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Antisémitisme intellectuel

Envoyé par Jean-Marc du Masnau 
28 septembre 2013, 12:13   Antisémitisme intellectuel
Afin de ne pas polluer le fil relatif à l'islamophobie, je me permets d'en ouvrir un nouveau à propos de l'antisémtisme intellectuel.


M. Rebeyrol nous indique :


Les journaleux du Monde feraient mieux de lire Snyder (Terres de sang) qui montre que l'extermination de six millions de juifs n'a pas eu pour cause première ou efficiente les opinions antisémites exprimées ça et là, mais la volonté de l'Allemagne et de l'URSS de "purifier" les terres qu'ils avaient conquises, dont le Yiddishland, de toutes les populations indigènes, dont les Juifs, et de les remplacer par de nouvelles populations, jugées plus dociles, composées de paysans allemands ou russes ou de paysans assimilables à l'un et à l'autre empires. Comme ces journaleux font primer l'idéologie sur la connaissance et préfèrent rester aveugles plutôt que d'ouvrir un oeil, ils en sont réduits à énoncer des bribes du catéchisme des puissants.

Je pense que cela est, au moins partiellement, inexact.

Les travaux de Snyder sont très intéressants, j'en conseille la lecture. Ce que dit Snyder n'est d'ailleurs pas entièrement nouveau : la "Shoah par balles" avait déjà été abordée, la question du massacre de populations slaves par les nazis aussi, de même que les exactions staliniennes. Snyder a le très grand mérite de fort bien argumenter, de prouver de façon incontestable et surtout de mettre tout cela en perspective.

Cela dit, Snyder limite volontairement son analyse à ces régions (appelées "Bloodlands" qui recouvrent la Pologne, la Biélorussie, l'Ukraine et quelques autres contrées).

Snyder ne nous parle pas du massacre des juifs occidentaux (Allemands et Hollandais, par exemple), totalement assimilés.

Il y a sans doute, de mon point de vue, deux formes dans cette haine nazie : celle qui est effectivement sous-tendue par le "Drang nach Osten", pour faire court ; celle, intellectuelle, du juif en général.

Zweig était parfaitement assimilé, Klemperer aussi. Lire Zweig et Klemperer nous montre bien cette haine intellectuelle.
Cet antisémtisme intellectuel n'est en rien comparable à la catophobie d'un Bergé, par exemple. Pour Bergé, un catho qui se renierait serait immédiatement paré de toutes les vertus, alors que pour les nazis l'athée Klemperer, officiellement protestant, était juif, quoi qu'il fasse.

Lisez "The Pity of It All", par Amos Elon (Requiem allemand). Il montre le drame des juifs assimilés, qui souvent n'étaient plus juifs à leurs propres yeux, face à l'antisémitisme intellectuel. Cet antisémitisme intellectuel, en Allemagne, a des racines très profondes, comme l'indique le nom même du sinistre mouvement "Hep-Hep".
La Shoah par balles, c’était le nazisme modéré.
28 septembre 2013, 12:33   Re : Antisémitisme intellectuel
Oui, c'est vrai. Pour les nazis le judaïsme est affaire de race, pour les cathophobes, c'est affaire de religion, ce qui change (presque) tout.
28 septembre 2013, 17:28   Re : Antisémitisme intellectuel
"Pour les nazis le judaïsme est affaire de race"

Et pou les collabos d'aujourd'hui, c'est l'islam qui est devenue une affaire de race puisqu'ils assimilent l'islamophobie à du racisme.
28 septembre 2013, 22:04   Re : Antisémitisme intellectuel
» qui montre que l'extermination de six millions de juifs n'a pas eu pour cause première ou efficiente les opinions antisémites exprimées ça et là

Encore faudrait-il que l’antisémitisme du régime nazi fût une "opinion", plutôt qu'un point de doctrine fondamental faisant fond sur une conception strictement racialiste et biologique du Volk, une sorte d'axiome d'où découleraient certaines mesures de protection prophylactiques... Après tout, il n'a jamais été question d'exterminer tous les Polonais, ou les Slaves, mais bien tous les Juifs (LesTsiganes aussi, je crois ?) ?
Je ne sais si un compte rendu trop fonctionnaliste ou "modulaire" du nazisme et de ses basses œuvres n’évacue un peu rapidement la particularité idéologique, et donc essentielle (à ce titre, en tant qu'axiome, non parfaitement réductible à une explication exhaustive et une analyse factuelle), du "problème juif", lequel semble avoir bel et bien existé, et ce très tôt dans l'émergence du mouvement.


» La Shoah par balles, c’était le nazisme modéré

Disons que c'était le nazisme direct, artisanal, à la bonne franquette, quand manquaient encore les moyens plus performants de la mise à mort usinée, non ?
L'antisémitisme est le ciment même du nazisme.

L'antisémitisme nazi est une variante des antisémitismes intellectuels du type völkisch, qui fleurirent dès le début de l'Empire (voir toujours Amos Elon).

Par malheur, la formidable capacité technique de l'Allemagne se mit au service de cette cause démente.
28 septembre 2013, 23:27   Re : Antisémitisme intellectuel
Jean-Marc, je suis d'accord avec vous ; j'hésite quand même un peu sur l’épithète "intellectuel" accolée à l'antisémitisme nazi : ce n'est justement pas une vue de l'esprit, une "opinion" intellectuellement possible parmi d'autres, il me semble que chez les séides les plus représentatifs de la cause il s'agit d'un dogme à ce point intériorisé qu'il en est devenu incarné. Aussi "antisémitisme organique" me paraît-il plus adéquat....
Pour les Tsiganes, la doctrine nazie est particulièrement peu claire, à ce que j'en sais.

Elle oscille entre une sorte d'admiration (le Tsigane, prototype de l'aryen) et la volonté de destruction (le Tsigane, prototype de l'asocial). Le sort des Tsiganes fut très différent suivant les pays.

L'antisémitisme nazi devient de plus en plus féroce, au fil du temps. Normalement, la conséquence logique des doctrines du type gobinesque est que la "race supérieure" et la "race inférieure" se mélangeant par le biais du métissage, la "race supérieure" l'emporte sur la "race inférieure".

Or, pour les nazis, le métis, au départ toléré, devient l'homme à abattre. Je vous conseille la lecture de "Hitler's Jewish Soldiers: The Untold Story Of Nazi Racial Laws And Men Of Jewish Descent In The German Military", par Bryan Rigg. On y voit ces malheureux proclamer leur germanité.

En 1940, le Mischling peut faire un bon soldat, il est plutôt allemand. En 1944, il faut au moins le surveiller, au mieux l'éliminer, car il est plutôt juif.
Alain,

Vous avez raison. Avant 1933, cet antisémitisme est en quelque sorte du domaine de la seule pensée. Après, il est du domaine des actes.

La bonne appellation serait sans doute celle d'Helmut Berding dans son "Histoire de l'antisémitisme en Allemagne" : l'antisémitisme politique.

Avez-vous lu "Goodbye to Berlin", d'Isherwood ? on y voit très bien la montée du nazisme, et le livre a été publié avant la guerre. Isherwood montre le désastre qui guette ses amis de gauche et ses amis homosexuels. En filigrane, Isherwood, bien que probablement antisémite, nous montre par petites touches comment les juifs sont touchés les premiers. C'est d'autant plus fascinant qu'on ne sait pas si, sur ce point, Isherwood est ou non de l'avis des nazis.
29 septembre 2013, 03:27   Re : Antisémitisme intellectuel
Je ne l'ai pas lu, mais je jurerais que le livre est chez moi quelque part...
Au fait, Alain, pour dire qu'on riait tout de même sous l'occupation (en Allemagne, Klemperer menacé chaque jour aimait à chantonner les Zehn Kleine Meckerlein), une blague.

Xavier Vallat et Darquier de Pellepoix se rendent dans un café des Champs-Elysées et s'attablent en terrasse.

Le garçon approche et Vallat lui dit : "Deux Martini !", le garçon questionne : "Dry ?" et Darquier lui répond : "Nein, zwei !".
Le texte des Meckerlein, façon antinazie :

Zehn kleine Meckerlein, die saßen einst beim Wein.
Der eine ahmte Goebbels nach, da waren es nur noch neun.
Neun kleine Meckerlein, die haben sich was gedacht.
Der eine hat es laut gedacht, da waren es nur noch acht.
Acht kleine Meckerlein, die hatten was geschrieben.
Bei einem ist es rausgekommen, da waren es nur noch sieben.
Sieben kleine Meckerlein, die fragte man: „Wie schmeckt's?“
Der eine sagte: „Schweinefraß!“, da waren es nur noch sechs.
Sechs kleine Meckerlein, die trafen einen Pimpf.
Der eine sagte „Lausejung!“, da waren es nur noch fünf.
Fünf kleine Meckerlein, die saßen am Klavier.
Der eine spielte Mendelssohn, da waren es nur noch vier.
Vier kleine Meckerlein, die sprachen über Ley.
Der eine sagte: „Säuft zu viel“, da waren es nur noch zwei.
Zwei kleine Meckerlein, die glaubten, es hört sie keiner.
Der eine hat 'nen Witz erzählt, da war es nur noch einer.
Ein kleines Meckerlein ließ diese Verse sehn;
Da sperrt man es in Dachau ein – und jetzt sind's wieder zehn!
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