Le site du parti de l'In-nocence

45455 personnes aiment ça

Envoyé par Quentin Dolet 
04 novembre 2010, 01:04   45455 personnes aiment ça
Chers amis, que penser d'une chose pareille ?
04 novembre 2010, 03:55   Re : 45455 personnes aiment ça
Rien. Je veux dire, cher Olivier, que l'on peut en penser le rien actuel.
(Dans un registre bien moins brutalement acculturé, je vous avoue que cela m'a aussitôt évoqué ce flm clinquant, improbable et fumeux de Liliana Cavani, Portier de nuit.)
04 novembre 2010, 17:22   Re : 45455 personnes aiment ça
Le Sympa éradique toute "common decency"; il fonde son pouvoir sur le fait qu'on ne peut rien lui opposer, parce qu'il est l'Unanimité joviale, le Consensus victorieux. Auschwitz est sur facebook. Des milliers d'amis du Mémorial aiment ça. Que dire ? Le goût lui-même est antipathique de toutes façons, comme la décence, la pudeur ou la sobriété - valeurs potentiellement nuisibles à la Réseaucratie.
07 novembre 2010, 08:47   Re : 45455 personnes aiment ça
Rien - pas davantage - si ce n'est la crainte que l'avant-garde du sympa ne soit beaucoup plus avancé dans sa reconquête du sacré, le non-sympa par excellence - je ne parle pas, bien entendu, des innombrables profanations virtuelles, procédant d'une volonté consciente de profaner -, il suffit de voir ce clip vidéo où un survivant danse, à Auschwitz, sur l'air d'I will survive... "J[e n'] aime [pas] ça".

Mais d'un autre côté, est-ce nocent ? N'étant que visiteur de votre site dont j'apprécie l'excellence du contenu - "j'aime ça", donc - sans être pour autant, loin s'en faut, un fervent in-nocent, je me suis déjà demandé si le concept d'in-nocence n'avait pas parfois de fâcheuses ressemblances avec le sympa (reflet inversé peut-être ?).
Il n'empêche. C'est pas sympa de fumer, c'est "dégueu" de laisser son chien déféquer sur les trottoirs, c'est pas "cool" de mettre ses pieds sur les banquettes de métro... L'enlaidissement du monde, en perpétuelle accélération, se fera sans difficulté l'allié de l'hygiénisme ambiant... Leur duo ne criera victoire que quand le monde sera devenu aussi antiseptique qu'un hôpital, où de petits chemins de caillous entourant des pelouses entretenues, sur lesquels bronzeront des touristes en soi, étrangers au Monde, mèneront à d'improbables cafés citoyens, non fumeurs et sans alcool, où l'on discutera, autour d'un smoothie, des mérites comparés du bio et du commerce équitable...
"Paris alors, dans les limites de ses vingt arrondissements, ne dormait jamais tout entier, et permettait à la débauche de changer trois fois de quartier dans chaque nuit. On n'en avait pas encore chassé et dispersé les habitants. Il y restait un peuple, qui avait dix fois barricadé ses rues et mis en fuite des rois. C'était un peuple qui ne se payait pas d'images. On n'aurait pas osé, quand il vivait dans sa ville, lui faire manger ou lui faire boire ce que la chimie de substitution n'avait pas encore osé inventé"...
Qui me rendra les douces nuisances d'un monde disparu ? Un monde que je suis même trop jeune pour avoir connu...

Et qu'on ne me dise pas : "Mais va donc voir ailleurs, eh, banane ! Tu les trouveras tes nocences rigolotes, dans les bordels d'Asie et les guerres d'Afrique... Là tout n'est que désordre et débauche, fumée, bruit et volupté", car je ne regrette que ce temps, cette courte période de l'histoire du monde, durant laquelle, sur fond de progrès social continu, en France, il restait quelque chose comme une civilisation, où l'on savait s'accommoder des vices, sans même envisager possible leur éradication définitive... Et je n'en approuve pas les excès ! Et je sais que la vie n'y était pas toujours facile ! "Les menteurs étaient, comme toujours, au pouvoir ; mais le développement économique ne leur avait pas encore donné les moyens de mentir sur tous les sujets, ni de confirmer leurs mensonges en falsifiant le contenu effectif de toute la production. On aurait été aussi étonnés alors de trouver imprimés ou construits dans Paris tous ces livres rédigés depuis en béton et en amiante, et tous ces bâtiments maçonnés en plats sophismes, qu'on le serait aujourd'hui si l'on voyait resurgir un Donatello ou un Thucydide"...
Pour que tout soit clair : je préfère malgré tout vivre dans le meilleur des mondes qu'on nous prépare, que dans les enfers qui peuplent le monde (mais il me faut bien avouer que je suis faible, et assez lâche... j'écris sous pseudonyme, c'est dire !)

(Excusez-moi d'avoir fait autant dévier ce fil... j'ai été victime d'une logorrhée matinale, et je sens déjà que je ne résisterai pas au désir de tout "envoyer", alors qu'il faudrait tout effacer... comme d'habitude je ne vois aucune objection à ce que le modérateur des lieux ne supprime mon message s'il est jugé non pertinent).
(J'ajoute que je vous prie par avance d'excuser ma perplexité si elle n'est due, comme je le crains, qu'à ma fréquentation insuffisante de la prose de Renaud Camus. Je comptais d'ailleurs me reporter à l'Abécédaire de l'in-nocence...)
(Mais je ne devrais pas autant "m'excuser", veuillez m'en excuser).
Seuls les utilisateurs enregistrés peuvent poster des messages dans ce forum.

Cliquer ici pour vous connecter