Ce forum est décidément très instructif. N'ayant pas pour habitude de me nourrir de nourritures industrielles mal comestibles et généreusement empoisonnées par les pesticides et autres herbicides, je ne mets jamais les pieds dans ces épouvantables magasins dits super et hypermarchés aux noms ridicules et mensongers. Lorsque j'étais enfant, ces endroits agoraphobiques me fichaient déjà des crises de panique. J'ignorais donc que certains de ces lieux hideux et mal hospitaliers de consommation concentrationnaire avaient cessé d'être horriblement ''sonorisés''. C'est dommage, ça avait au moins le mérite de la cohérence esthétique (si l'on peut dire). J'imagine cependant que l'odeur que l'on est contraint d'y respirer demeure toujours aussi épouvantable et rédhibitoire pour les narines délicates.
Robbe-Grillet avait bien raison de dire que la prolifération des supermarchés sur notre territoire était ce qui était arrivé de pire à la France, catastrophe économique (et alimentaire) qu'il comparait d'ailleurs à ce que la bombe atomique avait été pour le Japon.
La suppression de l'affreuse "sonorisation" répond, si j'ai bien compris, à des mesures d'économie liées au paiement prohibitif des droits d'auteurs (de variétés et pis encore). Le comble de la législation dans ce pays, c'est que toute boutique commerciale diffusant de la musique au sens ancien du terme (de la musique "classique'' au sens large, de la musique savante, bref de la musique tout court, et la seule qui ne nous casse pas les oreilles) se voit automatiquement exemptée du paiement des droits d'auteurs, quand bien même diffuserait-elle du Ligeti, du Dutilleux, du Boulez ou du Dusapin. De sorte que plus c'est laid et inaudible, plus c'est bête et bruyant, plus c'est abrutissant et cacophonique, et plus vous devez payer. La diffusion de la véritable musique est quant à elle entièrement gratuite, pour peu que vous ayez acheté auparavant le support matériel sur lequel celle-ci a été enregistrée (cette gratuité ne concerne pas le jazz, qui serait pourtant un moindre mal). Mais, bien entendu, la plupart des commerçants, par conformisme, pour complaire au goût le plus bas de la foule, mais aussi à n'en pas douter par choix personnel, préfèrent encore payer pour emplir leurs boutiques de vacarme stupide et de niaiseries à la mode. Voilà pourtant bien un dispositif répulsif qui devrait faire fuir tous les chalands s'ils n'étaient pas déjà eux-mêmes intoxiqués au dernier degré par le bruit permanent et la laideur sonore.
C'est là un signe indéniable de très Grande déculturation, de disparition totale du goût, d'effondrement moral de l'ouïe.