INSANE, adj.
A. − [En parlant d'une pers.] Qui a perdu son bon sens, fou. Je déclare mon faible pour une Marie Dubas un peu insane, le hennin de travers et crachant du vieulx françois de contrebande (Colette, Jumelle, 1938, p. 206).
− Emploi subst. Il riait, du rire silencieux des voyants qui possèdent la vérité éternelle et pour qui le reste du monde est composé d'insanes (Martin du G., Thib., Cah. gr., 1922, p. 613). N'étaient les insanes, dont la fêlure s'élargit selon que monte le thermomètre, Paris l'été garde de quoi réjouir ses captifs (Colette, Pays connu, 1949, p. 31).
B. − [En parlant des idées, des sentiments d'une pers.] Qui est contraire au bon sens, à la raison. Ses élucubrations insanes et d'une platitude désolante (Larbaud, Journal, 1931, p. 257). Il se persuade que ses craintes sont insanes, qu'il est aimé (Aragon, Beaux quart., 1936, p. 379).
Prononc. : [ε̃san]. Étymol. et Hist. 1784 (Courrier de l'Europe, 23 avril, XV, p. 262 ds Proschwitz Beaumarchais, p. 257). Empr. à l'angl. insane « qui n'est pas sain mentalement, fou » attesté dep. le xvie s. (cf. NED), lui-même empr. au lat. insanus « qui n'est pas sain, malade (physiquement ou mentalement) ». Fréq. abs. littér. : 17.
APERT, ERTE, APPERT, ERTE, adj.
Vx. Clair, évident :
... La salle entière s'agenouilla et pria pour l'assassin. Quand les oraisons se turent, il y eut un instant d'affolement et de trouble. Exténuée d'horreur, excédée de pitié, la foule houlait; le tribunal, silencieux et énervé, se reconquit. D'un geste, le promoteur arrêta les discussions, balaya les larmes. Il dit que les crimes étaient « clairs et apperts », que les preuves étaient manifestes, que la Cour pouvait maintenant, en son âme et conscience, châtier le coupable et il demanda que l'on fixât le jour du jugement.
Huysmans, Là-bas, t. 2, 1891, p. 142.
Rem. Attesté ds Ac. Compl. 1842, Lar. 19e et Nouv. Lar. ill. qui le disent vieux.
Orth. − Ac. 1835 écrit appert avec 2 p.
ÉTYMOL. ET HIST.
A.− 1. Mil. xie s. fig. « (d'un inanimé abstrait) évident, manifeste » (Alexis, st. 113b, G. Paris ds Gdf. : Quant il en veient les vertuz si apertes) − 1611, Cotgr.; repris comme archaïsme au xixe s., supra; 2. début xive s. au propre « ouvert » (Aimé, Ystoire de li Norm., VIII, 10, Champollion ds Gdf. : Et quant ces quatre garson porterent a mengier a li prison, et la prison estoit aperte), attest. isolée.
B.− 1170-71 « (d'une pers.) capable, doué, habile » (Chret. de Troyes, Cligès, éd. W. Foerster, 4156 ds T.-L. : vaslez, jant et apert Te voi mout et de grant corage) − 1611, Cotgr. A empr. au lat. apertus (part. passé adjectivé de aperire « ouvrir »), dep. Cicéron (Sex. Rosc., 65 ds TLL s.v., 219, 51); sens fig. Cicéron, Cat., 2, 1, ibid., 221, 71. B croisement de sens avec l'a. fr. espert « habile » (1262, J. Le Marchant, Mir. de N.-D., ms. Chartres, fo 7 b ds Gdf.), du lat. expertus « éprouvé, habile » part. passé de experiri qui aux sens dér. du parfait signifie « avoir fait, savoir par expérience ».
BBG. − Dupin-Lab. 1846.