Oui, vous avez raison, cher Rogemi, je ne pense probablement pas assez aux lecteurs de passage, qui risqueraient de s'horrifier de mon inélégance ou, pire, de l'obscurité de mes propos...
A tous ceux-là, passés, présents et à venir, je présente mes excuses les plus démagogiques.
Maintenant, si vous le voulez bien, laissez-moi vous exposer mon point de vue, en ce qui concerne cette sempiternelle question de savoir s'il convient ou non de faire remarquer à l'un ou à l'autre les fautes que l'on peut relever à l'occasion dans les messages qu'ils déposent sur le forum. D'aucuns ici, et ils sont probablement majoritaires, estiment qu'il est malséant de se livrer à un tel exercice, qui relèverait simplement de la cuistrerie et de la grossièreté. Bien. Il se trouve cependant que certains autres, dont je suis (vous l'aviez deviné), considèrent que la forme d'un message revêt une certaine importance, tout de même - et en disant cela, je modère l'expression de ma pensée, car je serais plutôt enclin, en vérité, à lui accorder une importance
égale à celle du fond de ce message ; ou, pour le dire plus précisément encore, à ne pas même dissocier l'une de l'autre, et à prendre chaque texte pour ce qu'il est en réalité, c'est-à-dire un tout - non pas indécomposable, c'est entendu -, figure d'une entité vivante qui tombe si elle se voit amputée de l'une de ses parties.
Le contenu, tout le contenu, rien que le contenu, voilà quelque chose à quoi je ne puis me résoudre ; pas plus que je ne saurais me contenter d'une forme parfaite et lisse, creuse coquille enfermant le vide conceptuel. Je vous fais grâce des antiennes du genre "La forme, c'est le fond qui remonte à la surface", ou "Le style est l'homme même". Vous ne vous offensez pas de ce que vos interlocuteurs critiquent les idées que vous exposez, qu'ils s'élèvent contre certains de vos arguments, qu'ils s'opposent à ce que vous exprimez, n'est-ce pas ? Mieux, vous le souhaitez, de façon à ce que le débat s'en enrichisse, et que le frottement des discours et des opinions fasse jaillir ces bonnes étincelles qui éclairent le ciel, parfois un peu sombre, de nos méditations. Eh bien, souffrez qu'ils puissent, de même, vous faire savoir (quand je dis "vous", ce n'est pas
vous, naturellement...) que les pieds sur la table, la chemise déchirée ou la tignasse en bataille ne sont pas forcément les bienvenus toujours et en tout lieu.
Evidemment, avec un tel point de vue, j'ai déjà eu affaire, sur ce même forum, à des reproches, parfois beaucoup plus virulents que les vôtres (je me souviens ainsi d'une colère noire de l'ami Francis, que j'avais un peu titillé naguère... colère dont il est revenu, et je lui en sais gré). La place de "petit prof'", de pion, de sous-correcteur, de prote au rabais, j'en passe, est si facile à attribuer que ce serait pécher de ne pas sacrifier à ce petit rituel. Cependant, il s'est également trouvé des personnes, parmi les habitués de ces lieux, pour considérer qu'une telle conception n'est peut-être pas totalement aberrante, et qu'il pourrait bien être tout aussi légitime de se voir opposer des remarques sur la
forme que sur le fond de ce que l'on écrit. D'autres m'ont fait savoir, aussi, qu'elles étaient bien aises de quelques-unes des observations que j'avais cru pouvoir leur adresser.
Je sais bien que ce que je dis là s'éloigne un peu du simple domaine de la faute de syntaxe, et a fortiori de la faute d'orthographe. Je sais bien, également, que nul n'est à l'abri de coquilles, de maladresses, de faiblesses d'expression. Je le sais d'autant mieux que, m'aventurant à formuler des reproches (parfois affectueux) de ce genre, je m'expose à ce que l'on me renvoie mes propres manquements à la figure. Tant pis ! Si vous estimez (et ce sera à juste titre, pas de doute) que vous êtes en droit de faire remarquer à quiconque qu'il "pense mal", si je puis dire, j'estime à mon tour être en droit de faire remarquer à chacun qu'il "dit mal". Ce qui n'entraîne pas que je le fasse systématiquement, Dieu merci, ni que je m'en obsède, ni surtout que je me considère comme l'arbitre des élégances, rôle que je ne peux ni ne veux en aucun cas endosser. Mais il est vrai que les questions de langue me sont chères, et que j'éprouve une réelle souffrance - non, c'est trop fort-, une gêne persistante lorsque je suis confronté à des exactions un peu trop voyantes en ce registre.
Pour en finir avec ces propos un peu longuets (pour moi qui suis peu disert en règle générale), je rappellerai que certaines des préoccupations que je viens d'évoquer sont en adéquation étroite avec quelques-uns des centres d'intérêt du parti de l'In-nocence (du moins j'aime à le croire) et que, par conséquent, je n'ai pas le sentiment de déroger à son esprit quand je me penche sur ses lettres.
Bon dimanche ! comme dirait notre cher Eric...