Voici l'intégralité du discours de Monsieur Sarkozy sur ces questions :
DISCOURS DE M. LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE
Sur la politique familiale
Palais de l’Élysée – Vendredi 13 février 2009
Madame et Monsieur les ministres, Cher Brice, Chère Nadine,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs les présidents d’associations familiales,
Mesdames et Messieurs les Présidents et directeurs des caisses d’allocations familiales,
Je suis très heureux de vous recevoir ici, au Palais de l’Elysée. Je sais que vous vous investissez au quotidien, au service des familles et plus généralement, au service de la famille.
Je tiens à saluer les heureux parents décorés ce matin de la médaille de la famille, en récompense d’une valeur qui n’est en rien démodée, qui est celle du dévouement.
Je veux vous dire que la famille, même si elle n’a pas toute la place qu’on souhaiterait qu’elle ait notamment dans l’actualité médiatique, il n’en reste pas moins que pour les Français c’est important. Je veux vous dire l’importance que j’accorde aux réseaux associatifs qui font vivre ce qu’on appelle le mouvement familial. Je veux notamment saluer le partenariat remarquable qui lie l’Union nationale des associations familiales et les pouvoirs publics.
Je veux dire toute ma reconnaissance aux acteurs de la branche famille de la sécurité sociale, qui apportent un soutien décisif aux familles.
Cette réunion est pour moi l’occasion de redire mon attachement à la politique de la famille et mon souci de soutenir toutes les familles, car elles sont la base de notre société. Et, particulièrement en période de crise, heureusement qu’il y a cette base.
*
Les familles apportent une contribution essentielle à notre équilibre social. Elles offrent un soutien irremplaçable à nos parents les plus fragiles et elles garantissent la transmission aux plus jeunes des repères de l’autorité – c’est un repère –, de l’affection – c’est un repère –, du respect – c’est un repère.
Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si les régimes totalitaires ont toujours voulu exploiter la jeunesse en séparant les jeunes de leurs familles. Je suis convaincu que l’esprit de famille est indispensable à la bonne marche de notre société.
La plupart des problèmes auxquels nous devons trouver des solutions ont une dimension familiale. Et la famille est au coeur des questions actuelles : évolution des moeurs, pouvoir d’achat, enjeu de l’Education, place des femmes dans notre société, défi de la solidarité. Ne nous voilons pas la face : la crise de la famille est une cause des difficultés pour beaucoup de nos concitoyens et la source de nombre de nos problèmes sociaux.
C’est pour cela que l’Etat ne peut pas, ne doit pas se désintéresser de la politique familiale.
La France, et ce n’est pas un hasard, a une natalité robuste, le meilleur taux de fécondité en Europe, avec plus de 2 enfants par femme. 834.000 enfants sont nés en France l’an passé. C’est un record depuis 30 ans. On ne va tout de même pas changer un système qui nous a permis d’avoir une politique familiale qui a ces résultats.
Notre politique familiale, c’est 80 milliards d’euros chaque année, c’est 5% du produit intérieur brut français. C’est considérable, mais on souhaiterait que l’argent soit, dans tous les domaines, aussi bien utilisé qu’il l’est pour la famille, c’est-à-dire que cet argent produise les résultats que l’on constate avec notre taux de fécondité.
Rappeler mon attachement à nos valeurs, à nos principes, à nos symboles, c’est être fidèle à notre histoire. Mais la fidélité ne signifie pas le conservatisme. Comme vous le savez, je ne suis pas un conservateur. Je crois à la nécessité du mouvement, des réformes, du changement. C’est d’ailleurs pour cela que j’ai été élu.
Après avoir dit tout le bien que je pense de la politique familiale, je considère qu’il faut que nous évoluions. Non pas par idéologie. Mais pour mieux répondre aux besoins des familles, qui doivent faire face aux charges liées à leurs enfants. Il faut prendre en compte l’effritement des solidarités traditionnelles, les mutations de la famille et les nouvelles réalités du monde du travail.
Depuis 2007, nous avons engagé de très nombreux chantiers. Les services aux familles ont évolué favorablement. A la rentrée scolaire, nous avons modulé l’allocation de rentrée scolaire en fonction de l’âge de l’enfant, en redéployant notre effort vers les collégiens et les lycéens. Les frais liés à l’éducation d’un enfant augmentent avec l’âge : il fallait bien nous adapter à cette réalité. Grâce à l’accord conclu entre Xavier DARCOS et la grande distribution, nous avons aussi garanti une certaine stabilité voire une baisse qui a été notée sur les des prix sur des fournitures scolaires essentielles. Honnêtement, toutes les
rentrées scolaires des années passées ne se sont pas déroulées comme celle-ci.
Les prestations familiales et de logement, cette année, sont revalorisées de 3%, c’est sans précédent.
C’est un milliard d’euros de pouvoir d’achat en plus pour les familles. Je n’en tire aucune gloire, mais dans les difficultés qui sont celles du pays, cette revalorisation de 3%, personne ne peut dire que ce n’est pas un effort. L’aide aux familles modestes qui ont recours à une assistante maternelle pour faire garder leurs enfants a été augmentée de 50 euros par mois en 2008. Pour les parents qui ont des horaires atypiques,
flexibles ou de nuit, les aides seront aussi majorées en 2009. Je n’oublie pas mes engagements vis-àvis de la France qui se lève tôt. Dans le cadre du plan Espoirs Banlieues, un développement des structures d’accueil des enfants dans les quartiers prioritaires a été engagé. Le crédit d’impôt famille a été réformé, pour mieux soutenir les entreprises qui proposent des places en crèches à leurs salariés.
C’est une solution d’avenir. On est très en retard en la matière.
La semaine dernière, encore, j’ai évoqué trois pistes de mesures de justice sociale pour répondre à la crise économique : mesures fiscales, mesures de prestations familiales ou bons d’achat de service. Je discuterai avec les partenaires sociaux de ces options et des publics qu’il convient d’aider en priorité, dont, naturellement, les familles lors de la réunion qui nous occupera le 18 février prochain.
Les aides aux familles évoluent donc. Des changements sont aussi en cours dans la gouvernance de notre politique de la famille.
Il ne s’agit pas de changer pour changer. Mais tout le monde convient que la gouvernance de notre politique familiale s’est un peu essoufflée. La tenue, chaque année, de la conférence de la famille était devenue un petit rituel, on se voyait mais il n’en sortait pas des choses énormes. C’est pour cela que j’ai demandé à Nadine MORANO qui s’acquitte avec beaucoup enthousiasme et de compétences de cette mission, d’instituer un Haut conseil de la famille, lieu d’expertise et de débats. Le Premier ministre le réunira très prochainement, et ce Haut conseil sera animé par Bertrand FRAGONARD.
J’invite les partenaires sociaux à s’impliquer davantage sur les sujets familiaux. Je voudrais saluer le choix du MEDEF de revenir dans les conseils d’administration des caisses d’allocations familiales. Les entreprises ont été à l’origine des politiques familiales. Elles en sont les premières contributrices aujourd’hui. Il est souhaitable qu’elles fassent valoir leur point de vue.
Je voudrais à cet égard que l’on mène une réflexion sans tabou sur l’évolution du financement de la politique familiale. 30 milliards de cotisations patronales famille sont prélevés sur les salaires. 30 milliards. Ces cotisations peuvent être pénalisantes pour la croissance et l’emploi. Je souhaite confier à M. Yves BUR, député, une mission de réflexion sur ce sujet, afin qu’il puisse faire des propositions permettant de conforter le financement de notre politique familiale, tout en limitant son impact sur l’économie. Parce que si on ne garde pas d’emplois en France, ce ne sera pas bon non plus pour les
familles.
Des changements sont tout aussi nécessaires dans notre droit de la famille et nos pratiques sociales, car il y a de nouvelles réalités familiales auxquelles il faut bien apporter une réponse. Je pense aux familles qui souhaitent adopter. Pour faciliter l’adoption des enfants à l’étranger, il faut renforcer nos actions de coopération avec les pays d’origine. Je souhaite que l’Agence française de l’adoption puisse s’appuyer sur les associations qui oeuvrent au service des familles adoptantes pour obtenir de meilleurs résultats. Disons les choses comme elles sont : tout cela dort un peu.
Nous devons aussi améliorer le cadre des adoptions des enfants nés en France et devenus pupilles de l’État. La France est beaucoup plus exigeante que d’autres pays avant de considérer qu’un enfant a été abandonné par ses parents et peut être adopté. Jean-Marie COLOMBANI, qui m’a remis des propositions fortes en mars dernier. Le Gouvernement a commencé à les mettre en oeuvre. Un comité interministériel sur l’adoption s'est réuni. D'ici fin mars, je souhaite avoir les dispositions législatives qui mettront en application le rapport excellent de Jean-Marie COLOMBANI.
Les nouvelles réalités, ce sont aussi des familles recomposées. Qui peut nier la réalité des liens affectifs qui peuvent se créer entre un enfant et le conjoint de son parent biologique ? Je souhaite reconnaître ces liens particuliers par la création d’un statut du beau-parent et, plus largement, des tiers qui vivent au domicile d’enfants dont ils ne sont pas les parents. Ce statut permettra de reconnaître des droits et des devoirs aux adultes qui élèvent des enfants qui ne sont pas les leurs avec le même amour que s’ils l’étaient. Je demande au Gouvernement de proposer un projet de loi sur ce thème d’ici fin
mars, après avoir procédé aux consultations qui s’imposent. Nous ne devons pas craindre la réalité.
Plus généralement, je souhaite que le ministère de la Justice puisse accélérer l’adaptation de l’organisation judiciaire à l’évolution de la famille, en créant notamment des pôles enfance-famille dans les tribunaux, en spécialisant le juge aux affaires familiales, en améliorant la coordination entre les magistrats en charge des mineurs.
L’autre mutation profonde de la famille, c’est un certain effacement des solidarités traditionnelles, entre les générations. L’honneur d’une civilisation, c’est de s’occuper des plus fragiles d’entre nous : la petite enfance, les handicapés, les malades, les personnes âgées. Cette responsabilité, immense, et bien sûr celle des familles.
C’est pour cela que j’ai lancé un ambitieux plan Alzheimer pour aider les aidants familiaux, soutenir les malades, donner un espoir aux familles en renforçant la recherche. La proposition de loi créant un congé de solidarité familiale rémunéré va être adoptée rapidement par le Parlement. Mesdames et Messieurs, je souhaite que l'on soutienne ceux qui ont la force et le courage de s'occuper de leur famille. Quand on perd l'un des siens, est-ce que n'est pas important de pouvoir passer quelques semaines ou quelques mois aux côtés de celui qui s'en va pour qu'il ne s'en aille pas dans la solitude.
Cela me semble très important et investir des moyens sur cela, c'est investir pour l'avenir. Parce que la famille n'est pas simplement un lieu où l'on reçoit des prestations, c'est un lieu où l'on fait fasse à des obligations. Ce n'est pas simplement un lieu où l'on a des droits, c'est un lieu où l'on assume des devoirs. Les parents ont le devoir d'éduquer leurs enfants. Les enfants devenus grands ont le devoir de s'occuper de leurs parents devenus vulnérables. C'est comme cela que fonctionne une société et quand on oublie cela, on oublie tout.
Je veux aussi créer un cinquième risque de protection sociale consacré à la prise en charge des personnes âgées dépendantes. Je veux développer les modes de garde des enfants. A travers toutes ces actions, mon objectif est simple, conforter les solidarités familiales, parce que sans solidarité familiale notre pays ne pourra pas supporter le choc du vieillissement.
Car il faut bien faire face aux nouveaux risques auxquels les familles sont confrontées.
Les dangers d’internet et des médias, tout d’abord. La vigilance parentale est certes la meilleure des garanties mais l’État peut vous aider. Je souhaite que les fournisseurs d’accès bloquent les sites pédopornographiques et illégaux recensés sur une liste noire. J'ai le plus grand respect pour la liberté. Mais un site pédopornographique, ce n'est pas de la liberté. Et il n'y a aucune raison que les fournisseurs d'accès permettent l'accès à des sites pédopornographiques. Je suis désolé, il faut prendre ses responsabilités. On peut parfaitement assurer la liberté, qui est tout à fait nécessaire, et en même
temps assurer le devoir de protection des plus vulnérables. Je ne vois pas pourquoi les règles ne seraient pas les mêmes que les règles dans la société parce que ce serait Internet. Internet n'est pas hors de l’Etat de droit. Il ne faut pas laisser accessibles des sites pédopornographiques pour que des désaxés puissent rentrer en contact avec des mineurs. Notre devoir, c’est de les protéger et d’aider les familles dans ce travail de protection. Les familles ont un rôle fondamental à jouer.
Il y a aussi le risque d’échec scolaire. Un enfant qui décroche à l’école, c’est un enfant qui aura plus de difficultés dans sa vie d’adulte. Je n’accepte pas qu’on me dise qu’à 6 ans ou à 7 ans un enfant est en échec scolaire et qu’on n’y peut rien. Parce qu’un enfant en échec scolaire à 6 ou à 7 ans, cela veut dire que la société démissionne et que cet enfant, ce sera un adulte exclu. Donc il faut que l’on s’y attaque. J’ai demandé à Xavier DARCOS de mettre en place un soutien scolaire personnalisé. Des études dirigées ont été créées. Un million d’élèves en bénéficient. Un million d’élèves, Mesdames et Messieurs. Je sais bien que le concept d’étude dirigée, cela ne fait pas très moderne, cela m’est égal. Je
m’étais engagé à résoudre la question des orphelins de 16 heures. On ne peut pas d’un côté avoir le travail féminin qui augmente - et c’est tout à fait naturel sur la base de l’indépendance et de l’autonomie de la femme - et avoir de l’autre côté à 16 heures des enfants qui sont livrés à eux-mêmes.
Donc, on a organisé pour un million d’enfants, cette année, des études dirigées. C’est une politique familiale. Il y a, bien sûr, la responsabilité de la famille. Je n’ai jamais tenu un discours déresponsabilisant à l’égard des familles, cela m’a été reproché parfois. Les parents sont les premiers responsables de l’éducation de leurs enfants. Je suis désolé de rappeler cette idée-là. Elle me tient à coeur. Quand on a des enfants, on en est responsable. C’est pour cela que les familles doivent être impliquées, associés à
l’organisation de la vie scolaire. Lorsqu’elles éprouvent des difficultés passagères, elles doivent être aidées dans leur rôle, par exemple dans le cadre d’écoles des parents. Si les parents sont défaillants, ils doivent être responsabilisés. Responsabilisés comment ? Par exemple à travers la suspension ou la mise sous tutelle des prestations familiales. Le dispositif existe : il suffit de l’utiliser ! Pas pour priver les familles d’une prestation. Mais pour leur faire prendre conscience de leurs responsabilités. Pour que les allocations soient utilisées au seul bénéfice et dans le seul intérêt de l’enfant. Si on n’a pas le
courage de défendre cette idée, alors il n’y a qu’à renoncer. Je ne suis pas un homme qui renonce. Je crois dans ces idées.
Vous le voyez : les chantiers ne manquent pas. Mais la politique familiale doit offrir aux parents la possibilité de mieux concilier la vie professionnelle et la vie familiale. C’est un objectif majeur de mon quinquennat.
Nous avons incontestablement augmenté l’offre de garde. Nous avons aussi développé les congés parentaux Ces congés ont une vertu immense : permettre aux parents qui le souhaitent de ne pas travailler pour s’occuper de leurs enfants. Mais ces congés parentaux sont parfois aussi à l’origine d’un immense gâchis. Gâchis pour les femmes
concernées. Parce qu’un congé parental de longue durée, c’est une rupture dans un parcours professionnel, qui peut se traduire par une diminution des chances de progresser dans la carrière, d’obtenir un meilleur salaire ou de retrouver un emploi. Parfois pour les familles, c’est un problème, parce qu’un congé parental c’est un salaire en moins et donc c’est le pouvoir d’achat qui diminue. Gâchis pour la société dans son ensemble, parce que sont maintenues en dehors du marché du travail près de 800.000 femmes chaque année. Le taux d’activité des femmes qui ont deux enfants est 40%
plus faible lorsque l’un de ces deux enfants a moins de trois ans. Je sais bien que l’on parle du « libre choix », mais il y a beaucoup d’hypocrisie derrière cette expression, parce qu’il y a beaucoup de femmes qui quand elles entendent dire : « libre choix » savent qu’il n’y a aucun libre choix. Tout se passe comme si les problèmes de prise en charge des enfants constituaient une sorte d’impôt sur la capacité de travail des parents et notamment des mères. La maternité est une formidable aventure humaine, ce n’est pas une sanction. L’arrêt de travail ne doit plus être une solution par défaut pour les familles. Il ne peut plus être le mode de garde des jeunes enfants auquel on doit se résigner
parce que l’on n’a pas le choix. Moi, je souhaite que l’on ait une réflexion sur l’évolution du congé parental. Ce n’est pas un sujet tabou, il faut que l’on en parle.
L’intérêt des femmes, parfois sans qualification, celui de leurs enfants, comme celui de notre société, c’est de mettre en place les conditions de leur retour à l’emploi. Je souhaite que l’on travaille à la mise en place d’un congé plus court. Que Pôle Emploi accompagne vraiment les jeunes mères dans leur démarche de retour à l’emploi, plutôt que de les laisser se débrouiller. C’est d’ailleurs l’esprit de la réforme de l’allocation de parent isolé avec la création du RSA. Je veux que l’on privilégie l’aménagement des horaires ou le temps partiel, plutôt que l’interruption totale d’activité. Bien sûr, qu’une femme souhaite s’occuper à plein temps de l’éducation de ses enfants, c’est formidable. Elle en a le droit. Il faut même l’encourager, la remercier. Mais cela doit être un choix. Ma crainte, c’est que
cette femme, après avoir fait cela, n’ait plus la chance de retrouver un emploi. Parce qu’on lui dit après : mais vous êtes trop vieille, Madame, excusez-nous et puis vous êtes restée trop longtemps sans une activité professionnelle. Et voilà comment on sanctionne des femmes qui ont fait un choix qui est aussi bénéfique pour la société. Donc, il faut développer le temps partiel, l’aménagement des horaires plutôt que l‘interruption totale d’activité. C’est important pour l’autonomie de la femme, aussi, afin qu’elle garde un pied dans la société, une possibilité de protection sociale, un revenu, une activité. Je
crois qu’il faut que l’on y travaille et que les partenaires sociaux réfléchissent à un droit spécifique à la formation pour les parents qui veulent reprendre une activité après s’être consacrés à l’éducation des enfants. Je ne veux plus entendre : je ne travaille pas, je ne fais rien, j’élève mes trois enfants. Cette activité est un travail, au sens où ce sont des soucis, de la fatigue, un sacrifice par apport à ce qu’aurait pu être une carrière professionnelle. Disons les choses comme elles sont : je pense que ces femmes
peuvent avoir un droit à la formation spécifique, sans qu’on leur dise : quelle est votre expérience professionnelle ? Je veux que l’on garantisse l’accès à un mode de garde pour les parents qui retournent à l’emploi. Le Haut conseil de la famille devra placer au coeur de ses premiers travaux ce dossier dont j’admets bien volontiers qu’il est complexe. Il est complexe mais si on n’en parle pas, on ne risque pas de le résoudre.
Pour donner un vrai choix aux familles, il faut développer les modes de garde des jeunes enfants. Mon but est de rendre effectivement possible la conciliation de la vie familiale et de la vie professionnelle et pour atteindre cet objectif, je souhaite que l’on agisse dans deux directions. Je souhaite que l’on puisse proposer 200.000 places d’accueil supplémentaires d’ici 2012, à la fin de mon quinquennat.
Pour cela, il faut mobiliser toutes les alternatives possibles et la diversification de l’offre, chère Nadine, est la seule manière de répondre aux besoins des familles. Il n’y a pas un seul mode de garde d’enfant qui résoudra tous les problèmes. Il faut diversifier la palette.
Mme TABAROT, députée, a fait des propositions innovantes : que Brice HORTEFEUX et Nadine MORANO s’en saisissent !
Pour dynamiser l’offre, je souhaite également que les procédures d’autorisation des établissements d’accueil des enfants deviennent plus rapides et plus efficaces. Des appels à projets doivent être lancés pour faire émerger une nouvelle offre de qualité au meilleur coût possible. L’élargissement des horaires d’ouverture est le minimum que l’on doit aux parents qui travaillent. L’adaptation des normes d’encadrement à l’âge de l’enfant est tout aussi nécessaire. Les pays scandinaves nous ont montré le chemin. Ainsi, dès cette année, les assistantes maternelles qui le souhaitent pourront garder non plus 3 mais 4 enfants. Je vous supplie de considérer qu’il faut que l’on sorte du sacro saint statut, de ces sacro saintes règles dont je comprends bien l’esprit mais, franchement, dans un pays où l’on n’a pas assez d’assistantes maternelles et de places de garde, n’était-il pas nécessaire de permettre à une assistante maternelle de garder 4 enfants ? J’attache plus
d’importance à la qualité de l’assistante maternelle, à sa formation, à son équilibre, plutôt qu’au fait de savoir si elle peut garder 4 ou 3 enfants ? S’il s’agit d’une assistante maternelle qui n’a aucune compétence et aucune formation, même un enfant c’est encore trop. J’admets que ce que je dis c’est beaucoup de bon sens, ce n’est pas très compliqué mais, je vous assure, ce n’est pas parce qu’on le comprend que c’est faux. On se focalise sur des points extraordinaires : le nombre de mètres carrés de la pièce, le nombre de fenêtres, le nombre d’enfants, l’aération, le sol. Et le dévouement ? Et la bonne
volonté ? Et la gentillesse, le charisme, l’expérience ? Tout ceci n’est pas valorisé. On ne peut pas le mettre simplement dans un statut. Il faut aussi de l’évaluation, des bonnes pratiques. Faire un peu preuve d’imagination et de souplesse.
Pour soutenir cet effort, les crédits d’action sociale de la branche famille seront majorés de 6% en 2009. Ce sont 230 millions d’euros de plus. D’ici 2012, pour garantir dans la durée une évolution au moins aussi substantielle des crédits, il faudra faire des arbitrages, assumer des choix et donner la priorité à la garde d’enfants.
Mon deuxième objectif enfin, c’est d’inviter les partenaires sociaux à être plus actifs en matière familiale. Moins de 2% des employeurs de plus de 20 salariés ont recours aux crèches d’entreprises. Moins de 2% ! Mais je veux saluer l’initiative de la « charte de la parentalité en entreprise », qui vise à proposer aux salariés-parents un environnement mieux adapté aux responsabilités familiales. 70 entreprises et associations ont déjà montré la voie à toutes les autres. Je demande au Gouvernement de faire sauter
les verrous juridiques ou fiscaux qui peuvent poser des problèmes à certains employeurs qui voudraient s’investir dans ce domaine, à l’image de la récente réforme du crédit d’impôt famille. Parce que si l’on continue à faire des crèches simplement au lieu où l’on habite et pas de crèche sur le lieu où l’on travaille, on va continuer à écarteler les parents entre le lieu de travail et le lieu de garde des enfants ; ce qui va allonger la durée de présence en établissement collectif des enfants et ce qui empêchera les parents, à l’heure du déjeuner ou à la coupure des déjeuners, d’aller voir leurs enfants et
de maintenir un lien affectif. Il est très important de développer ce mode de garde.
J’attends beaucoup des discussions entre partenaires sociaux sur au moins trois points : l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ; la conciliation des temps de travail et des temps familiaux, en particulier en favorisant le temps partiel familial et l’aménagement des horaires ; l’articulation du contrat de travail avec les besoins familiaux, à travers une simplification des nombreux congés familiaux qui existent. Le bon niveau de discussion sur ces sujets est vraisemblablement l’entreprise, au plus près du terrain.
Mesdames et Messieurs, ce sont des chantiers ambitieux. Comme vous le savez, je m’y engagerai puissamment. Vous avez en Nadine MORANO et en Brice HORTEFEUX deux interlocuteurs en qui j’ai totale confiance. Je sais parfaitement bien que je suis attendu sur les faits et non pas sur les discours. Mais il est parfois des discours qui, tant ils engagent son auteur, préparent des faits rapides.
Bienvenue Mesdames et Messieurs, je suis très heureux et très fier de vous recevoir à l’Elysée.