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Michel Serres dans ses œuvres

Envoyé par Phil Steanby 
C'était hier soir (ou plutôt ce matin) sur France Info. Le thème de la chronique de Michel Serres était : "Les grands hommes"... Je coupe le début.



[...] Imaginez que Napoléon revienne, ou imaginez que Alexandre revienne parmi nous. Ils se promèneraient par exemple de Paris vers Moscou en ensemençant la totalité de l’Europe, tous les quinze jours ou tous les mois de quelques dizaines de milliers de morts. Ces gens là, on les mettrait devant des tribunaux, forcément ! Et ils ne nous apparaîtraient non pas comme des héros mais comme des criminels, et même des criminels de guerre. Alors tout d’un coup, cette destruction progressive des grands hommes fait poser la question : à combien de mensonges doivent la gloire de certains grands hommes ? Et puis, y-a-t-il encore des grands hommes ? … de vrais grands hommes, etc ?

Et moi qui suis un homme de sciences, je m’aperçois alors qu’en effet, il n’y a plus de grands hommes comme Einstein ou Poincaré. Pourquoi ? Parce que la communauté scientifique travaille comme tel et a des résultats comme tel, que les grands résultats aujourd’hui sont signés de cinquante à soixante noms. Donc, la perte des grands hommes.

Alors vous posez la question : avons-nous aujourd’hui besoin de grands hommes ? Oui. On en a besoin, dites-vous pour la formation des groupes, pour l’éducation, pour l’exemple, pour la politique, pour la morale… on a besoin de phares. Mais, est-ce que l’on en a vraiment besoin ? Est-ce que l’on va rester longtemps des enfants pour avoir besoins de ces gens là ? Voilà une question décisive. Et cette question décisive, je vais la traiter et essayer de l’expliquer.

Je crois que souvent l’histoire des religions permet de comprendre cela. Pour une raison très simple. Par exemple, si vous relisez la Bible, vous verrez qu’il y a une idée dominante, celle dont parlent les prophètes : « Attention, il ne faut pas croire aux faux Dieux ! » Et même au Panthéon – on donnait ce nom en Grèce aux temples consacrés à tous les dieux -, où sont placés les grands hommes, mais dont les médias viennent précisément de me dire qu’ils ne sont plus les grands hommes, que leur gloire est fondée sur des mensonges, sur la toxicomanie, sur le vol dans d’autres cas, la manipulation, la guerre, les morts, ce sont par conséquent aussi des faux Dieux.

Et pourquoi servons-nous des faux Dieux ? Avons-nous besoin des grands hommes ? Oui, je vous avais dit que l’on en avait besoin. Mais voilà que nous avons fait une découverte extraordinaire : ils étaient faux ! Nous sommes devant des faux Dieux ! [Ici, le compte rendu de l'émission que je suis allé pêcher sur le site [resistanceinventerre.wordpress.com] n'est pas fidèle : l'intervieweur demande : "Tous faux ? Pas tous, quand même !" Et Michel Serres de répondre : "Si ! Tous !"] Et ils l’étaient tous, absolument tous ! Alors, si ce sont des faux Dieux, qu’est-ce qui va se passer pour l’Histoire ? Est-ce que nous ne sommes pas au début d’une nouvelle Histoire ?

Regardez maintenant les jeunes dans le monde arabe. Tout le monde dit : « ils n’ont pas de leader, ils n’ont pas de chef, ils n’ont pas de meneur ! » Et bien tant mieux ! Regardez maintenant : ils sont en train d’envahir les places d’Espagne ces jeunes là. Ils n’ont pas non plus de grands hommes. Grâce aux médias, et tout d’un coup, je m’aperçois que ces médias ont une fonction prophétique, celle de détruire peu à peu les mensonges qui faisaient la gloire des grands hommes.
Alors soudain on arrive à une nouvelle histoire qui peut être sera tout à fait surprenante, parce qu’elle se passera précisément des faux Dieux. Et si justement, ces jeunes là, sur les places publiques du monde arabe, de l’Espagne et peut être bientôt de Berlin et de Paris, est-ce que par hasard, ce ne sont pas des hirondelles qui annoncent un printemps de la démocratie sans faux Dieux ?

M.P. : Mais alors, les grenouilles qui demandent un roi, c’est fini ?

Dans ce cas là, ce serait en effet caduc et les médias auraient eu une fonction prophétique extraordinaire de détruire les mensonges de la gloire des grands hommes…
Ah, mais c'est très bien, cela : on attend donc que Michel Serre, qui se prend pour un grand homme, déboulonne sa propre statue...
Ecouter ceci vers minuit et demie du matin, un soir d'orage violent où le ciel, sur la ville jaune, clignote plusieurs fois par seconde, vous donne l'impression très concrète de vivre un tournant de l'histoire, un renversement des valeurs, et rend très palpable la puissance redoutable du ressentiment démocratique mâtiné de pacifisme, d'ultrapénalisme bon ton, et de tiers-mondisme à deux sous.
Utilisateur anonyme
06 juin 2011, 10:24   Re : Michel Serres dans ses oeuvres
(Message supprimé à la demande de son auteur)
"Imaginez que Napoléon revienne, ou imaginez que Alexandre revienne parmi nous. Ils se promèneraient par exemple de Paris vers Moscou en ensemençant la totalité de l’Europe, tous les quinze jours ou tous les mois de quelques dizaines de milliers de morts."

Et Mahomet ? simple oubli sans doute de cet homme qui ne cesse d'enfoncer les portes ouvertes de la pensée unique en se donnant des airs socratiques .

"et tout d’un coup, je m’aperçois que ces médias ont une fonction prophétique, celle de détruire peu à peu les mensonges qui faisaient la gloire des grands hommes. "
Ah ça, c'est bien vrai, m'dame Michu ! même qu'aujourd'hui, ils préfèrent répandre les mensonges qui font la gloire d'un monsieur Hessel , du philosophe Lilam Thuram ou des Résistantes comme Josiane Balasko et E. Béart !

"Alors soudain on arrive à une nouvelle histoire qui peut être sera tout à fait surprenante, parce qu’elle se passera précisément des faux Dieux."
C'est bien vrai, aussi, ça, m'dame Michu ! Vaut mieux remplacer les faux dieux par les vrais de vrais comme Allah. Avec eux au moins on risque pas de massacres !

Je suis toujours étonnée des sornettes que débite M. Serres.

Ce qui m'étonne aussi , c'est que l'on puisse croire que de ne plus avoir de "grands hommes" au sens que l'on donnait hier à cette expression diminue les risques de massacres sur la planète. Je ne vois pas en quoi répandre une mentalité petite bourgeoise d'épicier, de comptable et de simple consommateur puisse prévenir en quoi que ce soit l'humanité contre les crimes à venir. Au contraire ! Pour paraphraser Churchill, je dirai, que nous aurons tout simplement , à la fois, et la mentalité de consommateur et les massacres.
« Et Balzac ? Même Balzac ?
— Oui, même Balzac.
— Proust, vous n’allez quand même pas me dire que…
— Si, si.
— Et Beethoven, même Beethoven ? Et Delacroix aussi ?
— Même Beethoven. Et Delacroix. Et tous les autres, et quiconque dont la tête a dépassé, dépasse et dépassera. »
Lilam Turam : ça au moins ça résonne !
Ce doit être un syndrome des esprits qui furent puissants (M. Serres a écrit quelques vrais bon livres, si si, je vous assure): ils vieillissent en se muant Ravi-de-la-Crèche que la modernité plonge dans l'extase. Comblé d'honneurs académiques, au faîte de la gloire, ils tiennent à tout prix à mourir heureux, et pour ce faire, on les voit prêts à sourire avec attendrissement, émerveillement volontariste, à tout ce qui bouge.
Utilisateur anonyme
06 juin 2011, 17:02   Re : Michel Serres dans ses œuvres
"Dieu, dit Saint-Augustin, a fait les grands hommes chacun ut ordinem saeculi praesentis ornaret". (Contra Julian., V,14 - cité par Bossuet dans l'Oraison funèbre de Louis de Bourbon).

Dieu a fait M. Serres ut ordinem saeculi praesentis corrumperet.
Utilisateur anonyme
06 juin 2011, 18:42   Re : Michel Serres dans ses œuvres
Si je puis me permettre, il me semble que vous êtes un peu durs avec ce vieil érudit. D'une part, c'est un homme qui a une haute conscience écologique et, dès lors, des plus in-nocentes. D'autre part, le cœur de son intervention est tout à fait pertinent. Le voici : « ...et tout d’un coup, je m’aperçois que ces médias ont une fonction prophétique, celle de détruire peu à peu les mensonges qui faisaient la gloire des grands hommes. » Autrement dit : la transparence hyperdémocratique naturalise l'exploit, l'explique, le rationalise, le trivialise. M. Serres se fait ici nietzschéen. Souvenez-vous de ce qu'écrivait Nietzsche dans l'extrait que j'ai cité dans le fil L'origine de la décivilisation : « D’où vient-il donc que plus le monde est devenu intelligible, plus a diminué toute espèce de solennité ? » M. Serres ne dit rien d'autre que ce qu'écrivit Nietzsche : l'intelligibilité croissante du monde le désenchante. La gloire, l'honneur, la grandeur, toutes ces qualités quasi surhumaines, du moins exceptionnellement humaines, dépendaient aussi de mensonges et de censures qui les purifiaient de tout élément corrupteur, de tout défaut, travers, vice ou turpitude auxquels ces hautes qualités étaient nécessairement mêlées. L'art est l'illusion qui nous délivre de la vérité, disait Nietzsche. La vérité l'a emporté sur l'art : c'est ainsi qu'il faut comprendre le message de l'érudit aux sourcils broussailleux.
Michel Serres est épinglé dans le dernier volume paru du Journal de Renaud Camus, Kräkmo. Dans le cadre de sa campagne académique, Renaud Camus rend viste à Valéry Giscard d'Estaing. Il s'aperçoit vite que l'ancien Président de la République et récent académicien connaît fort mal la plupart de ses confrères. Renaud Camus est amené à le renseigner sur plusieurs Immortels. Et VGE de lui demander : "Qui est donc ce Serres, ce grand type qui parle tout le temps ?" (cité de mémoire, je n'ai pas le livre sous les yeux).
Citation
Henri Lesquis
M. Serres ne dit rien d'autre que ce qu'écrivit Nietzsche : l'intelligibilité croissante du monde le désenchante. La gloire, l'honneur, la grandeur, toutes ces qualités quasi surhumaines, du moins exceptionnellement humaines, dépendaient aussi de mensonges et de censures qui les purifiaient de tout élément corrupteur, de tout défaut, travers, vice ou turpitude auxquels ces hautes qualités étaient nécessairement mêlées. L'art est l'illusion qui nous délivre de la vérité, disait Nietzsche. La vérité l'a emporté sur l'art : c'est ainsi qu'il faut comprendre le message de l'érudit aux sourcils broussailleux.

Terminant la lecture de Darius dans l'ombre d'Alexandre, où Pierre Briant examine et récapitule les traditions historiographiques sur ces deux rois, je me suis rendu compte que la grandeur d'Alexandre avait été construite par les Anciens en opposition à ses petitesses et défauts. Autrement dit, le grand homme en tant que mythe et construction littéraire n'est pas une figure simplifiée et purgée d'éléments corrupteurs (sauf dans les dictatures barbares du XX°s), mais semble porter en lui la matière de sa propre critique, ou même de sa propre réfutation. L'art est bien cette illusion qui nous délivre de la vérité, (je crois que Nietzsche pensait surtout à la musique), mais cette illusion, pour être vraisemblable et divertissante, ne sera jamais univoque. Le panégyrique est un genre ennuyeux.
Les "petits travers" qu'ils ont tous ne rendent pas nos héros moins héroïques : par eux ils le sont davantage car ainsi ce sont des hommes. Les Grecs allaient plus loin, ils rendaient très humains jusqu'à leurs dieux en leur prêtant de nombreuses petitesses.
La principale idole à déboulonner aujourd'hui est Mahomet. Je suppose que Nietzsche le ferait alors que Michel Serres s'en garde bien, et ce n'est pas la première fois.
Utilisateur anonyme
07 juin 2011, 12:31   Re : Michel Serres dans ses œuvres
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Michel Serres est tellement subtil qu'il oublie d'être intelligent. Et il récidive.
Pour aller dans le sens de Cassandre dont je partage à la virgule près les analyses, j'ajouterai un réflexion que je rumine depuis un certain temps. L'affaire des versets sataniques n'a pas donné grand chose comme on aurait pu s'y attendre. La réponse est sans doute que tous les versets sont sataniques.
Citation
Francis Marche
[...] ils vieillissent en se muant Ravi-de-la-Crèche que la modernité plonge dans l'extase.
[...] ils tiennent à tout prix à mourir heureux, et pour ce faire, on les voit prêts à sourire avec attendrissement, émerveillement volontariste, à tout ce qui bouge.

Je trouve, une fois encore, votre remarque pertinente, cher Francis. Mais pourquoi la restreindre aux « esprits qui furent puissants »? Ce trait me semble malheureusement partagé par nombre de vieillissants plus ordinaires qui voudraient absolument finir en « sages ».
Citation
Henri Lesquis
[...] qui a une haute conscience écologique et, dès lors, des plus in-nocentes.

Je serais moins affirmatif que vous, cher Henri, sur le lien logique.
L'écologisme de Michel Serres me semble mâtiné de panthéisme.
Utilisateur anonyme
07 juin 2011, 14:13   Re : Michel Serres dans ses œuvres
Citation
Marcel Meyer

Les "petits travers" qu'ils ont tous ne rendent pas nos héros moins héroïques : par eux ils le sont davantage car ainsi ce sont des hommes. Les Grecs allaient plus loin, ils rendaient très humains jusqu'à leurs dieux en leur prêtant de nombreuses petitesses.

Cher Marcel, vos remarques sont toujours très pertinentes. En effet, ce point est crucial : les anciens Grecs divinisaient leurs défauts, car — je n'y vois pas d'autre explication — ils étaient assez forts et aguerris pour assumer l'ambivalence, la violence, l'incertitude et la cruauté de la vie — en somme, eux pouvaient supporter le caractère tragique de l'existence. (Nietzsche soupçonnait même que les bacchanales n'étaient en leur fond qu'une divinisation de... l'épilepsie !) Mais l'histoire, aussi polymorphe qu'imprévisible, connut de terribles renversements de valeurs : sitôt que tout défaut devint péché qu'il fallait absoudre, commença le grand mensonge, l'impossible refoulement, l'inacceptation de l'ambiguïté fondamentale du vivant : les dieux devinrent parfaits, purifiés de tout ce que l'homme ne pouvait plus assumer, de tout ce qui lui rappelait sa cruelle animalité. De sorte que la falsification du monde fut nécessaire, puis habituelle, pour devenir... instinctive ; jusqu'au jour où le monde, perdant son opacité, saisi puis disséqué par l'infâme raison, libéra l'animal qui gisait, moribond, sous le poids du péché. Quel accueil on lui fit ! L'opprobre lui fut jeté — et les héros, eux aussi, devenus bêtes immondes, furent jetés aux gémonies par ces hommes que "nous" sommes, ceux-là mêmes dont la bonté n'est qu'un masque de lâcheté.
Utilisateur anonyme
07 juin 2011, 14:20   Re : Michel Serres dans ses œuvres
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Utilisateur anonyme
07 juin 2011, 14:43   Re : Michel Serres dans ses œuvres
Cher Didier, l'existence d'un homme est entièrement façonnée par ses qualités et ses défauts ; de même que celle d'un peuple. Aussi la divinisation d'un certain type d'existence est-elle in fine divinisation de caractères, qualités et défauts d'hommes ou de peuples. Un dieu, aussi normatif qu'il soit, est toujours le reflet de quelque idiosyncrasie.
Ah Eric! la perspective de mourir heureux, qui doit être le Graal de tout philosophe, quelque part, en a tourné la tête à plus d'un... comme chez le jeune le mirage amoureux. Vous vous rendez compte ? au crépuscule d'une vie réussie, un homme comblé n'a strictement plus rien à faire, plus rien à dire de risqué ou d'original, non plus qu'à le penser pour quitter ce monde HEU-REUX et admiré; le départ dans le ravissement et la complétude, vous y résisteriez vous, Eric ? Et bien Michel Serres est comme vous: il n'y résiste pas, il se l'offre comme une gâterie suprême. La bonheur des gâteux en roue libre, gâterie suprême offerte par l'existence, ne se refuse pas. Paix à son âme. Et gloire à Hessel, gloire à Serres qui peuvent sans risque tapisser le ciel de leur paradis imminent du bleu naïf des enfants innocents sans que personne, jamais, ne trouve à redire.

Je ne sais ce qu'en pense M. Lesquis, mais il semble qu'un des rares philosophes dignes de ce nom qui accepta la venue de la mort dans la sérénité malheureuse soit encore le sien.

A propos de mirage amoureux, je viens de parcourir, dans ces minutes nécessaires à la perte de temps qui donne à l'existence hors ces plis toute sa valeur, l'exposé d'un sociologue chercheur au CNRS, c'est dans Rue 89. C'est I C I, et ça parle de situation pré-révolutionnaire et de pouvoir d'achat. J'ai eu une extra-systole en lisant l'expression "secteur amoureux", lequel, selon l'auteur montre les signes d'une relance et d'un regain de dynamisme encourageant dans la conjoncture internationale actuelle. Soit il est fou, soit je suis fou.
Utilisateur anonyme
07 juin 2011, 15:01   Re : Fragment d'un discours amoureux
(Message supprimé à la demande de son auteur)
[...] le départ dans le ravissement et la complétude, vous y résisteriez vous, Eric ?

J'y compte bien et crois que je n'aurais pas beaucoup à me forcer pour y parvenir.

Soit il est fou, soit je suis fou.

Un petit grain, juste un petit grain mais il vous va si bien.
(C'est curieux vous me rappelez Gobineau là)
Utilisateur anonyme
07 juin 2011, 15:22   Re : Fragment d'un discours amoureux
Citation
Francis Marche
Je ne sais ce qu'en pense M. Lesquis, mais il semble qu'un des rares philosophes dignes de ce nom qui accepta la venue de la mort dans la sérénité malheureuse soit encore le sien.

Il semblerait, cher Francis, que la sérénité malheureuse à laquelle vous faites allusion s'appelât folie syphilitique.
Utilisateur anonyme
07 juin 2011, 15:42   Re : Fragment d'un discours amoureux
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Je sais. J'avais seulement espéré que vous ne le disiez pas.

Je suis de ceux qui aiment à croire que Nietzsche est mort de nietzschéïte aiguë.
Utilisateur anonyme
07 juin 2011, 17:12   Re : Fragment d'un discours amoureux
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Utilisateur anonyme
08 juin 2011, 02:25   Re : Michel Serres dans ses œuvres
Tout bien considéré, cette "démolition du héros" n'a rien d'originale. Il ne fallait pas en attendre moins de M. Serre qui est un bon recycleur de vieilles idées.

En l'espèce celles du courant augustiniste et jansénisant du second XVIIème siècle bien analysé par Paul Bénichou. Les fausses vertus des grands hommes qui ne sont que de l'amour propre et de la vanité déguisés. Tout ça est bien connu.

Mais le problème avec M. Serre c'est qu'il recycle mal et trop vite : quel est le mensonge des grands hommes, en quoi sont-ils de faux dieux? On est dans le flou.

Chez les augustiniens et port-royalistes la démolition du héros débouchait sur un monde de vanités trouvant leur équilibre dans l'échange des concupiscences. Ce qui faisait l'étonnement admiratif de Pascal.

Puis Mandeville et ses abeilles puis Adam Smith et sa main invisible.

Selon M. Serre qui trie et qui recycle la dénonciation des faux dieux doit déboucher sur la perfection de la démocratie. Pourquoi? Là encore le flou.

M. Serre est une échangeur de petite monnaie qui transforme les Pascal en pièce de 10 centimes.
Utilisateur anonyme
08 juin 2011, 21:10   Re : Michel Serres dans ses œuvres
Citation
Brunet Latin
Tout bien considéré, cette "démolition du héros" n'a rien d'originale. [...] Chez les augustiniens et port-royalistes la démolition du héros débouchait sur un monde de vanités trouvant leur équilibre dans l'échange des concupiscences. Ce qui faisait l'étonnement admiratif de Pascal.

Il n'est peut-être pas innocent que les premières critiques virulentes à l'égard des héros fussent portées par de grands chrétiens... Condamner le héros pour son égoïsme trop marqué, son frénétique désir de grandeur ou de gloire, sa terrible volonté d'imposer tous les temps et tous les univers, trahit toujours quelque crainte du puissant. Mais je m'arrêterai là. (Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit : je reste un grand admirateur de Pascal, dont l'insigne puissance de pensée me fascine.)

Citation
Brunet Latin
Selon M. Serre qui trie et qui recycle la dénonciation des faux dieux doit déboucher sur la perfection de la démocratie. Pourquoi ? Là encore le flou.

Certes, M. Serres n'en dit mot. Mais, justement, ne se pourrait-il pas que la démocratie atteigne son faîte lorsque toute grandeur, toute trace de dieux déchus, fussent-ils faux, — en somme, toute distinction de valeur, — seront déconstruites au point de n'habiter que nos livres et nos souvenirs ? Autre façon d'évoquer l'inéluctable marche du processus d'égalisation que connaissent nos hyperdémocraties, fussent-elles en leur fond de cruelles oligarchies.
Lorsque toute grandeur, toute trace de dieux déchus, fussent-ils faux, — en somme, toute distinction de valeur —, sont déconstruites, la démocratie n'atteint pas son faîte, elle s'est dégradée en son avatar hyperdémocratique (ou post-démocratique).
Marcel,

L'aspect oligarchique que souligne Henri n'est pas à négliger...

Qu'en pensez-vous ?
Pardon pour cette digression, je voulais signaler à Jean-Marc cette info :
Les Maritain
Pourquoi oligarchique ? Parmi les héros que mon livre d'histoire de l'école primaire offrait à mon édification, il y avait saint Vincent de Paul, Jeanne d'Arc, Albert Schweitzer, Pasteur, Bernard Palissy...
Dans la belle étude de Jean-Pierre Vernant consacrée aux divinités votives (La Mort dans les yeux), Artémis est présentée comme la déesse ménageant le passage entre états incommensurables ; entre barbarie et civilisation, sauvagerie guerrière et urbanité, informité morale de l'adolescent et maturité responsable de l'hoplite-citoyen, dressant un pont par-dessus le vide des solutions de continuité.
La correspondance entre un défaut et un hiatus n'est évidemment pas parfaite, mais les premiers peuvent être rangés parmi les incohérences, les disparités, les incongruences, tout ce qui ne se laisse pas inclure si facilement dans un ensemble parfaitement ordonné et harmonieux.
Il y aurait alors délégation des dieux afin qu'ils prennent en charge les impropriétés de la nature et de la condition humaine, et mettent à niveau, écachent les inévitables irrégularités.

(La passion de Michel Serres pour Tintin et Leibniz le rachète quand même un peu...)
Marcel,

Henri nous parle de la société de ces années-ci.
Des héros, ces années-ci, en ce moment ? Qui ça, Stéphane Hessel ? À vrai dire je ne comprends pas bien de quoi vous parlez car je ne vois absolument rien d'héroïque dans l'oligarchie actuelle (notre fameuse "hyper-classe").
Mais justement, il n'y a rien d'héroïque.

Mais, justement, ne se pourrait-il pas que la démocratie atteigne son faîte lorsque toute grandeur, toute trace de dieux déchus, fussent-ils faux, — en somme, toute distinction de valeur, — seront déconstruites au point de n'habiter que nos livres et nos souvenirs ? Autre façon d'évoquer l'inéluctable marche du processus d'égalisation que connaissent nos hyperdémocraties, fussent-elles en leur fond de cruelles oligarchies.

Je ne vois pas où vous voyez des héros dans cette phrase.
Ah non, en effet. Il se pourrait en somme que nous soyons d'accord...
Utilisateur anonyme
09 juin 2011, 14:25   Re : Michel Serres dans ses œuvres
Citation
Éric Veron
Citation
Henri Lesquis
M. Serres [...] qui a une haute conscience écologique et, dès lors, des plus in-nocentes.

Je serais moins affirmatif que vous, cher Henri, sur le lien logique.

Cher Éric, il se pourrait, en ces temps de dévastation spectaculaire et éhontée de la nature par l'homme — baptisée par les scientifiques extinction de l'Holocène —, que la première des in-nocences soit l'écologique. L'homme ne combattant plus l'homme — la formidable explosion démographique en témoigne —, il guerroie désormais contre la nature, armé de son gigantesque bras technique, à des fins non de gloire, cette grande guerre étant inégale, mais de confort et de paresse. En ces temps où l'essence de l'homme n'est plus la raison ni le politique, mais l'invasif — en quelques siècles, la définition de l'homme évolua radicalement : d'animal rationnel ou politique, l'homme devint espèce invasive* —, il serait sain de considérer l'écologie comme le premier des combats de l'in-nocence.

* Lisez cet extrait de Wikipédia, tiré de l'article consacré au concept d'espèce invasive : « Homo sapiens peut être considéré comme une espèce invasive du fait d'une démographie incontrôlée, d'impacts significatifs et néfastes sur l'environnement global (flore, faune, climats…). »
Marcel,

Ce serait (glotte) horrible...
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