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Truffaut : qu'ont donc fait nos parents?

Envoyé par Loïk Anton 
Ce soir sur ARTE deux fims de Trauffaut. L'un se passe en 1970, on y voit naître un enfant qui a aujourd'hui la quarantaine... On se demande ce qu'ont donc fait nos parents, ces jeunes gens du film, cette génération, pour accoucher du monde dans lequel nous vivons. On voit à l'époque un peuple gentil, insouciant, la gaieté de Paris, l'humanité des relations (même au travail d'ailleurs). Nulle trace de cet esprit goguenard, de cette méchanceté à fleur de peau, de cette ironie mordante et satisfaite, qui caractérise aujourd'hui les parisiens des classes moyennes.
Quand R.C. parle de Grand Remplacement ; le Grand remplacement qui frappe, en voyant ce film, est celui des parents par des enfants qui leur ressemblent si peu... La France - ou Paris - me semble parfois devenu une immense annexe du Journal d'une chaîne commerciale bobo, avec le même esprit retors, la même suffisance, la boursoufflure pseudo-rebelle, l'humour "décapant" parfaitement conformiste, l'opportunisme comme stratégie et horizon existentiel...
Utilisateur anonyme
21 février 2012, 04:05   Re : Truffaut : qu'ont donc fait nos parents?
Citation
Loik A.

Quand R.C. parle de Grand Remplacement ; le Grand remplacement qui frappe, en voyant ce film, est celui des parents par des enfants qui leur ressemblent si peu... La France - ou Paris - me semble parfois devenu une immense annexe du Grand Journal de Canal+, avec le même esprit retors et abruti, la même suffisance, la boursoufflure pseudo-rebelle, l'humour "décapant" parfaitement conformiste, l'opportunisme comme stratégie et horizon existentiel...

Canal + (création des socialistes d'affaires aux affaires) fut pour beaucoup dans la crétinisation de la génération Mitterrand : l'humour parfaitement idiot et se revendiquant tel des Nuls, les moqueries basses du fils de Caunes aidé par le fils Algoud (paix à l'âme du pauvre Francois-Marie récemment disparu), les "spécial Cannes" en direct du Martinez, la diffusion de la pornographie, le culte du fric et des paillettes, la promotion d'un vivier de nunuches comme jamais la télé des speakerines n'en avait connu (Isabelle Giordano en critique de cinéma!), le dévoiement d'un Michel Field ancien permament du panorama de France-Culture et attiré là, la bave aux lèvres, par les manières peu farouches desdites nunuches et les cachetons vites gagnés.

Et puis les Deschiens comme image du peuple des campagnes donnée au peuple et le faisant rire du même rire, croit-il, qu'on rit à Paris.

Une des belles saletés de l'ère Mitterrand.
Cette époque est probablement la première à avoir enfoui ou laissé s'évaporer ou avoir oeuvré comme une forcenée à obtenir l'évaporation, la diffusion dans l'éther non point de l'époque qui l'avait précédée mais du souvenir même de ses valeurs, de ses normes, de son humour, de son atmosphère, de ses attentes, anticipations, air du temps, langage, verbe, matières et tournures des conversations, de son esprit en un mot.

Si l'on lit (chroniques, romans) ce qu'était l'époque en France il y a quatre-vingt ans, on voit des hommes et des femmes évoluer dans un esprit qui non content de ne plus exister n'a laissé chez les vivants d'aujourd'hui aucune trace du moindre écho, aucune nostalgie ni absence de nostalgie. L'époque des grands-parents n'a jamais existé si ce n'est par les images publicitaires que l'on veut bien en extraire. La solution de continuité entre ce qu'ils furent et ce que nous sommes ("nous", la génération des trentenaires à laquelle je n'appartiens plus) est totale.

L'on sait très bien que la France de 1880, par exemple, était pour ainsi dire devenue étrangère à celle de 1800 (suite tourbillonnante des changements de régimes, urbanisation, industrialisation, essor de la France outre-mer, etc..), cependant, chacun savait qui avait été ses arrières-grands-parents, ou tout au moins en avait une idée ou une image fidèle, pouvait, par la pensée, se replonger dans leur époque, leurs valeurs et, le cas échéant, vouloir s'en démarquer, s'en éloigner.

Il n'y a aujourd'hui plus même de volonté de s'éloigner d'un passé relativement récent -- il est plus que passé, plus que mort, plus qu'étranger: il est l'étranger que l'on ne voit pas, il est plus étranger que tout Autre visible actuel. Nos prédécesseurs, les frémissements de leur esprit, leurs jeux et enjeux de société, ne sont rien à la génération qui beugle dans ses téléphones portables, court acheter la dernière console de jeux vidéo et s'entr'interroge en milieu d'après-midi à coups de tu as mangé quoi ? par-dessus la tête des présents. Cette génération éprouve pour le passé français du 20ème siècle une absence de cognition, entretient avec elle un défaut d'intelligence qui se situe très au-delà du mépris, lequel, par comparaison, rassurerait, s'il survenait, comme porteur de sens.
Il y a un "accent" féminin des années soixante qu'on ne retrouve plus guère que dans les films de cette époque, une prononciation particulière du français que je serais bien en peine de décrire. Cet accent n'est pas propre aux actrices, on le retrouve, comme en témoignent les reportages de cette époque (Louis Malle, etc.), dans le peuple. Les petits français prennaient-ils des cours de diction ? En effet il me semble qu'aujourd'hui on parle très vite avec de la guimauve dans la bouche. Moi-même ne suis pas exempt de ce défaut.
Utilisateur anonyme
21 février 2012, 09:09   Re : Du petit salé aux lentilles tous les jeudis
ah c'est ça l'accent de Fanny Ardant?
Ah, eh bien c'est amusant ce que vous dites là, cher Bily, accent j'entends bien moi aussi, mais dans les bouches contemporaines (et particulièrement celles des jeunes filles, hélas !). Dans le film de Truffaut, par exemple, je suis "chez moi", si je puis dire.
Pourquoi parlez-vous d'accent "féminin" ? Pourriez-vous décrire plus précisément ce que vous voulez dire ?
Je suis, hélas, bien d'accord avec tout ce qui vient d'être dit. J'ai bien connu le Paris populaire -- j 'y ai grandi -- et j'ai beaucoup aimé son peuple, dur à la peine, fort en gueule mais gentiment blagueur et débonnaire, où Français de toutes origines se côtoyaient en bonne intelligence. Un peuple riche en personnages originaux, singuliers et qui n'avait pas besoin de la "diversité" pour être, comme on dit, haut en couleurs, contrairement à celui d'aujourd'hui où chacun semble être le clone sans âme du bobo, conforme au stéréotype imposé par les médias.
Je regarde beaucoup sur une chaîne cinéma de la télévision les films américains ou anglais des années 30 à la fin des années 70. Le nombre de ceux qui sont tournés à Paris, y compris dans le Paris populaire ou qui font allusion à la France, sa capitale et sa culture, sont légion . Même dans un Laurel et Hardy, Hardy envisage de prendre sa retraite à Marseille auprès dit-il en français, de la "Bonne mère" ! Aujourd'hui très rares sont les cinéastes étrangers qui tournent dans notre pays et ceux qui le font évitent comme la peste de tourner dans les quartiers prétendument populaires. Il y a bien eu, récemment, le film de Woody Allen,mais c'est justement le Paris prestigieux des années trente à cinquante qu'il filme où, d'ailleurss, les artistes ne vivaient pas coupés du peuple.
21 février 2012, 09:36   Jeunes filles (femmes)
Élocution particulière des jeunes filles et maintenant, depuis le temps, des jeunes femmes (jusqu’à quarante ans et un peu plus), oui, c'est un phénomène qui m'intrigue beaucoup et sur lequel je cherche en vain des lumières extérieures depuis plusieurs années (comment un phénomène de langue peut-il toucher un seul sexe ?).

Les caractéristiques du phénomène auquel je pense, et qui touche plutôt les jeunes femmes du milieu intellectuel au sens très large (agrégées, “doctorantes”, étudiantes, actrices, etc.) sont une très forte nasalisation, à l’américaine (on aurait dit jadis qu'elles parlaient du nez), la prononciation soulignée des finales semi-muettes (la France-euh — impossible de transcrire ce son, voisin du fameux çao portugais, très nasalisé lui aussi), et bien sûr la diphtongaison des syllabes doubles (bonjour en trois syllabes). Clémentine Autain est un exemple illustre, mais le cas est très répandu, presque général (jeune historienne, Mme Simon, qui parlait des juifs de Marseille au Moyen-Âge, dimanche matin à l’émission de Victor Malka). Je me demande si ça ne mériterait pas une de ces éblouissantes théories marchiennes, encore que je craigne le pire.
Citation

celui des parents par des enfants qui leur ressemblent si peu

Pardonnez-moi mais les parents dont vous parlez sont tout de même un peu de la partie! Leurs parents avaient vécu la guerre, ils étaient endurcis face aux épreuves, montraient l'image du courage, de la force. Eux, après avoir profité des années de reconstruction d'après guerre, clamaient la liberté en tout et pour tout en se dévergondant à tout va, sous les yeux de leurs progénitures, qui n'avaient que cet exemple pour éducation. Leur devoir aurait été de transmettre l'humanité des relations, à la place de quoi ils ont laissé pousser leurs rejetons, sans comprendre d'ailleurs quelques fois, à quel point l'éducation nationale sapait le moral de ceux-ci derrière leur dos, au passage.

Citation

cependant, chacun savait qui avait été ses arrières-grands-parents, ou tout au moins en avait une idée ou une image fidèle, pouvait, par la pensée, se replonger dans leur époque, leurs valeurs

Ce lien justement, entre les enfants de cette nouvelle génération et leurs arrières-grand-parents, n'était pas lui non plus, la préoccupation première des jeunes des années Truffaut. Helas! Je suis bien d'accord avec vous, parce que pour savoir qui étaient nos arrières-grand-parents, il fallait parfois faire des recherches. Et je me souviens du mal que j'avais à faire accepter mon désir d'apprendre sur ce passé sans me faire regarder curieusement, comme s'il y avait fatalement quelque chose de dérangé dans ma démarche, voire de suspect. Quel besoin avais-je donc, dans un monde qui m'apportait tant de bienfaits nouveaux technologiques ainsi que "Dallas" tous les samedis soirs à la télévision, pour aller m'enquérir de toute la richesse qu'une femme de 80 ans m'avait fait entrevoir avant de mourir? Je me trouvais parfois presque dans la position du coupable.
Oui, enfin, ne nous préoccupons pas trop de la surnasalisation féminine contemporaine, parce que pendant ce temps-là, Mehmed fourbit ses armes !
Effectivement, Francmoineau, si accent il y a, c'est dans les bouches d'aujourd'hui. Il me faudrait un exemple. Dans le film de Chabrol Les Noces rouges (ou un autre ?), j'ai souvenir, je ne sais pourquoi d'ailleurs (rien de particulièrement marquant), d'une jeune fille distinguée disant : "Tiens, Paul est de retour" (ou : "Tiens, Paul est d'retour") : le t de retour très légèrement chuintant et le ou placé presque entre les dents (je ne maîtrise pas le vocabulaire approprié). Chantal Goya dans Masculin/Féminin, peut-être (non). Il suffit évidemment que vous me demandiez pour que ma mémoire se vide. Cette manière de parler me charme absolument, elle est le contraire de l'avachissement. Elle a pour moi qui ne l'ai pas connue un parfum d'étrangèreté tout à fait séduisant.

L'accent dont parle Renaud Camus(hhhein) est très amusant à imiter(chhh).
"On se demande ce qu'ont donc fait nos parents, (...)"

Ah oui, on se demande vraiment ! Quel mystère ! Mais ils se sont équipés, tiens, et drôlement bien ! Je ne vois pas d'autre changement entre eux et leurs enfants que l'extraordinaire prolifération d'appareils domestiques et singulièrement d'appareils à communiquer (mais loin d'être les seuls), machines dont la vraie originalité est de pouvoir être constamment en service. Ah oui ! Ce sont des outils-ni-bons-ni-mauvais-tout-dépend-de-ce-qu'on-en-fait-et-puis-personne-n'est-obligé-de-les-acheter. Bien sûr, bien sûr. Années soixante : inconnue au bataillon la pourriture sociale entre toutes, la fausse-bonne idée majeure, qui a nom téléphone mobile, incompatible avec la gentillesse, l'insouciance, la gaieté ; deux chaînes de télévision pour quelques heures d'écoute quotidienne, pas d'ordinateur. Aujourd'hui : diffusion d'émissions en permanence, Canal +, Arte, M6 ou n'importe quoi, pareil au même : maîtrise impossible. Le P.I brame depuis longtemps après la création d'une chaîne vraiment "culturelle". La seule mesure "culturelle" à prendre, dans ce domaine, c'est de remettre en service la neige sur l'écran à partir d'une certaine heure, mais, évidemment, c'est impensable. On n'arrête pas les ondes...
"L'accent dont parle Renaud Camus est très amusant à imiter."
En effet.
21 février 2012, 09:58   A propos d'accent rare
Début des années soixante :

"Une dizaine de jeunes gens se sont installés sur le pont, à côté de nous. La plupart d'entre eux portaient des tenues de tennis et sous les jupes blanches plissées les filles laissaient voir de grosses cuisses. Tous parlaient avec l'accent dental que l'on cultive du côté du Ranelagh et de l'avenue Bugeaud."

Patrick Modiano - Villa triste (1975)
Je crois que la télévision, plus que le cinéma, a emballé le mimétisme. Peut-être parce que les gens chez eux sont plus vulnérables que dans une salle.
Comparer aussi avec les générations précédentes, Arletty, Suzy Delair, etc.
"L'accent dont parle Renaud Camus est très amusant à imiter."

Le danger est qu’on tombe très facilement dans Didier Bourdon (je dis bien d).
"Nulle trace de cet esprit goguenard, de cette méchanceté à fleur de peau, de cette ironie mordante et satisfaite, qui caractérise aujourd'hui les parisiens des classes moyennes. "

" ... on voit des hommes et des femmes évoluer dans un esprit qui non content de ne plus exister n'a laissé chez les vivants d'aujourd'hui aucune trace du moindre écho, aucune nostalgie ni absence de nostalgie. L'époque des grands-parents n'a jamais existé ... La solution de continuité entre ce qu'ils furent et ce que nous sommes ... est totale. "

Il y a une quarantaine d'années, les ethnologues se penchaient sur le cas d'une tribu africaine, les " Ikes", en voie d'autodestruction. La descripion qu'ils en faisaient ressemblait fort à celle que Marc et Francis font du peuple de la tribu "France" . Ils évoquaient la perte des repères et des valeurs , l'oubli du passé, la disparition de toute solidarité de proximité et la raillerie généralisée envers les anciens. Dans un article du " Monde, un des ethnologues qui s'intéressaient au phénomène racontait la scène suivante à laquelle il avait assisté : un vieillard à la marche hésitante heurtant du pied quelque obstacle invisible, tombait et n'arrivait pas à se relever à la grande rigolade des jeunes gens autour de lui dont aucun ne chercha à l'aider.
Depuis cette tribu a dû disparaître car je n'ai plus jamais entendu perler d'elle. Et je me pose la question, ne serions pas en train de devenir à notre tour, toutes proportions gardées, des " Ikes" ?
Citation
Francis Marche

Si l'on lit (chroniques, romans) ce qu'était l'époque en France il y a quatre-vingt ans, on voit des hommes et des femmes évoluer dans un esprit qui non content de ne plus exister n'a laissé chez les vivants d'aujourd'hui aucune trace du moindre écho, aucune nostalgie ni absence de nostalgie. L'époque des grands-parents n'a jamais existé si ce n'est par les images publicitaires que l'on veut bien en extraire. La solution de continuité entre ce qu'ils furent et ce que nous sommes ("nous", la génération des trentenaires à laquelle je n'appartiens plus) est totale.

Oui, c'est sans doute encore plus triste que cela, qui déjà n'est pas bien gai... (c'est un quizz, en même temps, pour les amateurs) :

"Seul le souvenir d'un lien passé laisse encore subsister une apparence d'unité, de même qu'on reconnaît que les fruits tombés de l'arbre lui ont appartenu au fait qu'ils gisent sous son feuillage, mais ni cette place qu'ils occupent sous lui, ni l'ombre qui les effleure, ne les sauve de la pourriture et de la puissance des éléments auxquels ils appartiennent maintenant."
Citation
Julien Fleury
ne les sauve de la pourriture et de la puissance des éléments auxquels ils appartiennent maintenant.

Voilà qui facilitera le travail aux amis du Grand Remplacement. Aidez-les encore un peu, ils n'y arrivent pas assez bien tout seul!
Utilisateur anonyme
21 février 2012, 12:52   Re : Truffaut : qu'ont donc fait nos parents?
Pour ne rien dire des films du même Truffaut où l'on voit les premiers résidents des HLM alors neufs. La population est exclusivement blanche, européenne, il s'agit de la classe moyenne dans la mesure où l'on voit des comptables, instituteurs, employés de bureaux, retraités, etc.
Ils se donnent tous du Bonjour Monsieur, Bonjour Madame, se vouvoient quand ils se croisent, prononcent les mots très correctement (aujourd'hui ils passeraient pour cultivés). Les couloirs sont propres, les gens ne dégradent rien gratuitement.

L'écart entre ce que montrent ces films (et je veux croire qu'ils sont assez réalistes, du moins en ce domaine) et la réalité d'aujourd'hui est cataclysmique. Ceux qui ont connu les années 60 et le début des années 70 partagent tous mon étonnement.
Utilisateur anonyme
21 février 2012, 13:06   Re : Truffaut : qu'ont donc fait nos parents?
Dans la scène de la terrasse du café Maurice Ronet regarde les passants.

Comment ne pas pleurer la perte définitive de cette France-là (même si les femmes sortaient déjà en cheveux)?




Comme cette scène est belle !
"Ils se donnent tous du Bonjour Monsieur, Bonjour Madame (...)

C'est sûr, ils ne risquent pas d'être tentés de se donner du "T'es où ?"
Bel effet de montage à l'instant. Aux deux tiers de votre extrait, alors que je me laisse emporter dans les extases saccadées de cet ancien monde, une voiture s'arrête sous mes fenêtres et son rap hurleur recouvre jusqu'au bout la musique de Satie.
À Marie Cournou :
Je ne crois pas que l'élégie soit le contraire de la résistance. Nous sommes bien placés ici pour le savoir.
Tiens il me souvient qu'un habitant de ce Forum initie un cours sur "le Grand Remplacement" aux Etats-Unis. Peut-être que les films dont nous parlons - les films donc des années 60-70 - sur la vie quotidienne des Français, mis en abîmes avec des extraits contemporains se passant dans les mêmes lieux et milieux, serait un volet intéressant pour son cours.
Même méthode aujourd'hui, en d'autres lieux, suivie d'une rédac' pour élèves de 3ème : "Qu'observez-vous ?"
Et pourquoi les enfants de ces habitants des premiers HLM, polis, qui se disaient Bonjour Monsieur, Bonjour Madame, sont devenus des brutes qui méprisent la politesse ? La notion de "ringardise" a fait beaucoup de dégâts... Surtout, ne pas passer pour un ringard. C'est l'invasion du cynisme, l'exaltation de la bassesse, l'inversion des valeurs en somme, qui m'intrigue.
Le cas des Ikes est intéressant, mais il s'agissait d'une tribu en situation de survie, ce qui est loin d'être le cas de notre société, encore très riche durant les années 1980 alors que le phénomène s'est installé à cette période.
Quant à l'hypothèse-Orimont, la prolifération des ondes et des outils-neutres-pas-tant-que-ça, elle ne résiste pas trop à un peu de comparatisme : en Suisse ou dans les petites villes allemandes aussi, on voit des mobiles, sans que ceux-ci ne détériorent à ce point le comportement (l'habitus ? sourire)...
Citation

il s'agissait d'une tribu en situation de survie, ce qui est loin d'être le cas de notre société, encore très riche durant les années 1980 alors que le phénomène s'est installé à cette période

Je ne sais pas si l'élégie est une forme de résistance ou non, peut-être, je vous le concède si vous le désirez dans la beauté, pourquoi pas. Pour ma part, la description dune agonie coupée de tout lien, me paraîtrait plutôt un désir de vengeance.
En tout cas, je ne sais pas dans quel pays vous habitiez dans les années 80 où vous dîtes avoir vu ce phénomène s'installer, mais vous deviez fréquenter de drôles de tribus en effet, si voir un vieillard tomber les faisait rire! Personnellement dans ces années-là, je laissais ma place aux vieilles personnes dans l'autobus, et je n'ai jamais aperçu une de mes fréquentations agir de façon, ou d'une façon approchante à ce que vous décrivez.
Bon Marie dans les années 90, si vous préférez. Ne vous perdez pas dans les précisions inutiles, c'est un des défauts de l'époque. Voir l'idée clef. Merci.
Citation
Francis Marche
Oui, des ikses.
Les Iks, etnnie d'Ouganda, ont été le sujet d'un ouvrage de la collection "Terre Humaine" montrant l'épouvantable dégradation des rapports sociaux à l'occasion d'une famine extrême.
Je souhaite que les propos sur la décadence ne soient pas récupérés dans un sens contraire aux paroles réelles. Certains y verraient alors une bonne raison de détruire d'autant plus vite l'occident.
Peut-être une peur paranoïaque, je l'espère.
"montrant l'épouvantable dégradation des rapports sociaux à l'occasion d'une famine extrême. "

... montrant l'épouvantable dégradation des rapports sociaux à l'avènement du "soi-mêmisme" et du Grand Remplacement.
21 février 2012, 19:40   "Défaitisme"
Citation
Marie Cournou

Je ne sais pas si l'élégie est une forme de résistance ou non, peut-être, je vous le concède si vous le désirez dans la beauté, pourquoi pas.

Je ne comprends pas : il n'est pas question de désir ici mais d'une description.

Citation
Marie Cournou
Je souhaite que les propos sur la décadence ne soient pas récupérés dans un sens contraire aux paroles réelles. Certains y verraient alors une bonne raison de détruire d'autant plus vite l'occident.

Tout va bien, donc. Rendons l'in-nocence hémiplégique, pour ne pas désespérer Billancourt — pour ne pas dire qu'il n'est plus de Billancourt.

Je veux bien qu'on reproche à une description d'être trop pessimiste, en ce sens qu'elle raterait le vrai à cause du systématisme d'une humeur chagrine. Mais refuser une description du réel au nom des mauvais usages qui pourraient en être faits, cela, certainement pas. Écraser la vérité au nom du Bien est justement la préoccupation constante de nos adversaires.

Pour critiquer le grand remplacement, il ne s'agit pas de fermer les yeux sur la déculturation : c'est la cohérence de l'ensemble qui nous étouffe.

Et nul besoin d'abandonner les Élégies pour sauver le Parti : tout au contraire, c'est notre tristesse qui fait notre force.
21 février 2012, 21:22   Re : "Défaitisme"
Tout ceci ne va pas me remonter le moral mais je vous remercie pour votre réponse.

La forme est importante, je m'en aperçois un peu plus chaque jour, vous avez bien raison de la défendre.
La douleur qui est la mienne aujourd'hui cherche une voie de changement, et veut y croire. Dans ce que vous écriviez, je redoutais d'entendre "il est trop tard, vous êtes tous pourris". Mais les élégies me plaisent, monsieur, et la compagnie des personnes de qualité de ce forum est extrêmement salutaire, grâce à ces élégies notamment.
Je reconnais, d'autre part, que l'étendue de mes connaissances n'est pas toujours à la hauteur des débats. Je le regrette et j'écris aussi parfois sous le coup de la douleur. "Tous pourris " fait mal quand il est pris trop à cœur. Mais plus tard, je reviens et comprends un peu mieux le coup porté, dans son contexte, ainsi que sa force. La vérité en effet me paraît plus importante que le Bien. Difficile de se sortir de tous les contextes actuels, comme de se remettre en question de fond en comble face au constat pourtant si présent sous mes yeux tous les jours, mais tellement majoritairement là, écrasant, que je finissais par ne plus comprendre le pourquoi du comment.
Sortir de la dictature n'est pas simple tous les jours.
21 février 2012, 21:39   Re : "Défaitisme"
Votre réponse à cette pauvreté féminine d'aujourd'hui, et dont nous souffrons par ailleurs, mais la plupart du temps sans le savoir, est peut-être la dictature. Dictature de tout ce que nous devons supporter sans avoir l'accès à ce qui nous ferait nous rendre compte que c'est bien une dictature.
Pendant mes années de théâtre, j'ai travaillé trois mois avec un Argentin qui nous disait "dans mon pays, il y avait une dictature, des tortures atroces, mais nous le savions. Chez vous, la torture est invisible." A l'époque, je ne comprenais pas bien, malgré que tout en lui respirait la vérité. Je sentais qu'il savait de quoi il parlait, mais je ne pouvais pas comprendre la portée de ses paroles, seulement les sentir. Il disait qu'il voyait de plus en plus la peur au fil des années, chez les nouveaux venus.
Citation
Cassandre
"montrant l'épouvantable dégradation des rapports sociaux à l'occasion d'une famine extrême. "

... montrant l'épouvantable dégradation des rapports sociaux à l'avènement du "soi-mêmisme" et du Grand Remplacement.

Il existe malheureusement de nombreuses causes possibles de dégradation des rapports sociaux.
Celle survenue chez les Iks est terriblement classique.
Je suis d'accord pour considérer que ce qui nous arrive actuellement est terriblement sournois et pernicieux.
"sournois et perniceiux", ce n'était pas seulement ce que je voulais exprimer. Ceux qui subissent la dégradation des rapports sociaux sont aussi ceux qui sont accusés. L'amalgame est sans arrêt fait à l'encontre de personnes qui, au contraire, devraient être défendues au nom des nuances, des bonnes manières, et de tout ce que vous défendez ici.
Montrer à quelqu'un qu'il serait bon qu'il améliore sa façon de parler pour exprimer le meilleur des propos à défendre est une chose, mais accuser systématiquement en portant le soupçon là où il n'y a pas lieu, détruisant des témoignages et des soutiens précieux, peut donner lieu à des erreurs.
Ceux qui supportent cette torture invisible qui consiste à tuer toute parole véritable avant qu'elle sorte de l'œuf, souffriront d'autant plus si les seuls qui portent une vérité envers eux, les détruisent, faute de les écouter. Il ne s'agit pas seulement du côté pernicieux de ce qui nous arrive, mais du pernicieux dans lequel est plongée toute personne qui aimerait pouvoir enfin dégager une parole de tout cet effondrement dans lequel elle est engloutie.
22 février 2012, 14:08   Tout autour
"(...) en Suisse ou dans les petites villes allemandes aussi, on voit des mobiles, sans que ceux-ci ne détériorent à ce point le comportement (...)"

Oui, et à Vaduz de même, aucun problème.
Eh bien oui, Orimont, donc : votre hypothèse sur le mobile/les techniques comme explication à cette dégradation semble invalidée.
La preuve par Vaduz.
D'ac, on s'aligne sur le modèle liechtensteinien et on voit.
J'ai comme l'impression que ce fil va s'arrêter de sa belle mort, alors que le fond du sujet n'a pas été traité... Quel est le sens des fils de discussion, d'ailleurs?
La transmission du savoir, des valeurs de parents à enfants, de maîtres à élèves, était déjà compromise dès l'extension des moyens de communication, télévision, concentration des groupes de presse et d'édition.
J'en ai fait l'expérience avec mes propres enfants, la lutte est inégale.
Utilisateur anonyme
23 février 2012, 19:54   Re : Truffaut : qu'ont donc fait nos parents?
Pour apporter de l'eau au moulin de M. Bolacre, je note que chez de nombreuses personnes la honte et la retenue disparaissent sitôt qu'elles sont ou pensent être entourées d'amis ou de compères --- croyance que le téléphone mobile entretient constamment.
Utilisateur anonyme
23 février 2012, 23:07   Re : Truffaut : qu'ont donc fait nos parents?
Citation

J'ai comme l'impression que ce fil va s'arrêter de sa belle mort, alors que le fond du sujet n'a pas été traité... Quel est le sens des fils de discussion, d'ailleurs?

Vous avez pourtant lancé un très beau sujet, cher Loik, mais je ne crois pas que l'on puisse comparer la France des années 70, telle que figurée dans un film de Truffaut, d'avec la France de 2012, telle que la plupart des participants à ce forum la perçoivent. Si, dans 40 ans, sur ce forum, un intervenant vient nous dire que le Paris du film de Woody Allen mentionné par Cassandre est infiniment plus beau que le Paris de 2052, je ne doute pas que vous interviendrez pour protester (gentiment) comme je le fais, pour dire que le Paris enchanteur décrit par ce réalisateur n'avait rien à voir avec la réalité vécue dans cette capitale. Quant aux souvenirs des années 70, pour ceux qui en ont, ils ont le charme de la nostalgie qui efface les aspérités d'une époque certes plus policée et courtoise, mais aussi terriblement fermée et impitoyable pour qui divergeait un tant soit peu du moule patriarcal commun. La France des années 70 est pesante, grise, misogyne et censurée.L'Université se perdait dans l'idéologie et le structuralisme. Des petits juges communistes enfermaient des bourgeois parce qu'ils étaient bourgeois, donc forcément coupables.La guerre froide régnait et l'horizon était l'Amérique. Non, ce n'était pas si bien, la France des années 70.
Gauchistes, les petits juges, gauchistes, pas communistes, avec un goût pour l'enfermement de notaires.

Ce que vous dites correspond assez bien à ce que j'ai vécu, Michel, je me permets d'ajouter au tableau les couleurs hideuses de l'époque, ces oranges notamment.
Utilisateur anonyme
24 février 2012, 00:35   Variation sur un même thème
« Le vieux Paris n'est plus (la forme d'une ville
Change plus vite, hélas ! que le cœur d'un mortel)... »
Utilisateur anonyme
24 février 2012, 19:02   Re : Truffaut : qu'ont donc fait nos parents?
Oui, gauchistes, naturellement.. Vous avez raison, cher Jean-Marc.
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