Le site du parti de l'In-nocence

Vu du Québec

Envoyé par Félix 
12 mai 2010, 20:53   Vu du Québec
Superbe analyse du débat sur l'identité nationale en France par le québécois Mathieu Bock-Côté :


Dérapage à la française ? Le débat sur l’identité nationale française

La controverse française sur l’identité nationale a traversé l’Atlantique et prend l’allure, dans nos quotidiens, d’une accumulation de « bourdes » de la part de ministres devant tout à Nicolas Sarkozy et provoquant sciemment la France populaire pour détourner à son profit ses suffrages lors des élections régionales de 2010. Nicolas Sarkozy avait clairement passé sa commande : il voulait dans ce débat du « gros rouge qui tache », autrement dit, des propos suffisamment transgressifs pour interpeller un électorat populaire déçu du sarkozysme au pouvoir. Ses conseillers ont donc suggéré à Nicolas Sarkozy de rejouer à son avantage la querelle de l’identité nationale.

Il y est même intervenu le 8 décembre dans une tribune au Monde, suivant de quelques jours le vote suisse sur les minarets en invitant les musulmans français à une certaine discrétion dans la pratique de leur culte (« Respecter ceux qui arrivent, Respecter ceux qui accueillent », Le Monde, 8 décembre 2009). Les déclarations des représentants de l’UMP ont suivi, Nadine Morano invitant ainsi les « jeunes » des banlieues à un plus grand civisme (« Morano demande aux jeunes musulmans français de ne plus parler "verlan" », Le Monde, 15 décembre 2009) alors que Pascal Clément a rappelé que « le jour où il y aura autant de minarets que de cathédrales en France, ça ne sera plus la France » (« Minarets : Clash à l’UMP, Le Figaro, 22 décembre 2009). On voit mal où est le scandale dans ces deux déclarations. L’incivilité épidémique des banlieues françaises n’est pas une fiction non plus qu’un fantasme, quoi qu’en pense une certaine gauche qui n’a jamais compris que la « contre-culture », qu’elle qu’en soit sa forme, s’exprime d’abord contre la culture. De même, rappeler que le paysage architectural et culturel français doit incarner de manière prédominante son héritage historique ne devrait pas être compris comme une déclaration inacceptable à moins, bien évidemment, de reconnaître dans la défense de l’identité nationale le signe d’une dérive « réactionnaire » ou « populiste », comme c’est le cas pour la gauche idéologique. À moins, on se souviendrait de la commission Bouchard-Taylor, quand l’intelligentsia multipliait les commentaires horrifiés dans les journaux et les bulletins télévisés pour se désoler d’une parole populaire qu’elle n’était pas loin de bestialiser en la faisant passer pour les rugissements de la bête immonde. On ne compte plus les tribunes publiées dans les grands quotidiens de gauche comme Le Monde ou Libération où l’intelligentsia en appelle à une suspension de ce débat où s’engouffrerait la « haine de l’autre » et où la « stigmatisation » des populations musulmanes serait non seulement tolérée mais encouragée.

Certains n’ont même pas hésité à faire sonner les sirènes fêlées de l’antifascisme officiel en reprenant la nouvelle maxime de la gauche idéologique : « l’islamophobie » - un concept qui vise surtout à pathologiser et criminaliser toute critique d’un certain communautarisme musulman ou de l’islamisme - serait à la société contemporaine ce que l’antisémitisme était à celle d’hier. Il n’y aurait aucune réalité dans le constat des difficultés d’intégration des populations musulmanes aux sociétés occidentales, seulement la peur de l’autre, le repli sur soi et la frilosité identitaire. Dans une tribune publiée dans Le Monde, plusieurs intellectuels, et certains de grande renommée, n’ont pas hésité à reconnaître le spectre du Troisième Reich derrière le débat sur l’identité nationale. « Ce qui se passe en France depuis l’ouverture du débat sur l’identité nationale est insupportable. Ce qui se dessine, c’est la montée de l’ostracisme à l’encontre de toute population dont la religion, la couleur de peau, le langage ou la tenue vestimentaire, voire l’âge, sont susceptibles d’inquiéter les Français ou du moins une partie d’entre eux qui s’arrogent le monopole de l’identité nationale. […] En raison même de l’idée que nous nous faisons de la dignité humaine, en raison du fait que la liberté religieuse et la liberté de conscience sont des droits humains fondamentaux, nous demandons que soit mis un terme à tout ce qui peut nourrir ou sembler justifier les dérives actuelles, à commencer par ce "diabolique" débat sur l’identité nationale qui ne sème que la division. Après l’étoile jaune, faudra-t-il un jour porter une étoile verte ? » (« Après l’étoile jaune, faudra-t-il un jour porter l’étoile verte », Le Monde, 22 décembre 2009). Sans surprise, on assiste à la nazification de Nicolas Sarkozy et de ses ministres, accusés désormais de mener une politique qui mènera le gouvernement français à accrocher une étoile verte aux musulmans de France. La chaîne d’équivalence est connue : la nation mène au nationalisme, le nationalisme à l’extrême-droite, l’extrême-droite au pétainisme et le pétainisme au nazisme. La référence à l’identité nationale et à l’héritage historique qu’elle incarne est ainsi criminalisée et ceux qui s’inquiètent à son sujet sont finalement désignés comme les nazis d’aujourd’hui.

Il y aurait pourtant autre chose à reprocher à ce débat sans verser dans l’antiracisme le plus virulent. Car il y a bien évidemment un aspect loufoque, à tout le moins artificiel, à ce débat décrété par un président qui croit manipuler grossièrement la question nationale à son avantage tout en menant une politique qui ne transgresse en rien le catéchisme pluraliste. Il faut le reconnaître : le débat relève d’une stratégie électorale si grossière qu’on peut même se demander si elle ne se retournera pas contre celui qui l’a initié. On l’a vu depuis son élection en 2007, Sarkozy, qui s’était fait élire en faisant usage d’un langage politique conservateur pour ramener vers la droite classique un électorat populaire qui l’avait déserté vers la droite populiste, s’est allié, au nom de « l’ouverture », avec les figures d’une certaine gauche moderniste qui incarne l’héritage de Mai 68 contre lequel il a pourtant fait campagne. Autrement dit, après avoir constituée dans une perspective conservatrice sa majorité le temps de la campagne présidentielle, Sarkozy s’est rangé au centre-gauche dès son élection, tout en sacrifiant sans mauvaise conscience son discours sur l’identité nationale qui avait au moins eu le mérite de problématiser à la fois l’idéologie pénitentielle et le droit-de-l’hommisme. De ce point de vue, le débat actuel sur l’identité nationale est là pour servir d’écran et masquer la conversion multiculturaliste de la présidence de Nicolas Sarkozy. Mais on sait très bien, d’ailleurs, que la conclusion de ce débat relèvera du « vivre-ensemble » multiculturel supposé conjuguer la diversité et la République dans l’idéal d’une France postnationale. Éric Besson, le ministre chargé de conduire le débat sur l’identité nationale, en a déjà donné la conclusion dans une visite en banlieue parisienne : « la France n’est ni un peuple, ni une langue, ni un territoire, ni une religion, c’est un conglomérat de peuples qui veulent vivre ensemble » (« Identité nationale : visite surprise de Besson à la Courneuve », Le Parisien, 5 janvier 2010).

Constater la conversion de Sarkozy au multiculturalisme ne relève pas du fantasme droitier. Pour des raisons qui relèvent probablement de la « stratégie de triangulation politique » qui consiste à doubler son adversaire sur le terrain idéologique qu’il prétendait s’être approprié, Nicolas Sarkozy s’est lancé dans la « lutte aux discriminations » - ainsi que dans l’écologisme le plus militant - en important à droite un appareil conceptuel qui est celui de la gauche la plus radicale, qui consiste à criminaliser la société d’accueil en lui faisant porter la responsabilité de « l’exclusion » de certaines communautés qui ne sont pas parvenues à s’insérer dans la collectivité nationale – une accusation loufoque quand on sait que les problèmes d’intégration relèvent bien davantage de la conjugaison de plusieurs facteurs, comme une immigration mal maîtrisée, d’un modèle économique épuisé et hyperbureaucratisée, de l’inversion idéologique d’une école qui ne transmet plus la culture et de la disqualification de l’identité nationale par l’antiracisme qui milite ardemment pour une recomposition multicommunautaire de la société française. La référence à la lutte aux discriminations laisse croire que la société d’accueil serait constituée autour d’un système exclusionnaire qu’il serait nécessaire de démanteler, notamment en reconnaissant la nécessaire implantation d’un dispositif légal permettant la discrimination positive, un système qui consiste pratiquement à transgresser l’égalité libérale – ou républicaine – la plus élémentaire pour institutionnaliser une forme de clientélisme ethnique qui conduit à la constitution de féodalités identitaires. Nicolas Sarkozy, dans son discours de Polytechnique, s’est d’ailleurs engagé à utiliser la capacité coercitive de l’État pour reprogrammer les mentalités et mener la rééducation thérapeutique des classes populaires françaises au nom de la lutte contre les discriminations. Il allait même jusqu’à envisager une radicalisation de la contrainte étatique dans la reconstruction multiculturelle du pays : « Si ce volontarisme républicain ne fonctionnait pas, il faudra alors que la République passe à des méthodes plus contraignantes encore, mais nous n’avons pas le choix. La diversité, à la base du pays, doit se trouver illustrée par la diversité à la tête du pays. Ce n’est pas un choix. C’est une obligation. C’est un impératif » (Discours de Polytechnique, 17 décembre 2008). Le rapport Sabeg, vite considéré comme une bible sur les questions liées à la diversité, a lui aussi consacré la nouvelle mission de l’État français dans la lutte contre les discriminations. Il faudrait désormais transgresser l’égalité en droit des individus pour favoriser certaines communautés – même si la chose n’est pas toujours dite explicitement - n’étant pas parvenues à s’insérer elles-mêmes dans la collectivité nationale. Il faut pourtant le redire, l’institutionnalisation de la « diversité » et conséquemment, des communautés particulières, la poursuite d’une « égalité de fait » entre ces communautés et la reprogrammation identitaire de la nation historique pour la contraindre à se décentrer de la communauté politique relèvent du multiculturalisme le plus orthodoxe, une politique qui n’a rien d’un pragmatisme gestionnaire pour libéraux éclairés, contrairement à ce que semble croire certains leaders de l’UMP.

Mais cette mascarade politique qui cherche à recouvrir d’une rhétorique patriotique le basculement multiculturel des élites françaises ne devrait pas disqualifier en soi la légitimité de la question de l’identité nationale qui est symptomatique d’un dérèglement profond des mécanismes de transmission culturelle et d’un affaissement de la souveraineté démocratique visible depuis les années 1970. On connait la genèse de la crise de l’identité nationale : depuis Mai 68, la nation n’a plus la cote chez des élites qui ont bradé sa souveraineté dans la construction européenne et relativisé son identité dans un multiculturalisme criminalisant l’identité française en l’assimilant à une histoire honteuse qui exigerait désormais une pénitence perpétuelle. Les campagnes de sensibilisation à la différence portées par SOS racisme des années 1980 et 1990, par exemple, ont été bien analysées par Paul Yonnet (Voyage au cœur du Malaise français, Gallimard, 1991) comme une tentation de dénationalisation de la France – on pourrait même dire de désoccidentalisation, la France devant apparemment rompre avec son identité historique et son héritage européen pour véritablement universaliser les principes qui seraient contenus dans l’idéal de la République. Cette dénationalisation a généré un profond malaise identitaire témoignant de l’attachement des classes populaires à la France historique. Les symptômes de ce malaise ont été très nombreux au fil des ans, des plus négatifs, comme le développement de la droite « populiste », aux plus positifs comme le vote populaire contre la constitution européenne en 2005. Cette préoccupation légitime pour une identité déstabilisée a été mise en procès par un antiracisme virulent reconduisant la terreur idéologique qui était autrefois celle du communisme. C’est le propre du politiquement correct que de traduire le malaise généré par l’idéologie soixante-huitarde dans le langage de l’intolérance. Il n’est plus permis de remettre en questions les grandes avancées « sociétales », la sociologie officielle assimilant toute défense de la nation au racisme, à la xénophobie, à la crispation identitaire, à la peur de l’autre. La protestation contre la dissolution de l’identité nationale a ainsi été combattue par une nouvelle croisade antifasciste assimilant l’attachement à la nation aux pires horreurs du vingtième siècle. Au même moment, on a redéfini la nation dans un républicanisme évidé de tout contenu historique. Puisque la France était « la patrie des droits de l’homme », elle ne pouvait plus être rien d’autre que cela. La « République » a été extraite de l’identité française pour être retournée contre elle, d’une certaine manière, ce qui consistait à saboter l’œuvre historique du Général de Gaulle qui avait justement su assumer pleinement l’idéal républicain en l’inscrivant dans la continuité nationale. Certains, comme le philosophe Alain Finkielkraut, se sont alors demandés ce qui, dans cette perspective, distingue la France des autres nations européennes qui partagent elles aussi le patrimoine philosophique des Lumières. Mais ceux qui vident l’identité française de tout contenu historique sont justement les premiers à consentir à l’intégration européenne qui ferait surgir un bien commun transnational affranchi des paramètres nationaux dans lesquels se formulait traditionnellement la question de l’intérêt général.

Ainsi, chaque rappel de l’épaisseur historique de la nation française, dont l’héritage ne s’épuise visiblement pas dans la tradition révolutionnaire et l’universalisme des droits de l’homme, est désormais présenté comme un dérapage. On comprend mieux la réaction de l’intelligentsia qui hystérise le débat politique en laissant toujours planer le mythe du fascisme. Si, comme l’a affirmé Daniel Cohn-Bendit au moment de la votation suisse sur les minarets, « le fascisme, c’est l’exclusion », on comprend donc que toute critique du droit-de-l’hommisme et d’un universalisme radicalisé jusqu’à la culture de la pénitence risque à tout moment d’être assimilée à une tentation fascisante. En fait, il faut revenir sur la notion de « dérapage », qui présuppose que le débat politique doit être contenu dans un couloir étroit où de bonnes vigies rappellent à l’ordre ceux qui s’écarteraient du chemin du « progrès ». On comprend ainsi le raisonnement de la gauche multiculturelle : les seuls bons débats sont ceux qui en arrivent à ses conclusions. Le débat politique ne met pas en scène plusieurs positions légitimes mais devient une pédagogie de l’avenir radieux et les médias, dans leur immense majorité, participent à cette disqualification de la nation. Évidemment, on trouve certaines voix autorisées par le système médiatique pour faire le procès de cet évidement identitaire de la France, comme celles d’un Éric Zemmour ou d’un Ivan Rioufol. Il n’en demeure pas moins que cette critique légitime et articulée est marginalisée et qu’elle ne parvient pas à s’exprimer politiquement. Évidemment, le politiquement correct n’a rien d’exclusif à la France. Le multiculturalisme est devenu la nouvelle religion des classes supérieures qui se sont donné pour objectif de reconstruire la société dans l’égalitarisme identitaire le plus radical. C’est ainsi qu’on explique la transformation de la société occidentale en grand camp de rééducation thérapeutique où « l’enseignement de la tolérance » et « l’éducation à la diversité » masquent l’aplatissement des grandes institutions qui fondaient traditionnellement les sociétés occidentales.

Quoi qu’en disent les médiacrates, le « dérapage » du débat sur l’identité nationale est le signe d’un ressaisissement brouillon mais légitime d’une question fondamentale trop longtemps censurée. Et ce qu’elle met en scène finalement, c’est que l’intelligentsia progressiste ne tolère pas la contestation de son monopole sur la définition du bien et du mal. L’intelligentsia est gardienne du bien, de la vérité, de la justice et doit éclairer les classes dangereuses encore traversées par la mauvaise passion de l’identité nationale. Mais malgré les consignes qu’on lui donne, la France populaire rappelle qu’un pays n’est pas un espace neutre ou une simple entité administrative mais une langue, un paysage, une architecture, une gastronomie, des traditions et des coutumes. Elle rappelle une chose simple : celui qui rejoint un pays a tôt ou tard pour vocation de s’y fondre, d’en prendre le pli identitaire. Pour cela, il doit consentir à privatiser les signes identitaires ostentatoires qui entrent en contradiction avec le mode de vie français. Certainement, l’identité nationale n’est pas statique et celui qui la rejoint apporte une nuance de plus à un pays complexe, aux terroirs nombreux. Un pays se transforme sur la longue durée en s’appropriant de nouvelles influences qui féconderont ses traditions. Mais c’est d’abord au nouvel arrivant à s’approprier, avec les efforts nécessaires, la culture du pays qu’il rejoint. Ce que la France populaire rappelle, c’est que la France n’est ni une page blanche, non plus qu’une seule déclaration des droits de l’homme, mais un pays porteur d’une culture en droit de se perpétuer et de faire un plein usage de la souveraineté qu’il a générée pour assurer son existence historique.
14 mai 2010, 15:00   Re : Vu du Québec.
Je trouve cet article remarquable. Je ne crois pas avoir lu en France d'article mettant aussi clairement le doigt sur l'incohérence des amis du Désastre qui traitent Sarkozy de quasi nazi pour son débat sur l'identité nationale alors que nul n'a fait autant que lui pour le multiculturalisme et la Diversité. Pour ne prendre qu'un exemple : la discrimination positive. Les amis du Désastre osaient à peine en rêver, lui l'a imposée !
14 mai 2010, 16:01   Re : Vu du Québec.
Son analyse de l'« affaire Éric Zemmour » est tout aussi remarquable :


« L’affaire Éric Zemmour » et la crise de la droite française

Par Mathieu Bock-Côté

Je suis de ceux qui ont lu Éric Zemmour avant de le voir à la télévision. Et puisque j’écris de mon côté de l’Atlantique, je l’ai connu non pas par son travail de journalisme mais bien par ses livres et d’abord par celui qui demeure à mon avis le plus achevé, Le livre noir de la droite française. Ce livre est celui d’un brillant historien des temps présents, un politologue sans le titre qui a compris avec une finesse remarquable la rupture révolutionnaire de Mai 68. Dans cet ouvrage qui n’a pas vieilli, Zemmour montrait comment la droite française a lentement intériorisé le discours de la gauche soixante-huitarde, dans une métamorphose idéologique qui l’a amenée à lui faire concurrence dans le progressisme et la recherche de la « modernité ». À force de vouloir plaire à la gauche et de lui reconnaître la supériorité de l’intelligence, la « droite » en deviendra son simple complément pragmatique, incapable de formuler sa propre vision du monde, sinon dans les termes d’un libéralisme gestionnaire censé piloter de manière optimale l’adaptation de la société française à la mondialisation et à la construction européenne. Si Nicolas Sarkozy a gagné en 2007, c’est parce qu’il a su faire sienne cette analyse en cherchant à s’approprier un électorat populaire et conservateur qui s’était réfugié dans le « populisme » pour marquer officiellement son désaveu de la dénationalisation française. Tout Zemmour était dans cet ouvrage, qui éclaire bien ceux qui suivront, qui ont repris de manière plus ciblée le procès de l’idéologie soixante-huitarde, avec la critique de l’antiracisme, du gouvernement des juges ou de la dissolution de l’espace politique dans la communication des communicants.

Cet avant propos n’est aucunement étranger à la controverse qui a touché Zemmour au printemps 2010. Car la campagne de dénigrement dont il a été récemment victime avait bien peu à voir avec ses propos, par ailleurs complètement déformés par le « buzz » médiatique, concernant la surreprésentation de certaines communautés immigrées chez les trafiquants. C’est plutôt pour « l’ensemble de son œuvre », comme on dit, que les vigies de l’antiracisme se sont lancées dans une tentative de lynchage médiatique, facilitée par certaines dispositions du droit français qui confèrent un pouvoir démesuré aux associations. Il aura fallu que Thierry Ardisson mette en scène grossièrement la controverse en officialisant le « dérapage » de Zemmour par une petite notice en bas d’écran : Zemmour dérape ! Tout cela dans une émission préenregistrée… Il n’y a probablement pas meilleur exemple de la manipulation de l’information dans la société française que cette mise en scène programmée d’un « dérapage » disqualifiant dans sa présentation même les propos d’un intellectuel qui était pourtant l’invité d’une émission. En fait, l’affaire Zemmour est symptomatique d’un dérèglement fondamental de l’espace politique et médiatique français dans son rapport au conservatisme, ou si l’on préfère, à la droite.

Reprenons le terme consacré, « dérapage », qui en dit beaucoup sur l’imaginaire du politiquement correct qui domine le système médiatique. On doit le comprendre ainsi : l’espace public ne tolère qu’un nombre limité de points de vue qui doivent être en accord avec le consensus progressiste, lequel s’est approprié de manière exclusive la référence à la démocratie et au pluralisme. Ceux qui sont en désaccord avec le système idéologique dominant n’expriment pas un autre point de vue, lui aussi chargé d’une certaine légitimité, mais ils dérapent, c’est-à-dire qu’ils quittent le chemin balisé vers la société « idéale ». Par là, ils consentent à se mettre au ban de la société officielle. On doit comprendre qu’ils sont coupables de leur propre marginalisation, ce qui toutefois laisse dans l’ombre la question fondamentale : qui a le privilège de distinguer entre ceux qui dérapent et ceux qui ne dérapent pas ? Le politiquement correct fonctionne à la manière d’un logiciel traducteur assimilant le sentiment national au repli identitaire, à la xénophobie ou au racisme. Il confond de la même manière le conservatisme culturel avec le sexisme ou l’homophobie. En fait, il criminalise systématiquement la dissidence, ce qui nous rappelle ses origines dans les travaux de l’École de Francfort sur la « personnalité autoritaire », qui faisaient du conservatisme une pathologie morale et sociale dérivant nécessairement vers le fascisme. Cette idéologisation de l’espace public entraîne aussi une disqualification de la portion du réel qui entre en contradiction avec la promesse de la transparence égalitaire, ce qui en amène plusieurs à s’opposer, par exemple, à une complexification de l’appareil statistique français, de peur de ce qu’il pourrait révéler. Le principe de réalité cède la place aux exigences de la reconstruction idéologique de la société. Par exemple, Rama Yade disait sur les ondes d’une radio que l’analyse de Zemmour sur la délinquance était « contradictoire avec les valeurs républicaines ». J’abuse peut-être ici de mon pragmatisme nord-américain, mais la question qui se pose est plutôt : se conformait-elle à la réalité ?

Ils sont nombreux à avoir souligné à quel point cette tentative d’exécution d’un journaliste à contre courant de la médiacratie était symptomatique d’une régression dramatique de la liberté d’expression, causée à la fois par le politiquement correct qui installe un dispositif inhibiteur dans l’espace public ainsi que par la criminalisation progressive de la dissidence politique. Mais je l’ai dit, l’affaire Zemmour n’aurait jamais pris une telle ampleur si elle n’était symptomatique d’une crise encore plus profonde de l’espace politique français. Celui-ci a été ravalé depuis une quarantaine d’années par un espace médiatique qui tend à neutraliser la polarisation politique dans une simple gestion clinique et thérapeutique de l’opinion survalorisant le « centre » de l’échiquier idéologique pour mieux classer arbitrairement à « l’extrême-droite » tout désaccord fondamental avec la multiculturalisation de la société française. Ce n’est pas sans raison qu’on a parlé et qu’on parle encore de la pensée unique.

Mais la communication publicitaire ne dépolitise la dissidence que pour mieux consolider le consensus progressiste de nos sociétés, à la manière d’une normalisation gestionnaire du radicalisme idéologique soixante-huitard. La troisième voie en Grande-Bretagne a représenté cette tendance de manière exemplaire. Tony Blair disait souvent que le temps des idéologies était dépassé. Certains y ont vu une religion du pragmatisme. Dans les faits, il suffisait de lire les travaux du principal doctrinaire de la Third Way, Anthony Giddens, pour y voir une forme de radicalisme idéologique nouveau genre d’abord occupé à désacraliser les dernières institutions sociales traditionnelles et à criminaliser ceux qui se portent à leur défense. À l’ordre du jour : la reconstruction de l’école dans le pédagogisme égalitaire, le démantèlement de la famille traditionnelle, le déploiement d’une sociologie victimaire lorsque vient le temps d’expliquer la criminalité, la sacralisation du multiculturalisme et la dissolution de l’État-nation. D’aucune manière, nous ne vivons l’heure de la fin des idéologies. Mais certaines d’entre elles sont si dominantes qu’on ne parvient plus à les reconnaître comme telles.

En France aussi, les questions « sociétales » ont été confisquées par la gauche soixante-huitarde et le multiculturalisme, qui est certainement l’expression la plus radicale de sa détestation profonde de la civilisation occidentale, y a pris la forme de l’antiracisme consistant à disqualifier moralement toute défense significative de l’identité nationale. Cette criminalisation du sens commun correspondait aussi à une inversion des valeurs qui ne pouvait que susciter un malaise populaire et démocratique. Mais ce malaise n’est aucunement légitime pour les vigies de la rectitude politique et ceux qui cherchent à l’exprimer ne sont jamais présentés comme des interlocuteurs légitimes dans le débat public, mais le plus souvent comme des réactionnaires, au mieux comme des provocateurs. Sans surprise, c’est le mauvais sort qu’on réserve à Zemmour qu’on présente d’un plateau de télé à l’autre comme un polémiste, comme si son propos visait d’abord à provoquer. On laisse ainsi entendre que Zemmour cherche à déplaire pour déplaire et qu’il se complaît dans le mauvais rôle du bouffon de service. Le conservateur est un pauvre type ou un bouffon, il a de mauvaises humeurs ou de l’humour noir, mais jamais d’idées. Aujourd’hui comme hier, la gauche n’envisage jamais la dissidence à droite comme une critique rationnelle de son système idéologique. Ce qui est contesté, c’est la légitimité même du conservatisme et de tout rapport à la société d’avant 68 qui ne consent pas à la manie du repentir.

Évidemment, l’hégémonie de l’idéologie néo-soixante-huitarde ne serait pas aussi puissante si la droite française ne faisait pas tout pour lui plaire. Mais Zemmour a souvent expliqué comment la droite finit toujours par passer à gauche pour ne pas déplaire aux nouveaux curés du politiquement correct. La droite fait désormais concurrence à la gauche dans le progressisme, dans la poursuite de la modernité, et cherche à faire tendance pour s’attirer les faveurs de la bobocratie, à tout le moins, pour ne pas l’incommoder. On l’a vu lorsque Nicolas Sarkozy s’est approprié la question de la « diversité », en envisageant même de l’inscrire dans le préambule de la constitution, ce qui n’était peut-être pas surprenant de la part d’un homme qui avait cherché, et cherche encore de bien des manières, à introduire la discrimination positive en France, qui consiste à accoupler le clientélisme identitaire avec le féodalisme administratif et qui pénalise sévèrement la majorité de la population au nom de crimes trop souvent imaginaires qu’on lui impute. Sarkozy s’est ensuite converti à la religion écologiste avec le souci de faire plus moderne que les modernes. La droite officielle représente au mieux une version édulcorée du consensus progressiste. On le voit de manière caricaturale lorsque Zemmour critique les ministres UMP qui défilent devant lui à l’émission On n’est pas couché. D’une Chantale Jouhano à une Rama Yade, on se demande bien pourquoi elles sont classées « à droite », sinon qu’elles n’ont pas la culture du Parti socialiste, difficilement assimilable pour celui qui n’a pas été formé aux jeux d’appareils d’une des machines politiques les plus sclérosées d’Occident.

L’électorat conservateur, et plus encore l’électorat populaire conservateur qui s’est historiquement reconnu dans le gaullisme et qui avait la culture politique du RPR, ne s’y retrouve plus et se trouve tiraillé entre une droite gouvernementale sans substance et une droite populiste qui s’est alimentée à la vieille culture faisandée de l’extrême-droite et qui s’est pour cela exclue du jeu politique respectable. Éric Zemmour surgit sur cette faille et en vient à exprimer dans un espace médiatique normalement confisqué par la gauche un conservatisme dont il devient l’un des rares représentant véritable, d’autant plus qu’il l’exprime de manière particulièrement articulée. Zemmour fait le procès de l’idéologie dominante. Il critique alors l’européisme, le multiculturalisme, le pédagogisme, la sociologie victimaire, l’historiographie pénitentielle et toutes les autres manifestations de cette idéologie du suicide des nations occidentales. Il ne faut pas se surprendre qu’il dispose désormais d’une base militante dans la mesure où la dissidence de Zemmour s’est depuis un temps investie d’une charge politique de plus en plus substantielle. Cette charge est d’autant plus dense que Nicolas Sarkozy, qui s’est fait élire sur un programme anti-soixante-huitard, a jusqu’à présent déçu systématiquement l’électorat populaire qui s’était rallié à lui. Le résultat des dernières élections régionales l’a confirmé radicalement.

Ainsi posée, l’affaire Zemmour se comprend mieux. Si la nébuleuse antiraciste et ceux qui la relaient dans le système médiatique ont tout fait pour expulser Éric Zemmour du débat public, c’est parce qu’il révèle médiatiquement que la France ne s’est pas laissée avaler entièrement par le système idéologique officiel. Il s’agit moins d’un paradoxe que d’une faille dans le système médiatique que le politiquement correct s’affaire en ce moment à colmater. Il y a une preuve par Zemmour du biais progressiste des médias français dans la mesure où son propos n’est absolument exceptionnel que parce qu’il est à peu près l’un des seuls à le tenir. Zemmour dément la prétention du progressisme à incarner le sens de l’histoire et montre comment il représente plutôt le consensus idéologique d’une petite élite qui est parvenue à confisquer la souveraineté et le discours public. Il y a surtout une preuve par Zemmour et par son remarquable tirant d’eau qu’une frange considérable de la société française ne se reconnaît pas dans les débats situés exclusivement dans les paramètres du politiquement correct.

Il semble, pour l’instant, que Zemmour sortira relativement indemne de cette tempête médiatique. Son assassinat professionnel n’aura pas lieu – pas cette fois du moins. Si Éric Zemmour est aussi sauvagement attaqué, c’est parce qu’il représente la dernière altérité idéologique à la fois véritable et honorable dans le débat public. Zemmour était la dernière caution qui laissait croire à l’existence d’un débat public dans le système médiatique. En s’acharnant sur lui, le système médiatique risque ainsi de sacrifier ce qui lui reste de crédibilité.
29 juin 2010, 14:56   Re : Vu du Québec.
Brillante intervention du sociologue québécois Mathieu Bock-Côté au sujet du multiculturalisme (son analyse peut aussi s'appliquer à la France) :


Utilisateur anonyme
29 juin 2010, 17:27   Re : Vu du Québec.
Très pertinent, en effet :

Citation

« l’islamophobie » - un concept qui vise surtout à pathologiser et criminaliser toute critique d’un certain communautarisme musulman ou de l’islamisme -
29 juin 2010, 18:15   Re : Vu du Québec.
Mathieu Bock-Côté a le mérite d'insister sur ce qu'on pourrait appeler, parodiant Benda, "La Nouvelle Trahison des clercs"; ou plutôt non : "La Définitive Démission des clercs".
29 juin 2010, 18:30   Re : Vu du Québec.
Le Pot d'adieux des clercs
30 juin 2010, 09:21   Re : Vu du Québec.
Un concept à retenir : la « désintégration » !
Utilisateur anonyme
26 décembre 2010, 13:43   Re : Vu du Québec.
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Utilisateur anonyme
26 décembre 2010, 18:11   Re : Vu du Québec
Drôle de voir Mathieu Bock-Côté cité sur le forum du PI. Je lui avais justement signalé la présence du site du PI l'été dernier lors d'un échange de courriels en lui faisant remarquer que certaines idées de Renaud Camus étaient assez près des siennes et de celles d'Alain Finkelkraut.

Mathieu, toutefois, ne fait pas vraiment dans l'élitisme bien que sa personnalité et sa conception de l'éducation l'y prédisposent certainement. Sa perspective procède généralement du bas vers le haut plutôt que du haut vers le bas. Hélas!
26 décembre 2010, 18:34   Re : Vu du Québec
Claires, nettes, précises : la définition et l'analyse du multiculturalisme par Mathieu Bock-Côté sont vraiment excellentes. Je trouve étonnant que l'on n'ait pas, en France, des sociologues ou analystes politiques de ce calibre au sujet du multiculturalisme. Il y a certes Eric Zemmour qui a bien expliqué la déconstruction du roman national et son remplacement par le "droit à la différence" antiraciste des années 80, mais il est l'un des rares.

Alain Finkielkraut, Malika Sorel, Ivan Rioufol et d'autres ont, certes, bien appréhendé le malaise identitaire dont la France est victime actuellement mais ils n'ont pas vraiment conceptualisé et décrit le multiculturalisme comme étant une idéologie d'inversion de l'intégration, tel que le fait Bock-Côté.

Pour beaucoup de gens, le terme "multiculturalisme" évoque simplement la coexistence de plusieurs cultures, alors que ce concept est en fait beaucoup plus fort, puisqu'il sous-entend une refonte complète et antidémocratique de la nation assortie d'une propagande pour convaincre les récalcitrants.

Il faut toutefois nuancer en précisant la différence entre multiculturalisme à l'anglo-saxone et à a française. Dans les pays tels que le Royaume-Uni ou la Suède, le multiculturalisme est défini légalement et encouragé en tant que tel (maintient et promotion des cultures étrangères, transformation de l'espace public pour n'offenser personne, communautarisme). En France, la tradition assimilatrice issue de l'universalisme républicain continue de proclamer officiellement que la France est une République indivisible. Le multiculturalisme a commencé à s'imposer de facto face à l'impossibilité d'assimiler les nouvelles vagues d'immigrations, grâce au discours relayé par la gauche, les médias et les associations antiracistes, mais il reste moins fort que dans les pays anglo-saxons : on privilégie notamment le métissage et la mixité culturelle plutôt que le communautarisme.
Utilisateur anonyme
26 décembre 2010, 18:37   Re : Vu du Québec
Voici l'adresse de son site personnel avec une collection d'articles publiés dans divers quotidiens montréalais abordant surtout la thématique identitaire:

[bock-cote.net]
26 décembre 2010, 18:57   Re : Vu du Québec
Raymond Boudon a, dans son dernier ouvrage, parlé fort bien lui aussi du multiculturalisme en relation avec le relativisme.
26 décembre 2010, 19:34   Re : Vu du Québec
Pendant des années, les "élites" de tous bords nous ont assuré, pour nous endormir, que les nouvelles populations d'origine étrangère s'assimileraient comme s'étaient assimilées les précédentes selon la règle de la république française. Quand il est devenu flagrant que l'assimilation ne marchait plus parce que ces populations, à la fois trop nombreuses et trop différentes, étaient inassimilables, pour s'innocenter du crime sans excuse de les avoir lait venir en masse, ces mêmes "élites" se sont mises, presque du jour au lendemain, à exalter les "Différences" et ont fait passer la volonté d'assimilation pour du né-colonialisme. En fait, faute de maîtriser une situation dont elles sont responsables, elle ont choisi de modifier le vocabulaire tout en prenant dans l'affolement et au petit bonheur des mesures parfaitement incohérentes : la mixité ethnique obligatoire mais avec la séparation à la fois concrète et mentale engendrées par certaines pratiques culturelles et revendications identitaires encouragées jusque dans l'Education nationale, mesures qui nous vaudront tous les poisons du communautarisme sans en avoir les rares antidotes dont, au premier chef, le chacun chez soi sur son territoire.
27 décembre 2010, 09:20   Re : Vu du Québec
En exergue de son blog, M. Bock-Côté a choisi Michelet :

Nul peuple ne résisterait à une telle épreuve. Cette manie singulière de se dénigrer soi-même, d’étaler ses plaies, et comme d’aller chercher la honte, serait mortelle à la longue. Beaucoup, je le sais, maudissent ainsi le présent, pour hâter un meilleur avenir ; ils exagèrent les maux, pour nous faire jouir plus vite de la félicité que leurs théories nous préparent. Prenez garde, pourtant, prenez garde. Ce jeu-là est dangereux. L’Europe ne s’informe guère de toutes ces habiletés. Si nous nous disons méprisables, elle pourra bien nous croire.

Jules Michelet, Le Peuple.
Utilisateur anonyme
27 décembre 2010, 09:36   Re : Vu du Québec
(Message supprimé à la demande de son auteur)
27 décembre 2010, 10:41   Re : Vu du Québec
Oui, il semble que nous soyons condamnés, si rien n'est fait pour endiguer le flot croissant de l'immigration musulmane dans notre pays, à devenir de pauvres demi-habiles voués, comme le relate cet article, à débattre du volume des haut-parleurs muezzinesques dans les rues devenues arabes. Il est même possible qu'on s'échevelle, qu'on se crêpe le chignon sur des sujets pareils. Et la conclusion sera tirée : il existe encore une opposition dans notre pays, sa démocratie, sa civilisation sont vivantes, la preuve : voyez comme on débat, comme on se contredit. Mais le pays aura changé de nature, sa population n'étant plus la même. Aux vieillards qui se seront attardés dans la France d'après, on expliquera qu'il en a toujours été ainsi. Et ceux-là ne sauront pas quoi dire, ne sachant pas par où commencer.
Utilisateur anonyme
27 décembre 2010, 11:30   Re : Vu du Québec
(Message supprimé à la demande de son auteur)
14 avril 2011, 12:26   Re : Vu du Québec
Nouvelle intervention de Mathieu Bock-Côté sur le multiculturalisme :


Seuls les utilisateurs enregistrés peuvent poster des messages dans ce forum.

Cliquer ici pour vous connecter