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Problèmes de concentration

Envoyé par Utilisateur anonyme 
Utilisateur anonyme
17 avril 2012, 08:21   Problèmes de concentration
(Message supprimé à la demande de son auteur)
a koa ça sert 2 b1 écrire en 2012 ?
Ce qui m'inquiète, c'est le niveau d'expression de l'instituteur !
"et effectivement j'ai des fautes", pour commencer, au lieu de "ils font des fautes" - c'est une belle anacoluthe, si on est généreux.
"alors que ce sont des gamins qui savent parfaitement" : niveau de langue très bas (gamins) et phrase incomplète.
"ils trouvent très bien les corrections eux-mêmes." : cela ne veut rien dire. Il voulait, je pense, dire : "Ils se corrigent très bien eux-mêmes."
J'enseigne en terminale et ces fautes sont toujours massivement commises par tous les élèves : preuve qu'on ne les a pas assez forcés à se corriger au cours des années précédentes. L'idée que les fautes ne sont pas graves est la plus commune : c'est elle qui permet de comprendre le peu d'attention et de soin apportés à la grammaire et à l'orthographe. L'essentiel est que le lecteur "comprenne", disent les élèves. Je corrige toujours : "Dans ce que vous écrivez, il n'y a rien à comprendre. Le lecteur est obligé de deviner ce que vous avez voulu dire sans le dire." En mathématiques, on n'exige pas du professeur qu'il devine les résultats justes sous les erreurs de raisonnement et de calcul : on l'exige en permanence dans les matières où la rédaction conserve une part importante, à commencer par la philosophie.
C'est exactement je ce que j'ai observé en donnant des cours particuliers de rattrapage, auprès d'enfants du CM1.

Que ce problème de concentration soit vraiment lié à "l'imaginaire", cela n'est qu'une hypothèse. Le phénomène est encore plus étrange, plus "stratifié". Par exemple, la fameuse "loi du moindre effort" est très peu à l'oeuvre. Des formes fautives sont parfois d'une étrange complication comparées à l'orthographe correcte.

Il y a aussi une visible confusion liée à un mauvais rapport entre l'oral et l'écrit. Celui qui écrit "Sais comme sa", au lieu de "c'est comme ça" semble courir se servir sur une étagère où toutes les occurrences de son "cé" (nous sommes dans le Midi, et il n'y a guère de "è") ou du son "sa" sont bien rangées et il attrape les premières à portée de main et s'empresse de les coucher sur le papier, avec, peut-être, l'idée inconsciente qu'il ne s'agit jamais que d'un son. En effet, si l'on revient sur la faute, elle est identifiée et corrigée, quelquefois avec l'air de satisfaire à une marotte de grande personne.

Sur le fond, par delà les méthodes, ce qui, au yeux des enfants semble perdu de vue dans cette histoire d'orthographe, c'est bien sûr le concept de "convention" commune qui permet tout simplement la compréhension entre individus.
S'ils ne savent plus se concentrer, c'est sans doute que l'école ne leur apprend plus la concentration (dès la maternelle, se taire, écouter, faire silence en soi, faire taire le "moi") qui briderait leur sacro-sainte créativité.
"(..., se taire, écouter, faire silence en soi, faire taire le "moi")"

Un enfant qui, à la maternelle, se comporte ainsi est considéré comme peu éveillé, introverti, peu sociable et on a vite fait de le stimuler en vue de sa "socialisation".
Je crois que la seule solution, à ce stade, puisque le nombre moyen de fautes par ligne augmente, est de diminuer la largeur des cahiers qu'achètent les élèves. La situation n'est plus tenable ; il faut que les pouvoirs publics se mobilisent pour faire céder sur ce point les multinationales de l'industrie du papier dont les intérêts privés entravent la poursuite de l'intérêt commun et compromettent la réussite de tou-te-s.
Orimont,

Suggérez-vous qu'ils font des fautes mais sont ensuite capables de les identifier ?
Oui, c'est bien ça. Du moins, c'est ce que ma très modeste expérience en la matière m'a permis de constater plus d'une fois. C'est un phénomène d'autant plus embarrassant puisque en définitive on ne leur apprend rien des règles de base. Elles ne sont tout simplement pas devenues le moins du monde des automatismes.

Avec le vocabulaire, c'est un peu différent. Mardi dernier j'ai appris à un élève de CM1 que l'expression "arts plastiques" ne s'écrivait pas en un seul mot (un cours d'arplastique ou quelque chose comme ça) et il était tout éberlué de cette révélation ! La pédanterie aura fait bien des ravages. Allez expliquer l'adjectif "plastique" accolé à art pour désigner dessin, coloriage, modelage, travaux manuels, balivernes archaïques ! Les enfants souffrent d'une extraordinaire disette de simplicité, de clarté, et, à 18 ans, ils ne comprennent plus que les discours de Mme Le Pen ou de M. Mélenchon...
Les problèmes de concentration que j'ai rencontrés (dans le même contexte que Orimont) étaient dus au sentiment d'infériorité et de culpabilité face à la connaissance. Il fallait tout savoir sans apprendre, sinon vous passiez pour un pauvre nul. Donc inutile d'exposer le besoin d'apprendre (trop dangereux), car pour apprendre il est bon de reconnaître que nous ne savons pas. Ne pas savoir aujourd'hui, même pour des enfants de Cm1 constitue une faute. L'enseignant moderne est là pour les conforter dans leur croyance d'une la connaissance innée de tout ou presque. Quand ils ont des parents très présents dans une transmission ou l'autre, ce n'est pas trop gênant, d'où le maintien des élites malgré le discours inverse. Rien à surmonter, à dépasser, car cela pourrait froisser la susceptibilité de ces merveilles de la société petite bourgeoise. Seuls quelques parents regrettent ce manque d'écoute de leurs enfants sans toutefois comprendre d'où vient ce laxisme total des autorités. Je reconnais qu'à une époque François Bayrou était le seul à parler ouvertement de ces problèmes. Mais qu'a-t-il fait concrètement? Rien.
"Il fallait tout savoir sans apprendre, sinon vous passiez pour un pauvre nul. Donc inutile d'exposer le besoin d'apprendre (trop dangereux), car pour apprendre il est bon de reconnaître que nous ne savons pas. Ne pas savoir aujourd'hui, même pour des enfants de Cm1 constitue une faute."

C'est vrai. Dans cette macédoine, il entre aussi beaucoup de cet ingrédient.

Ces illuminés de pédagogues n'imaginent pas à quel point les enfants souffrent de leur jargon et en viennent à rejeter en bloc l'enseignement scolaire. Conséquence inattendue, parfois : le goût, au lycée, pour les langues rares. Je connais deux lycéennes dont l'une a choisi le russe et l'autre le... coréen, qu'elle s'est mise à apprendre toute seule. Elles progressent vaillamment dans ces langues qui ne sont pas d'un abord facile et, dans le même temps, n'obtiennent que de très médiocres résultats en... anglais. Ce sont des choses qui me dépassent mais qui ont sans doute une explication dans le fait que ces langues rares ne sont pas encore investies par le pédagogisme. Faute de professeurs, ce sont bien souvent des Russes de Russie qui viennent enseigner. Quant au Coréen... Cela témoigne peut-être d'un goût d'apprendre vraiment parce qu'on est sûr et certain de ne pas savoir, sans en ressentir le sentiment de culpabilité décrit par Marie. Il n'y a aucune honte à ne pas savoir parler russe ou coréen et les gogos nous foutent la paix.
Je trouve vos remarques très pertinentes, c'est cela en effet, mieux vaut se passionner pour une culture "d'outsider" que de s'exposer aux chantres du pédagogisme avec ces professeurs tout dévoués qui vous collent aux basques pour que vous promouviez leur modèle partout. Je connais un autre de ces enfants qui apprend tout seul le japonais, invente des langues secrètes et étudie le code du guerrier samouraï. Imaginez un peu tout ce qu'il risque pour sa survie!
17 avril 2012, 15:47   Re : Problèmes de concentration
Citation
Stéphane Bily
Je crois que la seule solution, à ce stade, puisque le nombre moyen de fautes par ligne augmente, est de diminuer la largeur des cahiers qu'achètent les élèves. La situation n'est plus tenable ; il faut que les pouvoirs publics se mobilisent pour faire céder sur ce point les multinationales de l'industrie du papier dont les intérêts privés entravent la poursuite de l'intérêt commun et compromettent la réussite de tou-te-s.

Fondons le CNLCEC (Comité National de Lutte Contre l'Elargissement des Cahiers) ! Tous et toutes, avec SUD Etudiant-e-s, mobilisé-e-s !
Cela dit ces choix apparents, qui font se porter sur l'apprentissage d'une langue exotique, sont d'abord et avant tout des choix d'exotisme, lesquels acceptent des motivations très diverses, très individuelles et souvent assez profondes, suffisamment en tout cas pour être étrangères au contexte y compris à ce rejet du pédagogisme ambiant que vous caractérisez si bien: je me souviens d'un cours de langue et civilisation chinoises que j'ai suivi il y a trente ans où une personne était là pour "compenser" et soigner le mal d'une rupture sentimentale, un autre pour compléter sa panoplie de savoir-faire extravagants, tel autre pour approfondir sa réflexion sur la philosophie des Grecs et des stoïciens, un autre encore parce qu'il avait tout raté de ses études et voulait rattraper ses échecs et blessures narcissiques en se colletant l'impossible, un autre enfin pour moins ressentir l'exil de son pays sud-américain en dictature et moi-même les ayant toutes sauf la dernière et ayant la première en inversé: par enchantement amoureux.
Orimont,

Avez-vous noté une corrélation avec la proportion d'enfants issus de l'immigration dans les classes ? ou bien pensez-vous que cela soit le fruit amer du pédagogisme ?
Cher Jean-Marc,

Comme je l'ai écrit, mon expérience est très modeste et ne porte que sur des cours particuliers de rattrapage scolaire. Je ne peux donc répondre à votre question. Simplement, il me semble que si les tendances du pédagogisme sont désastreuses sur des enfants de langue française, il ne peuvent l'être qu'encore plus sur des enfants issus de l'immigration qui n'ont jamais vraiment coupés les ponts avec leurs langues d'origine.


Cher Francis,

"Cela dit ces choix apparents, qui font se porter sur l'apprentissage d'une langue exotique, sont d'abord et avant tout des choix d'exotisme, (...)"

Nos messages se rejoignent. Je pense en effet que le goût d'apprendre est, dans tous les cas, un choix d'exotisme. Le savoir est exotique. Si l'on ne sort pas de soi, on ne veut rien savoir, ni chercher à comprendre.
Orimont, vous écriviez :

"Sur le fond, par delà les méthodes, ce qui, au yeux des enfants semble perdu de vue dans cette histoire d'orthographe, c'est bien sûr le concept de "convention" commune qui permet tout simplement la compréhension entre individus."

Il me semble qu'au contraire, en écrivant "coman sa va", ils se font mieux comprendre entre eux que s'ils écrivaient "comment ça va ?". La socialisation marche à rebours, et c'est bien sûr cela qui inquiète...
Il me semble aussi qu'il y a une sorte de sens esthétique : l'amour des "k", des "s", qui seraient vus comme plus élégants (!) que les "ç" ; l'envie d'utiliser des lettres rares comme le "z" ou le "w"... "Zyva" "Wesh". C'est une forme d'esthétique du rugueux, du dur, qui se traduit là...
"C'est une forme d'esthétique du rugueux, du dur, qui se traduit là... "

Et aussi un exotisme forcené : c'est toujours mieux ailleurs.
l'envie d'utiliser des lettres rares comme le "z" ou le "w"... "Zyva" "Wesh". C'est une forme d'esthétique du rugueux, du dur, qui se traduit là...

Non non, c'est tout simplement par amour du Scrabble.

Plus sérieusement, il entre une part de volonté de "réhabilitation" des graphies "identitaires" ou revendicatives, telle Kanak pour Canaque, par exemple. Ce n'est pas sans influence sur tout un tas de mots relevant de ces sphères , et, par capillarité, sur l'ensemble du lexique (toutefois plutôt réduit) des "acteurs" de ce "champ".
Le z comme lettre ne me parait pas spécialement correspondre à une esthétique du rugueux. Il me semble par ailleurs que les parlures en cause sont beaucoup plus issues de la sous-culture américaine que de l'immigration. Je pense qu'il y a beaucoup plus de Swag (Something We All Get tired of hearing), de Lol, d'ASAP, d'OMG (Oh My Genitals ou Oh My Gayness) que de Ziva.
Le "k" en remplacement de "que", l'omniprésence du "w" ou du "z": confluence de facteurs dont deux prépondérants: langue des tags, langue des textos. "k", "w", "z" sont d'une plastique familière et aisée au rouleau de peinture des tags, lequel rouleau répugne aux pleins et aux déliés des lettres rondes. Vous l'aviez remarqué Francmoineau ?
Un point étrange : les terminaisons en -er, qui remplacent celles en -é.
Oui, le -er a presque totalement remplacé le -é chez les moins de vingt ans (c'est frappant sur Facebook). C'est probablement dû au fait qu'ils cherchent une forme unique pour chaque verbe (manger ou mangé) et que l'accent est instinctivement fui comme une bizarrerie.

A noter, cette amusante et très répandue terminaison universelle en -ay, assez populaire, et qui est une faute consciente d'elle-même. "J'ay terminay de mangeay".
Prochaine réédition d'Orimont pour séduire un nouveau public : "J'yay croiyes pah !"
Certes, on ne "tague" pas à la plume Sergent-major, cher Francis... Néanmoins, je serais moins affirmatif que vous au sujet des lettres "rondes".
Utilisateur anonyme
18 avril 2012, 14:29   Re : Problèmes de concentration
Citation
Francis Marche
Le "k" en remplacement de "que", l'omniprésence du "w" ou du "z": confluence de facteurs dont deux prépondérants: langue des tags, langue des textos. "k", "w", "z" sont d'une plastique familière et aisée au rouleau de peinture des tags, lequel rouleau répugne aux pleins et aux déliés des lettres rondes. Vous l'aviez remarqué Francmoineau ?

J'ai cru comprendre que vous étiez amateur de langues orientales... il me semble que le k est un durcissement du g (resp. le t du d, le p du b), non?

à moins que ce soit encore un coup des Polonais.
Aux Editions de la Tour de Blablabel.
Babybel pour Hollande.
Pour quoi les Polonais ? et sur tout pourquoi encore ?

Oui, le "k" est dur, si vous voulez. mais encore une fois le "g" est non scriptible sur les murs -- même en majuscule, il conserve son arrondi. Ah mais vous allez me dire que ce qui est anguleux est "dur" n'est-ce pas ?
Utilisateur anonyme
18 avril 2012, 17:43   Re : Problèmes de concentration
Il existe des graffitis aux lettres rondes, un peu dans ce genre :



(Berk !)
Utilisateur anonyme
18 avril 2012, 17:56   Re : Problèmes de concentration
Citation
Francis Marche
Pour quoi les Polonais ? et sur tout pourquoi encore ?

Le polonais est champion des lettres à dix points au scrabble.

«Encore un coup des Suédois» se rencontrait beaucoup sur fdesouche il y a un an.
J'ai pensé l'espace d'un instant que vous vouliez nous évoquer le père Ubu et la mère Ubu; ces deux là sont les deux seuls personnages d'une certaine envergure qui, dans leur genre, ont traversé la barrière du millénaire comme une fleur (les Caucescu, Mao et Jiang Qing, n'y parvinrent pas, feu Descoing et son épouse n'y parvinrent qu'incomplètement). Sarkozy, dans cent ans, sera mentionné dans les manuels d'histoire comme le seul homme à les avoir électoralement affrontés (le père et la mère) tous les deux à cinq ans d'intervalle...avec un succès, hélas il faut le craindre, lui aussi incomplet.

Si la France est immortelle, il se peut, tout compte fait, que ce soit par ce couple Ubu qui a traversé la barrière du millénaire comme d'autres le mur du son. Seule la bêtise en France, est véritablement immortelle. Faut-il s'en plaindre ? Je ne sais, disons qu'il est sage de ne s'en plaindre qu'incomplètement.
Un angoisse me vient. Et si ce couple se reformait pour nous dire : "On vous a bien eus !"
L'histoire nationale contemporaine virant au cauchemar, c'est une éventualité qui ne peut désormais être exclue.
Utilisateur anonyme
18 avril 2012, 19:27   Re : Problèmes de concentration
Vous n'y êtes point.

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