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Communiqué n° 1071 : Sur l'entrée de la musique populaire à la Villa Médicis

Communiqué n° 1071, jeudi 10 juin 2010
Sur l'entrée de la musique populaire à la Villa Médicis

Le parti de l'In-nocence voit un signe éclatant de la grande déculturation en cours dans la désignation de la chanteuse pop Claire Diterzi et du flûtiste et jazzman Magic Malik comme lauréats de l'ex-"Prix de Rome" et pensionnaires à la Villa Médicis. Avec de pareilles nominations est consacrée officiellement la fusion qui s'observe de toute part entre art et culture d'un côté, divertissement, commerce et "industrie culturelle" de l'autre — les premiers se fondant et se perdant dans les seconds. On se félicitait que les services de l'État, du moins, parussent résister à ce mouvement hautement démagogique. Le signe est clairement donné que le temps de cette résistance est révolu et que les arts savants doivent s'attendre à perdre tour à tour, sous l'effet de l'hyperdémocratie et du métissage forcé des genres comme des êtres, tous les territoires qu'ils avaient pu prendre pour des sanctuaires.
«[...] sous l'effet de l'hyperdémocratie et du métissage forcé des genres comme des êtres [...]»

J'apprécie. Merci.
En même temps, il est trop cool Magic Malik.
Mais passons à un autre Malik, le slameur Abd Al Malik. Il vient de faire l'objet d'une attaque incroyablement haineuse, il serait le Maréchal Pétain du slam ce qui m'avait échappé, sur le site proche des Frères musulmans, Oumma.com, lequel semble estimer qu'il n'est pas encore assez halal :
[oumma.com]
On trouvera dans le dernier numéro de Diapason, juillet-août 2010, p. 10, troisième colonne, un écho de cet éditorial de l'In-nocence. Plus loin, Ivan A. Alexandre consacre sa chronique à la chanteuse Lady Gaga et écrit : « Le monde ancien transmettait de génération en génération des "valeurs" plus ou moins immuables. Tandis que, pour reprendre le vieil aphorisme de Tocqueville, "dans les démocraties, chaque génération est un peuple nouveau". Au modèle paternaliste qui prétendait transmettre aux masses l'art de l'élite succède le modèle participatif dont le programme est d'inculquer à l'élite l'art des masses. Or la musique du peuple nouveau n'est pas Dusapin, pas même Phil Glass, mais Lady Gaga. » (p. 40)

Il conclut en ces termes : « Si vous êtes arrivés jusqu'ici, vous vous demandez depuis un moment : (...) que vient faire Lady Gaga chez Mozart et Pablo Casals ? Qu'importe au fidèle de Diapason le succès ou l'insuccès de ce qui n'est finalement rien d'autre que le dernier emballage de la pompe à dollars ? Finissons donc par où le Mainstream de M. Martel finit aussi : " Nous sommes dans l'effarement face à ce que nous voyons disparaître sous nos yeux, assis au milieu des ruines du monde passé. " L'effarement, donc autant que possible, aussi longtemps que possible, la résistance. Nous avons grandi avec et par la certitude que l'universel s'incarnait dans La Passion selon Saint Matthieu. On nous prie désormais de croire que ce n'était qu'un leurre, un hochet secoué entre snobs, et que l'universel appartient au vaste monde mondialisé, son seul juge, son seul garant. Or quelque chose dans ce marché nous écœure. Une loi peut-être arbitraire et désuète nous interdit de souscrire entièrement à ce que M. Martel nomme la "diversité standardisée". Bach me force à résister. Pourtant, le ciel m'est témoin, je suis un démocrate ordinaire. J'adore Lady Gaga. »

Ce Martel est-il le ridicule speaker de France-Culture qui faisait la leçon à Alain Finkielkraut recevant Renaud Camus ? Que les In-nocents me pardonnent de citer la prose journalistique de M. Alexandre : une certaine coïncidence d'idées n'excuse pas les fautes de langue et de raisonnement que la copie de son article me fait voir.

On remarquera peut-être avec intérêt que les idées défendues ici finissent par percer dans des journaux où on ne les attendait pas.
À mon avis, il faudrait une modification de plus.
Je suis parfaitement d'accord avec ce communiqué tout en constatant que le phénomène n'est pas nouveau. Je me souviens d'une altercation, sur le plateau d'Apostrophe, entre Serge Gainsbourg, prétendant que la chanson était un art mineur, et Guy Béart, défendant son art comme un art respectable qui avait produit des chefs d'oeuvre et auquel il se vouait avec ferveur. Il se trouve que Serge Gainsbourg avait bénéficié quelque temps d'un atelier à la Cité Internationale des Arts, lieu où on rencontre des premiers prix de Conservatoire, des artistes de talent dont Gérard Grisey, prix de Rome 72 (nouvelle formule sur dossier) et dont nous fêtâmes la promotion avec force liqueur.
Non non, je ne pense pas ! Au contraire, s'agissant de Frédéric Martel, il est bon d'employer ce genre de tournures qui lui siéent si bien !
Citation

Nous avons grandi avec et par la certitude que l'universel s'incarnait dans La Passion selon Saint Matthieu
.

Oui, c'est l'une de mes plus chères convictions.
"À mon avis, il faudrait une modification de plus."

Mais c'était ironique, non ?
Je trouve étrange que cette oeuvre magnifique soit prise comme image de l'universel. Si mes souvenirs sont bons, elle fut fort mal reçue par les protestants, ce qui explique en partie que la "Passion selon Saint Jean" ait été davantage donnée.
Utilisateur anonyme
24 juin 2010, 23:27   Re : La Passion selon Saint Matthieu
pourtant l'une et l'autre ont en commun des chorals Luthèriens

[madamemusique.canalblog.com]

ce n'est pas que je sois pour l'entrée de la musique populaire à la Villa M , mais force est de reconnaître que nos compositeurs de musique savante , n'ont plus aucune inspiration !


Dusapin
Glass
Grisey
Savouret



qu'on ne me chante pas le couplet de la musique moderne ou des talents à découvrir , la musique tonale à disparue depuis Messiaen et P scheffer , qu'ils reposent en paix
pourtant cette musique à vécue + de 500 ans et avec une multitude de styles et d'instruments , alors il ne faut pas s'étonner si la musique tonale et mélodique subsiste encore dans la musique populaire .
Laquelle par ailleurs est souvant confondue avec la musique folklorique ....alors dans ce cas entièrement d'accord , car elle est un trésor d'inventions : j'assite tous les ans au festival de Gannat où le monde entier est représenté
Non seulement Gainsbourg aimait Stravinsky mais il lui ressemblait

Citation
Olivier
C'est bien de F. Martel qu'il s'agit.

Mea culpa. Je corrige de suite, et m'en vais couvert d'un juste opprobre.
Nos compositeurs explorent un univers sonore qui échappe au commun des mortels. Nos plasticiens font la même chose dans leurs registres. J'adore la chanson française mais je trouve qu'elle est totalement décalée à la Villa Médicis où, comme à la Cité des Arts, la confrontation avec d'autres artistes de différents pays est le but du jeu.
25 juin 2010, 06:23   Correction
La malédiction s'acharne sur vous...
Citation
Jean-Marc
Je trouve étrange que cette oeuvre magnifique soit prise comme image de l'universel. Si mes souvenirs sont bons, elle fut fort mal reçue par les protestants, ce qui explique en partie que la "Passion selon Saint Jean" ait été davantage donnée.

Comme vous, Jean-Marc, j'ai été étonné que ce journaliste parle d'universalité à propos de l'art. Nous savons bien que les œuvres de notre civilisation ne sont pas universelles, que leur valeur, comme notre plaisir, tiennent à leur identité particulière, à leur étrangèreté. J'ai noté un jour cette phrase de Nabokov, prise je ne sais plus où : « En tant qu'artiste et homme d'étude, je préfère le détail particulier à la généralisation, les images aux idées, les faits obscurs aux symboles évidents et le fruit sauvage découvert à la confiture synthétique. »
Bien chers amis,


Je me demande si on ne devrait pas aussi saisir l'occasion pour demander qu'il soit mis, dans le même temps, un terme à la démagogie symétrique qui veut que pleuvent les subsides (émanant du contribuable) sur des "artistes" marginaux et incompréhensibles pour le public (je ne dis pas le grand public), et qui ont, semble-t-il, pour seule vocation, de choquer (je pense surtout aux Arts plastiques).

Un homme qui aurait eu son baccalauréat en 1900, donc un homme "normalement cultivé" pour cette époque, apprécierait sans aucune difficulté l'oeuvre de Renaud Camus ; il aimerait sans doute Marcheschi, parce qu'il y a une grandeur et un sens.

Cette personne s'enfuirait en revanche (en se signant furtivement) à la vue de certaines "oeuvres" ou à l'écoute de certaines "oeuvres", "oeuvres" au demeurant payées par nos impôts.
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