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l'antisémitisme des belles âmes

Envoyé par Cassandre 
12 novembre 2009, 12:01   l'antisémitisme des belles âmes
Lu dans le Monde;


Dans un roman intitulé Courts-circuits, récemment édité au Cherche Midi, Alain Fleischer raconte qu'en aparté, lors d'une pause, Jean-Luc Godard aurait lâché cette phrase monstrueuse à son ami et interlocuteur Jean Narboni, ex-rédacteur en chef des Cahiers du cinéma : "Les attentats-suicides des Palestiniens pour parvenir à faire exister un Etat palestinien ressemblent en fin de compte à ce que firent les juifs en se laissant conduire comme des moutons et exterminer dans les chambres à gaz, se sacrifiant ainsi pour parvenir à faire exister l'Etat d'Israël."

Jean-Luc Godard est coutumier de ce type de provocations. La première est survenue en 1974, lorsque, illustrant sa notion du montage comme vision comparative de l'histoire, il faisait chevaucher dans Ici et ailleurs une image de Golda Meir, premier ministre israélien, avec celle d'Adolf Hitler.

Prenant fait et cause pour la Palestine, l'auteur de Bande à part s'est maintes fois plu à rappeler, entre autres dans JLG/JLG en 1994, que, dans les camps nazis, les détenus au seuil de la mort étaient désignés sous le terme de "musulmans". Ignorant délibérément la nature des crimes commis et subis par les uns et par les autres, il sous-entend que les victimes d'hier sont devenues les bourreaux d'aujourd'hui. Décrivant la Bible comme un "texte trop totalitaire", il a déjà lâché à propos de ces juifs qui, selon lui, auraient sauvé Israël en mourant dans les camps : "Au fond, il y a eu six millions de kamikazes."

Dans Notre musique, film au départ duquel il voulait reprendre le schéma du Silence de la mer, de Vercors, en imaginant un officier israélien installé chez des Palestiniens, il déclare que "le peuple juif rejoint la fiction tandis que le peuple palestinien rejoint le documentaire". Avec démonstration rhétorique, photographies à l'appui. Champ : les Israéliens marchent dans l'eau vers la Terre promise. Contrechamp : les Palestiniens marchent dans l'eau vers la noyade. Il s'en explique dans Morceaux de conversations... : "Les Israéliens sont arrivés sur un territoire qui est celui de leur fiction éternelle depuis les temps bibliques..." Jean Narboni lui fait remarquer que le mot "fiction" est choquant. "Alors, réplique-t-il, on dira que les Israéliens sont sur TF1, c'estla télé-réalité. Et les autres, dans un film de Frédéric Wiseman".

Ces raccourcis suscitent doutes et consternation chez ses thuriféraires. Lorsque Jean Narboni lui rappelle que la juxtaposition des images de Golda Meir et d'Hitler avait même troublé Gilles Deleuze, sympathisant palestinien, lequel avait pourtant tenté de le défendre, Godard répond cinglant : "Pour moi, il n'y a rien à changer... sauf d'avocat !"

"Juif du cinéma"

"Un catholique, je sais ce que c'est : il va à la messe, dit-il dans le film d'Alain Fleischer à Jean Narboni. Mais un juif, je ne sais pas ce que c'est ! Je ne comprends pas !" Jean-Luc Godard s'est pourtant autoproclamé "juif du cinéma" pour signifier son destin de cinéaste persécuté. Il dit que, culpabilisé de n'avoir pas été alerté dans son enfance par l'Holocauste, choqué par les propos antisémites de son grand-père maternel qui faisait des plaisanteries sur son "médecin youpin", il n'a pas trouvé d'autre moyen de comprendre le juif qu'en se considérant "pareil".

Dans Deux ou trois choses que je sais d'elle, lorsque son héroïne, prostituée occasionnelle, emmène un client dans un hôtel et que celui-ci lui fait remarquer que c'est un hôtel réservé aux juifs parce qu'il a une étoile, elle ne trouve pas ça drôle. Sensibilisé par la Shoah, Godard n'a de cesse de dénoncer la faute inexpiable du cinéma de n'avoir jamais filmé les camps. Le "ce qui ne peut pas être dit" de Wittgenstein devient à ses yeux un "il vaut mieux voir que s'entendre dire". Clamant que "l'image c'est comme une preuve dans un procès", une formule que d'aucuns trouvent à la limite du négationnisme.

Cette certitude que rien n'est infilmable, même la Shoah, l'oppose à Claude Lanzmann, qui, lui, s'insurge contre le caractère suspicieux qu'auraient des images du génocide. Persuadé de l'inadéquation de celles-ci, Lanzmann se range à l'avis d'Elie Wiesel, qui craint que le cinéma ne transforme un événement innommable en "phénomène de superficialité". Débat qui, dans les colonnes du Monde, suscite la réaction du psychanalyste Gérard Wacjman résumant l'affrontement : "Saint Paul Godard contre Moïse Lanzmann".

La question juive obsède Godard. Parfois à bon escient : le rappel des forfaits perpétrés dans les stades, comme le Heysel, rappelle le Vél'd'Hiv dans Soigne ta droite. Ou ce reproche adressé à Romain Goupil durant le tournage d'Allemagne neuf zéro : "Tu te dis anti-fasciste et quand tu filmes le stade des JO de Berlin, tu ne filmes qu'un stade, pas celui d'Hitler !" Mais, en négatif, ses propos sur Hollywood "inventé par des gangsters juifs", et sur l'invention du cinéma par ces producteurs émigrés d'Europe centrale ayant compris que "faire un film, c'est produire une dette". Son biographe américain, Richard Brody, raconte le projet d'un film où Godard débattrait avec Claude Lanzmann. Bernard-Henri Lévy étant médiateur. Ce dernier déclare : "Lanzmann et moi étions les instruments de sa cure : celle d'un antisémite qui essaye de se soigner. J'étais prêt à jouer le jeu, mais il a changé de plan." Ici antisioniste, là carrément antisémite, Godard se heurte à quelque chose qu'il ne comprend pas, homme d'image affichant un problème avec la parole.

Jean-Luc Douin
Article paru dans l'édition du 11.11.09
Sensibilisé par la Shoah, Godard n'a de cesse de dénoncer la faute inexpiable du cinéma de n'avoir jamais filmé les camps.

Je saisis mal la pertinence du propos. Pour commencer, les images existent. Je citerai seulement les images anglaises de la libération du camp de Belsen (les monceaux de corps enterrés au bulldozer pour prévenir l'épidémie). Ensuite, leur écho retentit à travers l'histoire du cinéma. Pour l'exemple de Belsen, je me référerai seulement au film de science-fiction britannique Quatermass and the Pit (1967), où l'on extrait sous hypnose une vision de « mémoire ancestrale » d'une jeune dame, qui montre les Martiens (des grandes sauterelles mesurant environ un mètre trente), « committing mass suicide ».
Godard est un cuistre.
Godard est une confusion. Les perpétuels petits rapporteurs du camp du Bien tous à leur place au Monde post-Plénel le valent cependant. Il y a une propension à la mesquinerie, la vindicte, la délation qui révèlent de bien petits esprits. Quelle information digne d'intérêts nous livre ce journal cette fois-ci ? Il "balance" lorsqu'il ne calomnie pas.
Godard est un poète qui a mal tourné. Rimbaud, lui, n'a pas joué les prolongations et tout porte à croire que c'est tant mieux. [ Je dis une grosse bêtise, là ? ]
Utilisateur anonyme
12 novembre 2009, 23:59   Re : l'antisémitisme des belles âmes
Pourquoi « tant mieux » ?
Parce que —pour ce que j'ai pu en apprendre — ce qu'il a vécu par la suite tendrait à montrer qu'il n'était plus poète et qu'il le savait, la source était tarie, la jeunesse enfuie. Ceci étant dit, peut-être n'était-il plus poète littéraire mais demeurait-il poète existentiel. « Ces rinçures » aurait-il dit de ses poèmes lorsqu'il revint mourir à Marseille. Mais pardonnez-moi, cher PhiX, tout cela est loin pour moi aussi et peut-être ma mémoire me joue-t-elle des tours, il est possible que je recompose.
J'avoue ne pas comprendre pourquoi Le Monde "révèle" ce que tout le monde savait, et surtout pourquoi maintenant.
Notre musique fut pour moi le pensum cinématographique le plus éprouvant de ces dernières années.
Un film terrible, d'un chiant d'encre, répulsif à jamais de ce pauvre Godard qui en fut dorénavant étiqueté comme diseur de conneries d'une inégalée cuistrerie.
Rien ne subsistait d'une certaine grâce des premiers films, ou peut-être était-ce un don pour le collage, je ne sais plus...
Bernard-Henri Lévy pour se guérir de l'antisémitisme et pourquoi pas du sucre pour soigner le diabète ?
Utilisateur anonyme
15 novembre 2009, 11:57   Altaléna
"Jean-Luc Godard est coutumier de ce type de provocations. La première est survenue en 1974, lorsque, illustrant sa notion du montage comme vision comparative de l'histoire, il faisait chevaucher dans Ici et ailleurs une image de Golda Meir, premier ministre israélien, avec celle d'Adolf Hitler."

Godard fait un contresens en comparant Golda Meir à Hitler, mais il aurait pu comparer (à Mussolini) plus valablement Vladimir Zeev Jabotinsky, extrémiste juif créateur du Parti Révisionniste, armée disciplinée dont les adeptes arboraient la chemise brune (Ben Gourion lui-même surnommait Jabotinsky « Vladimir Hitler ») et très suspect d'être responsable de l'assassinat du dirigeant sioniste socialiste Haïm Arlozoroff en 1933.

En évoquant ces Juifs qui auraient sauvé Israël en mourant, Godard pense peut-être à Yosef Trumpeldor (qui a donné son nom au Bétar), dont les derniers mots furent : « Ça ne fait rien, il est bon de mourir pour notre terre ». Quelques photos de la Ligue de Joseph Trumpeldor, prises à Berlin et Varsovie dans les années 30 :



Autre photo ici

Et ici

Aujourd'hui, le parti Hérouth (une branche du Likoud) considère Jabotinsky comme son maître spirituel.

Cette affiche aussi est peu connue : ICI
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