Cher Jean-Marc Du Masnau,
Il ne s'agit pas de l'emploi différentiel de l'article défini et de l'article démonstratif dans la langue, en général.
Il s'agit d'un emploi très particulier et purement journalistique, pour le moment (je ne l'ai guère vu pénétrer la littérature,
Dieu merci, mais ça viendra, le pire étant rarement évitable...)
Les journalistes ont probablement pour consigne de ne jamais répéter le nom d'une personne, pour ne pas alourdir, pour ne pas impatienter le lecteur, ou pour toute autre raison.
Alors ils impatientent le lecteur en s'y prenant autrement.
Nous avons droit ainsi à un festival de tournures de remplacement qui peuvent faire penser aux périphrases des Précieuses, en moins élégant, moins imaginatif.
Cette manière d'écrire est à mon avis d'une laideur sans nom : et absolument pas conforme au génie de la langue.
Ainsi, puisque vous prenez le cas de Renaud Camus, son nom sera peut-être cité au début de l'article. Puis il deviendra : L'ami de Jean-Paul Marcheschi. Puis, nouvelle métamorphose ou hypostase : Le natif de Chamalières.
Et encore : Le maître de Plieux. Puis, pourquoi pas : Le sexagénaire. Et enfin, par exemple : L'ancien pilier de POL.
Toute une métaphysique de bas étage est engagée là-dedans, qui pose l'équivalence absolue et successive de la personne avec un des ses aspects, une de ses activités, une de ses particularités.
Il y a aussi dans cette manière d'écrire ce petit air
entendu propre à ceux qui, justement, ne savent rien. "Le natif de Chamalières" (car bien entendu tout le monde sait que...).
Tandis que : "Renaud Camus, ce natif de Chamalières" : là, vous écrivez en français, langue essentiellement sociale et clarificatrice, car vous exprimez un lien, une relation, qui aide à la compréhension, qui peut apporter une nuance, un élément explicatif.
Vous ne posez pas une équivalence brutale : Renaud Camus =
Le natif de Chamalières.
Et cela devient profondément ridicule quand la même personne devient successivement à quelques lignes de distance :
Le natif de Chamalières,
le sexagénaire,
le maître de Plieux,
l'ami de Jean-Paul Marcheschi,
l'ancien pilier de POL, que sais-je encore.