Menace d'attentat en France

Ce qui m'étonne, ce sont les réactions des lecteurs
du Figaro

Parmi les réactions, il y en a de nombreuses qui laissent augurer de théories qui s'exprimeraient en cas d'attentats islamistes en France. Les coupables seraient le gouvernement et les politiques qui auraient organisé une opération de diversion pour se maintenir au pouvoir. Ce serait une éclosion de Thierry Meyssan et de théories négationnistes..

Guère étonnant. Les théories du complots ont ceci de séduisant qu'elles donnent à qui y croit un sentiment de sécurité, celui d'avoir à disposition une explication ordonnée du désordre du monde, ainsi qu'un sentiment d'élection, celui de faire parti du groupe forcément restreint de ceux qui savent. Il y a quelque chose qui s'apparente à la gnose dans tout cela... Et il n'est guère étonnant de voir ce genre de théorie prendre la relève des anciennes idéologies comme le marxisme, car lui aussi conférait à ceux qui y adhéraient ces deux mêmes sentiments : celui de connaître les mécanismes secrets de la marche de l'Histoire, et celui de faire partie de l'avant-garde initiée à ces mécanismes. Des personnes comme Alain Soral sont de beaux exemples du passage de l'idéologie à la théorie du complot, voire de la coexistence bouffonne de l'une et de l'autre dans un même esprit.

Intéressant.

Et pendant ce temps...

Citation

Le Pakistan repousse l'aide des Indiens
On savait déjà que le Pakistan avait mis un temps infini à accepter les 25 millions de dollars offerts par l'Inde pour aider ses sinistrés pourtant bien démunis. Islamabad a fini par dire oui à condition que cette aide passe par l'ONU. Delhi a obtempéré... Selon le Times of India d'aujourd'hui, les dons faits par des particuliers en Inde seraient quant à eux carrément refusés. Ils n'ont pourtant aucun caractère politique. (Figaro)

Et...

Citation

SRINAGAR, Inde (AP) — La police a procédé à des tirs de sommation et de gaz lacrymogènes pour disperser plusieurs centaines de manifestants ayant attaqué un poste de police et brûlé des bâtiments gouvernementaux au Cachemire samedi, alors que des dizaines de milliers de personnes sont descendues dans les rues pour protester contre la tutelle indienne sur cette région de l'Himalaya, ont annoncé les autorités.
Après les prières, samedi, au moins sept civils et six policiers ont été blessés près du poste de police situé près du lieu de pèlerinage d'Hazratbal, dans la banlieue de Srinagar, la principale ville du Cachemire administrée par l'Inde, a précisé un policier.
Plusieurs milliers de personnes ont participé à des marches de protestation au Cachemire indien, a-t-il ajouté.
Les musulmans du Cachemire ont célébré samedi l'Aïd el-Fitr, fête marquant la fin du ramadan. (Nouvel Obs.)

"Les théories du complots ont ceci de séduisant qu'elles donnent à qui y croit un sentiment de sécurité, celui d'avoir à disposition une explication ordonnée du désordre du monde, ainsi qu'un sentiment d'élection, celui de faire parti du groupe forcément restreint de ceux qui savent."

C'est vrai, mais n'est-ce pas le cas d'absolument toutes les théories ?

De plus, que l'on cède ou pas à la "théorie du complot", il faut bien dire que le mode d'action dit "attentat" n'existe que par la manipulation, celui qui le commet aussi bien que celui qui en est victime sont conduits à s'en servir , d'une façon ou d'une autre, puisque les objectifs touchés ne sont jamais déterminants, d'un point de vue, si j'ose dire, "militaire". A partir de là...

Le problème, c'est que s'il y a bel et bien des complots de toutes sortes, une théorie du complot tend à les fondre dans un seul plan d'ensemble voulu et élaboré par un groupe de personnes plus ou moins étendu (franc-maçons, groupe Bilderberg, Juifs, Eglise catholique, etc.).

Il n'y aurait rien de mal à proposer une "théorie du complot" dont le but serait de faire une explication typologique du fonctionnement de n'importe quel complot. Pareille théorie serait intellectuellement légitime. Les théories scientifiques ont pour but de démonter un mécanisme, pas de créer un bouc émissaire.

Le succès fleurissant des théories du complot (ou plutôt du mensonge) procède largement des atteintes portées à la liberté d'expression par l'adoption de lois mémorielles ou antiracistes (par exemple en France la loi Gayssot). Alors que ces hypothèses devraient être facilement ruinées par le débat contradictoire, elles n'ont plus aujourd'hui à faire face qu'à des procès en sorcellerie et à des condamnations, jamais à des arguments ou à des preuves, ce qui est évidemment assez inefficace pour lutter contre le pouvoir d'une idée, surtout si elle est fausse et relève de pure propagande.

Le mal premier est venu de l'Université de Lyon qui a validé les thèses de Faurisson. Donc si le débat intellectuel n'a pas lieu, la pénalisation est une mesure qui peut venir à l'esprit.

A l'esprit d'un dément.

Chose amusante : les théories du complot reposent sur l'idée maîtresse qu'un petit groupe de personnes est à l'origine d'un phénomène historique de grande ampleur ; bien sûr, seul un petit groupe de personnes est au courant des agissements prêtés aux conspirateurs fantasmés...

... Or je me demande si les "complotistes" ne sont pas victimes d'une sorte de phénomène de projection mimétique : ils donnent à une autre confrérie que la leur des intentions qu'ils pensent authentiques puisqu'ils sont capables de les penser comme opérationnelles. En un mot, il prêtent à leur bouc émissaire de sombres desseins qui sont leur désir et leur délire, c'est-à-dire en un seul mot : leur fantasme.

Toutafé !

Entièrement d'accord avec Agrippa.

Généralement le dément est isolé, ce ne fut pas le cas.

Il y eut toutefois des protestataires:

( Pour les dénigreurs(euses) d'Elisabeth Badinter; elle est signataire de cette pétition):

Appel du 12 décembre 2005 de "Liberté pour l’histoire" : "Émus par les interventions politiques de plus en plus fréquentes dans l’appréciation des événements du passé et par les procédures judiciaires touchant des historiens et des penseurs, nous tenons à rappeler les principes suivants : L’histoire n’est pas une religion. L’historien n’accepte aucun dogme, ne respecte aucun interdit, ne connaît pas de tabous. Il peut être dérangeant. L’histoire n’est pas la morale. L’historien n’a pas pour rôle d’exalter ou de condamner, il explique. L’histoire n’est pas l’esclave de l’actualité. L’historien ne plaque pas sur le passé des schémas idéologiques contemporains et n’introduit pas dans les événements d’autrefois la sensibilité d’aujourd’hui. L’histoire n’est pas la mémoire. L’historien, dans une démarche scientifique, recueille les souvenirs des hommes, les compare entre eux, les confronte aux documents, aux objets, aux traces, et établit les faits. L’histoire tient compte de la mémoire, elle ne s’y réduit pas. L’histoire n’est pas un objet juridique. Dans un État libre, il n’appartient ni au Parlement ni à l’autorité judiciaire de définir la vérité historique. La politique de l’État, même animée des meilleures intentions, n’est pas la politique de l’histoire. C’est en violation de ces principes que des articles de lois successives - notamment lois du 13 juillet 1990, du 29 janvier 2001, du 21 mai 2001, du 23 février 2005 - ont restreint la liberté de l’historien, lui ont dit, sous peine de sanctions, ce qu’il doit chercher et ce qu’il doit trouver, lui ont prescrit des méthodes et posé des limites. Nous demandons l’abrogation de ces dispositions législatives indignes d’un régime démocratique."


Les signataires : "Jean-Pierre Azéma, Elisabeth Badinter, Jean-Jacques Becker, Françoise Chandernagor, Alain Decaux, Marc Ferro, Jacques Julliard, Jean Leclant, Pierre Milza, Pierre Nora, Mona Ozouf, Jean-Claude Perrot, Antoine Prost, René Rémond, Maurice Vaïsse, Jean-Pierre Vernant, Paul Veyne, Pierre Vidal-Naquet et Michel Winoc

Elisabeth Badinter...celle qui explique la faible participation des femmes à l'Histoire par la sournoise et infatigable domination masculine ? Ah oui alors l'historien n'accepte aucun dogme, ne respecte aucun interdit, ne connait pas de tabous...

La société patriarcale n'a jamais existé en France bien entendu et les grandes écoles leur ont toujours été grande ouvertes vers lesquelles elles ont de tous temps été fortement encouragées M. Sorpasso ! Badinter Elisabeth délire.

Un extrait de la biographie de Suzanne Borel :

Suzanne Borel, née en 1904 et décédée en 1995, est la première femme à avoir été conseiller d’ambassade. A l’automne 1944, elle est devient directrice adjointe de cabinet de Georges Bidault qu’elle a rencontré dans la Résistance et qu’elle épouse en 1946. Diplômée en philosophie et en langues orientales, étudiante à l’École libre des sciences politiques, elle entre au Quai d’Orsay en 1930. Mais le directeur du personnel s’empressa de lui faire signer une lettre dans laquelle elle reconnaissait qu’elle ne pouvait en l’état actuel des lois être « affectée aux emplois des services extérieurs ainsi qu’à ceux réservés aux agents des cadres des services extérieurs »

Cette biographie ne nous dit pas qu'on dénicha, l'année suivante, que le poste de consul à Valparaiso, qui était du rang correspondant à celui de conseiller d'ambassade sans possibilité qu'il y ait en même temps un conseiller d'ambassade à proximité était aussi un poste d'officier d'état-civil, et donc un poste qui ne pouvait être tenu que par un homme jouissant (?) de ses droits politiques.

En conséquence, le concours fut fermé aux femmes.

"L’historien ne plaque pas sur le passé des schémas idéologiques contemporains et n’introduit pas dans les événements d’autrefois la sensibilité d’aujourd’hui."

Alors là c'est la meilleure, la majorité des historiens ne font que ça.

Majorité des historiens ?

Il est vrai que les journalistes de radio et de télévision ne sont pas des historiens, donc je modère mon propos.

Je ne vous comprends pas cher William. Ainsi donc les "complots politiques" ne sont que vue de l'esprit et projection mimétique ? La prise du Palais d'hiver en 1917 n'était pas le fruit d'un complot politique (pour prendre un exemple qui illustre on ne peut mieux comment "un petit groupe de personnes peut être à l'origine d'un événement historique de grande ampleur") ? Et les attentats du 11 septembre 2001 en Amérique étaient donc le résultat purement fortuit d'une contingence hasardeuses (vitesse du vent imprévisible ce matin, lourd sommeil suite à une nuit de débauche des responsables de la Défense aérienne du territoire, etc.) qui a conduit ces avions dans des erreurs de trajectoires que nul n'avait souhaitées et intensément préparées ?

Mais enfin si les événements politiques "de grandeurs ampleurs" n'étaient préparées par personne sinon la Main de Dieu, à quoi diable pourraient bien servir les partis politiques ?

Les théories du complot, en leur principe se justifient puisque les complots existent, ne sont pas une maladie de l'esprit qui les suppose, mais chaque hypothèse d'un complot doit se justifier, doit être étayée par un recoupement de faits qui dira irréfutablement le montage, la machination qu'elle dénonce. Le comploteur est généralement un auteur incomplet, qui saisit au passage des "chances" (comme nous l'avions relevé dans le cas des "chances pour la France" qui sont des créations incomplètes de leurs démiurges politiques) dont l'imposition au peuple historique relève, sinon d'un complot échafaudé de part en part, du moins d'une conspiration de conjonctures et de désir, tout l'art du politique consistant ensuite, mais ceci, tout le monde le sait, à faire accroire, en nageant la tête hors de l'eau dans le fleuve des événements, qu'on les commande et qu'on en ordonne le cours. Il me semble bien que cette image fut d'abord de Balzac.

Vous avez comme exemple remarquable l'attentat de Sarajevo, cher William.

Je n'ai jamais dit que les complots n'existaient pas, bien au contraire. Mais les théories du complot pêchent par une vision paranoïaque de l'histoire (ainsi la marche du monde qui serait réglée dans les détails depuis l'après-guerre par un petit groupe d'homme réunis dans la bourgade néerlandaise de Bilderberg) et le recours à des arguments qui vont à l'encontre de la règle du rasoir d'Ockham (il est plus simple de penser par exemple que l'effondrement des tours jumelles est le fait d'avions détournés par quelques hommes que par l'installation longue et forcément suspecte d'explosifs un peu partout dans les deux bâtiments, et ce par des équipes autrement plus conséquentes, et dont l'idée avait été en substance djà pensée dans un rapport de la CIA datant des années 60 : entre deux complots, je choisis celui qui me paraît le moins abracadabrantesque)

Vous avez tout à fait raison, cher William König. Les théories du complot sont avant tout motivées par la paranoïa, la volonté inconsciente de croire que les autres nous voudraient du mal. Dès lors, l'esprit veut à tout prix trouver un lien caché de cause à effet entre deux choses n'ayant aucun rapport, ou bien penser que si quelque chose de mal se produit, ce n'est jamais l'effet du hasard mais toujours provoqué délibérément par une personne mal intentionnée.

On pourra remarquer que la tendance à voir des complots partout est très présente dans les pays de culture musulmane : en effet, l'islam est un système incroyablement narcissique qui ne tolère aucune remise en cause et a une haute idée de lui-même. Ainsi, dans l'inconscient des individus, le fait de croire aux complots permet de toujours rejetter la faute sur les autres et de ne pas faire son auto-critique.

A ce titre, il est intéressant d'écouter le constat exceptionnellement lucide de cet intellectuel koweïtien :

Et la Conjuration des Poudres de Guy Fawkes, vous l'attribuez aussi à une vision paranoïaque et "musulmane" de l'histoire ? et les tentatives multiples d'attentats sur des hommes d'Etats ou de régicides, dont ont été la cible des hommes et des femmes aussi divers que Fidel Castro, De Gaulle ou Benazir Buttho, délires d'historiographes à l'imagination égarée par une vision paranoïaque des faits et des intentions humaines ? pffffffft!

Et la tentative de débarquement dans la Baie des Cochons à Cuba ? Fut-elle décidée spontanément, le matin même sans que personne, et surtout pas la CIA, n'en eût jamais conçu les plans ?

Certains complots peuvent aboutir, quand la boucle de la machination se referme par le fil de la chance; la plupart échouent, quand ce fil refuse de se nouer. Ainsi De Gaulle a survécu et la Conjuration des Poudres échoua. Je crois, sans qu'il me soit possible de le démontrer ici, que les comploteurs qui réussissent sont ceux qui savent parier sur ce fil et qui donc se refusent à clore parfaitement la boucle de la machination. Les conjurés qui voient leur plan aboutir auront été suffisamment humbles pour ne pas verrouiller complètement leur machination, et suffisamment sages pour savoir que dans l'aboutissement de toute entreprise complexe, la chance a sa part. Et de fait, à ceux-là, souvent la chance sourit.

Je vous signale au passage que la "théorie du complot" la plus en vogue en ce moment -- mais dans la diffusion de laquelle, cela, je vous le concède, les pays musulmans, Arabie Saoudite en tête, jouent un rôle déterminant -- est celle d'un prétendu "complot réchauffiste" relatif au climat de la planète, complot dont les conjurés seraient regroupés, par milliers, dans le GIEC.

Les théories du complot les plus délirantes ou tout simplement les plus bêtes, sont celles qui émanent des cavaliers blancs de la rationalité. Ceux-là sont les pires, qui vous disent que les "théories du complot" sont un complot de la paranoïa de certains, et qui vous rassurent ou vous raillent, selon leur humeur, en vous expliquant que la rationalité domine l'histoire et que celui qui voit l'irrationalité agir, poindre ou surgir n'est qu'un paranoïaque. Pourquoi ces gens sont-ils les pires ? Et bien parce qu'ils n'ont pas compris, ou refusent de comprendre que la paranoïa n'existe pas que dans sa forme passive et interprétative (comme vous l'épinglez chez les Musulmans) mais qu'elle sévit aussi chez les acteurs et les décideurs pour en orienter l'action. C'est ainsi que l'Holocauste, pour certains de ces cavaliers blancs de la rationalité, alors même qu'il était en train de s'accomplir, ne pouvait être que le produit d'une imagination délirante passive mais jamais active, et écartaient ainsi logiquement la possibilité de son fait. Voilà.

Me voilà retoqué "cavalier blanc du rationalisme"... un comble !... si j'avais su, j'aurais pas venu...

N'en soyez pas trop affecté, cher William. De temps en temps, notre Francis lâche les chiens : mieux vaut alors faire le gros dos.

Bien cher William,

Francis et moi sommes associés dans le crime.

Alors que Francis a planté ses crocs puissants dans votre échine courbée, je surviens et vous mords aux jarrets :

La citation exacte est "Si j'aurais su, j'aurais pas venu", source "Petit Gibus".

N'empêche que moi, j'ai pu constater, cet été, les ravages causés par les complotistes éoliens qui répandent leurs entre-axes partout sur notre beau pays.