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Communiqué n° 1749 : Sur les plans gouvernementaux relatifs au “bâtiment”

Communiqué n° 1749, vendredi 29 août 2014
Sur les plans gouvernementaux relatifs au “bâtiment”

Le parti de l’In-nocence juge profondément aberrants, en leurs présupposés mêmes, les actuels plans gouvernementaux visant à une relance des activités du “bâtiment”. Il s’agit de construire toujours davantage, c’est-à-dire d’artificialiser plus encore le territoire, d’accélérer sa conversion en banlieue généralisée, de l’aménager plus étroitement à l’incessant afflux des colonisateurs, de préparer des logements pour les nouvelles vagues d’immigrés et leur progéniture, d’achever de faire disparaître la campagne, l’absence, le vide, tout ce qui a constitué le fond et la réserve poétique de notre civilisation et de notre littérature, lesquelles furent longtemps une seule et même chose.

Le parti de l’In-nocence pense qu’à l’inverse de cette politique de collaboration au désastre et de soumission à la colonisation en cours il faut au contraire construire le moins possible, restaurer prioritairement le patrimoine bâti déjà existant et, surtout, soulager la pression immobilière en mettant un terme absolu à l’immigration, en abolissant les lois natalistes, qui se sont révélées une incitation formidable à la substitution ethnique, et en inaugurant résolument le mouvement de remigration, seule perspective saine et raisonnable pour la nation, pour son indépendance, pour son identité et pour la paix civile.
Si l'on voulait critiquer un peu ce communiqué, on pourrait dire qu'il mêle diverses choses qui ne vont pas parfaitement ensemble, et qu'il est un peu absolu, et qu'il aurait été plus convaincant s'il avait été plus relatif et plus modéré.

1° Il critique l'intention de relancer "les activités du bâtiment", et dit qu'il faut "restaurer prioritairement le patrimoine bâti". Mais dans ces activités du bâtiment est comprise la restauration du patrimoine bâti.

2° Il dénonce la construction comme étant la conversion du territoire en "banlieue généralisée".
Mais
a) Toute construction n'est pas construction en banlieue ou construction de banlieue.
b) La banlieue est la rencontre entre le développement des moyens de transport et le désir de beaucoup de ne pas habiter en ville - trop chère et offrant peu d'espace. C'est aux ménages de choisir s'ils préfèrent habiter la banlieue, la ville ou la campagne, pas à l'État de choisir pour eux au nom de telle sienne préférence. (Incidemment, il est à noter que l'énoncé selon laquelle la banlieue est par nature concentrationnaire, criminogène et zone de relégation, dont le discours immigrationniste s'est beaucoup servi naguère, est, bien entendu, une imposture : à peu près tout ce qui est habité par certaines populations est infesté par la délinquance, rien ou à peu près de ce qui est habité par les autochtones ne l'est, ou ne l'est au même degré).

3° De toutes façons, il faut bien construire, même à population moins croissante, ou décroissante :
a) Les logements, comme les vêtements, s'usent.
b) Les logements, comme les vêtements, se périment : tout le monde ne veut pas, habillé des jupes de sa grand-mère, conduire la voiture de son arrière-grand-père.
c) Les logements ne sont plus toujours situés aux endroits appropriés : tout le monde ne veut pas chercher à s'employer domicilié dans le village de ses aïeux.

4° Il affirme que la construction, en soi, est une "artificialisation du territoire". Et dit que cela est mal.
La première proposition est incontestable.
La deuxième proposition me surprend un peu :
D'une part, l'artificialisation du territoire est consommée depuis le Néolithique. Alors, un peu plus ou un peu moins... (A noter d'ailleurs que, du fait des progrès de l'agriculture au cours du dernier siècle, il n'y a jamais eu autant de forêts en France, ni autant de terres en friche).
D'autre part, je ne sache pas que ce soit mal en soi, l'artificialisation : elle est le propre de l'homme.
1° On osait espérer que les pions feraient relâche le dimanche.
Mais

2° Ils ne lâchent jamais le morceau
a) Parce qu'ils suivent leur programme invasif.
b) Parce que c'est dans leurs gênes.
Citation
Thomas Rothomago
c'est dans leurs gênes.

Oui.
Vous par contre, vous avez la culture dans le sang, je dirais même l'orthographe dans le code gênétique.
31 août 2014, 17:15   La pèche au canard
Merci mon vieux, vous m'avez fait gagner un pari.
Il y a pour une fois du vrai dans ce que dit M. Page : les changements de façon d'habiter, les évolutions sociales ont conduit à la construction de beaucoup plus d'immeubles que les simples changements démographiques, c'est incontestable.

D'autre part, M. Page a raison en disant que l'artificialisation accompagne l'homme : par exemple, la nature, dans le sud, n'a rien à voir avec celle d'il y a deux mille ans, quand bien même on est dans un espace naturel (essences différentes, en général), et beaucoup de secteurs sont revenus à un état naturel en cent ans (par exemple la Lozère).
31 août 2014, 21:50   Re : La pèche au canard
Citation
Thomas Rothomago
Merci mon vieux, vous m'avez fait gagner un pari.

Je vous en prie, mon vieux.
Comme vous êtes conservateurs, tous ! Parce qu’on l’a toujours fait, il faut continuer de le faire, Artificialiser, construire, bétonner, défricher, cimenter, croître et multiplier. Ne vous rendez-vous pas compte que la terre n’en peut plus de l’homme ? Et l’homme non plus, n’en peut plus de l’homme.
Lisez la Bible, sur la procréation et la soumission de la nature à l'homme. Vous pouvez prétendre que la terre meurt de l'homme, mais l'Homme a été créé par Dieu à son image et seule la recherche du Salut doit nous guider. En accordant autant d'importance à la terre et si peu à l'Homme (pas à l'homme en tant qu'idée mais à l'humanité, à chaque homme), vous n'êtes pas loin du matérialisme voire de l'animisme et je ne peux, connaissant votre intelligence, que voir en cela le refus de Dieu et du Dessin divin.

Voici le passage qu'il vous faut méditer :

Dieu créa l'homme à son image, il le créa à l'image de Dieu, il créa l'homme et la femme.
Dieu les bénit, et Dieu leur dit: Soyez féconds, multipliez, remplissez la terre, et l'assujettissez; et dominez sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel, et sur tout animal qui se meut sur la terre.


N'oubliez pas qu'un jour viendra le Jugement de Dieu : je vous adjure de penser à cela, d'abandonner cette posture trop intellectuelle, n'attendez pas que se présente à votre huis la Statue du Commandeur, il sera alors trop tard.

Plus prosaïquement, vous êtes d'autre part bon apôtre : votre demeure est dans un emplacement préservé et sa surface habitable est sans commune mesure avec celle d'une habitation moyenne. Que se passerait-il si tout le monde faisait comme vous ?
« Que se passerait-il si tout le monde faisait comme vous ? »

Qui a jamais prétendu que ce serait possible, nécessaire, souhaitable ou équitable ?
Vivement que tout le monde fasse comme tout le monde, et surtout qu'aucune tête ne dépasse, enfin !
... C'est la Statue du Commandeur qui sera alors contente !
Si tout le monde faisait comme moi, la croissance démographique en prendrait un sacré coup — je n’en demande pas tant.
Page & Masnau. Une sacrée couple. Les Bouvard et Pécuchet de l'In-nocence.
Ils n’en sont pas membres, à ma connaissance.
Il est clair en tout cas que, dans les civilisations chrétiennes et juives, la croissance de la population d'une part, le fait de mettre l'homme au-dessus des créatures et au-dessus de la nature d'autre part (la nature et les créatures sont citées, au premier chapitre de la Genèse, dans un ordre croissant) sont des points fondamentaux.

Pour MM. Noroît et Dangle : n'appelez pas trop la Statue du Commandeur, et ne riez pas trop avec elle car, si on ne connaît ni le jour, ni l'heure, rien n'est plus certain que notre mort, et que ce jour-là le Seigneur nous appellera en garantie.

On peut contredire frontalement la Bible, on peut rejeter l'enseignement de Dieu, cela a, je le conçois, une certaine grandeur, celle de Dom Juan, justement. N'oubliez cependant pas que si l'acte V nous montre un Dom Juan gagnant contre le pauvre Sganarelle, la chanson change à la fin. Souvenez-vous de ces paroles : les grâces du Ciel que l'on renvoie ouvrent un chemin à sa foudre.
Citation
Renaud Camus
Comme vous êtes conservateurs, tous ! Parce qu’on l’a toujours fait, il faut continuer de le faire, Artificialiser, construire, bétonner, défricher, cimenter, croître et multiplier. Ne vous rendez-vous pas compte que la terre n’en peut plus de l’homme ? Et l’homme non plus, n’en peut plus de l’homme.

Vouloir être mieux logé et mieux équipé, comme c'est vulgaire !
Et, puisque ça fait dix mille ans (ou trois millions d'années...) que ça dure, comme c'est conservateur !
Vulgaire, bête, sans imagination, inerte.
Au contraire d'une position, la vôtre, distinguée, créative, et novatrice...
Mais je lui trouve justement, à cette position, un peu trop de toutes ces qualités.

Quant au fait que la Terre n'en peut plus de l'homme, je ne le vois pas.
Que l'homme n'en peut plus de l'abondance de l'homme, je ne le vois pas non plus.
Il y a des problèmes ? Prométhée les résoudra et en créera d'autres.

Ici vous semblez quitter l'attitude attentive à la qualité du patrimoine et du paysage, c'est à dire l'attitude conservatrice, et pencher vers un frugalisme qui n'est pas conservateur, ni même réactionnaire, mais utopique (et autoritaire : parce qu'il va falloir dresser le peuple à se contenter de moins...).
"Soyez féconds, multipliez, remplissez la terre, et l'assujettissez; et dominez sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel, et sur tout animal qui se meut sur la terre."

N'est-ce pas précisément ce qui se passe ? Qui fait obstacle à ce que les choses ne se passent pas selon le respect de ces prescriptions suprêmes ? Certainement pas les matérialistes.

Certains savants ont forgé le concept d'anthropocène pour désigner l'entrée dans l'ère de domination irréversible de l'espèce humaine sur la planète. Un croyant pourrait tout aussi bien y voir l'exécution du plan divin.


(Corrigé)
Notez, cher Thomas, qu'il faut attendre l'écologisme politique pour voir apparaître une volonté de maîtrise de la population basée sur le respect de la nature (la Planète, en ékolo). Prenez les "zonezumid", c'est à dire les endroits vaseux où poussent des végétaux incertains et où croissent et coassent des animaux tout autant bizarres que répugnants, et donc on ne sort que couvert de boue et de brenne, si on n'est pas noyé ou dévoré par les moustiques : Mussolini a drainé les Marais Pontins, les démocrates américains ont arrosé de DDT des milliers de kilomètres carrés et Napoléon III a couvert de pins les Landes. Grand consensus, n'est-ce pas ?

Les mouvements anti-natalistes du passé ne faisaient absolument pas entrer cela en ligne de compte (pour eux aussi, la nature était à domestiquer, voire même à asservir). Malthus ne fonde ses théories sous aucun précepte moral, le problème, pour lui, est celui des ressources alimentaires. Nul doute que les plantations de tomates sous serre l'auraient ravi.
02 septembre 2014, 06:43   Le Commandeur ne nous fait pas peur
Tout de même, n'y a-t-il pas quelque chose qui relève du procédé racailleux, mafieux, d'exhorter à certaine conduite sous peine de représailles terribles ?
Cela m'a toujours gêné, ce recours final et obligé au droit du plus fort ; non mais !
Oui, après avoir tout essuyé, nous allons avoir droit à la terreur catholique, sur ce forum : vous subirez le feu éternel !
Page & Masnau. Les Bouvard et Pécuchet de l'In-nocence.

Du Masnau ferait plutôt penser à Bossuet. Pas pour le style, pour l'intention : La Politique tirée des propres paroles de l'Ecriture sainte...
Cher Alain, il me semble difficile de se référer aux traditions juive et chrétienne et méconnaître l'importance du Jugement dernier. Je ne me serais pas permis ce message si Renaud Camus n'avait dans le sien cité l'Ecriture. Or, cette citation met sur le même plan la Parole et diverses horreurs, ce qui est choquant pour un croyant.

Il y a cinquante ans, Dieu était présenté d'une façon terrible, et ce n'était pas plus mal.

Ces précisions ayant été apportées, me considérez-vous comme mafieux ou racailleux ?
... si Renaud Camus n'avait dans le sien cité l'Ecriture.

Il me semble que Renaud Camus avait employé les termes "croître et multiplier". Est-ce une citation de l'Ecriture ? Une réminiscence tout au plus... Tandis que vous, vous vous appuyez bien sur les Ecritures prises à la lettre pour asséner des vérités définitives et tuer le débat. Comme s'il n'était pas évident que le champ du politique s'était émancipé des dogmes religieux depuis des siècles en Occident ; comme si ce n'était pas cette émancipation "fondatrice" que menace par exemple l'Islam et que nous voulons préserver mordicus. Surprenant de votre part... qui avez tant de curiosité d'esprit et qui avez tant de choses à nous apprendre par ailleurs.
Mais dans ce cas pourquoi se référer à une tradition chrétienne ? Plus exactement, que retient-on de la tradition chrétienne ? Si on en nie un point aussi important qui est de placer l'Homme au-dessus de tout le reste de la création et ce sous le regard de Dieu il ne reste plus grand chose...
Citation
Jean-Marc du Masnau
Notez, cher Thomas, qu'il faut attendre l'écologisme politique pour voir apparaître une volonté de maîtrise de la population basée sur le respect de la nature (la Planète, en ékolo). Prenez les "zonezumid", c'est à dire les endroits vaseux où poussent des végétaux incertains et où croissent et coassent des animaux tout autant bizarres que répugnants, et donc on ne sort que couvert de boue et de brenne, si on n'est pas noyé ou dévoré par les moustiques : Mussolini a drainé les Marais Pontins, les démocrates américains ont arrosé de DDT des milliers de kilomètres carrés et Napoléon III a couvert de pins les Landes. Grand consensus, n'est-ce pas ?

Bien vu.

On pourrait imaginer une nouvelle avec un passage du genre :

Je découvris plus tard qu'Attilio était passionnément antifasciste : il ne pardonnait pas à Mussolini l'assèchement des Marais pontins. Je l'appris quand je l'entendis dire, à sa percutante manière, mais en bégayant un peu comme il faisait depuis qu'il fréquentait un grand seigneur qui avait ce défaut : "Un homme qui a détruit ce biotope, il n'est pas étonnant qu'ensuite il se soit acoquiné avec Hitler, le maniaque des autoroutes, dont la construction a fait tellement de mal aux grenouilles et aux limaces.
Et tout ça pour nourrir le peuple !".
Comme à l'accoutumée Clelia ajouta une inflexion culturelle aux propos de son cousin et amant.
- Ces latifundia malariques, vous n'avez pas idée de ce que ça représentait, à quelques lieues de Rome, comme espaces de solitude et réserves de sauvagerie. Certes, ils ne rapportaient pas grand-chose mais, Dieu merci, leurs propriétaires disposaient en général d'autres ressources.
Qui sait si, sans ces déserts, l'art et la civilisation romaines auraient fleuri comme ils l'ont fait ?
J'y allais pour tout oublier et me perdre.
Tout ça passait évidemment bien au-dessus de la tête de l'agité de la place de Venise [Benito M.] !
- Il fallait bien que le fils du forgeron et de l'institutrice donne du pain à la plèbe ! Mais elle n'avait qu'à ne pas naître, la plèbe ! Est-ce que je serais né, moi, si j'avais été à sa place ?
- Les amoureux de la chansonnette et du football...
- ...Mais attention, ma chère, on voit leurs descendants même dans les musées maintenant, et avec leur marmaille s'il vous plaît !
- Ils se prennent mutuellement en photo devant un Léonard ou un Michel-Ange parce qu'ils ont entendu dire que c'était de l'art !
- Ils pensent que ça va élever leur âme !
- Comme s'ils en avaient une ! Puis, illico, direction les cartes postales et la bimbeloterie...
- Vous rendez-vous compte, Monsieur Bouvard... (Attilio s'était tourné vers moi de nouveau)
- Pécuchet, Monsieur, Pécuchet.
- ...Monsieur Pécuchet, que le moustique de la malaria a probablement coévolué avec nos ancêtres depuis des millions d'années ?
Et ils ont remplacé son habitat, les Marais, par du béton et des canaux rectilignes !
Des cuistres quand ce ne sont pas des pions... (il soupira) Cette race est éternelle... Vous la voyez déjà à l'œuvre dans le Satyricon...
- L'immortelle bêtise nous enterrera tous ! Et il y en a qui discutent ! (Elle leva les bras au ciel). Vous rendez-vous compte, ils discutent ? Il faut voir ce que ça donne...! Pleins d'eux-mêmes, imbus de leurs démocratisme, torpides, sphériques, des zéros parfaits en béton.
- L'anophèle, elle, est fragile, fugace, périssable...
Elle est sensible aussi. Et chaste : savez-vous que la femelle ne fait l'amour qu'une fois dans sa vie ?
Certes, je n'exige pas que toutes les femelles de notre espèce la prennent pour modèle, surtout certaines (il baisa la main de Clelia), mais tout de même, une telle singularité méritait un peu de respect, de soin et d'attention..."
Elle ricana : "Les Grands Égalisateurs ! C'est à des simplificateurs de ce genre qu'on doit la diffusion de l'agriculture au Néolitique. Ils ont été incapable de respecter la diversité de la nature ! Du blé, du blé, encore du blé...!
Et ce sont leurs ancêtres qui ont diffusé la connaissance de la maîtrise du feu il y a un million d'années !
- Toujours l'artificiel... Ils ne peuvent pas laisser les choses tranquilles, il faut qu'ils inventent...
- Et quand ils ont inventé, tout farauds, ils diffusent...
- Il y a quatre millions d'années ils ont inventé le biface...
- Les zéros, je vous disais, les zéros... (elle fit un rond avec les doigts)
- Ils ne pouvaient pas supporter la nature et le silence... Vous rendez-vous compte, le silence qu'il devait y avoir.. Mais il leur fallait l'artifice, l'artefact : ils ont taillé une pierre. Ils ne pouvaient pas la laisser tranquilles, non, ils l'on taillée... Mais qu'est-ce qu'elle leur avait fait, je vous le demande, qu'est-ce qu'elle leur avait fait donc ? Ils l'ont taillée !
- Le premier pas vers le béton était fait...
.
[...]
Citation
André Page
Et ,tout ça pour nourrir le peuple !".

Brigade de sécurité typographique. Vos papiers !
Au fait, Alain, savez-vous que la religion catholique fait obligation à un croyant de reprendre publiquement un autre baptisé et de lui indiquer les risques qu'il court dès lors qu'il nie le dessin de Dieu (je ne parle pas des péchés véniels) ? C'est dans l'Evangile selon Matthieu... Existe-t-il une chose analogue dans le judaïsme ?
Cher Thierry,

Une réponse au fond.

Si je comprends bien le propos de Renaud Camus, il s'agit de reconstituer une société in-nocente largement basée sur le système ancien, qui est un système d'ordres.

Ce projet suppose l'existence de hiérarchies, de règles et se réfère à des courants de pensée qu'on qualifie de réactionnaires, pour faire court. Un excellent exemple de ces courants est fourni par Gomez Davila qui fait, je pense, l'unanimité sur ce forum.

Or, le monde auquel se réfère Davila est un monde essentiellement chrétien, et la société d'ordres n'a de sens que dans une vision chrétienne, car son premier ordre est le clergé. Cette société d'ordres a une tête, un souverain (peu importe le terme) qui tient son pouvoir de la volonté divine (il est par exemple roi de France et non des Français).

Une société d'ordres sans premier ordre, cela fait désordre, convenez-en. Le second ordre, c'est la noblesse. Sa fonction est d'être l'intermédiaire entre le souverain et le peuple (le tiers-état), du moins elle définit ainsi sa fonction. Lorsqu'elle méconnaît ses devoirs, elle continue à exercer son rôle d'intermédiaire, mais comme le chien est l'intermédiaire entre le gibier et le chasseur (l'idée est de Chamfort).

Venons-en aux hiérarchies. Comme l'indique l'étymologie, il y a là une notion de sacré, absente d'un monde sans Dieu. Comment concevoir une hiérarchie sans rien à son sommet ? qui sera au-dessus de la caste dominante ?

Il me semble que la notion d'émancipation fondatrice va justement à l'encontre de ces courants de pensée : elle est de fait plus proche des Lumières que de Davila ou de Joseph de Maistre.

Davila nous dit ceci, que je vous livre dans le texte original, facilement compréhensible je pense :

La dignidad del hombre no está en su libertad, está en la clase de restricciones a su voluntad que libremente acepte.
Deuxième point, Thierry.

Mon discours peut paraître insensé, je le conçois. Il était cependant tenu il y a cinquante ans fort communément en France, ce n'est pas un discours fondamentaliste, et concevez que pour un chrétien placer la nature au-dessus de l'homme ("la terre n'en peut plus de l'homme") c'est bouleversant, c'est la porte dangereusement ouverte à beaucoup de choses.

Il y a cinquante ans, la religion dominante du pays appelait au sens de l'effort, au sacrifice (enfant, je me privais, justement par esprit de sacrifice). Il y a cinquante ans, une large part de la population était tenue par la crainte de Dieu qui était miséricordieux mais savait aussi punir. Il y a cinquante ans, on vivait dans l'idée de mourir, en sachant qu'on allait mourir.

J'ai retrouvé une prière qu'on me faisait dire quand j'étais enfant, imaginez-vous cela possible maintenant ? je vous invite à la méditer, car elle évoque de façon très parlante nos fins dernières.



Sainte Marie, Mère de Miséricorde, refuge des pécheurs, porte du Ciel,

Je (dire son prénom) me présente à Vous avec confiance,

pour vous recommander ma dernière heure et celle de ces pécheurs dont l'âme m'est presque aussi chère que la mienne.

(Spécifier ici intérieurement les pécheurs à recommander à la Très Sainte Vierge)

Quand nos yeux seront obscurcis et troublés des approches de la mort,

Priez pour nous, Sainte Marie, Mère de Miséricorde.

Quand nos joues pâles et livides, nos lèvres froides et tremblantes inspireront aux assistants la compassion et la terreur, et leur annonceront notre fin prochaine, Priez, etc...

Quand nos oreilles seront près de se fermer pour toujours aux discours des hommes, et de s'ouvrir à la sentence qui doit fixer notre éternité. Priez... etc...

Quand le monde entier aura disparu pour nous,

et que, privés de l'usage de nos sens, nous serons dans les oppressions de la dernière agonie, et dans le travail de la mort, Priez... etc...

Quand notre imagination sera agitée de fantômes sombres et effrayants, et que notre esprit sera troublé par la vue de nos iniquités, et par la crainte de la justice divine, Priez... etc...

Quand le démon, pour nous jeter dans le désespoir, s'efforcera de nous dérober la vue des divines miséricordes, Priez... etc...

Quand notre âme sortira pour toujours de ce monde, et laissera notre corps pâle, glacé et sans vie. Priez... etc...

Quand notre âme paraîtra devant votre Fils, et qu'elle verra pour la première fois l'éclat de sa majesté. Priez pour nous, Sainte Marie, Mère de Miséricorde.
Du Masnau est le Jacques Roux de ce forum.
Bossuet, Jacques Roux...

Une anecdote, au sujet de l'athéisme et de la révolution. Chaumette fut condamné et décapité sous la Terreur pour avoir "cherché à anéantir toute espèce de morale, étouffer tout principe de vertu, effacer toute idée de la divinité et fonder le gouvernement français sur l'athéisme".

On ne badine pas avec l'Etre Suprême sous Robespierre...
"Mon discours peut paraître insensé, je le conçois."

Pas pour moi, en tout cas, qui ne suis pas croyant (ni même baptisé) mais si je l'étais, je ne vois pas comment je pourrais l'être en pensant autrement que Jean-Marc et ses alter ego des deux autres monothéismes. Il n'y a pas d'arrangement écologique dans la vallée des larmes, si on la croit telle.

Les contradictions entre un désir de hiérarchie et une absence de profession de foi religieuse me paraissent pertinentes.

Ce qui me semble plus difficile à comprendre, c'est la raison pour laquelle ceux qui croient en Dieu et en ses messages n'applaudissent pas à la situation du monde en ce qu'elle peut avoir d’apocalyptique.
Ils l'applaudissent par défaut : en laissant faire et en faisant du mariage gay, par exemple, l'objet prioritaire de leur indignation.
Notez ce que disait Gomez Davila, dont je fais actuellement grand profit :

En la sociedad que se esboza, ni la colaboración entusiasta del sodomita y la lesbiana nos salvarán del tedio.

Je laisse la phrase en espagnol car la construction grammaticale est merveilleuse de "punch" (elle est syntaxiquement correcte en espagnol).

Ce mariage pour tous est la dernière étape d'un long déclin. Je fais partie des hommes qui aiment les hommes qui aiment les hommes, j'en suis d'ailleurs affligé religieusement parlant, et je trouvais déjà eétonnant que des hommes pussent s'afficher en couple (la Grèce, plus que tolérante envers l'éraste et l'éromène, condamnait les couples d'hommes adultes et n'admettait pour un homme fait que l'usage du bardache ou le mariage (voir à ce propos les amours de Socrate et de Xantippe)), singeant ainsi les hétérosexuels, alors que les expériences que j'ai eues m'ont montré le caractère fort papillonnant de cette forme de sexualité.
A la date du 3 septembre je tombe sur l'une des trois pensées quotidiennes de l'écrivain Eric Chevillard sur son blog l'Autofictif :

Nous croyons encore que l’arbre cache la forêt, alors qu’il n’y a plus derrière que des terrains de football.

Je crois que cela rejoint autrement ce qu'avait dit et déploré Renaud Camus (prolifération des hommes, artificialisation du territoire). Il n'est point suffisant de menacer tout un chacun des feux de l'enfer pour atténuer l'angoisse ressentie devant la disparition du vide, du silence, des arbres - et ce afin de satisfaire les plus viles des activités humaines.
Cher Thierry,

Je ne menace pas tout un chacun des feux de l'enfer, je me borne à dire que s'opposer à l'esprit même de la religion, rejeter l'enseignement de Dieu (le Commandement divin n'aurait pas été cité, je n'aurais rien dit) voue à l'enfer, je ne vois pas comment il pourrait en être autrement.

Vous écrivez : l'angoisse ressentie devant la disparition du vide, du silence, des arbres...

Vous aimez la littérature, vous avez sans doute lu l'Enfer de Barbusse. Je vous parlerai donc de mon angoisse, de celle que je ressens devant les gens cultivés qui ne voient dans les églises que des vaisseaux de pierre, de l'angoisse devant la perte du sens de ces églises.
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