Le site du parti de l'In-nocence

N°2

Envoyé par Daniel Teyssier 
15 mars 2015, 11:21   N°2
Le désir, l'ambition folle et pathétique qu'ont certains, à l'intérieur d'une oeuvre ou même d'une simple discussion, de viser à l'exhaustivité, c'est-à-dire de vouloir tout maîtriser rationnellement, intellectuellement, conceptuellement, analytiquement est de nature métaphysique, ignorant la finitude de l'Homme et la forme de son entendement.
L'idée que l'on se fait de Dieu (qu'il existe ou non n'a pas d'importance), personnage omniscient (qui sait tout sur tout) implique justement, comme le disait Kant et avant lui Spinoza, que Dieu ne saurait penser (au sens de penser comme un humain) car toute pensée bute sur quelque chose de définie et de bornée, qui lui fait face et sur laquelle cette pensée peut s'exercer et s'appuyer.
On ne peut penser le tout du tout.
Ce qui nous empêche pas, bien entendu, d'approfondir autant qu'on le peut, notre cheminement vers plus de connaissances, comme la science le fait très bien, tout en sachant qu'on ne pourra jamais parvenir à une pensée synthétique de l'ensemble de notre Monde. Notre sphère synthétique, puits nourricier de nos jugements analytiques, ne peut être de rayon infini.
15 mars 2015, 19:54   Re : N°2
Quelle "ambition folle et pathétique" ? et quels "certains" ?

Ce n'est pas parce que l'on est fini que l'on doit tolérer d'être incomplet. Et aujourd'hui il est moins question, moins à l'ordre du jour, de penser que de repenser ce qui depuis des siècles l'a été incomplètement, voire très incomplètement.

Si Kant et Spinoza revenaient il est quasi-sûr qu'ils rejetteraient Kant et Spinoza, enfin, les vôtres.

Cette semaine a paru un article dans la revue Nature qui date, par des relevés de la chimie de l'atmosphère et des sols, la naissance de l'anthropocène à l'an 1610 (cf. le Golden Spike évoqué dans l'article en anglais reproduit ci-dessous) soit l'époque copernicienne qui vit surgir l'eschaton occidental et avec lui un régime d'espérance et de pensée du destin humain qui situe et date la fin des temps dans l'ordre historial et évacue la gnose. Autrement dit l'histoire naturelle et le destin humain commencèrent à être vécus par l'homme occidental comme une évolution en laquelle l'histoire humaine et la nature furent mises à un même pas, mises à l'unisson : la fin des temps historiaux fut datable et temporalisée dans l'avant, mais, en même temps, la fin des temps naturels débuta elle aussi (l'anthropocène est une fin des temps naturels). Finalité historiale et fin du monde (fin de la planète) furent programmées par l'homme occidental en cette décennie, et leur advenue conceptuelle est datable de ce kaïros.

La naissance de l'avant (terme que Jabob Taubes préférait à celui de "futur") et le commencement de la fin de l'ordre naturel planétaire se firent ensemble à cette date : c'est lorsque l'ordre copernicien s'imposa (grâce à Kepler et à Tycho Brae à partir de 1610) que l'Eglise, jusque là reine de la dispensation cosmique ptoléméenne, cessa de se poser en Royaume de Dieu, et elle se dégagea de ce rôle dans la mesure et pour autant que lui permettait le fait que ce dernier commença de nicher dans l'avant que lui fixait l'eschatologie. L'ordre copernicien nouveau ruinait toute gnose (toute possibilité d'extérieur ou d'étrangeté à l'ordre ptoléméen de l'Eglise qui avait laissé subsister un extérieur). Et l'ordre du monde, la globalité mondaine mise en logos dans le théâtre de Shakespeare (1610, date sommet pour l'oeuvre shakespearienne) s'instaura dans ce moment où s'entama l'anthropocène et où s'installa définitivement l'ordre copernicien. La genèse de l'avant s'opéra mêmement et dans le même temps dans l'ordre spirituel/historial que dans l'ordre naturel planétaire (anthropocène).

La question est moins de choisir ou de corriger ses choix dans et par l'arbitrage entre finitude et infini que de reconsidérer le fini et sa prédication, son articulation, sa mise en relief et en contraste, sa conjugaison avec ce qui jusqu'ici a été pensé comme infini (Dieu, l'histoire humaine, la nature, l'ordre cosmique, etc.). Kant et Spinoza sont chroniquement incomplets et ne peuvent que l'être ne serait-ce que parce que, n'ayant point vécu cinq cents ans, ils n'eurent point connaissance de l'anthropocène, du fait anthropocénique et de la conjonction que je vous rapporte, et qui donnent à la finitude tout le relief et la perspective qui lui manquaient à son époque. Cette conjonction, fût-elle seule, nous oblige à repenser la finitude.

Vous n'êtes pas obligé de me croire sur parole. Mais avant de pérorer sur "l'ambition folle et pathétique de certains", vous devriez vous sentir tenu (ou libre) de lire et de vous informer, par ceci, pour commencer :

Tandis que, pendant tout le Moyen Age, pour Augustin, l'Eglise était déjà le Royaume de Dieu, l'irruption à la fin du Moyen Age de la prophétie de l'interprétation historique de la Trinité par Joachim de Flore va briser cet ordre théologico-politique augustinien. Et c'est l'Apocalypse de Jean, lue comme chiffrant l'histoire du salut, qui fera l'objet de commentaires révolutionnaires, tels le Postilla super Apocalysim de Pierre Olivi. Pour Taubes, il s'agit bien d'une "récidive gnostique". La nouvelle périodisation de l'histoire de Joachim est liée à toutes les vagues apocalyptiques de la modernité, dans la mesure où, comme le dit Taubes, Joachim formule en fait la "loi des Temps Modernes". En prédisant la venue d'un "Troisième âge" de la révélation, l'âge du Saint-Esprit comme ultime âge de l'accomplissement, qui sera ensuite compris par les franciscains "spirituels" comme avènement de l'ecclesia spiritualis qui périme l'Eglise du pape, les successeurs de Joachim ne font pas que donner naissance à une nouvelle hérésie. Ils inaugurent les Temps Modernes comme l'époque qui n'est plus dominée par un modèle idéal dans le ciel, incarné par l'Eglise --- image du ciel ---, mais par l'esprit qui pousse vers l'avant, vers l'avenir : la dialectique de l'histoire va réaliser le royaume de Dieu sur terre. Les franciscains joachimites vont ainsi ouvrrir une grande époque de retour vers l'apocalyptique qui culminera dans la Guerre des paysans avec la théologie révolutionnaire de Thomas Münzer et ses suites, que Taubes nomme la "Révolution baptiste". Les Temps Modernes sont donc dans leur essence la réouverture de la perspective apocalyptique, dans un contexte par ailleurs caractérisé par la révolution copernicienne. Un lien systématique lie l'affirmation de l'avenir dans une perspective historique à ce qu'après la révolution copernicienne, la perspective céleste de l'En-Haut, celle de l'Eglise "charismatique" du monde ptoléméen -- centré sur la messe qui fait communiquer avec le ciel --- est désormais fermée à une "terre sans ciel", et que s'ouvre la possibilité d'un monde radicalement profane dans lequel l'idéal n'est plus l'Idée platonicienne ayant son "lieu" en-haut, mais situe son foyer dans l'avenir. Tout en renouant le fil de l'altérité radicale du gnosticisme antique, les Temps Modernes, dans la structure épistémologique du nouvel univers copernicien, n'autorisent en effet plus aucun "exode gnostique" hors du cosmos, comme c'était possible avec la représentation du cosmos dans l'Antiquité.

Extrait de La Guérilla herméneutique de Jacob Taubes, préface de Raphaël Lellouche à Eschatologie occidentale de Jacob Taubes, 2009, Editions l'Eclat.

et ceci, une rescension de l'artice de Nature paru le 11 mars 2015 (dont l'original, en accès payant est disponible ICI:

Epoch-defining study pinpoints when humans came to dominate planet Earth
11 March 2015

Columbian Exchange

The human-dominated geological epoch known as the Anthropocene probably began around the year 1610, with an unusual drop in atmospheric carbon dioxide and the irreversible exchange of species between the New and Old Worlds, according to new research published today in Nature.

Previous epochs began and ended due to factors including meteorite strikes, sustained volcanic eruptions and the shifting of the continents. Human actions are now changing the planet, but are we really a geological force of nature driving Earth into a new epoch that will last millions of years?

Scientists at UCL have concluded that humans have become a geological power and suggest that human actions have produced a new geological epoch.

Defining an epoch requires two main criteria to be met. Long-lasting changes to the Earth must be documented. Scientists must also pinpoint and date a global environmental change that has been captured in natural material, such as rocks, ancient ice or sediment from the ocean floor. Such a marker – like the chemical signature left by the meteorite strike that wiped out the dinosaurs – is called a golden spike.

The study authors systematically compared the major environmental impacts of human activity over the past 50,000 years against these two formal requirements. Just two dates met the criteria: 1610, when the collision of the New and Old Worlds a century earlier was first felt globally; and 1964, associated with the fallout from nuclear weapons tests. The researchers conclude that 1610 is the stronger candidate.

The scientists say the 1492 arrival of Europeans in the Americas, and subsequent global trade, moved species to new continents and oceans, resulting in a global re-ordering of life on Earth. This rapid, repeated, cross-ocean exchange of species is without precedent in Earth’s history.

They argue that the joining of the two hemispheres is an unambiguous event after which the impacts of human activity became global and set Earth on a new trajectory. The first fossil pollen of maize, a Latin American species, appears in marine sediment in Europe in 1600, becoming common over subsequent centuries. This irreversible exchange of species satisfies the first criteria for dating an epoch – long-term changes to Earth.

The Anthropocene probably began when species jumped continents, starting when the Old World met the New. We humans are now a geological power in our own right – as Earth-changing as a meteorite strike
Dr Simon Lewis
The researchers also found a golden spike that can be dated to the same time: a pronounced dip in atmospheric carbon dioxide centred on 1610 and captured in Antarctic ice-core records. The drop occurred as a direct result of the arrival of Europeans in the Americas. Colonisation of the New World led to the deaths of about 50 million indigenous people, most within a few decades of the 16th century due to smallpox. The abrupt near-cessation of farming across the continent and the subsequent re-growth of Latin American forests and other vegetation removed enough carbon dioxide from the atmosphere to produce a drop in CO2. Thus, the second requirement of a golden spike marker is met.

The researchers have named the 1610 dip in carbon dioxide the ‘Orbis Spike’. They chose the Latin word for ‘world’ because this golden spike was caused by once-disconnected peoples becoming globally linked.

Lead author, Dr Simon Lewis (UCL Geography and University of Leeds), said: “In a hundred thousand years scientists will look at the environmental record and know something remarkable happened in the second half of the second millennium. They will be in no doubt that these global changes to Earth were caused by their own species. Today we can say when those changes began and why. The Anthropocene probably began when species jumped continents, starting when the Old World met the New. We humans are now a geological power in our own right – as Earth-changing as a meteorite strike.”

He added: “Historically, the collision of the Old and New Worlds marks the beginning of the modern world. Many historians regard agricultural imports into Europe from the vast new lands of the Americas, alongside the availability of coal, as the two essential precursors of the Industrial Revolution, which in turn unleashed further waves of global environmental changes. Geologically, this boundary also marks Earth’s last globally synchronous cool moment before the onset of the long-term global warmth of the Anthropocene.”

Nature Anthropocene cover
The authors also considered the merits of dating the Anthropocene to 1964, which saw a peak in radioactive fallout following nuclear weapons testing. This marker is seen in many geological deposits, and by the 1960s human impact on the Earth was large. However, the researchers note that while nuclear war could dramatically alter Earth, so far it has not. While the fallout from nuclear bomb tests is a very good marker, the testing of nuclear weapons has not been – in geological terms – an Earth-changing event.

The beginning of the Industrial Revolution, in the late 18th century, has most commonly been suggested as the start of the Anthropocene. This linked a clear turning point in human history, and the rise of atmospheric carbon dioxide from fossil fuel use is a long-term global environmental change of critical importance. However, the researchers did not find a golden spike at that time because most effects were local, while the global exponential rise in carbon dioxide was too smooth an increase to form a precisely dated marker.

The authors’ new paper ends by highlighting some implications of formally defining the Anthropocene.

Co-author, geologist Professor Mark Maslin (UCL Geography) said: “A more wide-spread recognition that human actions are driving far-reaching changes to the life-supporting infrastructure of Earth will have implications for our philosophical, social, economic and political views of our environment. But we should not despair, because the power that humans wield is unlike any other force of nature, it is reflexive and therefore can be used, withdrawn or modified. The first stage of solving our damaging relationship with our environment is recognising it.”

An official decision on whether to formally recognise the Anthropocene, including when it began, will be initiated by a recommendation of the Anthropocene Working Group of the Subcommission of Quaternary Stratigraphy, due in 2016.

- See more at: [www.ucl.ac.uk]
15 mars 2015, 23:49   Re : N°2
Bon! Pérorons donc! Puisque vous m'y invitez.
Tout d'abord écartons tout malentendu à propos de ces certains qui se montreraient coupables d'une ambition folle et pathétique, le but de cette mise au point n'étant nullement de m'attirer vos bons sentiments mais tout bonnement d'être perçu et compris dans la vérité de mon discours et seulement dans cela.
Il ne s'agit en aucune façon, pour moi, d'incriminer ni de délégitimer les personnes qui, par leur travail, leur culture (littéraire, scientifique, artistique, philosophique, sociologique, religieuse, anthropologique, etc), leur désir d'aller toujours plus loin dans la connaissance et la complexité de la pensée, enrichissent considérablement les échanges, offrant souvent aux autres des perspectives nouvelles et insoupçonnées. Ces gens-là, par leur culture et leur travail acharné à se l'être appropriée, sont infiniment respectables et méritants, toujours hautement stimulant pour les autres, et souvent d'un commerce agréable. Il ne s'agisssait donc nullement de ceux qui sont les plus savants et les plus cultivés d'entre nous, qui font avancer la science à grand pas et multiplient les questionnements, ne se contentant jamais du port où ils sont arrivés. Non! Il ne s'agit pas de cela.
Etaient visés tous ceux, et eux seuls, qui s'adonnent à l'exercice vain d'une métaphysique hautement dogmatique et spéculative à l'excès, qui ne s'embarassent d'aucun empirisme et laissent vaquer leur pensée délirante sans retenue aucune (telles les Idées de Platon), qui, justement, ne tiennent aucun compte de la révolution copernicienne dont votre texte ci-dessus fait allusion, texte dont je partage entièrement ses vues lesquelles m'étaient d'ailleurs très connues et familières.
Etaient visés ceux qui, comme Descartes, avec son principe ontologique, ou Leibniz, ont l'ambition folle de prouver l'existence de Dieu par la raison seule. Chez les cartésiens, l'objectivité de la connaissance est validée par le recours à Dieu (par la garantie divine chez Descartes et par l'harmonie préétablie chez Leibniz) et non par la science, laquelle à cette époque n'était pas encore moderne.
N'étaient pas visés ceux, comme j'ai déjà dit plus haut, qui font l'effort d'aller toujours plus loin dans la complexité d'une pensée très élargie mais uniquement ceux qui ne se limitent à aucun empirisme scientifique, et continuent donc à se comporter comme les métaphysiciens d'avant la science moderne, c'est à dire ceux qui ont l'ambition folle d'une connaissance absolue et totale du Monde (Critique de la Raison pure- Kant). Pure signifiant, chez Kant, a priori, c'est-à dire sans recours à l'empirisme. Cette ambition ne repose absolument pas sur la science moderne mais tout au contraire elle en est la négation car elle ne se soumet pas à l'expérience, à l'empirisme.
Mais si Kant réduit bien en cendres la métaphysique dogmatique des cartésiens il lui confère néanmoins le rôle d'un pôle régulateur de la pensée humaine, poussant toujours plus loin la recherche scientifique et les questionnements.
Ce qu'il faut bien saisir ici c'est la différence capitale entre connaissance illimitée (L'Homme progressant sans cesse dans ses savoirs) et connaissance totale et parfaite du Monde (connaissance illusoire et métaphysique). La finitude de l'Homme ne signifie absolument pas que ses connaissances finiront par se figer mais qu'il ne pourra jamais accéder à une connaissance parfaite et totale de tout sur tout, qu'il ne remplace pas le Dieu qui, avant la révolution copernicienne de la science moderne, régissait le cosmos.
Avec Kant, ce sont deux grandes conceptions des limites inhérentes à la connaissance humaine qui vont s'opposer. Ces deux visions de la réalité humaine engagent aussi bien la question métaphysique des rapports entre l'Homme et Dieu (entre le relatif et l'Absolu, le fini et l'infini) que celle, épistémologique, du statut de l'ignorance et de l'erreur qui caractérisent toujours plus ou moins le savoir humain.
Pour aller à l'essentiel, on pourrait dire que, du point de vue des cartésiens qui domine assez largement la philosophie du XVII ème siècle (Spinoza Descartes Leibniz), les limitations qui affectent la connaissance humaine sont pensées par rapport à une référence absolue : l'idée d'une omniscience dont Dieu est censé être le dépositaire. C'est par rapport à celle-ci que le savoir humain est dit limité. La finitude humaine est ainsi pensée sur fond d'Absolu.
Cet Absolu est premier et, par rapport à lui, la condition humaine est seconde, de l'ordre du moindre. C'est en effet parce qu'il est fini stricto sensu, c'est à dire tout bêtement borné par un monde qui lui fait toujours déjà face, donc parce qu'il est un être sensible situé (c'est à dire limité) dans l'espace et dans le temps, qu'il peut parfois se tromper, et finalement mourir.
Le mouvement Kantien, et sur ce point des interprètes aussi différents que Heidegger et Carriser s'accordent, représente un retournement de perspective complet, sans précédent dans l'histoire de la pensée, par rapport au schéma cartésien.
Ce retournement, dont la Critique de la Raison pure est le théâtre, consiste très exactement en ceci : Kant pense d'abord la finitude, donc la sensibilité et le corps situés dans l'espace et le temps, ensuite seulement l'Absolu ou la divinité intemporelle. Que je ne sois pas un être infini, en effet, c'est là ce dont témoigne tout simplement le fait que mon corps occupe un certain espace (et non sa totalité) à un certain temps (au-delà duquel mon ticket n'est plus valable). En d'autres termes : la finitude, le simple fait que notre conscience soit toujours déjà limitée par un monde extérieur à elle, par un monde qu'elle n'a pas produit elle-même, est le fait premier, celui dont il faut partir pour aborder toutes les autres questions et ce pour la simple et bonne raison qu'il n'existe aucun autre point de vue réel sur le monde.
Je peux bien sûr essayer de faire abstraction de ma finitude, tenter de me placer en imagination du point de vue d'un Dieu infini. L'honnêteté intellectuelle la plus élémentaire m'oblige cependant à conserver la conscience claire du fait qu'il s'agit bien là d'une abstraction, d'une hypothèse fictive et qu'à la vérité c'est toujours un être fini qui pense, même quand il joue à se prendre pour Dieu.
Il faut donc toujours partir non de ce dernier, comme le fait Spinoza dans l'Ethique, mais de l'homme qui est et reste, malgré ses capacités d'abstraction et d'invention, un être radicalement fini.
Car, sans cette finitude, il n'aurait pas même conscience de quoi que ce soit. Comme le dira plus tard Husserl dans le sillage de Kant, toute conscience est conscience de quelque chose, représentation d'un objet qui vient la limiter.
Dieu, infini et omniscient, ne saurait penser. La réflexion est consubstantielle à la finitude, à l'idée de limite, de distance entre soi et le monde, voire entre soi et soi.
Du coup, c'est aussi à partir de cette finitude sensible, spatio-temporelle, qu'il convient de penser Dieu lui-même ou l'Absolu, et non l'inverse!! Conséquence ultime de ce renversement : c'est la prétention à connaître l'Absolu, à démontrer par ex l'existence de Dieu, qui va se trouver relativisée par rapport à l'affirmation initiale de la condition limitée de l'Homme.
C'est par rapport à cette dernière que la prétendue connaissance métaphysique sera dénoncée comme illusoire, parce qu'hors de portée de l'Homme. Avec Kant, ce n'est plus la figure divine de l'Absolu, de l'omniscience, qui vient relativiser la finitude humaine, la définir comme moindre être. Tout à l'inverse, c'est au nom de la finitude indépassable qui est celle de toute connaissance humaine, que la figure divine de l'Absolu est à son tour relativisée, rabaissée au rang d'une simple Idée dont la réalité objective est indémontrable par les voies d'une quelconque théorie philosophique ou scientifique.
La fin du cosmologico-éthique du monde antique grec et du théologico-éthique d'avant Kant et la science moderne, n'ont pas donné à l'Homme les attributs d'une divinité omnisciente.
Par contre l'Homme et sa finitude consubstantielle sont devenus le point de départ à partir duquel tout se juge et s'interprète.
Ouf! Bonne nuit à tous.
16 mars 2015, 13:21   Re : N°2
Cher Francis,

Existe-t-il une traduction de cet article ? J'ai du mal à saisir pour quelles raisons, à partir de quelles mesures, ces scientifiques parviennent à dater le début de l'anthropocène à l'année 1610.
16 mars 2015, 14:12   Re : N°2
Je vous prépare une traduction vite fait sur le gaz, Thomas.
16 mars 2015, 14:19   Re : N°2
Il semble que 1610 soit l'année où les bouleversements dus au contact du nouveau et de l'ancien monde commencent à se faire sentir fortement.

Le graphique est d'ailleurs explicite : on voit bien les changements de culture (au sens des produits agricoles), les nouveaux processus de pollinisation, les tranferts d'espèces animales.
16 mars 2015, 15:28   Re : N°2
Traduction intégrale de l'article en anglais reproduit ci-dessus:


L’ère géologique dominée par l'homme et appelée anthropocène a probablement commencé vers l'année 1610, avec une chute inhabituelle du dioxyde de carbone atmosphérique et un échange irréversible d’espèces entre l’ancien et le nouveau monde, selon une nouvelle étude publiée aujourd'hui dans Nature.

Les ères géologiques antérieures avaient commencé et s’étaient terminées sous l’action de facteurs [non anthropiques] comprenant chutes de météorites, éruptions volcaniques et dérive des continents. Les actions humaines sont en train de modifier la planète, mais sommes-nous vraiment l’équivalent d’une force naturelle qui apporterait sur Terre une ère géologique nouvelle appelée à durer des millions d'années ?

Les scientifiques de l'UCL ont conclu que les hommes sont devenus une force géologique et suggèrent que les actions humaines ont produit une ère géologique nouvelle.

Une ère géologique se définit par deux critères majeurs. Les modifications durables que subit la Terre doivent être documentées. Les scientifiques doivent également circonscrire et dater une modification de l'environnement mondial inscrite dans des matériaux naturels : roches, glace ancienne ou sédiments des fonds océaniques. Pareil marqueur - telle la signature chimique laissée par la chute de météorite qui a exterminé les dinosaures - est appelé Golden Spike (pointe dorée).

Les auteurs de l'étude se sont livrés à une confrontation systématique des grands impacts environnementaux qu’a eus l'activité humaine au cours des 50 000 dernières années à l’aune de ces deux exigences formelles. Seules deux dates répondent à ces critères: 1610, lorsque la collision de l’ancien et du nouveau mondes qui avait eu lieu un siècle plus tôt fut ressentie à l'échelle mondiale; et 1964, année marquée par les retombées radioactives d’essais d'armes nucléaires. Les chercheurs ont conclu que, de ces deux dates, 1610 est celle qui satisfait le mieux aux critères requis.

Les scientifiques affirment que l’arrivée des Européens aux Amériques en 1492, et le commerce mondial qui lui fit suite, opérèrent un transfert d’espèces d’un continent à l’autre et d’un océan à l’autre, entraînant une réorganisation mondiale de la vie sur Terre. Ces échanges inter-océaniques rapides et répétés d’espèces sont sans précédent dans l'histoire de la Terre.

Ils soutiennent que la jonction de l’ancien et du nouveau monde (l’Europe et l’Amérique) est incontestablement un événement après lequel les impacts de l'activité humaine prirent une dimension mondiale et imprimèrent à la planète un cours nouveau. Le premier pollen fossile de maïs, espèce végétale d'Amérique latine, apparaît dans des sédiments marins en Europe en 1600, devenant commun au cours des siècles suivants. Cet échange irréversible d'espèces satisfait aux premiers critères permettant de dater une époque, soit une modification planétaire de caractère permanent

L’anthropocène a probablement commencé lorsque les espèces ont sauté d’un continent à l’autre, phénomène déclenché par la rencontre entre le Vieux Monde et le Nouveau Monde. Les humains que nous sommes peuvent désormais se considérer comme force géologique à part entière, aussi capable de modifier la planète que peut l’être une frappe de météorite.

Les chercheurs ont également décelé une « pointe dorée » qui peut être datée du même moment : un creux prononcé dans les taux de dioxyde de carbone atmosphérique centré sur 1610, constatable dans les prélèvements de glace par carottage en Antarctique. Cette chute s’explique comme conséquence directe de l'arrivée des Européens dans les Amériques. En effet, la colonisation du Nouveau Monde a conduit à la mort d'environ 50 millions d’autochtones, la plupart en quelques décennies au 16ème siècle, sous l'effet d'épidémies de variole. La quasi-cessation brutale de l'agriculture dans l’ensemble du continent et le recrû ultérieur des forêts d'Amérique latine et d'autres formations végétales ôtèrent des quantités suffisantes de dioxyde de carbone de l'atmosphère pour produire une baisse des émissions de CO2. C’est ainsi que l’exigence du second marqueur de « pointe dorée » se trouve satisfaite.

Les chercheurs ont nommé le creux dioxyde de carbone de 1610 du nom d'« Orbis Spike ». Ils ont choisi le mot latin qui signifie «monde» parce que cette « pointe dorée » a été causée par la mise en liaison planétaire de peuples qui avaient été jusque là disjoints.

Selon les mots de l’auteur principal de cette étude, le prof. Simon Lewis (UCL Géographie et de l'Université de Leeds) « Dans cent mille ans, les scientifiques se pencheront sur les courbes des données environnementales et apprendront que quelque chose de remarquable s’est produit dans la seconde moitié du deuxième millénaire. Il ne fera pour eux aucun doute que ces modifications ayant affecté la planète dans son ensemble furent causées par leur propre espèce. Aujourd'hui, nous sommes en mesure de dire quand ces modifications ont commencé et pourquoi. L'anthropocène a probablement commencé lorsque les espèces ont franchi les continents, à partir du moment où le Vieux Monde a rencontré le nouveau. Nous, les hommes, sommes désormais une force géologique à part entière, capables de modifier l’environnement terrestre comme l’est une frappe de météorite.

« Historiquement, la collision de l'Ancien et du Nouveau Monde marque le début du monde moderne (« Temps modernes »). De nombreux historiens considèrent les importations agricoles européennes depuis les vastes nouveaux territoires des Amériques, et avec elles la disponibilité du charbon, comme les deux précurseurs essentiels de la révolution industrielle, laquelle à son tour a déclenché de nouvelles vagues de changements environnementaux planétaires. Du point de vue géologique, cette ligne de démarcation marque également le dernier moment de refroidissement planétaire synchrone de la Terre avant l'apparition du réchauffement de longue durée caractéristique de l'anthropocène. »


Les auteurs ont également examiné les éléments plaidant pour une datation du commencement de l'anthropocène en 1964, qui a vu un pic dans les retombées radioactives après des essais d'armes nucléaires. Ce marqueur est présent dans de nombreux gisements géologiques, et dans les années 60 du siècle dernier, l’impact anthropique sur la Terre a été fort. Cependant, pour ces chercheurs, si une guerre nucléaire est susceptible d’entrainer une altération dramatique du milieu terrestre, il reste que pour l’heure, elle n’a pas eu lieu. Bien que les retombées des essais de bombes nucléaires soient un très bon marqueur, les essais d'armes nucléaires n'ont pas été - en termes géologiques - un événement modifiant le milieu terrestre.

Le début de la révolution industrielle, à la fin du 18ème siècle, est le plus communément donné comme début de l'anthropocène. Celle-ci a en effet marqué un tournant dans l'histoire humaine, et la hausse de la teneur en dioxyde de carbone dans l'atmosphère causée par l’exploitation de combustibles fossiles représente une modification de longue durée du milieu planétaire dont l'importance est déterminante. Cependant, les chercheurs n’ont trouvé aucune « pointe dorée » à cette époque parce que la plupart des effets constatés se sont manifestés à l’échelon local, cependant que la hausse exponentielle planétaire de dioxyde de carbone présente dans l'atmosphère s’effectue avec une régularité qui ne permet pas d’y déceler un marqueur datable avec précision.

L’article se termine en mettant en évidence certaines implications que comporte la définition officielle de l’anthropocène.

Selon un co-auteur de cette étude, le géologue Mark Maslin (UCL Géographie) : "Une reconnaissance élargie du fait que les actions humaines sont à l'origine de modifications profondes de l'infrastructure qui soutient la vie sur Terre ne peut manquer d’avoir des implications sur la manière d’envisager notre environnement des points de vue philosophique, social, économique et politique. Mais nous ne devons pas désespérer, car la force dont disposent les hommes ne ressemble à aucune autre force du monde naturel, elle est réflexive et peut donc être utilisée, retirée ou infléchie. La première étape vers toute solution aux rapports préjudiciables que nous entretenons avec notre environnement est la reconnaissance de leur fait."

Une décision officielle sur le bien-fondé d’une reconnaissance formelle de l'anthropocène, dont la date de son commencement, sera prise suivant les préconisations du Groupe de travail de la Sous-Commission anthropocène du Quaternaire stratigraphie, attendues en 2016.
16 mars 2015, 15:46   Re : N°2
à noter, pour mémoire : 1610 est la date de la dernière oeuvre, bouquet final, du Theatrum Mundi de Shakespeare : The Tempest. L'altération globale du milieu terrestre commence sous l'effet d'un commerce extractiviste mondial porté par un véhicule linguistique appelé à devenir lui-aussi Orbis, dont l'avènement se parachève l'année même où commence cette altération !
16 mars 2015, 15:53   Re : N°2
Cela coïncide avec le "Petit Age Glaciaire", 1608 est l'année de la première des River Thames Frost Fairs.
16 mars 2015, 18:49   Re : N°2
Grand merci, Francis ! Vous l'avez vite fait sur le gaz, mais il va falloir que je laisse mijoter un peu.
16 mars 2015, 23:06   Re : N°2
L'article est convaincant et laisse rêveur, sans toutefois invalider tout à fait ce qu'écrit par ailleurs M. Hergat à propos de la maîtrise du feu, que je serais tenté comme lui de désigner comme le début virtuel de l'anthropocène, dont les événements de 1610 ne seraient que la suite logique. Sans la maîtrise du feu, pas de collision de l'Ancien et du Nouveau monde et, par conséquent, pas d'anthropocène.
16 mars 2015, 23:42   Re : N°2
Les objections que soulève cet article sont d'ordre épistémologique et ... métaphysique -- qu'est-ce que la causation dans pareil contexte où se constitue une trame factuelle plutôt que ne surgit un fait unique, comme est unique et très borné dans le temps l'événement de Chicxulub constitué par une frappe de météorite survenue un certain jour ?

Au fond, n'avons-nous pas forgé et taillé sur mesure un concept, l'anthropocène, à la seule fin de placer le mouvement apocalyptique et eschatologique occidental à la place du roi et de démiurge de cette évolution ? Ces savants font-ils autre chose qu'oeuvre de thaumaturge ? S'agissant de la dégradation irréversible du milieu naturel de la planète l'entrée de la Chine en révolution industrielle à l'approche du millénaire que nous venons d'aborder n'est-il pas factuellement plus déterminant, plus directement causatif que la présence de pollen de maïs dans les océans à partir du XVIIIe siècle ?

Ce dont nous sommes témoins, soit l'irréversibilité entropique dont l'humanité prend peu à peu conscience, eut-elle un début autre que mythique ? Autrement dit, ne sommes nous pas en train d'écrire une fable et de faire de la magie dans notre besoin naïf et primitif d'attribuer à toute évolution un point d'origine datable ?

Entre lignée ou trame évolutive d'une part et causation directe d'autre part, le scientifique, qui n'est pas thaumaturge où faiseur de mythe, dans sa chasse aux causes originelles doit s'interroger sur la nature de la relation causale qui le préoccupe. C'est un exercice très délicat. Qu'est-ce qui fait que la Chine se prend à agir, à l'intérieur comme à l'extérieur de ses frontières, à la manière de l'Angleterre mercantiliste d'il y a trois siècles ? En l'absence de ces moments antérieurs de l'humanité, des causes efficientes existent-elles qui eussent conduit la Chine à évoluer ainsi malgré tout ?

L'origine se recherche et se décèle dans un mouvement à rebours : on part du présent pour remonter le temps à la recherche d'une solution de continuité à un état dynamique dont les caractéristiques essentielles durent depuis nous dans le présent. Il y a là un biais qui occulte la causation directe au sein même de la continuité chronologique des étants, laquelle rend compte notamment du fait que certaines branches de l'évolution avortent faute d'animation causale interne, locale et immédiate des étants, laquelle animation (ou défaut d'icelle) est située très loin de l'origine première que l'on recherche : par exemple, la suspension et l'avortement des Temps Modernes en Chine à l'époque des Qing et des Ming eurent lieu faute d'une animation causale interne à cette aire de civilisation et il faut se garder de n'y voir qu'un "accident de l'histoire", ou un toussotement de la fatalité.

Le rail historial existe très probablement mais la locomotive humaine qui y court puise la cause et l'énergie de son mouvement dans des phases relais, des stations causales que ne commande plus la gare originelle. Il s'ensuit que l'ontologie d'un anthropocène risque n'avoir d'autre fonction que discourante et mythologique.
17 mars 2015, 05:55   1596
» Avec Kant, ce n'est plus la figure divine de l'Absolu, de l'omniscience, qui vient relativiser la finitude humaine, la définir comme moindre être. Tout à l'inverse, c'est au nom de la finitude indépassable qui est celle de toute connaissance humaine, que la figure divine de l'Absolu est à son tour relativisée, rabaissée au rang d'une simple Idée dont la réalité objective est indémontrable par les voies d'une quelconque théorie philosophique ou scientifique.


Tiens, cher Daniel Teyssier, fûtes-vous, vous aussi, lecteur de l'Homo estheticus de Ferry ? Ces dernières phrases concernant l'antériorité de la finitude humaine reléguant Dieu au statut quelque peu évasif de simple "idée" de la raison m'y ont fait penser, notamment au chapitre intitulé "Le Moment kantien" ; c'est un bon livre, trouvé-je, toujours soucieux de clarté et didactique dans le meilleur sens du terme, présentant une vision cohérente, synoptique et commode des choses (parfois un peu trop commode ?), et qui n'est à mon avis pas dénué de profondeur.
Dans les grandes lignes je suis d'ailleurs plutôt d'accord avec vous, ce qui n'empêche nullement qu'on puisse toujours trouver des perles de réflexion et de pénétration chez les "absolutistes" de la connaissance, qui, peut-être, sans cette passion de la totalité savante n'auraient pas été capables de celles-là...
Il y a toutefois que je vous trouve un peu injuste avec Descartes, qui occupe tout de même une place de choix, dans cette histoire de "subjectivisation" du monde et du recentrement anthropique des perspectives. Car après tout, et cela est du reste fort bien amené dans ce même livre de Ferry, la certitude et l'évidence nécessaires à la reconstruction du monde pulvérisé par le doute (Dieu même s'en trouve chambardé) ne sont en réalité possibles qu'en faisant fond sur le sujet, sur la saisie qu'a le sujet de lui-même, ultime recours et point d'ancrage sur quoi sera refondé le monde : déjà, avec Descartes, c'est uniquement par l'entremise refondatrice de la pensée de l'homme que sera retrouvé, plus en aval, Dieu et toute absoluïté. La rupture d’avec l’ancien ordre , le renversement du point de vue est déjà consommé avec le cogito, et c’est avec raison me semble-t-il qu’on fait traditionnelemnt débuter la « modernité philosophique » avec Descartes.
Pendant un instant j’ai eu une de ces peurs : n’ayant jamais été très fort avec les dates, je me suis tout à coup demandé si Descartes n’était pas né en 1610 !?
17 mars 2015, 08:56   Re : N°2
Cher Alain Eytan, concernant Descartes je suis bien sûr tout à fait en accord et familier avec ce que vous dites.
Mais mon souci premier était de ne pas trop alourdir et complexifier mon propos, et donc de proposer très shématiquement et un peu caricaturalement deux grandes lignes de pensée.
Me vient à l'esprit, sans crier gare, une possible illustration imagée, peut être assez signifiante d'ailleurs, de la différence irrémédiable de nature qui existe entre la connaissance acquise par les Hommes grâce à la pratique de la science et donc de l'expérience et, une connaissance absolue et totalisante de tout sur tout.
Dans le premier cas, malgré la finitude inhérente à sa condition spatio-temporelle, l'Homme a la possibilité d'aller toujours plus loin dans ses découvertes, de ne jamais s'arrêter à bon port, de repousser encore et encore ses propres limites.
On se situe ici, mathématiquement, dans un ensemble, certes infini mais parfaitement dénombrable!! Ensemble non borné par un élément maximal que serait l'ultime expérience, mais néanmoins dénombrable.
On peut dénombrer, c'est à dire compter, ou encore classer et ranger ces découvertes suivant la relation d'ordre total qui est celle de la chronologie. La conscience humaine peut s'exercer car elle est toujours en butte à quelque-chose de concret, d'expérimental, interpellant notre sensibilité (esthétique transcendentale) et par suite notre entendement.
Alors qu'une connaissance absolue et métaphysique se rapporte à un ensemble infini non dénombrable! Comme pour Dieu, je peux définir conceptuellement et mathématiquement tous les nombres de l'univers mais je ne peux pas me les schématiser et me les représenter tous d'un seul coup. Même si je me limite à une parcelle de ce Dieu infini, par ex aux nombres compris entre 0 et 1. Je ne pourrai jamais les penser tous à la fois en même temps ; entre 2 nombres, aussi rapprochés soient-ils, il en existe une infinité non dénombrable d'autres.
C'est toute la différence entre les fonctions discrètes et les fonctions continues.
Bon! Peut-être un peu tiré par les cheveux mais ça peut aider à comprendre.
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