On s'y emploiera, Florentin, on s'y emploiera.
Cependant, la lecture des mémoires de Simone de Beauvoir me semble assez fructueuse pour faire la généalogie d'une certaine
tournure d'esprit qui, dût-on le déplorer, a bel et bien façonné les esprits - et en profondeur - jusqu'à rendre possible la situation actuelle.
On distingue :
- une capacité à "s'agripper [à une théorie quelconque] contre vents et marées, contre la raison même" ("méthode globale", immigration)
- un engagement à prendre parti pour un groupe quelconque sans y appartenir (féministes soutenant la bâche),
- une croyance à un "avenir lointain" qui nous donnera raison et au nom d'un confort immédiat, sans tenir compte de la réalité présente (avenir radieux du métissage et, en attendant, fête à tous les étages),
- lequel confort se
soulage sans risque dans la haine de soi.
- ambivalence des attractions, révélée par l'examen des goûts et pratiques culturelles à cette époque, ainsi conclu : "C'est ainsi que, paradoxalement, nous étions attirés par l'Amérique [cinéma, littérature, musique, paysage, absolument tout] dont nous condamnions le régime, et l'URSS où se déroulait une expérience que nous admirions nous laissait froids [la propagande a tout avalé, le cinéma, la littérature, tout.]"
Et dire que de telles façon de voir et de raisonner, appelées à s'incruster si durablement dans les cervelles, apparaissent dans les années trente chez des jeunes gens fraîchement diplômés !
Personnellement, Simone de Beauvoir m'est nettement moins antipathique que son alter ego (définitivement croqué par Jacques Laurent dans son irrésistible
Paul et Jean-Paul.) Je suis sensible à une certaine drôlerie (évidemment involontaire) à suivre les pérégrinations de Simone et JP, qui ne manquent pas de me rappeler un autre terrible couple : Bouvard et Pécuchet. Mais Simone de Beauvoir a pour elle, à mes yeux, une forme appréciable de sincérité, servie par une langue bellement tranchante. A la lire, on se renseigne bien sur ces années.