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Guadeloupe : ces vérités qui dérangent

Envoyé par Ostinato 
Excellente analyse par sa reconnaissace du réel par Véronique Grousset dans le Figaro. Je copie l'article en entier ici, tant il me semble rendre compte des faits et des problèmes.

Après un mois de conflit, marqué par la violence et les surenchères des manifestants, la tonalité désormais raciale et politique du discours de leur leader, Elie Domota, commence à inquiéter les Guadeloupéens.

Un premier mort. Par balle. Dans la nuit de mardi à mercredi, un syndicaliste d'une cinquantaine d'années, Jacques Bino, a été mortellement touché au volant de sa voiture alors qu'il s'approchait d'un barrage tenu par des jeunes dans la cité Henri-IV, une zone sensible de Pointe-à-Pitre. Et trois policiers escortant les pompiers venus le secourir ont également été blessés, par des plombs provenant «vraisemblablement d'une arme de chasse». Après quatre semaines de conflit, la Guadeloupe basculait dans le drame.

Lundi matin, tout était encore à peu près calme. A part le fait, naturellement, qu'on ne pouvait plus du tout circuler dans l'île. Peu avant l'aube, les troupes du LKP (Liyannaj kont pwofitasyon - Collectif contre l'exploitation) avaient barré la plupart des routes. Pas seulement neuf d'entre elles, comme il a été indiqué, mais absolument tous les accès (rocades ou venelles) qu'il leur plaisait d'interdire : rien que dans une petite ville comme Le Gosier, nous avons compté six barrages, dont deux en feu.

Presque tous étaient environnés de débris de pare-brise et d'effets personnels (sacoches, photos, livres, chaussures...) éparpillés sur le bitume, qui témoignaient de la violence avec laquelle certains conducteurs avaient dû être « convaincus » du bien-fondé des thèses du LKP.

Cette organisation très bien réglée, de la part d'un collectif regroupant quelque 43 organisations syndicales ou culturelles dont la création ne date pourtant que d'un mois, apparaît sans faille, car copiée sur celle des comités de surveillance révolutionnaires cubains : au moins un groupe par commune, sinon par quartier, composé de militants connaissant parfaitement leur voisinage, ce qui leur permet de bloquer n'importe quelle route ou hôtel (avec des pneus, des parpaings arrachés aux trottoirs, un cocotier ou un véhicule renversé) sur un simple coup de téléphone, même en ne disposant que d'une vingtaine de volontaires, gamins de 12 ans compris.

Echauffés pendant des heures à écouter leurs meneurs

Les gendarmes ne pouvaient évidemment pas laisser faire, et les manifestants n'attendaient que cela. Certains l'ont joué « pacifiste », en levant bien haut les mains devant les caméras, pendant que, à l'arrière-plan, les autres continuaient à balancer sur les forces de l'ordre tout ce qui leur tombait sous la main : des pierres, le plus souvent, et jamais choisies parmi les plus légères. Une cinquantaine d'entre eux ont été interpellés, puis relâchés avant la nuit. Ce qui leur a permis de regagner très vite le palais de la Mutualité de Pointe-à-Pitre, où les militants et les sympathisants du LKP se retrouvent tous les soirs, depuis un mois, pour écouter leur leader Elie Domota (voir encadré) les haranguer, ou pour danser, chanter, dîner d'un colombo de poisson cuisiné sur place, et recevoir leurs consignes pour le lendemain.

Après avoir gagné Pointe-à-Pitre en Zodiac depuis Le Gosier, avec une poignée de touristes qui n'avaient pas d'autre solution pour tenter d'attraper leur avion, nous en avons vu arriver quelques-uns, tous accueillis en héros, et très pressés d'y retourner. Trois heures après la tombée de la nuit, vers 20 h 30, les choses sérieuses commençaient : brutalement plongés dans l'obscurité totale par une panne de courant généralisée, les coteaux du Gosier résonnaient de galopades et de cris, rompus de temps à autre par une détonation sourde, tandis qu'un hélicoptère ne cessait de tourner en tentant d'éclairer les recoins du faisceau de son projecteur. Au cœur de Pointe-à-Pitre, c'était pire : échauffés par des heures passées à écouter leurs meneurs répéter leur indignation face à la «violence arbitraire» dont ils se prétendaient victimes, les casseurs se déchaînaient. Pillages, incendies, affrontements directs avec les forces de l'ordre, gaz lacrymogènes, grenades assourdissantes. Et nouveaux barrages dans de nombreuses communes de l'île - sachant que la plupart de ceux érigés la veille n'avaient jamais été démantelés.

Le matin du mardi, on pouvait parler sans exagérer de climat insurrectionnel. L'aéroport, qui avait résisté jusque-là aux nombreuses tentatives de blocage des grévistes, était fermé.

Les touristes, regroupés dans les hôtels encore ouverts (la plupart du temps sans télévision, sans service de chambre, sans eau chaude et sans aucune possibilité d'en sortir), étaient exaspérés, parfois même paniqués. Elie Domota avait enfin obtenu ce qu'il désirait.

Dès la nuit du vendredi 13 février, lorsqu'il nous reçoit, il ne cache déjà plus, en effet, que les 200 euros d'augmentation pour tous les salaires inférieurs à 1,4 fois le smic - ce fameux « point » qui fait officiellement blocage et dont «les médias nationaux font tant de cas» - ne sont pas sa priorité. Tout en estimant qu'aucune de ses 131 revendications n'a été satisfaite, il ne nous parle alors que de sa colère contre ce qui se passe en Guadeloupe, du point de vue racial, économique et culturel. «Ce que nous voulons, c'est que la France cesse de nous mépriser et nous fasse enfin confiance en rétablissant les droits légitimes des Noirs en tant que peuple majoritaire sur cette île», nous dit-il en insistant sur l'urgence d'un «rétablissement aussi rapide que possible d'un meilleur équilibre sociologique, professionnel et économique entre les différentes composantes, dont les Blancs, bien entendu- personne ne dit qu'ils ne sont pas Guadeloupéens - de la société guadeloupéenne». Les mots « indépendance » (honni par l'immense majorité des électeurs d'outre-mer) ou « révolution » (Haïti est très proche, et ne fait pas vraiment rêver) ne sont évidemment pas prononcés. Mais l'expression «libre droit des peuples à disposer d'eux-mêmes», si.

Un discours foncièrement politique, qui présente l'incontestable avantage de permettre à Elie Domota de sortir la tête haute de ce conflit, en s'assurant le soutien d'une partie non négligeable des Antillais, effectivement convaincus d'être «exploités et méprisés», non seulement par les Blancs en général, mais aussi par l'Etat français. Il est en effet sidérant de constater que beaucoup d'entre eux croient sincèrement qu'ils rapportent davantage à la métropole («en impôts, en taxes, et en consommation des surplus de l'Union européenne», ainsi que le proclame Elie Domota) qu'ils ne lui coûtent. Et qu'ils sont en revanche très peu nombreux à réaliser que les prix baisseraient d'eux-mêmes si les fonctionnaires (presque tous les militants du LKP le sont ; Elie Domota étant lui-même directeur-adjoint de l'ANPE) n'étaient pas payés 40 % de plus en Guadeloupe qu'en métropole. Ou si les élus des Antilles cessaient de défendre la défiscalisation, conçue au départ pour augmenter le nombre de logements, mais qui n'a fait que renchérir la valeur des terrains et le coût des travaux.

Le paiement des jours de grève est bien sûr exigé

Mais, en favorisant les émeutes, son unique carte vu la fin de non-recevoir qu'il n'a cessé d'opposer au secrétaire d'Etat Yves Jégo comme aux élus de l'île, Elie Domota fait un pari des plus risqués. Car les Guadeloupéens ont commencé de le lâcher et de s'en méfier depuis au moins trois semaines, dès qu'il est devenu évident que le combat du LKP n'était pas dirigé uniquement «contre la vie chère». La fermeture des stations-service et des commerces, l'impossibilité d'envoyer leurs enfants à l'école, les barrages et les menaces auxquels ils se heurtent sans arrêt lorsqu'ils tentent de se rendre à pied à leur travail, la peur qu'ils ont de perdre leur emploi (une angoisse qui n'épargne que les militants fonctionnaires du LKP, et d'autant plus que leurs dirigeants syndicaux ont d'ores et déjà prévenu que, «bien entendu», ils exigeraient le paiement des jours de grève), les exactions contre les rares commerçants qui refusent de s'incliner face aux intimidations dont ils sont quotidiennement victimes, l'exode des touristes (30 % d'occupation dans les hôtels, contre 70 % en cette période de l'année en temps normal), et les dépôts de bilan en chaîne (185 pour les quatre premières semaines du conflit), les avaient déjà considérablement détourné d'un mouvement qui n'a, de toute façon, jamais été majoritaire. La tonalité désormais raciale et politique du discours de Domota n'a fait que renforcer leurs craintes. Mais maintenant, avec les pillages et les affrontements, la coupe est pleine. Dès lundi, tous les Guadeloupéens que nous avons croisés ne disaient déjà plus «les grévistes» en parlant des militants du LKP, mais «les voyous». Un glissement sémantique qui équivaut à une condamnation dans une société qui déteste la violence, et qui n'a déjà que trop subi - toujours à son détriment - celle des gros bras de l'UGTG (Union générale des travailleurs de Guadeloupe).

Des cases en tôle avec «un veau au piquet»

Jusqu'à présent, toutes les grèves menées par ce syndicat, le plus important de l'île, dirigé depuis avril dernier par Elie Domota, n'ont en effet profité qu'à ceux qui ont déjà le plus : les dockers, payés 6 000 euros net par mois, les fonctionnaires, les employés des banques, les transporteurs. Et ce, tout en renforçant à chaque fois les monopoles, privilèges, rentes de situation et autres abus du droit et de la morale qui foisonnent de toute façon sur l'île. Car, quoi qu'en dise Elie Domota, les plus pauvres n'y ont jamais rien gagné. Les plus pauvres, c'est-à-dire 40 % de la population : tous ceux qui n'ont rien à faire de 200 euros de plus, puisqu'ils ne touchent pas de salaire, ni du gel des loyers puisqu'ils vivent dans des cases en tôle avec «un veau au piquet» (revendu cinq fois son prix d'achat après un an passé à brouter l'herbe saturée d'essence du bord des routes), en donnant ce qu'on appelle ici des «kou de main» (travail au noir). Et tous ceux qui souffrent aussi le plus de cette grève, avec l'explosion des prix que pratiquent les «lolos», ces petites épiceries locales que le LKP autorise à ouvrir et à s'approvisionner, mais qui abusent souvent de la situation. Comme quoi la «pwofitasyon» n'est pas toujours du côté des mêmes... Et cela aussi, les Guadeloupéens sont bien placés pour le savoir.


[www.lefigaro.fr]
Utilisateur anonyme
22 février 2009, 14:13   Re : Guadeloupe : ces vérités qui dérangent
Un discours foncièrement politique, qui présente l'incontestable avantage de permettre à Elie Domota de sortir la tête haute de ce conflit, en s'assurant le soutien d'une partie non négligeable des Antillais, effectivement convaincus d'être «exploités et méprisés», non seulement par les Blancs en général, mais aussi par l'Etat français.

L'Etat français depuis 2002 est, par le vote de nos concitoyens, dirigé par la droite. Que je sache, Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy, élus par les français en 2002 et 2007, ne sont pas de gauche. Une gauche rendue responsable de tous les malheurs de la République alors qu'elle n'est plus au pouvoir depuis 2002.
C'est donc à messieurs Chirac et Sarkozy qu'il convient de demander des comptes sur la situation des DOM-TOM et la Guadeloupe.

Concernant la fin de l'article du "Figaro", je serais assez d'accord. En particulier sur ce passage:
Jusqu'à présent, toutes les grèves menées par ce syndicat, le plus important de l'île, dirigé depuis avril dernier par Elie Domota, n'ont en effet profité qu'à ceux qui ont déjà le plus : les dockers, payés 6 000 euros net par mois, les fonctionnaires, les employés des banques, les transporteurs. Et ce, tout en renforçant à chaque fois les monopoles, privilèges, rentes de situation et autres abus du droit et de la morale qui foisonnent de toute façon sur l'île. Car, quoi qu'en dise Elie Domota, les plus pauvres n'y ont jamais rien gagné. Les plus pauvres, c'est-à-dire 40 % de la population : tous ceux qui n'ont rien à faire de 200 euros de plus, puisqu'ils ne touchent pas de salaire, ni du gel des loyers puisqu'ils vivent dans des cases en tôle avec «un veau au piquet» (revendu cinq fois son prix d'achat après un an passé à brouter l'herbe saturée d'essence du bord des routes), en donnant ce qu'on appelle ici des «kou de main» (travail au noir). Et tous ceux qui souffrent aussi le plus de cette grève, avec l'explosion des prix que pratiquent les «lolos», ces petites épiceries locales que le LKP autorise à ouvrir et à s'approvisionner, mais qui abusent souvent de la situation. Comme quoi la «pwofitasyon» n'est pas toujours du côté des mêmes... Et cela aussi, les Guadeloupéens sont bien placés pour le savoir.

Par contre, "Le Figaro" en comparant la révolution cubaine et les évènements actuels aux Antilles, en particulier dans ce propos, frise le ridicule:
Cette organisation très bien réglée, de la part d'un collectif regroupant quelque 43 organisations syndicales ou culturelles dont la création ne date pourtant que d'un mois, apparaît sans faille, car copiée sur celle des comités de surveillance révolutionnaires cubains :

Comparer la révolution cubaine avec les évènements des Antilles est aussi absurde que de parler d'"Apatheid". J'ai déjà relevé cette énormité sur le présent forum.
La comparaison n'est pas faite avec la révolution cubaine dans son ensemble, mais avec son organisation ou celle d'ailleurs de toute révolution "marxiste" en la création de "soviets".

Cet article ne se positionne ni par rapport à la gauche ni par rapport à la droite en métropole mais à mon avis analyse le mouvement en tant que tel.
Utilisateur anonyme
22 février 2009, 15:13   Re : Guadeloupe : ces vérités qui dérangent
Merci pour cet article, chère Ostinato.

Voici un petit aperçu de la musique (très "formatrice") dont raffolent les jeunes émeutiers, et les autres... :


Utilisateur anonyme
22 février 2009, 15:42   Re : Guadeloupe : ces vérités qui dérangent
Propos d'une "révolutionnaire" guadeloupéenne...
......................................
Christine, Guadeloupéenne de Paris, appelle à une « révolution nationale »
Jeudi 19/02/2009 | Posté par Nadia Méhouri Bondy.blog.

Cette habitante de métropole soutient sans réserve le combat du LKP, terni par les « jeunes désœuvrés » de l’île, « touchés par le fléau de la drogue ».

« Ici, c’est la révolution et nous ne lâcherons pas ! » C’est ce que disent les Guadeloupéens restés au pays à leur famille installée en métropole. Christine et son mari sont arrivés à Paris il y a plus de 15 ans. Tous deux sont guadeloupéens et fonctionnaires d’Etat. Elle me raconte l’esprit de solidarité qui les lie à l’île des Antilles, distante de 7000 kilomètres. Cette « solidarité » est le ciment d’un mouvement de grève générale entamée il y a plus d’un mois.

Christine et son époux suivent l’évolution de la situation au jour le jour, branchés sur RFO Guadeloupe via Internet ou au téléphone. Cette crise qui jusque-là s’était déroulée dans un calme tout relatif mais qui a tourné à l’émeute avec des jeunes de plus en plus incontrôlables. Un syndicaliste qui se trouvait face un barrage est mort d’une balle en plein thorax. « Ce sont sûrement des jeunes désœuvrés qui ont fait ça, avance Christine. Ils ont les mêmes réflexes que certains jeunes de banlieue. Il faut savoir qu’aux Antilles, nous subissons le fléau de drogues telles que le crack. »

Le principal leader du mouvement, Elie Domota, du LKP, tente de raisonner les esprits échauffés. Il a lancé un appel au calme aux Antillais. Les leaders syndicaux espèrent toujours que leurs revendications finiront par être prises en compte par l’Elysée. « Les guadeloupéens sont tous pour la grève et ils la soutiendront quoi qu’il arrive, affirme Christine. Et si ça maintenant ça dégénère, c’est à cause du gouvernement qui a envoyé des unités de gendarmes aux Antilles. Ils ont commencé à taper sur les membres du LKP. Mais la mort du syndicaliste ne les Antillais révoltés, ils en ont assez de la misère. Ils savent que s’ils arrêtaient aujourd’hui leur grève, ils n’obtiendraient rien. Les Antillais sont têtus, ils vont tenir, j’ai appelé ma sœur fonctionnaire municipale qui est retourné travailler seulement trois jours pour faire les payes de ses collègues. Tout ce qu’ils font, c’est dans l’intérêt collectif. »

» Il y a encore beaucoup de femmes et d’hommes de 40 ou 50 ans qui vivent chez leurs parents, tellement la vie est chère, poursuit Christine. Les fonctionnaires de l’île ont 40% de salaire en plus pour cause de vie chère et pourtant, ils n’arrivent pas à s’en sortir. Les jeunes sont désœuvrés, et consomment beaucoup de drogues, on les voit à tous les coins de rue. La vie est trop chère, ce sont les békés qui fixent les prix. Moi-même, quand j’y vais en vacances en Guadeloupe, j’achète des packs de lait en poudre chez l’Hindou et mes enfants ne mangent pas de yaourts pendant deux mois. Imaginez la vie de ceux qui vivent là-bas toute l’année. »

Une délégation sera reçue par le président de la République cette semaine, mais selon Christine, les Antillais ne voient pas d’intérêt à cette rencontre puisque aucun membre du LKP ne fera partie de la délégation. Toute la confiance des Antillais semble basée sur ce collectif et personne d’autre à leurs yeux n’est plus apte à les représenter pour porter leurs revendications.

Christine, et à l’entendre, elle n’est pas la seule parmi les Antillais, regrette que la métropole n’ait pas un leader tel que Elie Domota pour lancer un mouvement national qui prolongerait celui de la Guadeloupe et ferait plier l’Etat : « Si, en France, les Guadeloupéens et les Martiniquais s’étaient réveillés, ce serait déjà fini. Il ne faut pas oublier que ce sont les révolutions qui ont toujours permis d’obtenir des droits. »

Nadia Méhouri
Comme dans un forum du Figaro je justifiai vis à vis de contradicteurs l'attitude de Nicolas Sarkozy, s'attachant autant que faire cse peut, à dissocier le mouvement en France de celui de la Guadeloupe, j'ai eu la surprise d'être censurée. C'est dire si le sujet est chaud, car il n'y avait aucune polémique dans mes propos.
Utilisateur anonyme
22 février 2009, 15:55   Re : Guadeloupe : ces vérités qui dérangent
La solidarité ethnique joue pleinement son rôle dans ce conflit (tel un pont entre "ici" et "là-bas") , - pourquoi donc continuer de le nier ? pour préserver la paix civile ?
Ce qu'il y a de bien dans le rap en général, c'est la subtilité du texte et la richesse de la mélodie et du rythme ...Tout est en parfaite harmonie.

Quant à la solidarité ethnique, il ne semble pas à mon avis que ce soit majoritaire, mais certains s'emploient à orienter dans ce sens le mouvement. Domota, Besancenot et tous les groupes oeuvrant à la discrimination positive.
Utilisateur anonyme
22 février 2009, 16:38   Re : Guadeloupe : ces vérités qui dérangent
Quant à la solidarité ethnique, il ne semble pas à mon avis que ce soit majoritaire

Oui, cette solidarité n'est peut-être pas majoritaire, elle est néanmoins bien réelle. Ce qui nous aveugle, nous, les Blancs, c'est que nous avons perdu toute forme de solidarité (autre qu'instituée, c.a.d. sociale) et que nous croyons, ou plutôt espérons (un peu bêtement) que les autres fonctionnent exactement comme nous.
Utilisateur anonyme
22 février 2009, 17:02   Re : Guadeloupe : ces vérités qui dérangent
Re: Guadeloupe : ces vérités qui dérangent
Envoyé par: ostinato ()
Date: 22 février 2009, 16:27

Ce qu'il y a de bien dans le rap en général, c'est la subtilité du texte et la richesse de la mélodie et du rythme ...Tout est en parfaite harmonie.


Je me suis souvent fait cette réflexion: L'esclavage et les champs de coton aux Etats-Unis nous ont donné le jazz dont les sources se trouvent dans le blues, le ragtime, le gospel (pour faire court), et le jazz est sublime.

Le rap, expression "musicale" de la rebellion des jeunes des années 80 contre la police, est une horreur.
Parce-qu'il n'y a aucune oppression réelle à la base, mais des revendications sans limites.
Les grands musiciens de Jazz ont appris le solfège et l'harmonie; les rappeurs crachent dessus à dessein.
22 février 2009, 18:12   chanson de Renaud Séchan
(C'était avant le rap et les progrès de la discrimination positive, c'était bien vu)
Titre : "Deuxième génération"

J'm'appelle Slimane et j'ai quinze ans
J' vis chez mes vieux à la Courneuve
J'ai mon C.A.P. de délinquant
J' suis pas un nul j'ai fais mes preuves
Dans la bande c'est moi qu'est l' plus grand
Sur l' bras j'ai tatoué une couleuvre
J' suis pas encore allé en taule
Parait qu' c'est à cause de mon âge
Parait d'ailleurs qu' c'est pas Byzance
Que c'est un peu comme dans une cage
Parce qu'ici tu crois qu' c'est drôle
Tu crois qu' la rue c'est des vacances


J'ai rien à gagner rien à perdre
Même pas la vie
J'aime que la mort dans cette vie d' merde
J'aime c' qu'est cassé c'est détruit
J'aime surtout tout c' qu'y vous fait peur
La douleur et la nuit

J'ai mis une annonce dans Libé
Pour m' trouver une gonzesse sympa
Qui bosserait pour m' payer ma bouffe
Vu qu' moi l' boulot pour que j'y touche
Y m' faudrait deux fois plus de doigts
Comme quoi tu vois c'est pas gagné
C' que voudrai c'est être au chomdu
Palper du blé sans rien glander
Comme ça j' serai à la sécu
J' pourrai gratos me faire remplacer
Toutes les ratiches que j'ai perdu
Dans des bastons qu'ont mal tournées

J'ai même pas d' thune pour m' payer l'herbe
Alors j' me défonce avec c' que j' peux
Le triclo, la colle à rustine
C'est vrai qu' des fois, ça fout la gerbe
Mais pour le prix, c'est c' qu'on fait d' mieux
Et puis ça nettoie les narines
Le soir on rode sur des parkings
On cherche une BM pas trop ruinée
On l'emprunte pour une heure ou deux
On largue la caisse à la Porte Dauphine
On va aux pûtes juste pour mater
Pour s'en souvenir l' soir dans notre pieu

Y'a un autre truc qui m' branche aussi
C'est la musique avec des potes
On a fait un groupe de hard rock
On répète le soir dans une cave
Sur des amplis un peu pourris
Sur du matos un peu chou-rave
On a même trouvé un vieux débile
Qui voulait nous faire faire un disque
Ça a foiré parce que c' minable
Voulait pas qu'on chante en kabyle
On n'y a mis la tête contre une brique
Que même la brique elle a eu mal

Des fois j' me dis qu'à trois milles bornes
De ma cité y'a un pays
Que j' connaîtrai sûrement jamais
Que p' t-être c'est mieux qu' p't-être c'est tant pis
Qu' là-bas aussi j' serai étranger
Qu' là-bas non plus je serai personne
Alors pour m' sentir appartenir
A un peuple à une patrie
J' porte autour d' mon cou, sur mon cuir
Le keffieh noir et blanc et gris
J' me suis inventé des frangins
Des amis qui crèvent aussi
Utilisateur anonyme
22 février 2009, 18:20   Re : Guadeloupe : ces vérités qui dérangent
J'ai mis une annonce dans Libé
Pour m' trouver une gonzesse sympa
Qui bosserait pour m' payer ma bouffe


Mais elle s'appelle France, cette gonzesse... ?
Utilisateur anonyme
22 février 2009, 19:25   Re : Guadeloupe : ces vérités qui dérangent
Concernant Renaud Séchan, je me sens moins seul. Dès 1978, époque où j'étudiais en faculté de droit et à laquelle il sortait son second ou troisième album, je passais pour un huluberlu en disant qu'il n'avait ni voix ni talent.
Il y a eu un consensus général pour le faire passer pour un "poète" intouchable.
Je trouve quant à moi qu'il avait du talent et sa description de la deuxième génération n'est pas fausse. Mais maintenant il est devenu parfaitement bobo.
22 février 2009, 20:15   The self-serving civil servant
Toute une philosophie de "l'intérêt collectif" et de l'action politique récapitulée en trois lignes. Sans commentaires:


j’ai appelé ma sœur fonctionnaire municipale qui est retourné travailler seulement trois jours pour faire les payes de ses collègues. Tout ce qu’ils font, c’est dans l’intérêt collectif. »
Utilisateur anonyme
22 février 2009, 20:59   Re : Guadeloupe : ces vérités qui dérangent
Merci Francis, j'avais manqué ce passage... il faut dire qu'à force de lire toutes ces âneries.
Utilisateur anonyme
23 février 2009, 11:43   Rapt
C’était de braves gars, qui n’étaient pas tout à fait entrés dans le monde désenchanté des adultes, ou qui en étaient sortis, obéissant à des coutumes et des pensées qui étaient des façons de ne pas obéir à ce qui faisait mourir le monde dans lequel nous étions nés, se pliant non pas aux lois de la technique mais comme l’avait fait leur père, pendant des siècles, à la cadence du cœur et du souffle, sachant encore ces chants qui accompagnaient le travail à la faux, par exemple, ou le labourage avec les boeufs et les vaches (…), définissant une cadence dure mais naturelle, une sorte d’accord entre l’homme et le monde par un travail qui s’est trouvé modifié, puis remplacé par la mécanisation de l’agriculture, le paysan mourant en quelque sorte de ne plus accompagner ses efforts par ces chants du travail, de marche ou d’après-travail dont Pierre Bugeaud rejouait sans doute la mélodie sur son accordéon, tout comme l’Eglise d’avoir renoncé au latin et au chant grégorien, tandis que les campagnes étaient envahies par des chants de la ville qui n’avaient nul rapport avec leurs rythmes et qui altérait peu à peu celui de leur vie, pliant leur oreille, leur cœur et leur corps à toute autre chose, les séparant d’eux-mêmes et de leur traditions de la même façon qu’aujourd’hui le rythme obstinément binaire du rock, du rap et de la techno a fini par changer le rapport de tant d’individus avec le monde, le simplifiant à l’excès, le rendant même mortifère puisque calqué sur la pulsion cardiaque, et qu’on peut considérer que devenir la proie de ce genre de musique revient à entendre, monstrueusement amplifié, le bruit de son propre cœur, chose si peu naturelle à l’homme que c’est à peu près comme s’il écoutait le bruit de sa propre mort.

Ma vie parmi les ombres Richard Millet

Ces anciens paysans, qui avaient un travail au moins aussi pénible que celui des dockers de la Guadeloupe aujourd’hui, auraient dû donc gagner l’équivalent de 6.000 euros net par mois (jours de chômage remboursés)
23 février 2009, 11:47   Re : Rapt
Voilà bien ce qu'à L'Express on appellerait un « nauséeux fatras ».
Utilisateur anonyme
23 février 2009, 12:14   Pénible, pas ?
"Ces anciens paysans, qui avaient un travail au moins aussi pénible que celui des dockers de la Guadeloupe aujourd’hui, auraient dû donc gagner l’équivalent de 6.000 euros net par mois (jours de chômage remboursés)(...)"

Il faudrait décider cette question de la "pénibilité". Le travail avant la mécanisation était-il plus pénible ou moins pénible qu'aujourd'hui ?

Quand Richard Millet évoque ces "braves gars" "se pliant non pas aux lois de la technique mais comme l’avait fait leur père, pendant des siècles, à la cadence du cœur et du souffle, sachant encore ces chants qui accompagnaient le travail à la faux, par exemple, ou le labourage avec les bœufs et les vaches (…), définissant une cadence dure mais naturelle, une sorte d’accord entre l’homme et le monde par un travail", il donne furieusement envie de ce temps-là, de ce travail-là, "dur mais naturel", mieux accordé à l'homme et qui contenait, en quelque sorte, une rétribution dont le salaire n'était qu'une partie.

Si on le suit, il me semble vain d'ironiser sur les salaires des dockers de la Guadeloupe ou d'ailleurs parce que ceux-ci ne sont plus de "braves gars" "se pliant etc.", comme n'est plus un "brave gars" celui qui, aux commandes de son excavatrice, un casque acoustique fluo sur les oreilles, tranche à lui tout seul, dans un vacarme infernal, des portions entières de bitume. La question demeure de savoir s'il eût été moins pénible de creuser cette tranchée pendant plusieurs semaines, à plusieurs, avec des piques et des pioches, ou en quelques jours, à un seul, avec un engin.

Eh bien je crois, que c'est le pilote de l'engin qui est le plus fatigué, plutôt que l'équipe d'une demi-douzaines d'hommes à la pioche ; il est plus fatigué d'une mauvaise fatigue. De plus, il ne s'est rien passé pour lui dans cette journée, coupé du monde dans sa bulle de bruit, seul, recevant les vibrations de l'engin pour toute compagnie. Pas de discussions, de chant, de ces micro-événements qui font le charme du travail en commun etc.

Oui, la mécanisation a détruit dans tous les "secteurs d'activité" le goût et l'attrait humain du travail. Et cependant, bien sûr, on ne reviendra pas à la faux. Alors quoi ?
Utilisateur anonyme
23 février 2009, 17:39   Re : Guadeloupe : ces vérités qui dérangent
Alors quoi ?
Mais Rien justement, Orimont. Cela fait-il partie de la dissolution de l'identité européenne : qu'elle ne croit plus avoir quelque chose de précieux à défendre, au fond ? Cette fascination pour ceux qui arrivent maintenant, auréolés par ce décalage civilisationnel, serait-ce qu'on leur prête d'avoir encore cette connaissance, cette magie ici perdues ? Arts premiers, gigantesques stèles de fer levées, musiques élémentaires, dénudement de la vie privée, drogues, consumérisme, abolition de l'histoire, infantilisation citoyenne : parties d'un syndrome ou exorcismes du mal ? Peut-être devrait-on le savoir pour pouvoir se reprendre ?
Je ne sais pas Orimont, je ne sais pas. Mais il y a quelque chose.
Utilisateur anonyme
23 février 2009, 18:48   Re : Pénible, pas ?
"Cette fascination pour ceux qui arrivent maintenant, auréolés par ce décalage civilisationnel, serait-ce qu'on leur prête d'avoir encore cette connaissance, cette magie ici perdues ?"

C'est en effet ce que je soupçonne. Il y a dans l'arrière cour de la propagande pour la "diversité" un passéisme rampant qui, bien sûr, ne dira jamais son nom, comme si la "diversité" allait restaurer des modes de vie anciens, évidemment plus humains (il est caractéristique, dans ce sens, de noter combien "l'inhumanité" est très présente dans les protestations contre les reconduites à la frontière.)

On voit d'ici le malentendu entre ceux qui débarquent dans le monde occidental pour bénéficier d'une modernité à laquelle ceux qui l'ont machinée ne croient plus, pire encore, qu'ils n'aiment plus et, quelquefois même, exècrent (voir Millet).
Utilisateur anonyme
23 février 2009, 19:55   Re : Guadeloupe : ces vérités qui dérangent
C'est un double malentendu, qui ne peut que créer des désagréments pour tout le monde, c'est pourquoi il faut réguler l'immigration.

Ma connaissance de Millet est très limitée. Pour lors, je crois voir que : il n'embellit pas la vie d'autrefois, au contraire, il détaille sa dure réalité. C'est un amateur de vie à l'état brut ressentie animalement, par les odeurs, par la peur, les bruits, les mystères, le tranchant du destin. Ce naturel, il ne le retrouve plus, dit-il, que dans le corps nu d'une femme, sa passion, avec l'écriture, la belle langue. Il exècre si bien ce que nous exécrons dans une partie de nous-mêmes, qu'il tape, par son art, au profond de nous. On le lit bien mieux la nuit, je trouve.
Utilisateur anonyme
23 février 2009, 21:12   Re : Pénible, pas ?
"(...) il n'embellit pas la vie d'autrefois, au contraire, il détaille sa dure réalité."

Certes. On ne peut pas dire qu'il "embellisse" la vie d'autrefois en donnant à croire que tout y était simple, indolore et joyeux ; il ne "l'embellit" pas moins, cette vie ancienne, la "dure réalité" n'y étant pas pour lui synonyme de laideur, d'abrutissement et même de bestialité, comme le sont à ses yeux les conditions de la vie moderne. (En cela, l'extrait que vous produisez est caractéristique.)
Dans le Figaro aujourd'hui, description des (ex)actions du LKP.

[www.lefigaro.fr]
J'aime beaucoup la photo qui montre des membres du service de sécurité du "LKP" : une belle bande de gras du bide qui portent des verres fumés et roulent des mécaniques, affichant un air rogue à souhait. Ils sont parfaits.
Utilisateur anonyme
04 mars 2009, 18:24   Re : Guadeloupe : ces vérités qui dérangent
De la fenêtre de Ségolène Royal, la situation politique actuelle n'est pourtant pas compliquée !

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