Lectures

Dans Commentaire (livraison hiver 2011-12), une très rigoureuse étude de Mme Tribalat sur le "dynamisme démographique des musulmans de France" et enfin un décompte précis du nombre de musulmans en France.

Dans Le Débat (la livraison en cours), un "article" de Mathieu Guidère, le spécialiste de l'islam politique, sur le "printemps arabe" (ou sur l'histoire contemporaine en train de se faire : son enthousiasme initial s'est refroidi) et une distinction qu'il faut faire absolument selon lui mais qui est totalement irréelle, entre "l'islam" (la religion) et "l'islamisme" (l'idéologie). Lisant cette distinction et ce sur quoi elle est fondée, on se demande si on n'a pas la berlue : ou bien M. Guidère ne sait pas ce qu'est une religion, non plus qu'une idéologie; ou bien il réduit la religion au seul culte et il range tout le reste sous la rubrique "idéologie" - ce qui fait peu d'un côté et beaucoup de l'autre.

Dans ce même numéro, le journal de M. Kepel en Tunisie (deuxième quinzaine d'octobre). Il a rencontré dans un restaurant des Tunisiens ayant vécu en France et qui se sont gaussés de ses erreurs d'analyse. Faisant référence à son livre traitant de l'échec de l'islamisme, ils lui ont objecté qu'en Tunisie, c'est l'islamisme qui gagnait ou allait gagner... A cela une réponse très jésuitique. Par "échec" de l'islamisme, il entendait une scission dans le mouvement, les uns suivant la voie de la guerre, les autres faisant de l'entrisme dans les sociétés et tentant d'arriver au pouvoir par des moyens légaux; les premiers avaient échoué (jusqu'à présent), les seconds avaient réussi.

L'article se nomme exactement "Dynamique démographique des musulmans de France"


Voici quelques extraits, permettant de ne pas enfreindre la loi sur le copyright.

Laissons de côté les chiffres lancés à la volée - les 5 à 6 millions de musulmans inlassablement répétés depuis au moins dix ans, sans parler de chiffres encore plus farfelus - dont la méthode d’estimation est absolument intraçable. Dans l’enquête ERFI réalisée en 2005 par l’Ined et l’Insee auprès d’environ 10 000 personnes, 5% des enquêtés âgés de 18 à 79 ans se déclaraient musulmans (...)

Cette estimation a été révisée dans les projections de populations musulmanes réalisées par l’IIASA... avec un chiffre de 4,7 millions en 2010, soit 7,5% de la population, qui, comme on va le voir, semble un peu trop élevé (...)

On parvient ainsi à une population musulmane proche de 4 millions de musulmans, soit 6,4% de la population métropolitaine.

Je pense que dans la suite des travaux de ce forum, il serait souhaitable de partir de ces chiffres, qui résultent de méthodes difficilement contestables.

Quatre millions de musulmans, un habitant sur seize.

Parfaitement d'accord avec vous, Jean-Marc.

Et tant qu'à vouloir jouer la carte d'une objectivité incontestable il serait intéressant aussi de signaler que la
population musulmane est essentiellement citadine en rappelant les effets qu'induit inévitablement ce phénomène de concentration.

Que dans certaines agglomérations telles que Roubaix, la population est composée non pas de 6,4 % mais de plus de 50 % de musulmans, soit un habitant sur deux ! autour de 25 % à Marseille soit un habitant sur 4 !

Que la belle jeunesse parisienne des moins de 24 ans se compose de près d'un tiers de musulmans (Justin VaÏsse, IEP Paris) ! 30 % des jeunes de moins de 18 ans dans plusieurs métropoles et villes de France comme à Mulhouse, où j'étais récemment.

Que parmi les jeunes gens issus de l'immigration musulmane, c'est moins d'un tiers qui se réclame sans religion (Sylvain Brouard, Vincent Tiberj, Rapport au politique des Français issus de l'immigration, CEVIPOF, Sciences PO, juin 2005) et que la pratique religieuse revendiquée non seulement ne désenfle pas mais semble aller croissant...

Que le prénom Mohammed, hautement symbolique, d'après l'état civil (rapport INSEE) est le plus fréquemment donné aux nouveaux-nés de sexe mâle en Seine-Saint-Denis depuis 2002 ! et d'après le quotidien La Provence, à Marseille depuis 2009.
Seine-Saint-Denis où l'islam est la première religion pratiquée,ce qu'elle est en passe de devenir dans d'autres départements tels que les Bouches-du-Rhône.

Ceci, bien sûr, simplement afin de souligner que l'impression "d'invasion musulmane" a d'autres origines, se nourrit d'autre chose que d'un vil préjugé islamophobe et pour ne pas nous laisser aller à croire, bêtement, que l'exagération des chiffres de l'islam en France, si exagération il y a, résulterait, comme l'insécurité sous Jospin, souvenez-vous, non d'un accroissement démographique effectif, réalité tangible, mais du "sentiment", aussi confus qu'erroné, entendu comme un préjugé qu'il nous faudrait combattre, qu'en aurait une population française victime de ses phobies.

Citation
Dans ce même numéro, le journal de M. Kepel en Tunisie (deuxième quinzaine d'octobre). Il a rencontré dans un restaurant des Tunisiens ayant vécu en France et qui se sont gaussés de ses erreurs d'analyse

Pauvre Kepel plus idéologue que scientifique. Déjà V.S. Naipaul dans les années quatre-vingt soulignait dans son livre remarquable "Crépuscule sur l'islam : voyage au pays des croyants" que le retour à l'islam des origines avait été de
tous temps la solution à tous les problèmes auxquels les musulmans ont fait face. Vainement.

Les pays de religion musulmane sont peuplés aujourd'hui majoritairement de jeunes gens sans expérience historique et ils devront d'abord passer par une phase de renaissance religieuse avant de comprendre que ce type de risorgimento n'aboutit à rien.

Je m'étonne de l'étonnement et de la déception de notre nomenklatura sur l'échec de la démocratie au Proche-Orient. Dans des pays où les gens vivant à la campagne sont majoritaires et où le taux d'alphabétisation est très bas il n'y a pas d'autre issue que la prise de pouvoir des islamistes.