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Communiqué n° 1618 : Sur la fin de la culture générale aux examens d’entrée de l’ENA

Communiqué n° 1618, samedi 27 juillet 2013
Sur la fin de la culture générale aux examens d’entrée de l’ENA

Le parti de l’In-nocence observe que l’École Nationale d’Administration, emboîtant le pas à l’Institut d’Études Politiques de Paris, a décidé, sans le dire tout à fait, de faire à peu près disparaître la culture générale de ses examens d'entrée, au motif, comme pour Sciences-Po, qu’elle serait discriminatoire et “socialement biaisée”. L’invraisemblable charabia de la directrice de l’École, qui veut bien reconnaître à la culture générale le mérite de « conceptualiser une problématique » (et cela vaut définition, imagine-t-on), montre assez, déjà, les prévisibles effets de la mesure prise, au demeurant bien conforme au processus général de prolétarisation et de changement de peuple : la Grande Déculturation sera encore accentuée et consacrée, l’administration deviendra plus technique encore et déshumanisée, les robots administrés et les robots administrants seront moins tentés de sortir d’eux-mêmes pour s’observer d’un œil civilisé.
Je croyais qu'à l'ENA, la culture générale avait disparu des épreuves d'admissibilité et de l'enseignement depuis longtemps. Notre actuel président énarque n'avait-il pas été surpris, en 2006, en train de lire, en maillot de bain, L'Histoire de France pour les nuls?
Pendant ses congés, il devrait passer à la géographie (il n'est jamais trop tard pour apprendre ou corriger ses lacunes, pour sûr):

François Hollande fâché avec la géographie
Je crois que George W Bush avait inventé les "Gréciens", les habitants de la Grèce.

[news.bbc.co.uk]
Citation
Jean-Marc du Masnau
Je crois que George W Bush avait inventé les "Gréciens", les habitants de la Grèce.

[news.bbc.co.uk]

Ah oui, mais là vous évoquez un cas-limite. Saviez-vous que, depuis qu'il a pris sa retraite politique,"W" consacre de longues heures à la peinture de sympathiques toutous? [www.theatlanticwire.com]
Grecian est le terme anglais qui sert, par exemple, à désigner les ordres architecturaux helleniques.

Donc, en anglais, deux termes adjectivaux : Greek comme dans l'énoncé Aristotle Onassis was the Greek millionaire who married Maria Callas

et Grecian, comme dans ces titres d'ouvrages savants [www.amazon.fr]

[www.jamescumminsbookseller.com]

L'écueil peut donc, pour l'Américain moyen que G.W Bush ne se défend certes pas d'être, être considéré comme relevant d'une subtilité de la langue. Grecian, n'est pas du tout le barbarisme que "Grécien" pourrait être en français. Cela pour que les railleurs exclusivement francophones raillent en connaissance de cause.

Il en va de même pour Arabian (comme dans Arabian Nights) et Arabic qui désigne la langue arabe, ses dialectes et sa grammaire, et qui sert d'adjectif ou complement de nom lorsque le substantif est un référent métalinguistique (Arabic scriptures; Arabic lettering, etc. mais Arabian drums, Arabian customs, etc.)
À vrai dire, je n'avais entendu Grecian appliqué à des personnes que dans le sens "hellénistique", donc culturel et non national, exactement comme Saint Paul.
L'équivalent français de Grecian pourrait être hellène, ou "hellènique" mais sans l'être tout à fait.

Et l'équivalent français de la "bourde" de G.W. Bush pourrait être alors, par exemple : la finance hellène, ou le gouvernement hellène, ce qui n'a pas de quoi faire se rouler parterre de rire.


Le Trésor de la Langue Française en ligne :
Hellène s'emploie parfois pour grec dans un cont. littér. ou emphatique. Au loin court quelque voile hellène (HUGO, Contempl., t. 3, 1856, p. 113). Télégramme du général de Gaulle au président Metaxas, premier ministre de Grèce. Brazzaville, 2 novembre 1940 : (...) j'adresse à votre excellence, ainsi qu'au gouvernement et au peuple hellènes, l'hommage de notre admiration et de notre foi (DE GAULLE, Mém. guerre, 1954, p. 322).
Francis, je pense que si Churchill avait dit Grecian personne n'aurait rit et que chacun, rentré chez lui, aurait discrètement ouvert un dictionnaire et aurait ensuite dit : quel homme !

J'ignorais totalement que Grecian pouvait simplement dire Grec, je voyais un sens figé comme dans Gentils en français.
Je m'aperçois que Francis a répondu à ma première phrase mal tournée et que j'ai supprimée.
Non, Grecian ne peut être substantif, et Grecians pour désigner les habitants de la Grèce est fautif (cependant que les Hellènes en français ne l'est pas).

Je tenais à faire savoir aux lecteurs exclusivement francophones de notre forum ce que tous ne savent peut-être pas : que Grecian existe en anglais, et que ce terme à valeur adjectivale (qui s'écrit toujours avec une majuscule) sert à qualifier des objets ou des valeurs culturelles, et singulièrement les objets et artifacts de l'architecture grecque (a Grecian gate, portico; the Grecian orders, etc.). Donc, la faute de Bush a consisté à user de ce terme substantivement, pour désigner les habitants de la Grèce, et non d'avoir usé d'un barbarisme comme pourrait être tenté de le penser un railleur francophone ignorant de l'anglais.
30 juillet 2013, 08:34   To a Grecian Urn
Grecian se trouve dans le poème qui se termine ainsi : "When old age shall this generation waste, / Thou shalt remain, in midst of other woe / Than ours, a friend to man, to whom thou say'st, / 'Beauty is truth, truth beauty', that is all / Ye know on earth, and all ye need to know". C'est de mon cher Keats, dans son ode "To a Grecian Urn".

Je profite de l'occasion pour signaler les recherches d'un historien byzantiniste, Anthony Kaldellis, dont on a traduit et publié aux Belles-Lettres l'essai sur Le discours ethnographique à Byzance : le titre laisse attendre une étude extrêmement spécialisée, ce qui est le cas, mais le sujet permet d'aborder une question universelle et essentielle, celle de la perception (de la nomination, de la description) de l'autre dans l'empire romain. Sur ma lancée, j'ai commencé son Hellenism in Byzantium (The transformation of Greek identity and the reception of the Classical tradition), Cambridge University Press. Il a le mérite de combler le vide historiographique (pour nous, public) qui va du IV° au XIII°s, concernant cette entité occidentale-orientale que fut l'empire romain d'Orient.
Bien sûr, que j'y ai-je pas pensé ! Ode On A Grecian Urn a même été cité (et ses deux fameux derniers vers qui ont tant fait couler d'encre) récemment ici-même:

I C I
Mon livre donne comme titre (de Keats) To a Grecian urn, sans dire qu'il s'agit d'une ode (à la différence de l'Ode au rossignol, à Psyché, ou à la mélancolie, qu'il appelle odes). Il y a peut-être là une question de métrique. D'autres poèmes contiennent, comme celui-ci, To : To Leigh Hunt, esq, To Homer, To autumn ... A moins que la fantaisie de l'éditeur, du poète ou de Dieu sait qui, brouille les cartes de ce minuscule problème.
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