Voici une première série d’éléments chiffrés, assénés avant d’aborder la partie «proposition de solutions ».
Entre 1962 et 1999, le nombre de personnes habitant une résidence principale en France (donc en ne tenant pas compte des personnes logées en collectivité) est passé de 45,3 millions à 57,2 millions. Cette hausse a donc été de 30 %.
Dans le même temps, la croissance du nombre de résidences principales a été nettement plus forte. Elles ont augmenté de 14,6 millions à 23,9 millions, soit une hausse de 63%.
Cela s’explique par la forte baisse du nombre de personnes par résidence principale : il est tombé de 3,1 à 2,4.
Si on considère les résidences secondaires et les logements inoccupés, on voit que leur nombre a, littéralement, bondi : de 2,4 millions en 1968 à 4,9 millions en 1999.
Globalement, nous constatons donc une hausse du parc résidentiel de 17,022 millions à 28,692 millions, avec les impacts qu’on imagine sur l’environnement, l’espace et les paysages. Ce parc s’est accru de près de 70%.
Contrairement à une idée reçue, la hausse de ce parc n’est pas principalement due à l’augmentation de la population. Si le seul changement avait été celui de la population, le total n’aurait crû que de 29 %, donc en fait de 4 millions à peu près. Or, il a crû de près de 12 millions. Les 8 millions restants s’expliquent, pour 2,5 millions à peu près, par l’importance de le thésaurisation immobilière (immeubles laissés vacants et résidences secondaires) et pour 5,5 millions par les changements des habitudes de vie (diminution très marquée de la taille des foyers).
Ces chiffres sont déjà inquiétants, mais ils masquent une autre réalité. L’urbanisme en tâche d’huile est aussi largement dû aux changements de structure de l’habitat.
Prenons un exemple concret, celui des douze arrondissements centraux de Paris, le Paris historique.
Ces 12 arrondissements hébergeaient 1,1 millions de personne en 1962, ils n’en hébergent plus que 0,7 millions. Ils comptaient 500000 résidences, ils n’en comptent plus que 400000. Le total du parc était de 522000 logements, il est tombé à 487000. Il y a donc eu destruction de logements (au profit des bureaux) et aussi une thésaurisation extrême. Les Ier, IIème, IIIème et VIème comptent plus du quart de leurs logements en « secondaire ou inoccupé », alors que la proportion n’était que de 5% il y a quarante ans.
Paris, à l’heure actuelle compte 75000 résidences secondaires et, chiffre inouï, 136000 logements vacants. Des situations du même ordre sont constatées dans les communes les plus recherchées (Neuilly, 16 % de non-occupation, Levallois, 19%, Puteaux 15%) et sont absentes des communes les plus pauvres (Bobigny, 6%, Dugny, 4%).
En province, des situations de « rétention urbaine » s’observent aussi. Elles sont accompagnées d’un phénomène spécifique, l’abandon du bâti existant. Dans les Alpes-Maritimes, les trois-quarts des maisons de Saint-Martin-Vésubie ne sont pas des résidences principales ; dans le Gard, les deux-tiers des maisons de Saint-André-de-Valborgne sont dans la même situation ; en Corrèze, 60% des maisons de Tarnac (pourtant célèbre pour ses néo-ruraux) sont dans cet état.