"Mais les mêmes râleurs de files d’attente peuvent, stoïques, poireauter une nuit entière pour le nouveau smartphone d’Apple ou la toute dernière PlayStation de Sony. Pour le hamburger frites le plus coté du moment, ils oublient leur faim et l’heure qui tourne devant Le Camion qui fume ou le Burger King. Et que penser des quarante-cinq minutes à faire le pied de grue pour deux minutes de frisson, au parc Eurodisney ? De la chenille processionnaire au départ des télésièges, en février ? Du camping devant les guichets avant les grandes finales sportives ou les concerts ? Au Grand Palais, à Paris, les six heures de queue pour Monet (hiver 2010), les quatre heures pour Hopper (février 2013) étaient le prix à payer pour ceux qui voulaient en être.
« C’est
le phénomène de la “queue chic”, qui se limite à certains types d’achat, et n’est ni ordinaire ni ennuyeuse. Elle est vécue comme une expérience collective, un événement que l’on gardera en mémoire et que l’on pourra raconter à ses proches. » Parole d’expert. Professeur au très prestigieux Massachusetts Institute of Technology (MIT), Richard Larson, qui revendique son surnom de « Doctor Queue », étudie la psychologie des lines depuis 1977. Le sujet, qu’on se le dise, n’a rien de frivole. Dès les années 1950, des chercheurs sont venus à l’aide des constructeurs de gratte-ciel : leurs habitants ne supportaient pas l’attente en bas des ascenseurs. Des miroirs y furent installés, la contemplation de soi étant une activité qui, jamais, ne lasse.
Depuis, les objets d’étude n’ont pas manqué. Selon le New York Times, les Américains passent trente-sept millions d’heures en file indienne chaque année. L’invention, par un pâtissier français, d’un hybride entre croissant et donut suffit à extirper de leur lit les New-Yorkais par centaines, dès potron-minet. Les Japonais, pourtant habitués à être instantanément servis dans les boutiques, sont capables de plus fou encore pour le dernier iPhone."
Trouvé sur le Net