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La grande déculturation

Envoyé par Alexandre Benfredj 
02 novembre 2010, 17:33   La grande déculturation
Quelques photographies prises récemment au musée du Louvre.





















02 novembre 2010, 17:38   Re : La grande déculturation
Très drôle !
02 novembre 2010, 17:39   Re : La grande déculturation
Mais voyons ! vous ne comprenez pas que ce sont des installations aléatoires éclatées.
Ah oui, très drôle ! Mais notre rire est un peu jaune, cependant.
Point commun entre tous ces amateurs d'art : baskets, jean's, shorts, sacs à dos, vestes ou pantalons de jogging...
02 novembre 2010, 17:48   Re : La grande déculturation
Quelques exemples parmi des millions j'imagine. C'est la noce du XXIe siècle. Gervaise est doctorante en histoire de l'art.
02 novembre 2010, 18:14   Re : La grande déculturation
Comme ils paraissent épuisés !
Alexandre,

Vous avez manifestement un problème de mise au point. Vérifiez que l'image du tableau est nette dans le viseur avant de presser le déclencheur !


Blague à part, l'idée est excellente. Si vous me permettez des souvenirs personnels, j'ai visité Léningrad en 1975, au sein d'un groupe dirigé par un vieux communiste tarnais, un ancien cheminot, arrêté une fois par les Allemands et déporté pour avoir malmené quelques trains, et arrêté une seconde fois pendant la guerre d'Algérie pour s'être couché sur les voies.

Cet homme qui n'avait jamais bénéficié d'une éducation suivie écoutait religieusement toutes les explications des guides soviétiques (fort compétents), à l'Ermitage ou ailleurs, et cela sans doute pour la dixième fois, et ne manquait pas de dire, à la sortie de chaque musée, qu'il était remarquable que le peuple puisse avoir accès à l'art.
Utilisateur anonyme
02 novembre 2010, 18:48   Re : La grande déculturation
(Message supprimé à la demande de son auteur)
02 novembre 2010, 19:01   Re : La grande déculturation
Ces photographies sont très réussies ! J'avais tenté de faire la même chose il y a quelques années, et j'étais sorti de ma séance de photographie complètement écoeuré...
02 novembre 2010, 19:05   Re : La grande déculturation
On voit bien qu'il y a trop de monde dans les musées, trop de gens qui s'ennuient et qui seraient mieux ailleurs.
02 novembre 2010, 19:18   Re : La grande déculturation
Je ne suis pas d'accord.
Il se dégage surtout de la série complète que le Louvre est un endroit de choix pour faire la sieste.
Sièges confortable, lumière diffuse étudiée, genoux bienveillant, brouhaha berçant... Et quel luxe que de pouvoir s'endormir sous l'oeil bienveillant d'une naïade de Rubens!

Si quelqu'un devait écrire un livre sur les meilleurs coins sieste de Paris, je serais surprise qu'il ne place pas le Louvre haut dans son classement. "Luxe et légèreté, ici vous ne serez pas dérangé".

Imaginez donc si le musée entreprenait de s'équiper de sièges similaires aux sièges "anti-clochards" de la RATP! Chute de popularité assurée.
02 novembre 2010, 19:18   Re : La grande déculturation
"On voit bien qu'il y a trop de monde dans les musées, trop de gens qui s'ennuient et qui seraient mieux ailleurs."

Une autre indicible vérité. Vous voudriez quoi, hein, Florentin ? Qu'on interdise l'accès des musées aux personnes qui portent des joggings ? Qu'on organise des examens d'entrée ? Qu'on opère une sélection parmi les visiteurs ? Vous ne trouvez pas ça bien, vous, que tout le monde se cultive ? Attention Florentin, vous êtes sur la ligne jaune, encore un pas et vous serez anti-démocrate.

Alexandre, ces photos sont de vous ? Bravo, elles sont très réussies. Je cherche toujours désespérément le nom de cette historienne qui a publié un livre de photographies du même genre sur les touristes à Auschwitz.
Utilisateur anonyme
02 novembre 2010, 19:20   Re : La grande déculturation
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Cela n'est pas indispensable de leur flouter le visage. En cas de procès, le droit à l'image céderait sans aucun doute devant la liberté d'expression : les images ne présentent pas spécialement de caractère dégradant et ont été réalisées dans un lieu public. (Il serait étrange que quelqu'un prenne au sérieux des touristes invertébrés contrariés d'avoir été photographiés alors que ceux-ci n'éprouvent aucune honte à s'étaler devant des centaines de visiteurs.)
02 novembre 2010, 19:26   Re : La grande déculturation
Flouter les visages ? Ah non, ce serait dommage de rater la dernière, au moins...
Oui, les photographies sont de moi, sauf la quatrième, la cinquième et la dernière, qui ont été prises par Noémie - nous traquons parfois les touristes de concert.
02 novembre 2010, 19:34   Re : La grande déculturation
Puisque vous aimez la dernière, je tiens absolument à vous présenter sa voisine :



Cher Didier Bourjon, merci à vous. Je vous propose mes vingt petites années pour rejoindre la "jeune garde", pour peu que l'on trouve un casque à plume à ma taille. Je lis souvent le forum mais pas encore assez.
Utilisateur anonyme
02 novembre 2010, 19:48   Re : La grande déculturation
(Message supprimé à la demande de son auteur)
02 novembre 2010, 19:49   Re : La grande déculturation
L'Ermitage, en 75 ???? J'y étais. Jean-Marc, on a dû se croiser...
C'était juste au moment des accords d'Helsinki... j'avais découvert durant ce voyage une grande réalité prolétarienne : les restaurants fermaient à onze heures pour rouvrir à deux heures, car le personnel déjeunait à ce moment-là...
02 novembre 2010, 19:55   Re : La grande déculturation
Plage, aérogare, salle d'attente des trains, musée du Louvre: où qu'elle soit, l'humanité moderne qui ne fait rien de ses petits doigts agiles, qui n'est pas dans l'interactivité -- pas de jeu au Louvre, comme au Palais de la Découverte ou au musée de la Villette où l'on appuie gaiement sur des boutons de console pour faire apparaître des images, des avatars, etc. -- s'avachit, se liquéfie comme le personnage d'un dessin fameux de Robert Crumb.


La culture sans la bougeotte WII, sans écran tactile, sans dimension ludique, ne vaut rien, n'est pas même de la culture pour vieux, dans une époque où l'enfant à console (inconsolable sans sa console) perdure jusqu'à des 45 ans.

La solution, vite: créer un Louvre virtuel 3D interactif, un Louvre sans tableaux ni statue: on entre, on se laisse guider par des robots, on tripatouille, on touchette, on fait apparaître des images, des jeux de lumière, des rampes clignotantes, c'est fun, ça occupe, tout s'anime, rien n'est réel. La reculturation passe par la cage animée du rat qui appuie de ses petites pattes démenées sur des pédales, des leviers, des mécanismes à bascule et à surprise, qui déclenche des voyants lumineux, qui, en un mot comme en mille, pour les jeunes, s'éveille, pour les vieux, reste éveillé, et dont on retarde habilement et ergonomiquement la survenue d'Alzheimer, pas plus, pas moins.
02 novembre 2010, 19:59   Re : La grande déculturation
Irresistible !
Un peu de compassion pour ces gens qui ont vraiment l'air exténués.

» Il se dégage surtout de la série complète que le Louvre est un endroit de choix pour faire la sieste.
Sièges confortable, lumière diffuse étudiée, genoux bienveillant, brouhaha berçant...


Et puis, en hiver il y fait chaud.

C'est donc Houellebecq qui avait raison ?...

« C'est ça la culture, me disais-je, c'est un peu (beaucoup) chiant, c'est bien; chacun est renvoyé à son propre néant. »
02 novembre 2010, 20:25   Re : La grande déculturation
Citation
Francis Marche
La culture sans la bougeotte WII, sans écran tactile, sans dimension ludique, ne vaut rien, n'est pas même de la culture pour vieux, dans une époque où l'enfant à console (inconsolable sans sa console) perdure jusqu'à des 45 ans.

"La culture (...) sans écran tactile (...) ne vaut rien".
Malheureusement le touriste aisé a totalement remédié à ce problème. Soucieux de ne pas avoir payé leur billet à 9€50 pour rien, ceux qui possèdent un iPhone ou un iPod équipé d'une caméra s'appliquent à filmer autant qu'ils peuvent.
J'ai pu voir un homme traverser la moitié de la Grande Galerie sans quitter des yeux l'écran de son iPhone, qui n'était même pas dirigé vers un mur.

Mais le Louvre propose déjà des audio-guides et des visites virtuelles (sur son site). Sans parler du développement des tags utilisés pour la réalité augmentée.
Gardons espoir, bientôt ces gens visiteront le Louvre depuis leur chaise de bureau ou leur canapé, seuls ou en famille, mais sans quitter leur mère patrie, et trop heureux d'enfiler leurs lunettes 3D pour l'occasion.

>> Un peu de compassion pour ces gens qui ont vraiment l'air exténués.

Philippe Meyer a raison depuis le début, sa proposition dans Paris la grande est excellente, placer dans une même salle les trois oeuvres les plus visitées du Louvre épargnerait à tous ces touristes bien des minutes de marche et de perdition, ainsi que l'obligation de traverser bien des couloirs aux murs couverts de croûtes...
02 novembre 2010, 23:07   Re : La grande déculturation
Je sais que j'ai tort mais ça ne fait rien, je regrette l'époque des musées déserts.
02 novembre 2010, 23:08   Re : La grande déculturation
Non, non, Noémie, celui qui visite le Louvre depuis son fauteuil ou dans sa play room se voit amputé de son réel, savoir le seul réel qui vaille: celui où il peut se faire photographier par son compagnon, sa compagne, ses complices qui, s'obligeant tel l'animal de zoo qui gratte le dos de son congénère en escomptant la pareille, le saisiront digitalement, dans toute sa viande réelle en train d'arpenter les galeries du Louvre virtuel à venir. Seul le visiteur physique, déplacé, venu là, est réel, en 3D non projeté, palpable, tel qu'en lui-même en action dans le carton-pâte électronique. Le sujet, le thème de la visite de ce Louvre virtuel qu'on va lui préparer, ce sera lui, le visiteur, îlot persistant de réalité dans l'océan hologrammatique lequel, encore physique, n'est déjà plus qu'un plasma accompagnateur, décor interchangeable d'un week-end l'autre (Guggenheim de Bilbao, Louvre, Rijkemuseum), standardisé et modulable, n'ayant d'autre finalité que celle d'enjoliver les pérégrinations de la bête ambulante, épaisse, équipée, centre du monde connu (du monde photographiable) et collectionneuse de soi. De musée en musée, le déculturé se collectionne, se confirme, se fait à la lime les ongles des pieds, se fait les pieds. Cela lui suffit. Mais aussi, cela ne peut lui être retiré sans qu'il s'en sente, à bon droit, lésé.
C'est juste, Francis, la visite au musée n'existe que parce qu'elle figure sur facebook ou flicker.

Florentin, il y a six ans, j'ai visité le musée Kirov, à Saint-Petersbourg. J'étais le seul visiteur pour quatre vieilles gardiennes. L'une me précédait, allumant la lumière des pièces, une autre suivant pour éteindre. Je me donnai une contenance en regardant attentivement tous les cartouches, sans mot dire (je ne parle pas un mot de russe et à peine pouvais-je deviner les patronymes). Ce fut une visite longue, sinistre et étrange.
02 novembre 2010, 23:22   Veni Creator Spiritu
Ah oui la voisine est très bien aussi, en effet. On sent que l'Esprit va descendre et l'habiter d'un instant à l'autre (et ne dites pas méchamment : « Il aura de la place...»)
02 novembre 2010, 23:37   Re : La grande déculturation
Jean-Marc, bien cher, le musée le plus désert du monde, et l'un des plus envoûtants, est le musée d'anthropologie de Papouasie-Nouvelle-Guinée, sis dans la campagne qui entoure Port-Moresby, la capitale de cette île: il est si désert qu'il faut prendre rendez-vous avec le gardien lequel, vous accompagnant, vous précédera dans ses ténèbres équipé d'un casque muni d'une lampe de mineur! pour éclairer ses cimaises et ses murs comme les parois de Lascaux ! dans la chaleur étouffante, la climatisation ayant été coupée depuis longtemps par souci d'économie.
Francis,

Je commence à être tenté par la Nouvelle-Guinée...

Dans le secteur (si j'ose dire), vous avez le très intéressant musée baba-nyonya de Malacca, qu'il faut absolument voir un jour de semaine, et un samedi. C'est désert la semaine, et le samedi vous avez environ trois mille visiteurs de Singapour au mètre carré. J'ai passé tout un samedi d'août à admirer les touristes singapouréens (est-ce la façon correcte de les nommer ?), c'était la journée où nous nous manquâmes de quelques centaines de kilomètres...
02 novembre 2010, 23:58   Re : La grande déculturation
Oui le musée baba-nyonya que j'ai visité il y a 17 ans déjà ! est une merveille de cette région. Il donne à voir les origines d'une société coloniale impuissante qui, à cause de cette impuissance même, fut tolérée, utilisée, par les populations autochtones et leurs chefs pour s'édifier, se moderniser, donner plus tard la société singapourienne voisine qui doit tout à cette société moderne primitive. L'enracinement portugais dans ces ports marchands des premiers temps modernes en Orient fut exemplaire. Dans leur manière d'être à l'étranger, les Portugais furent presque toujours exemplaires. A Timor Leste, que pourtant ils ne développèrent point, leur langue, adoptée par les populations, fut un outil de résistance à la domination. J'aimerais vivre assez longtemps pour pouvoir explorer ce mystère. Est-ce un des mystères du catholicisme, celui d'une universalité douce, souveraine, d'un empire non combattant, d'essence pontificale et mystique et qui s'offre comme un don ? A vous de nous le dire.
Et Macao, Francis, et Macao et sa pataque ?

A Singapour, confirmez-le moi, le respect pour les "Tuan" (est-ce ainsi qu'on disait ?) s'est perdu, et les Anglais ont été remplacés par les "expats". A Hong Kong, il me semble, vous trouvez une ville splendide, mais où les traces britanniques s'effacent peu à peu (seul le thé du Peninsula résiste).

Or, à Macao, alors que les Portugais furent très peu nombreux, poussez la porte d'une taverne, et vous êtes à Lisbonne... j'ai trouvé cela très étonnant...

Très étonnante aussi la bienveillance dont les anciens colonisés font preuve à l'égard du Portugal, que ce soit à Macao, au Cap-Vert ou à Rio, alors que les Anglais n'inspirent que la haine et le ressentiment...

Je ne pense pas que ce soit une question de religion : les Espagnols ne sont pas aimés (davantage tout de même que les Anglais). Ce doit être lié à la "portugalité".
La troisième photo (celle de l'enfant assis), est un extraordinaire sujet... de tableau, ou le début d'une réécriture du Petit Poucet où la sombre forêt serait remplacée par un musée.
Utilisateur anonyme
03 novembre 2010, 18:22   Re : La grande déculturation
L'avachissement guidant le peuple, d'Alexandre Delacroix, est vraiment très réussi !
Utilisateur anonyme
03 novembre 2010, 18:42   Re : La grande déculturation
Le Musée Gugenheim de New York reprend le principe de la rampe d'accès d'un parking. C'est volontairement caricatural car un musée ne devrait jamais n'être rien d'autre qu'un garage dans lequel s'entassent les oeuvres (d'art). Alors déculturation ? Qu'est-ce qui est déculturé ? Le musée du Louvre ou les visiteurs du musée du Louvre ?

Guggenheim
Louvre
Je ne suis pas certain que Wright ait eu cette idée-là en tête...
03 novembre 2010, 23:28   Re : La grande déculturation
Je préfère Bilbao... sans rien dedans !
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