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La justice a choisi son camp

Envoyé par Marcel Meyer 
Dans la petite ville que j’habite, et plus précisément dans mon quartier, la situation s’est brutalement détériorée ces derniers mois. Tous les jours, de deux heures de l'après-midi à deux heures du matin, le carrefour qui marque le centre géographique de la ville est occupé par des rassemblements de voyous, jusqu’à une vingtaine, d'où fusent les détritus, les quolibets, les insultes, le rap assourdissant et abrutissant, les motos pétaradantes et dangereuses, avec rodéos en moto cabrée, trafics de drogue et de véhicules volés, agressions verbales des filles, agressions physiques et bolossages nocturnes de passants imprudents.

Une grande partie de la population est exaspérée mais les recettes traditionnelles ne fonctionnent plus guère. Lorsqu’avec force pressions tous azimuts on réussit à faire venir la police, qu’on dépose une main courante ou une plainte après s’être fait traiter de « sale blanc » et caillasser, l’effet est dérisoire : les rodéos de motos s’arrêtent quelques heures, au mieux jusqu’au lendemain. Les policiers, même déplacés en nombre et en force, n’ont pas le droit de poursuivre les deux roues, cela leur est interdit par une directive du ministre, c’est trop dangereux — pour les voyous, faut-il le préciser, car le danger que les motos cabrées font courir notamment aux enfants qui jouent dans la rue semble moins préoccuper les autorités. Les policiers ne répondent même pas aux quolibets qui les visent, eux comme les autres. Ici, nous n’en sommes pas au fusil d’assaut, ni même à la boule de pétanque ou au flash-ball, même si j’ai un jour aperçu un pistolet que l’on se montrait, mais le territoire est perdu pour l’autorité, que ce soit celle de l’habitant adulte, de la municipalité ou des forces de l’ordre : les rares et difficilement obtenues « descentes » de celles-ci sont pour ainsi dire inutiles ; les averses sont plus efficaces, puisqu’au moins elles dispersent les sauvageons pour le temps qu’elles durent.

La municipalité a fini par organiser, il y a une dizaine de jours, une réunion publique en présence du commissaire de Saint-Denis dont nous dépendons. C’est surtout de son intervention que je voulais parler ici. Manifestement, nous l’ennuyions car il avait des chats autrement plus sérieux à fouetter. Il nous l’a d’ailleurs dit sans détours : notre ville est tranquille (rumeurs dans la salle) et d’ailleurs, lorsque nous lui expliquons que ces garnements commettent vingt-cinq infractions par heure, nous nous leurrons car il s’agit de contraventions (on a, il est vrai, mentionné l’absence de casque, les rues prises à contre-sens, les excès de vitesse, la conduite dangereuse) au code de la route et on ne peut arrêter personne pour cela. Puis il s’en va après avoir promis de faire ce qu’il pourrait.

Depuis, cette déclaration me trotte beaucoup dans la tête. D’abord parce que le policier était de mauvaise foi dans la mesure où il omettait des faits nettement plus graves, connus de tous et rappelés précédemment : le défaut d’assurance et de permis, le fait que ces véhicules ne sont pas homologués, le fait surtout qu’ils sont presque toujours volés, et que ces rassemblements ont aussi et d’abord pour objet la pratique de tous les trafics illicites. Ensuite parce que cette déclaration, faite en public par un commissaire de la République, avalisait le fait qu’il existe désormais en France deux catégories de citoyens : ceux que l’on verbalise et les autres. Je me trouvais il y a quelques semaines, rue Royale, coincé derrière une voiture roulant avec une lenteur extrême. Après un coup d’œil au rétroviseur, constatant que la première voiture sur la file d’à côté était loin, j’ai déboîté, sans mettre mon clignotant (cela m’arrive assez souvent car j’ai passé mon permis en Allemagne dans les années soixante, à une époque où il était interdit de mettre son clignotant pour dépasser parce que le législateur avait estimé que cela poussait les gens à dépasser n’importe comment du moment qu’ils le signalaient ; cette règle a été assez rapidement abolie, mais pour moi, l’habitude a été prise : quand la voie est libre, j’oublie souvent de signaler). Manque de chance, la première voiture en question était un véhicule de police banalisé. Ils m’ont fait arrêter ma voiture et m’ont verbalisé. Je leur ai demandé si je leur avais fait une « queue de poisson », non non m’ont-ils dit mais je devais mettre mon clignotant. J’ai bien sûr payé les quarante euros et après tout, j’avais en effet commis une faute. Mais enfin voilà : il y a bel et bien discrimination et j’en suis doublement victime, parce que je suis une de ces vaches à lait que l’on trait en toute occasion et parce que la police et la justice de mon pays ne me protègent pas contre des voyous qui m’empoisonnent l’existence et qui, en toute impunité, font infiniment pis vingt-cinq fois par jour.

Pour être honnête, je dois dire que les manifestations d’exaspération ont été telles que les voyous se sont faits un peu plus discrets depuis. Mais on sent bien que la rémission est extrêmement précaire et que cela repartira de plus belle bientôt, c’est en tout cas ce que tout le monde pense.

C’est à tout cela que je pensais en lisant ceci chez F.Desouche : deux élèves de troisième sont poursuivis pour outrage à personne chargée d'une mission de service public et encourent théoriquement jusqu'à six mois d'emprisonnement et 7 500 € d'amende pour avoir déposé trois rondelles de saucisson sur le bureau d’un professeur qu’ils supposaient de confession musulmane. Vous remarquerez que la gendarmerie voulait classer l’affaire, considérant qu’il s’agissait d’une mauvaise plaisanterie faite par deux garnements, mais le parquet semble avoir été sensible à des pressions exercées par la LICRA.

L’appareil judiciaire français est aujourd’hui coupable de collaboration active avec la contre-colonisation dont nous sommes les victimes impuissantes.
Je connais cela : en arriver au point de souhaiter des averses pour que cessent enfin le rap tonitrant et les éclats de voix...
On ne me fera pas croire que le pouvoir en place n'est pas complice pour entretenir une certaine tension sociale...
Ah, vous croyez ? Et pourquoi voudrait-il entretenir la tension sociale, le pouvoir ?
Utilisateur anonyme
22 juin 2009, 14:44   Re : La justice a choisi son camp
Quand je disais que nous avions besoin de charcutiers, et ce n'est pas un amateur de saucisson, ici bien connu, qui me contredira...

Existe-t-il désormais en France deux catégories de citoyens ou bien deux cadres de juridiction pour l'Etat ? Je penche plutôt pour la seconde solution. Il y a le territoire juridique ordinaire, celui où vous étiez rue Royale, par exemple, et qui, tout de même, recouvre encore une proportion très majoritaire du territoire français. Et puis il y a ces fameuses zones de droit dégradé, de droit a minima, où les autorités ont renoncé à exiger l'application intégrale de la loi.

Il faut tirer les conclusions de ces circonstances exceptionnelles en modifiant le droit en vigueur dans ces zones et, si nécessaire, en confiant son application à des autorités militaires et à des juridictions d'exception.

Le théâtre d'opérations de plus ambitieuse portée sera ainsi convenablement posé.
22 juin 2009, 15:34   Re : White Flight
L'isolement, puis la fuite, sont les symptômes de ce qu'on appelle en anglais le White Flight. Plus de réunions, plus de discussions, plus de forums. Il ne s'agit plus que de sauver les meubles. Vous n'en êtes pas encore là -- l'article ci-dessus n'a pas encore de rubrique 'France'.

Il doit être difficile dans ces circonstances de ne pas se laisser abattre moralement. Aussi, je trouve réconfortant le sang-froid et la pondération qui vous font débattre de ce problème comme l'auraient fait les sages de la cité grecque.
22 juin 2009, 16:03   Re : White Flight
J'ai perdu mon sang-froid plus d'une fois, cher Monsieur. J'habite ce lieu depuis dix-neuf ans. A l'époque, cela ne manquait pas de charme : les agréments de l'insularité et des berges de la Seine, la promenade des Impressionnistes, le centre de Paris à dix minutes, une maison spacieuse et très agréable à un prix abordable, un joli jardin, des gens dans notre genre en assez grand nombre et beaucoup de cordialité : tout ce gentil monde croyait à la mixité sociale, à la convivialité festive et autres sornettes du même tonneau. Comme pour beaucoup, c'est la réalité dure, laide, puante, gluante et brutale de la tiers-mondisation galopante qui nous a dégrisés. Au début, j'ai voulu lutter : partir, fuir (ce white flight dont vous parlez fort à propos) me paraissait équivaloir à accepter honteusement la défaite sociale et aussi à accepter lâchement de me faire mettre à la porte d'une ville de mon propre pays. Maintenant, c'est un peu tard. La maison est devenue invendable. Malgré tout, nous partirons bientôt, d'une façon ou d'une autre, mais ce sera bel et bien une défaite.
A Marseille je vis un peu le même problème que Marcel Meyer. Dans une co-propriété, toute proche du centre ville, j'ai acheté un appartement. Quand j'y suis arrivée le quartier était un peu dégradé du fait notamment de la présence d'un CHRS. Les habitants de la copro étaient en majorité de petits co-propriétaires, vigilants en cas de vente quant à l'acquéreur. Il y avait une cohabitation avec des immigrés peu problématique. Maintenant le quartier s'est encore beaucoup dégradé avec les flux de "sans papiers" hébergés dans le CHRS, la création de nouvelles structures d'accueil dans le quartier, et surtout avec le départ de nombre de co-propriétaires vers d'autres lieux, accompagné de la mise en location à une grande proportion d'immigrés dont une partie pose problème. Maintenant les locataires sont plus nombreux que les propriétaires. Les problèmes de la co-propriété et du quartier s'aggravent, et ce n'est que par la présence d'un conseil syndical dynamique et d'une association active pour essayer d'améliorer la situation, que c'est encore à peu près vivable ici. Il faut préciser qu'à Marseille le centre ville est plus paupérisé que la plupart des cités des arrondissements au nord. Comme nous sommes dans le secteur d'Euroméditerranée, nous avons encore espoir (souvent démenti) dans Saint Euromed pour nous protéger de la décadence finale. La magnifique vue sur la mer et la proximité du centre ville qui m'avaient conduite à l'achat de cet appartement ne suffisent pas à retenir grand monde. Moi aussi je croyais à la mixité sociale et j'avais toujours pratiqué ainsi.
Eh bien, force est de constater que le pouvoir en place fait le contraire de ce qu'il dit, et le contraire de ce qu'il a promis (l'histoire du karcher), comme s'il fallait se ménager une possibilité de nouvelles promesses, et justifier certains mécanismes de contrôle... Ne me dites pas que la police ne sait pas, par exemple, que la drogue circule librement autour de chez vous. Or, comme vous le montrez très bien, elle laisse faire...
Concernant la drogue, il y a deux choses dont il faut tenir compte : l'économie souterraine est tolérée comme une sorte de soupape de sécurité, et, de toute façon, les tribunaux ont dépénalisé dans les faits l'usage et le commerce de détaile des drogues courantes.

A mon avis, le "pouvoir" est aussi dépassé que les habitants de base ou que les policiers. La machine judiciaire ne joue pas son rôle en ne punissant pour ainsi dire pas la délinquance ordinaire et, de toute façon, les prisons sont pleines à craquer de criminels d'une toute autre eau que la petite racaille de merde du coin (dont seule une partie franchira le pas et rejoindra les premiers), et quand on ouvre une nouvelle prison, cela permet tout juste de compenser la fermeture d'une vieille geôle pourrie. Je rappelle que nous avons le même nombre de places en prison que dans les années cinquante pour huit fois plus de crimes et délits. Et il y a toujours la prison dans laquelle croupit l'ensemble de notre société : l'idéologie gnan-gnan qui fait pousser des hurlements, y compris dans le lit conjugal de l'Elysée, dès qu'il est question de ... mais vous savez tout cela par cœur.
Utilisateur anonyme
23 juin 2009, 13:19   Re : La justice a choisi son camp
Le "pouvoir" donne l'impression d'être dépassé par la situation qu'il a créé, comme Frankenstein par sa créature. En réalité, il entretient soigneusement le système, notamment dans l'appareil policier et judiciaire, ainsi que le montre votre récit et que le traduit votre titre : la justice a choisi son camp. Il s'agit d'un choix libre et délibéré.
Je doute beaucoup qu'il s'agisse d'un choix libre et délibéré. Je crois plutôt que c'est un vaste et puissant mécanisme social, mis en oeuvre à la fois par l'inhibition (le complexe du Grand Méchant Occident et ses colonies, ses camps de concentration, ses prisons) et par l'amollissement de l'autorité (dans la sphère publique et dans la sphère privée).
"Je doute beaucoup qu'il s'agisse d'un choix libre et délibéré." Moi aussi. Simplement, il me semble que "ça tombe bien". La guerre civile chronique, qui n'aurait pas fait l'objet d'une préméditation, peut néanmoins se révéler une méthode de gouvernement adaptée à l'époque.
Utilisateur anonyme
23 juin 2009, 15:37   Re : La justice a choisi son camp
En somme, si je vous lis correctement, le hasard faisant bien les choses, les conséquences des politiques menées depuis trente ans coïncident miraculeusement avec les intérêts du système au pouvoir.
Je ne crois pas non plus à la thèse de la violence entretenue volontairement : qu'y gagnerait le gouvernement, sinon le mécontentement croissant des populations devant son impuissance flagrante à assurer l'ordre et la sécurité ? La pré-guerre civile dans les banlieues n'est pas une muleta que l'on agite pour exciter l'indignation des électeurs, et paraître soudain en sauveur de la situation : il est trop évident que la situation n'a fait qu'empirer, malgré les promesses musclées de Sarkozy. C'est qu'il est lui même enchaîné et qu'il aimerait vraiment résoudre les choses par d'autres moyens que la force brute, par un traitement "social" du problème - ceci afin d'éviter d'être accusé de faire dans le "sarkozysme", et de prendre à contre-pied ceux qui voyaient en lui l'épigone (faussement) soft de Le Pen. Aucun gouvernement ne prendra plus la responsabilité d'une action policière, juridique (voire militaire) d'envergure. Cela serait totalement en contradiction avec les valeurs consensuelles, festives et sympa des élites contemporaines.
"En somme, si je vous lis correctement, le hasard faisant bien les choses, les conséquences des politiques menées depuis trente ans coïncident miraculeusement avec les intérêts du système au pouvoir."

Disons d'abord que je ne crois pas un instant que les gouvernements qui se sont succédé depuis trente ans ont songé sérieusement aux conséquences de leurs politiques, singulièrement celles du regroupement familial. L'aprèsmoiledélugisme me semble avoir été de rigueur et, en attendant le déluge, on bricole.

Faire de la violence sociale (dans sa version ethnique) non pas une situation temporaire mais un état chronique peut présenter des avantages du point de vue de l'occupation d'une population de plus en plus encombrante, inutile, toutes origines ethniques confondues. Au bout du compte, ne cherche-t-on pas les conditions d'un nouveau modus vivendi ?
C'est ça : s'adapter ou entreprendre une politique très difficile. Je crains qu'on préfère s'adapter, tenter de limiter les inconvénients par des biais divers. On peut se demander d'ailleurs si une politique voulant revenir sur tout ce qui a été mal fait en matière d'immigration ne serait pas comme vouloir remettre le lait dans la casserole après qu'il a débordé.
Utilisateur anonyme
23 juin 2009, 20:11   Re : La justice a choisi son camp
Ce serait plutôt comme vouloir ôter de la casserole un certain nombre d'ingrédients qu'on ne voulait - tout bien considéré - pas voir figurer au menu.
Utilisateur anonyme
25 juin 2009, 21:36   Re : La justice a choisi son camp
Citation
Je ne crois pas non plus à la thèse de la violence entretenue volontairement : qu'y gagnerait le gouvernement, sinon le mécontentement croissant des populations devant son impuissance flagrante à assurer l'ordre et la sécurité ?

Maintenir les français dans le désordre, la peur et la pauvreté est un moyen de contrôle de la population. On sait en effet que les individus apeurés et désespérés sont enclins à accepter n'importe quelles réformes sensées améliorer leur sort. Je pense que Nicolas Sarkozy a consciemment opté pour cette stratégie orwellienne.

En s'arrangeant avec ses amis des médias pour faire monter le NPA d'Olivier Besancenot, Nicolas Sarkozy n'aura aucun mal à diminuer suffisament le poids électoral du candidat PS pour qu'il ne passe pas le premier tour des élections présidentielles. Sa réélection sera assurée.
Faire mousser Besançenot comme le PS a fait mousser Le Pen: extra!
26 juin 2009, 11:51   Opinion
Bien chère Ostinato,


Je partage totalement votre opinion (et plus généralement ce que vous dites au fil du forum sur le Président).
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