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Guerre civile mondiale

Envoyé par Thomas Rhotomago 
31 août 2013, 18:13   Guerre civile mondiale
Un ministre syrien déclare qu'une intervention américaine servirait les intérêts d'Israël et d'Al Qaïda. Comprenne qui peut. Est-ce le fin mot de la politique étrangère française ?
01 septembre 2013, 08:21   Re : Guerre civile mondiale
Ah ... Ceci vous éclairera peut-être : j'ai beaucoup connu dans le temps une chercheuse libanaise d'origine palestinienne, spécialiste des discours politiques arabes de gauche (et en arabe, ce qui change tout), fréquentant un grand nombre de Palestiniens naturalisés français, etc ... Un des topoï de ces discours est de poser la complicité objective, ou même consciente, entre Israël, les USA et les islamistes radicaux. Tout fait de terrorisme imputable à l'islamisme radical est en fait d'origine américaine, donc juive (ils parlent moins de l'état d'Israël que de "l'entité sioniste" et des "Juifs"). Ceci explique la rumeur (fidèlement relayée par certains gauchistes français) selon laquelle pas un seul Juif ne se trouvait dans les Tours Jumelles : ils avaient été mystérieusement avertis que des avions devaient s'y écraser. De même, pour un Syrien baassite ou assimilé, tout ce qui arrive ne peut être que le fait des Juifs. C'est au moins une explication rhétorique possible, et sans doute très criticable. En l'occurrence, j'ignore absolument qui compose l'armée révoltée de Syrie, et ce ministre a peut-être raison à propos d'Al Qaïda, qui sait ? Sachez cependant que pour des Arabes orientaux de gauche, Al Qaïda et apparentés sont créés et manipulés par "les Juifs"... Finalement, les Protocoles des Sages de Sion, ou le fantasme qui les a inspirés, ne sont jamais bien loin.
Utilisateur anonyme
01 septembre 2013, 10:43   Re : Guerre civile mondiale
Ca, c'est probablement la compréhension au deuxième degré. Au premier degré, c'est un fait qu'une des organisations militaires des rebelles (Al Nosra) se réclame d'Al-Qaïda - organisation dont les combattants sont d'ailleurs réputés pour leur honnêteté, selon un article du dernier numéro de la revue Euroorient. Le régime syrien se voulant par ailleurs le champion du combat contre Israël, quiconque l'attaque "joue le jeu" d'Israël, comme disaient jadis nos amis communistes, du temps qu'ils parlaient et étaient ouïs.
Utilisateur anonyme
01 septembre 2013, 10:58   Re : Guerre civile mondiale
Toujours selon cette revue (Euroorient), l'intérêt d'Israël est plutôt que le conflit s'éternise, affaiblissant les deux camps, qui lui sont tous deux radicalement hostiles, et détruisant (économiquement et moralement) la Syrie. Par ailleurs, au cas où le régime serait renversé par une intervention occidentale, il y aurait la possibilité qu'il lance une attaque chimique contre Israël pour donner un sens antiisraélien à son combat, et finir en beauté comme on "tombait à gauche".
Maintenant je présume que, les Israéliens, comme tout le monde, peuvent ne pas considérer l'affaire au seul prisme de leurs intérêts. et de ce point de vue peuvent former des souhaits divers quant à l'évolution du conflit.
01 septembre 2013, 17:33   Re : Guerre civile mondiale
Merci pour vos explications, qui m'ont permis de comprendre un peu mieux la logique (je ne dis pas la vérité) de certaines déclarations. Tout compte fait, ce conflit en Syrie me parait échapper à la logique du "choc des civilisations" puisqu'il semble autoriser des "alliances" d'intérêts géo-politiques pour le moins inattendues. Tout semble se passer comme si les Occidentaux se positionnaient en fonction d'une guerre de religion entre sunnisme et chiisme, à travers laquelle ils perpétuent d'antiques rivalités Est-Ouest.
Utilisateur anonyme
02 septembre 2013, 12:56   Re : Guerre civile mondiale
Comment concilier le fait que la victoire des rebelles semble peu dans l'intérêt d'Israël avec le fait que le renversement du régime d'Assad est réclamé par B.-H. Lévy, lui qui se veut le meilleur des pro-israéliens ?
La réponse est probablement que Lévy doit vouloir le renversement d'Assad sans vouloir la victoire des rebelles.

Il pourrait vouloir le renversement par les Occidentaux suivi de l'occupation par ces mêmes Occidentaux jusqu'à ce qu'un régime démocratique et respectueux des minorités soit maître de la situation : non le scénario libyen mais le scénario irakien (enfin, le scénario irakien qui fut souhaité).
Il doit pourtant savoir que, si un renversement des rebelles par une intervention occidentale est concevable, ou l'a été, l'occupation du pays des années durant est, elle, inconcevable, du fait de la "fatigue irakienne" des Etats-Unis, et de l'extrême réticence des Européens à des engagements extérieurs.
Il pourrait rétorquer que, si le régime est renversé, et si les massacres des minorités commencent au son des "Allah Akhbar", les Occidentaux se sentiront obligés d'intervenir de nouveau...
Mais qu'ils interviennent massivement pendant des années, cela est inconcevable. même à son cerveau imaginatif.

Et je crois qu'on a la réponse : Il doit penser que le partage communautaire du pays peut se faire assez naturellement et rapidement et peut-être même sans trop de casse - les alaouites et les chrétiens évacuant précipitamment les villes et les territoires conquis par les rebelles. On aboutirait alors, une intervention limitée des Occidentaux et peut-être des Israéliens aidant, idéalement à un partage de la Syrie en cinq entités - sunnite, alaouite, kurde, chrétienne et druze - ou quatre, si les chrétiens qui n'émigrent pas se réfugient dans l'entité alaouite. Bref, une solution à la yougoslave. Ce partage, évidemment, serait pour Israël, la meilleure solution.
Et finalement Lévy échapperait à la contradiction entre sa position et sa passion de servir Israël.

Cette solution peut d'ailleurs se soutenir du point de vue de la justice pure : puisque la majorité ne supporte plus la dictature tolérante - tolérante et cruelle - d'une des minorités, et puisque le règne de cette majorité serait persécutoire, ou pis que persécutoire, pourquoi pas un partage du pays ?
Elle est également de l'intérêt de Lévy : les Occidentaux se sentiront responsables pendant longtemps de la situation, et seront engagés en Syrie pour longtemps : et sans cesse Lévy et sa grande âme auront l'occasion de donner des conseils, d'adjurer, d'invoquer, etc. Si, comme il est probable, ces Occidentaux se réduisent essentiellement aux Etats-Unis, cela lui permettra peut-être de s'importer dans le débat politique étatsunien, voire auprès de la Présidence (ou, disons, du Sénat).

Il est cependant à remarquer que tout cela est du domaine de la reconstitution : à lire Lévy, il fait fond sur la force et la modération des rebelles dits modérés.
Peut-être d'ailleurs concilie-t-il les deux points de vue : il espère, en y croyant peut-être de moins en moins, que les rebelles modérés liquideront rapidement les milices djihadistes, et il se dit que, s'ils ne le font pas, le deuxième scénario est en réserve.
05 septembre 2013, 11:43   B.H.L.
Pour vous répondre comme il conviendrait, il faudrait traiter ce journaliste comme un auteur doué d'une pensée cohérente, d'une vision du monde, etc ... Le prendre au sérieux, en somme. J'avoue que cela m'est difficile, car je me souviens de ses analyses des guerres yougoslaves, où il ne faisait pas preuve d'une honnêteté intellectuelle sans faille.
07 septembre 2013, 02:30   Re : Peste et choléra
Il va sans dire que le coeur des Israéliens balance entre, d'un côté, une rébellion syrienne mal identifiable, soutenue par l'Arabie saoudite et le Qatar, et qui compte dans ses rangs un nombre non négligeable d'islamistes, émules d'al-Qaïda, et de mercenaires djihadistes, et, de l'autre, l'abominable dictature d'un Bachar el-Hassad soutenu par l'Iran des mollahs et les terroristes du Hezbollah libanais...
Utilisateur anonyme
07 septembre 2013, 07:22   Re : Peste et choléra
Est-il légitime que la France, ou un mouvement politique français, se soucie particulièrement du sort des chrétiens syriens ?
Il me semble que oui. Certes, un laïciste strict répondra "non" (ou alors, il le justifiera par des raisons d'intérêt pur : parce que ce sont des alliés potentiels).
Mais le partisan d'une laïcité ouverte - ou celui qui est hostile à la laïcité, préférant la conception qui prévaut en Europe partout ailleurs qu'en France - pense qu'il est légitime que l'Etat ait une attitude bienveillante envers la religion en général, et singulièrement envers la religion ou les religions historiques de la nation (d'où, par exemple, en Allemagne, le fait que l'impôt religieux et l'éducation religieuse à l'école sont protestants et catholiques, pas musulmans ni juifs).
De ce point de vue, il est légitime que l'Etat français soit particulièrement soucieux du sort des chrétiens syriens.


John Kerry a parlé de la France en disant "notre plus ancien allié", faisant bien entendu référence à Lafayette et Rochambeau. Je trouve cette expression assez émouvante. A la rage anti-étatsunienne de De Gaulle puis de Pompidou et de son ministre Jobert, manifestée avec la plus grande mauvaise foi, jamais désavouée par les exécutifs qui ont suivi - le comble pour moi étant de voir Mitterrand aller au Bundestag prôner l'implantation d'euromissiles en Allemagne sans qu'il soit question d'en implanter en France, "indépendance" (vis-à-vis des Etats-Unis) oblige - les Etats-Unis ont répondu avec calme, bonne humeur et le maintien d'une sympathie qui fait qu'un ministre peut s'exprimer comme Kerry sans être ridicule ni susciter de réactions hostiles.
Le Fn - ou en tout cas Florian Philippot - se veut malheureusement l'héritier de cette posture qui me semble avoir été ce qu'il y a eu de plus contestable dans le gaullisme.
Les nations n'ont pas que des intérêts, elles ont aussi des amis. Et l'amitié des Etats-Unis et l'alliance avec eux a aussi été de notre intérêt.
07 septembre 2013, 10:49   Re : Peste et choléra
"De ce point de vue, il est légitime que l'Etat français soit particulièrement soucieux du sort des chrétiens syriens."

Il est possible qu'une fois encore quelque chose m'échappe. Il me semblait avoir compris que les chrétiens syriens, plutôt favorables au régime en place, étaient opposés à une intervention occidentale et ne comprenaient pas l'attitude française.
Utilisateur anonyme
07 septembre 2013, 11:19   Re : Peste et choléra
"...une fois encore quelque chose m'échappe. Il me semblait avoir compris que les chrétiens syriens, plutôt favorables au régime en place, étaient opposés à une intervention occidentale et ne comprenaient pas l'attitude française."

Vous avez raison. Ma réflexion visait le cas général. Elle n'était pas relative à l'intervention envisagée.
(Cela dit, je crois que plus aucune nation occidentale n'est actuellement favorable à la victoire des rebelles ; l'intervention préconisée par la France vise à "punir" le régime, pas à le renverser ou à l'affaiblir décisivement. Le seul responsable politique occidental dont j'ai entendu parler qui vise la défaite du régime est le sénateur John McCain).
07 septembre 2013, 14:02   Re : Peste et choléra
Accessoirement, je suis assez étonné, sur ce forum, de la quasi-absence de débat sur le thème de la situation en Syrie et de la position du gouvernement français. Est-ce l'illustration d'une incapacité à se prononcer ou de tendances trop divergentes au sein du P.I. ? L'engagement de la France aux côtés des Etats-Unis me semble tout de même un important sujet à réflexion.
07 septembre 2013, 15:07   Re : Peste et choléra
Toute opinion relative à la guerre civile syrienne, et a fortiori toute décision politique, diplomatique ou militaire, s'y rapportant, devrait, me semble-t-il, faire d'abord l'effort de répondre à un ensemble de questions on ne peut plus contradictoires et délicates à trancher.

Quel est l'intérêt de la France, de l'Europe, de l'Occident, de l'Amérique ? Quel est l'intérêt d'Israël, du Liban, de la minorité chrétienne syrienne ? Mais aussi : quel est l'intérêt de la Syrie et de son peuple ?

En Syrie, comme ailleurs, il faudrait pouvoir combattre à la fois et la dictature et l'obscurantisme musulman et le terrorisme islamique. En avons-nous encore la puissance militaire, les moyens financiers, et ne serait-ce que l'ambition géopolitique ?

Il faudrait, pour ce faire, qu'existassent les États-Unis d'Europe, et que ceux-ci fussent animés, horresco referens, par une sorte de néo-impérialisme civilisationnel, judéo-chrétien et occidental.

Quant à ceux qui raillent la forfanterie du président de la République, voulant faire mordre la poussière à Bachar el-Hassad, mais bien incapable de faire régner l'ordre à Marseille, ou dans n'importe quel autre territoire perdu de la République, il faut reconnaître qu'il n'est pas aisé de leur donner tort.

Moyennant quoi, il faut de nouveau souligner la pitoyable impéritie de la Ligue arabe qui, non contente de jouer en permanence double-jeu, se permet de traiter les puissances occidentales en larbins de ses noirs desseins, lorsque celle-ci pousse l'outrecuidance jusqu'à exiger des Occidentaux qu'ils prennent leurs responsabilités dans l'affaire syrienne !
Après quoi, on nous accusera, d'un côté, d'avoir des ambitions néo-colonialistes, et, de l'autre, d'avoir, une fois de plus, naïvement et fort imprudemment ouvert la boîte de Pandore des catastrophes islamistes à venir. Or, aujourd'hui, les populations syriennes ne seraient sans doute pas prises entre deux feux, ni leur sort dans cette impasse internationale, si les dites révolutions arabes, aux lendemains qui déchantent, n'avaient échaudé les esprits européens et occidentaux. Il m'est d'avis que c'est tout d'abord dans ces rangs-là qu'il faut chercher et trouver les premiers responsables des massacres en Syrie, et de la non-intervention des Occidentaux. Il n'en demeure pas moins que laisser un dictateur, de surcroît soutenu par les terroristes du Hezbollah, continuer de réprimer atrocement et impunément une partie de son peuple insurgé, n'est guère tolérable, pas plus que n'est souhaitable la fin de la Syrie.
Utilisateur anonyme
07 septembre 2013, 20:05   Re : Peste et choléra
Vous vous posez là la question du renversement du régime.
La question du jour est autre : une intervention militaire limitée pour "punir" le régime d'avoir employé les gaz.
07 septembre 2013, 20:42   Re : Peste et choléra
Certes, mais j'aimerais tout de même bien connaître l'avis des stratèges militaires, et surtout voir la tête des officiers d'État-major, lorsque le Chef des Armées leur dira :

- Bon les gars, je compte sur vous pour me combiner une petite attaque de derrière les fagots, mais surtout pas trop de zèle, hein, juste une petite frayeur de rien du tout, pour bien faire comprendre au vilain Bachar el-Hassad que c'est très méchant ce qu'il a fait.

- Et si on se contentait, en guise de représailles, de lui expédier Ségolène Royal ?
07 septembre 2013, 22:32   Re : Guerre civile mondiale
"(...) une intervention militaire limitée pour "punir" le régime d'avoir employé les gaz."

Cette "punition" est à la guerre ce que la "probation" est à la délinquance, dans la réforme de Mme Taubira.

D'un strict point de vue militaire, s'il s'agissait de "punir" Bachar El-Assad, il me semble qu'on lui a laissé tout le temps et de se protéger et de préparer sa riposte. De deux choses l'une, ou cette affaire trahit une bonne vieille stupidité des dirigeants ou elle est planifiée dans ses moindres détails, y compris sa stupidité.
08 septembre 2013, 17:12   Re : Guerre civile mondiale
Mais vous n'avez pas compris : c'est la fameuse technique du salami, expérimentée en Hongrie après guerre. On fait passer le salami tranche par tranche.

Les choses étant ce qu'elles sont et les temps ayant changé, je suppose (c'est le cas de le dire) que le salami ne sera pas forcément en tranches.
08 septembre 2013, 23:18   Re : Guerre civile mondiale
Propos sibyllins qui m'échappent, eux aussi. Décidément !
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