Deux faces de la modernité sportive et médiatique

Trois ou quatre jours après avoir perdu en finale de la Coupe du monde de rugby à XV, les joueurs de l'équipe de France, à peine descendus de l'avion qui les ramenait de Nouvelle-Zélande, ont été reçus à l'Elysée par le Président de la République et, deux ou trois heures plus tard, ils ont été "fêtés" par leur "équipementier" et les "sponsors" du rugby sur les Champs-Elysées... Ils se sont rendus à l'Elysée en survêtement (portant le logo Nike ou Adidas ?) et aux Champs-Elysées, dans le "palais" de leur équipementier (Nike), en habit de ville : "costume et cravate". Aucun journaliste n'a relevé l'incongruité de leur tenue à l'Elysée, ni l'inversion des valeurs qu'elle exprimait - ni journaliste, ni essayiste, ni philosophe, ni sémiologue, ni observateur des moeurs et des rites sociaux. Pourtant, les joueurs de l'équipe de France de rugby sont réputés honnêtes, attentifs aux êtres et aux choses, ayant des "valeurs" (mais lesquelles ?), soucieux sinon de la grandeur de leur pays, du moins de sa dignité - à moins, bien entendu, qu'ils n'aient pris acte ou avalisé du nouvel ordre du monde et de sa valeur suprême : la marchandise, dans lequel la politique, l'Etat, le peuple, la Nation... ne méritent rien d'autre qu'un pyjama de stades.


Il y a quelques jours, nous avons appris, en lisant un journal algérien, que sept des joueurs de l'équipe de football d'Algérie, celle qui avait participé aux Coupes du monde de 1982 et 1986, étaient pères d'enfants lourdement handicapés ou atteints de maladies génétiques très graves. Ces joueurs, trente ans après les faits, ont incriminé "l'encadrement médical" de leur équipe d'alors - des médecins ou des "soigneurs" venus des anciens pays de l'Est amis de l'Algérie révolutionnaire (URSS, Yougoslavie et autres), généreusement rémunérés et qui les obligeaient ou les auraient obligés avant chaque entraînement, avant chaque match, après chaque match, etc. à ingurgiter des pilules miracle... En bref, ils accusent ces médecins d'avoir condamné leur descendance avec des produits chimiques nocifs ou dangereux.
Or, ce dont se souviennent peut-être les habitués de ce forum, cette équipe d'Algérie était alors célébrée par les "tiers-mondistes" des journaux sportifs ou autres, dont "le Monde", comme une équipe exemplaire sur le plan "moral" et sur le plan "idéologique", composée de sportifs "politisés" ou "conscientisés", conscients de la grandeur de leur pays, de leur continent, de leur religion, etc. Trente ans plus tard, la supercherie de leurs performances dévoilée, que sont ces discours assénés à des millions d'auditeurs ou de téléspectateurs français ? Des mensonges, de la duperie, de la propagande. Très étrangement, les journaux, les radios, les chaînes de télévision, qui ont diffusé tout ce fatras idéologique, se gardent bien aujourd'hui de rappeler ce qu'ils serinaient alors. On ne leur demande pas de faire leur "autocritique" (la France n'est pas la SFIC) - mais ils pourraient au moins, pour informer leurs lecteurs ou leurs auditeurs, rappeler ce qui était dit en 1982 en particulier de la grande et exemplaire équipe de football d'Algérie, phare de l'Afrique et de l'islam, dont tous les joueurs apparemment étaient dopés à mort...

Les joueurs n'ont pas de prise sur le protocole, le rugby, comme le reste, subit la loi de l'argent. Le supporter que je suis le déplore amèrement.

Florentin a raison, les joueurs n'y sont pour rien.

J'aime beaucoup l'image "pyjama de stade".