Chers tous,
Il me semble tout à fait acquis que l'Art ne saurait, si j'ose dire, se contenter d'être ludique et
sympa, ni non plus se plier à tel ou tel diktat idéologique, fût-il
progressiste en diable.
L'oeuvre d'Art ne peut viser que vers les cîmes. Et donc peu en tentent l'ascension et encore moins parviennent au sommet.
Sa réalisation dans un matériau sensible ne peut se résoudre au médiocre ni se contenter paresseusement de faire tache dans un décor historique (Le Louvre ; Versailles ; Place Vendôme ; cathédrale ou église romane).
Car bien entendu c'est toujours la tache que l'on remarque sur un beau costume en tweed, c'est le petit canard vert en plastique flottant dans la baignoire de Boris Godounov du film de même nom, l'homard gonflable s'invitant au château de Versailles.
C'est le
savoir-faire du coucou.
Pondre ses oeufs dans le nid des autres et se nourrir de la somptuosité de ces lieux chargés d'Histoire et souvent de Beauté pour s'approprier toute l'attention des journaleux, critiques d'art et autres idéologues bien-pensants et in fine ne voir plus que la tache sur le beau costume.
Beaucoup trop de metteurs en scène d'opéras
tombent dans ces facilités-là.
Car en usant de la tache, il est nettement plus aisé de se voir
reconnu par toute la
camarilla en place et avoir son
mot doux dans leur presse.
En outre le travail (la tâche) en est beaucoup moins exigeant, le metteur en scène n'étant pas au seul service de l'oeuvre afin de la magnifier et de l'intérioriser en profondeur, mais privilégiant son ego et accordant une importance démesurée au petit truc merdique (la tache) qui fera qu'on parle de Lui!
Se servir de l'oeuvre plutôt qu'être au service de celle-ci. Et ainsi être
reconnu comme un vrai créateur original, fustigeant la Tradition, dépoussiérant l'Art en le
revisitant, comme on ne manquera pas de le lire.
Pour revenir à nos moutons, il est indéniable que l'Art ne s'offre pas à nous clé en mains.
Qu'il ne suffit pas de rendre gratuit l'accès au musée, de
descendre l'art dans la rue pour que, spontanément, tout individu
entre comme par magie dans la révélation de l'Art.
Il nous faudra faire beaucoup d'efforts, de patience, d'abnégation pour rendre la rencontre possible (aha-erlebnis) avec l'oeuvre qui nous est proposée, avec l'univers singulier de l'artiste et son génie.
C'est un peu comme partir à la découverte d'une nouvelle planète. Il faut de la curiosité, de la ténacité, de l'envie et accepter aussi de se départir de son environnement immédiat afin de rendre seulement la rencontre possible avec cet autre monde, de le humer, l'apprivoiser, le faire presque sien. Et in fine en être parfois ébloui et ému jusqu'aux larmes.
Comme le dit Alain Eytan il y a peu d'élus parmi le bon peuple. Peu s'intéressent à l'Art et ont envie d'y consacrer du temps et encore moins de l'argent.
Néanmoins il faut toujours rendre la rencontre possible pour ceux, même ultra minoritaires, qui ont le désir d'aller y voir de plus près. Et pour cela il faut toujours proposer le meilleur de l'Art, même s'il vaut mieux en passer par plusieurs étapes. Par exemple on ne commencera pas, d'emblée, à proposer l'écoute de la Tétralogie mais plutôt la Traviata ou Carmen ou Le Barbier de Séville.
Après c'est un peu comme à l'école. Tous ne feront pas normale sup...