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La grande éradication (suite)

Envoyé par Michel Le Floch 
08 décembre 2008, 12:40   La grande éradication (suite)
Lecteurs paisibles et bucoliques, après le projet santinesque de suppression des questions ressortissant à la culture générale aux concours de la Fonction publique, voici une modeste proposition, avancée par un linguiste moderne dans un entretien, au titre prometteur, Réformer l'ortografe [sic] pour l'enseigner, figurant dans le dernier supplément boboïsant du Monde, Le Monde 2, qui ne manquera pas de vous passionner.
Le lien :
[www.lemonde.fr]

Un extrait en guise de teasing :

Mais écrire "des animaus" et "filosofie", n'est-ce pas une violence faite à tous ceux qui aiment la langue française ?

L'orthographe ne doit-elle pas demeurer porteuse d'histoire, de culture ? Les réformes des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles ont supprimé des quantités de legs de l'histoire. Ce n'est pas en figeant l'orthographe qu'on maintient la tradition. Au contraire, elle doit continuer d'évoluer pour rester dans le droit fil de son histoire. On est à l'heure du choix. On ne peut pas accepter la fracture orthographique de la société et laisser un nombre croissant de jeunes Français en situation d'infériorité ou d'échec face à l'écriture de la langue nationale. Il faut que tous les jeunes, dans l'avenir, maîtrisent une orthographe simplifiée. Qu'elle ne devienne pas l'apanage d'une classe cultivée. Une orthographe de caste. Car la contrepartie de la réforme, c'est bien le retour à un enseignement rigoureux de l'orthographe. Il faut réformer pour pouvoir enseigner.
Utilisateur anonyme
08 décembre 2008, 16:44   cjksneiu
Réformer l'ortografe [sic] pour l'en saigner.


"Une orthographe de caste."
C'est déjà le cas. On se fait vite repérer (et de moins en moins dans un sens laudatif) quand on ne fait pas de fautes. On commence à passer pour un original. Idem si ça ne chie pas dans le vocabulaire.

"Il faut que tous les jeunes, dans l'avenir, maîtrisent une orthographe simplifiée."
Pourquoi "maîtrisent" ? 7 ortografe simplifié orai donc dé raigles ? Kel ID !

"Qu'elle ne devienne pas l'apanage d'une classe cultivée."
Apanage toi-même, tête de mort !

"On est à l'heure du choix."
Pour ce linguiste, c'est La marche à suivre.
Après la "réforme" voici ce qu'on lira dans le Journal de l'année 2010

Plieux, neuf heures du soir

Ce matin, j'ai interdit l'accès de la bibliotèque et de la Salle des Vents à mes animaus. Ce fut dificile mais l'ipotèse de la présence, rien moins qu'i-nocente, du Grand Daufin, écrivant sa tèse de filosofie, en biciclette qui plus est, ne me laissait pas le choix. Je les ai donc rapelés malgé la douleur cronique que m'inspirait cette décision.
08 décembre 2008, 17:10   Re : La grande éradication (suite)
Pitié! Il y a certainement de nombreux professeurs qui se distrayent un peu , en lisant ce forum, de la correction des copies de leurs élèves! Et ils risquent de s'arracher leurs dernières crolles ! (Cette dernière remarque vous est destinée cher Petit-Détour).
Attendez, Aline, c'est pas moi c'est lui :

Quels changements concrets appelez-vous de vos vœux ?


Les règles d'une orthographe réformée doivent être très simples. Par exemple : supprimer les doubles consonnes inutiles pour la prononciation. Ne pas toucher à "acceptable" ou à "laisser", évidemment, mais enlever un "l" à "collège", un "f" à "difficile" ou un "n" à "innocent". Cette réforme nous rapprocherait de l'Europe. Dans les langues romanes voisines, espagnol, italien, portugais, roumain, ce doublement n'a jamais existé, ou a été supprimé. "Appeler" s'écrit apelar en espagnol. Pourquoi ne pas l'écrire "apeler" ? Cela concerne des montagnes de mots qui occasionnent énormément de fautes. Les études comparatives des copies du XIXe et de la fin du XXe siècle montrent une tendance à faire compliqué quand il faut faire simple, à redoubler les consonnes là où il n'en faut qu'une. Autre règle très simple : supprimer les lettres grecques, en abandonnant tout souci de l'étymologie. Quand la prononciation le permet, il faut supprimer les "y" (ceux qui ne correspondent pas à un double "i"), supprimer les "h" après les "t" ou les "r", remplacer "ph" par "f". On écrirait une "ipotèse" (ipotesi en italien), une "bibliotèque" (biblioteca en espagnol, italien, portugais, roumain), une "biciclette", une "cronique", un "daufin"… Encore une règle simple : que tous les noms et adjectifs prennent un "s" au pluriel (même "des animaus"), à l'exception des mots qui sont déjà terminés en "s", "x" ou "z", comme "mois", "paix" ou "nez". Le pluriel des noms a déjà été régularisé à deux reprises : on écrivait "une difficulté, des difficultez" jusqu'en 1735, "un enfant, des enfans" jusqu'en 1835. Dans ces deux cas, la simplification a consisté à généraliser la règle : pour le pluriel, on prend le singulier et on rajoute un "s". Si l'on poursuit dans la même voie sans toucher à la prononciation, il n'y aura plus que deux règles de pluriel : celle des noms et adjectifs, et celle des verbes. Une fois que l'élève les aura mémorisées, il commettra moins de confusions par ailleurs. L'impact de la réforme ne s'arrête pas aux seuls mots touchés. C'est toute la relation à la langue qui s'en trouve confortée : il n'y a plus ce sentiment d'insécurité face à une orthographe difficile, voire imprévisible.
Utilisateur anonyme
08 décembre 2008, 17:35   Re : La grande éradication (suite)
Près de deux cents réactions à cet article dans le Monde, très majoritairement défavorables aux idées de simplification orthographique proposées. Deux exemples d'un ton très bolacrien :

Citation

Florent
06.12.08 | 00h59
É dan kelke sièkle on ora une langue fonétik avek plein de cygne ki voudra plu gran choz dir

PATRICE S.
06.12.08 | 00h58
kel boneur, kel joi kel plésir pour les ieu ... pluto ke de revisé et lir, no djeun pouron encor plu se consacré a leur consol de je "décérébrantes" !

La révolte des lettrés est en marche....
08 décembre 2008, 17:42   Re : La grande éradication (suite)
La Cancritude ne passera pas!
Utilisateur anonyme
08 décembre 2008, 19:34   Re : La grande éradication (suite)
bande2fachiste
Utilisateur anonyme
08 décembre 2008, 21:00   Re : La grande éradication (suite)
Y sait de quoi y cause l'Arthur !
09 décembre 2008, 20:54   Après le conseil de classe...
Un argument me plonge dans la perplexité: " cette réforme nous rapprocherait de l'Europe. " Encore une raison d'obtenir de bonnes notes ?
Utilisateur anonyme
09 décembre 2008, 21:08   Re : Au delà des frontières....
A propos d'Europe (non, plutôt : à propos de rien), vu ce soir, à la Bibliothèque cantonale universitaire de Lausanne, au Palais de Rumine, exposé dans la sélection de la littérature française : Corée l'absente.
10 décembre 2008, 12:30   Re : La grande éradication (suite)
Brèves d'édition...

Les élèves de Terminale L (littéraire), cette année, ont quelques chapitres des Pensées de Pascal à leur programme de littérature, et le texte prescrit par le ministère est celui de Michel Le Guern, aux éditions Folio. Comme à leur habitude, ces éditions ont publié récemment, en volume séparé, les seuls chapitres de Pascal au programme scolaire, augmentés de suggestions pédagogiques, et de nouvelles notes en bas de page (celles de Michel Le Guern ont dû paraître indigestes, alors qu'elles sont indispensables). Voici trois extraits de ces notes, écrites par M. Jean-Luc Vincent, professeur de lettres :

Note 1 p. 10 : " ... L'anecdote est citée par Montaigne, Essais I, 20, qui se souvient de la Vie de Paul-Emile écrite par l'historien de langue grec Plutarque."

Note 3 p. 11 : " Pascal se rappellerait ici d'une querelle, qui avait duré plus d'un siècle ..."

Note 3 p. 13 : " ... Le consul romain Caton interdisit aux habitants de certaines villes d'Espagne, conquises par Rome, de porter des armes..."

Du reste, Pascal a une mauvaise étoile : dans le volume de commentaires publiés dans la "Foliothèque", Laurent Susini (Maître de conférences à Paris-IV Sorbonne) écrit à la première page : " Au pire, l'ouvrage nous apparaît de loin comme les géniales mémoires d'une âme..."

Je vais continuer ma lecture, mais j'épargnerai au Forum la liste des inepties que je vais trouver au fil des pages. Je ne puis m'empêcher de me sentir humilié dans ce qu'il faut bien appeler mon honneur professionnel, ou bien dans ce qu'il en reste.
Bien cher Henri,


"langue grec" et "interdisit" me semblent relever de la problématique de la faute de frappe.


Pour ce qui est de "se rappeler de", je pense qu'il y a eu, ici même, de nombreux débats. Un point m'a d'ailleurs toujours intrigué : "je me rappelle de vous" étant incorrect, et "je me souviens de vous" n'yant pas le même sens, comment traduire l'idée ?
Utilisateur anonyme
10 décembre 2008, 13:54   Re : La petite friction d'un détail infime
Cherchant un stylo feutre dans un rayon de supermarché, je remarque un nouveau type de feutre qui permet d'effacer et de réécrire. Sur l'emballage (évidemment disproportionné, mais c'est un autre sujet), un exemple est donné des possibilités de cet "outil scripteur" :

Première image : on a écrit le mot "friction"
Deuxième image : on efface les deux lettres "ct"
Troisième image : on écrit correctement le mot frixion (c'est d'ailleurs le nom de ce stylo.)
Bien cher jmarc,
il me semble que les deux exemples choisisit par Henri, que je salue, ne relève pas de la faute de frappe mais bien de la faute de français. Quant aux "mémoires d'une âme", c'est proprement bégeaudesque. J'espère que lors du prochain remaniement gouvernemental qui vient, (plus probable d'ailleurs que l'Insurrection, qui attendra, elle), Bégaudeau sera nommé ministre de l'Eduction nationale. Je pense que la bonne stratégie désormais est de pousser à la radicalisation du désastre afin que le fond soit plus vite touché.
Utilisateur anonyme
10 décembre 2008, 14:37   Re : Absence d'imagination
Oh, le désastre a-t-il bien besoin d'être encore radicalisé ?
C'est une très bonne question en effet.
10 décembre 2008, 15:06   M駑oire d'une quoi ?
"m駑oires d'une 穃e",


(Gros soucis de clavier et d'écran ici. J'en perds mon Bégaudeau)
Utilisateur anonyme
10 décembre 2008, 15:22   la correxion s'impose
"Bégaudeau sera nommé ministre de l'Eduction nationale"

On écrit éduxion, sans détour !
Utilisateur anonyme
10 décembre 2008, 15:25   Re : la correxion s'impose
Cet Orimont. Toujours le mot pour pleurer.
Attends Orimont j'aplique la réform.
Utilisateur anonyme
10 décembre 2008, 15:54   Bouh...
C'est parce que j'ai un stoque de clinesques à éponger, Corto bello.
Utilisateur anonyme
10 décembre 2008, 22:05   Re : Bouh...
Corto bello ? Ah..... y a pas à dire : y sait comment me prendre cet Orimont...
16 décembre 2008, 23:09   Bande d'essinés !
Dans Le Piège diabolique (paru en 1960), d'Edgar P. Jacobs, le professeur Mortimer, voyageant dans le temps à bord du chronoscaphe, tombe sur une écriture phonétique, dans un environnement urbain totalement dévasté, au début du XXIe siècle. Je me souviens ainsi d'un panneau indicateur sur lequel on lit "Pari santr"...
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