Je conçois que l'on soit agacé, cher Orimont, en regardant pareilles émissions. A vrai dire, je ne les suis pas, mais grâce au câble, je peux voir de nombreux documentaires, par exemple sur National Geographic Channel ou Encyclopédia, de meilleur niveau que TF1. Ce que vous en dites montre bien que le journalisme "généraliste" entretient d'étroits rapports avec la science-fiction et avec la publicité (je me souviens de cet écran géant incitant les humains à émigrer vers d'autres planètes, dans le Los Angeles de 2020 du film
Blade Runner).
Il n'est pas douteux que l'exploration de l'espace ait des motivations intéressées, surtout dans les organismes d'état qui la financent. Cependant, je me demande si aux Etats-Unis, à l'opposé de la France dont la politique de recherche fait fuir les jeunes savants, d'autres motivations, d'autres facteurs n'agissent pas. Quelles motivations ? Le prestige international, l'expérience des retombées pratiques, toujours inattendues, de la recherche fondamentale, et même, qui sait ? un certain goût pour le gaspillage somptueux (qui nous a valu Versailles, St Pierre de Rome ou le Taj Mahal). Gaspillage du point de vue comptable, immédiat, mais sage investissement si l'on réfléchit à long terme. L'esprit comptable (qui va souvent de pair avec le misérabilisme caritatif) domine le discours journalistique, et partant, nos esprits.
Pourquoi enfin certains politiciens ne seraient-ils pas persuadés de la bonté intrinsèque de la découverte scientifique ? On a trop l'habitude de ramener toutes les entreprises humaines à l'intérêt le plus mesquin, c'est un réflexe intellectuel qui me rappelle ce passage d'une lettre de Gerard Manley Hopkins à un ami cynique et élégamment désillusionné : " ... sans conviction, il n'est rien qui puisse être sain ni beau, et [qu'] une veine de cynisme à laquelle on s'abandonne trop volontiers finit par rendre tout grossier en nous. "
Je me suis mal exprimé sur la recherche du Même : des penseurs ont reproché aux savants de trop vouloir trouver des traces de vie extra-terrestre, et d'employer pour ce faire des critères trop terrestres. Cela me paraissait mal fondé, parce que la biologie n'a qu'un objet d'étude disponible, la vie terrestre, et parce que les savants que j'ai entendu parler sur ces chaînes câblées témoignaient d'une remarquable ouverture d'esprit. Quant à coloniser d'autres planètes, il paraît difficile d'affirmer que l'idée n'a pas traversé les esprits, bien sûr. Mais techniquement, financièrement, scientifiquement, c'est impossible aujourd'hui.