Un peu tard...
Ecouteurs islamiques pendant le cours de musique
Une jeune fille va à l'école avec des écouteurs isolants dans les oreilles parce que son père ne veut pas qu'elle suive le cours de musique : "Affaires d'infidèles." Cela se passe au collège de Reggello.
Reggello (Florence) : Depuis plus d'un an, une jeune fille de quinze ans suit le cours de musique avec des bouchons dans les oreilles. Ainsi l'a voulu son père, Omar, Marocain de confession musulmane qui considère comme impure la musique, une "affaire d'infidèles". Cela se passe au collège public de Reggello, en classe de quatrième, où le père de la jeune fille et les enseignants ont concocté cette parade originale pour permettre à la collégienne de rester en classe pendant le cours d'éducation musicale. Et ainsi, pendant que ses camarades de quatrième jouent d'un instrument, chantent, font du solfège, elle se soustrait à tout cela au moyen d'une paire d'écouteurs isolants. Elle observe ses camarades à la flûte, mais elle ne les entend pas. Elle voit bouger leurs doigts, mais elle demeure totalement sourde aux sons émis par les instruments. C'est comme ça, chaque semaine, au premier tintement de la clochette annonciatrice du cours de musique. Désormais, la mécanique est bien huilée, mais jusqu'à l'année dernière, entre la famille marocaine et l'administration du collège, il y a eu bien des grincements. Quand elle avait musique, la jeune fille n'allait pas à l'école et, souvent, perdait des journées entières. Trop de ces absences entraînèrent son exclusion. Le proviseur signala le cas au maire et aux gendarmes.
Une plainte fut déposée, un procès engagé, encore en cours, à l'encontre du père, accusé d'avoir contraint sa fille à ne pas se soumettre à l'obligation de scolarité. Nonobstant la plainte, les parents demeurèrent inflexibles : "Pas de musique pour notre fille. Sinon, pas d'école." On parvint de la sorte à la solution qui prévaut actuellement.
"Happy end", au moins pour les parents et les enseignants. Quant à la jeune fille... Là-dessus, le père n'a pas le moindre doute : "Ma fille est heureuse de suivre les règles du Coran. Notre religion nous oblige à ne pas étudier la musique, c'est écrit dans les textes sacrés. Je ne me sens pas dans la peau d'un fanatique, mais dans celle d'un fidèle à la foi musulmane. Je crois que je suis le premier en Italie à avoir soulevé ce problème, mais j'en suis content et si j'avais à le refaire, je le referais." Le protagoniste de cette affaire, Omar R, est l'un des représentants de la communauté musulmane de Reggello. SOn initiative a suscité cirtique et perplexité à travers tout le pays. "Nous respectons les traditions religieuses de tous nos concitoyens - a commenté le premier adjoint de la ville, chargé des affaires scolaires, Cristiano Benucci - mais je rappelle que tout doit être fait afin que toutes les matières soient enseignées aux élèves. Parmi celles-ci, la musique, qui est une grande tradition à Reggello et doit être apprise par tous les enfants. Il est difficile de comprendre ce qui peut pousser un parent à interdire l'écoute de la musique à sa propre fille. " Sur la même longueur d'ondes que le premier adjoint, le responsable de la politique sociale : "Notre école accueille tout le monde, mais les musulmans devraient s'adapter à la culture du pays qui les reçoit".
Plus modérée, le proviseur : Vilma Natali : "Nous avons trouvé une solution équilibrée, qui satisfait aussi bien les parents que les enseignants. L'affaire ne prend pas un retentissement disproportionné." "Quoi qu'il en soit", précise cette responsable "je crois que la jeune fille n'obtiendra pas de grands résultats par cette métode éducative."
Ce choix est en revanche compréhensible aux yeux de l'imam de Florence, Izzedin Elzir, : "Le monde musulman interprête la musique de deux façons : elle peut être quelque chose d'illicite et d'immoral, ou bien une activité artistique positive." Elzir, bien que retenant cette deuxième hypothèse, met en avant que "tout doit aller dans le sens du chois éducatif de la famille." En outre, ajoute l'imam, "il est nécessaire de travailler à la cohésion de notre société en respectant les croyances de chacun et en évitant de créer un alarmisme médiatique."
Francesco Rutelli, par une question urgente au ministre Gelmini, demande une intervention immédiate dans cette affaire. "Certaines restrictions - argumente Rutelli - auraient d'abord conduit la jeune fille à pratiquer l'absentéïsme scolaire, puis, rien que ça ! à devoir se présenter au cours de musique les oreilles bouchées par des écouteurs isolants, tout cela à cause d'une interprétation démentielle de son père, selon qui l'écoute de la musique serait illicite, et, tant qu'à faire, immorale ! Si de tels faits venaient à être confirmés - poursuit le leader d'Alliance pour l'Italie - nous serions face à une violation criante de notre Constitution, et des droits humains fondamentaux de cette jeune collégienne, à une interprétation équivoque des principes de tolérance et des valeurs de l'hospitalité, et enfin à un renoncement à l'impératif d'éducation qui incombe à l'école italienne." "Le pluralisme est au fondement de la culture italienne et en aucune façon on ne peut le comprendre comme une interdiction d'accès à la culture, qu'elle soit musicale ou artistique." observe Rutelli qui, dans sa question, demande au ministre "Quelles dispositions a-t-il l'intention de prendre pour faire cesser une telle situation de fanatisme anti-éducatif, incompatible avec la démocratie ?" et "Quelles mesures il entend mettre en oeuvre à l'égard de cette acceptation prolongée, de la part des structures scolaires régionales, d'une semblable situation, aussi paradoxale qu'incivile et hors-la-loi."