Certes feu Claude Nougaro ne pouvait, de son vivant, concurrencer le charme ni l'élégance naturelle d'une Elisabeth Schwarzkoph ou d'une Fanny Ardent, ou damer le pion à un Fischer-Dieskau, tant sur le plan artistique qu'esthétique.
Néanmoins j'ai dû mal à considérer que ce
boxeur de la chanson française au front de taureau, à la voix puissante, chaude et rocailleuse, martelant, forgant, triturant ou swingant les mots à la façon de sa
race, puisse être perçu comme le comble de la vulgarité.
S'il est bien vrai qu'il n'a pas la voix flutée ou l'accent pointu ou le
sans-accent qu'on eût peut-être aimé qu'il eût, que bien au contraire sa voix rugit tel un torrent dévalant les pentes cévenoles et qu'en outre sa démarche de
cyclope, maladroite et empruntée, un peu chaloupée à la
sarko n'a pas la grâce ni la légèreté de la gazelle, sans parler de son
port de tête manquant cruellement de prestance et de la minimale arrogance nécessaire en ce domaine là, pour autant je ne perçois pas une once de vulgarité dans cet homme, dans sa voix
noire et parfois un peu
laide (comme certains ont pu le reprocher à Maria Callas) qui, à l'image d'une Piaf ou d'un Brel, vous prend aux tripes et honore la chanson française dans ce qu'elle a de plus authentique et finalement de plus beau.