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Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?

Envoyé par Utilisateur anonyme 
Utilisateur anonyme
21 juillet 2012, 19:42   Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
Je viens de d'achever la lecture de "Septembre absolu". On perçoit ici et là une sorte de désir d'en finir avec ce monde tel qu'il est devenu et dans lequel l'auteur se sent étranger. Dieu merci, M. Camus n'est, semble-t-il, pas tenté par une solution violente de peur de se faire mal. Mais on sent qu'après tout celle qui vient est attendue sans aucune crainte et presque avec soulagement :

"Solo aspettar sereno
Quel dì ch’io pieghi addormentato il volto
Nel tuo virgineo seno
".

Mais c'est de charcuterie et de fromage plutôt que de sorbets au citron que l'auteur se délectera en l'attendant.

L'auteur y montre aussi une admiration amusée pour les audaces idéologiques de M. Richard Millet. Un peu comme Robespierre interrogé sur sa complaisance vis-à-vis de Marat répondit, prétend-on, qu'il gardait Marat parce qu'après lui c'était la terre inconnue.

Que pense le Parti de cette double attitude : celle-là assez peu motivante pour les troupes et celle-ci qui semble aller contre le peu de sympathie de ce forum pour M. Millet?

"Appressamento della morte" et fascination pour ce que pourrait être politiquement un "au-delà de Millet" : septembre précède la glaciation hivernale.
Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?

Koestler aurait dit "L'Infini".
Je ne représente pas le Parti, loin de là, mais Millet m'est subitement devenu très sympathique lorsqu'une collègue de travail, un jour de bac, à la pause de midi en pleine cantine, s'exclama qu'elle l'abhorrait comme l'idéologue nazi qu'il est. Vous voyez, c'est tout récent. Je ne suis jamais arrivé à terminer un livre de lui, dois-je ajouter, alors que je suis en bonne voie d'en finir avec les 600 pages de The Semitic Languages, sous la direction de Robert Hetzron. Je ne manque donc pas de coffre, voyez-vous.

Comme d'autre part je n'ai jamais pu me défaire, me dépêtrer, me débarrasser, de cette phrase de Renaud Camus qui dit, en substance, que les opinions sont comme des autobus, on les prend et on en descend, parfois en marche, j'ai beaucoup de mal à prendre au sérieux la moindre idée politique. Réponse inutile, d'accord, je descends.
Richard Millet est moins que sympathique. C'est un auteur, un acteur des lettres, arrivé, avec tout ce que cela comporte de morgue, de transgression pardonnée d'avance, d'épaisse couverture de risque.
Exactement, à un détail près : je dirais plutôt "parvenu".
Bon, les oreilles ne doivent pas lui siffler l'angélus !
Chers amis,
Vous pourriez argumenter vos propos avant de traiter Millet de " parvenu", et plutôt que de viser
l'auteur, viser d'abord l'œuvre ...
HP H
Car, pour ma part, je commence à peine "Fatigue du sens"...
C'est dire mon retard de lecture par rapport à vous.
Prévoyons de discuter sur ses thèses...
HPH
Citation
Richard Millet est moins que sympathique. C'est un auteur, un acteur des lettres, arrivé, avec tout ce que cela comporte de morgue, de transgression pardonnée d'avance, d'épaisse couverture de risque.

Quel tableau ... fielleux et injuste ...
Tout à fait d'accord, Rogemi, nous savons depuis Céline que le génial peut frôler l'abject...
Tenons nous à "Fatigue du sens " et débattons !
HPH
Utilisateur anonyme
21 juillet 2012, 22:38   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
"de transgression pardonnée d'avance,"

Je ne crois pas qu'il puisse continuer encore longtemps à se faire tout "pardonner d'avance" parce que ses livres, de plus en plus violents, et par moments si obscurs, commencent de s'opposer trop frontalement à la "domination totalitaire du présent" et à son insupportable idéologie vivrensembliste. Et si Millet attend, s'il espère quelque chose (mais là je m'avance un peu...), conspuant sans relâche l’idéologie antifasciste oeuvrant à l’effacement pudibond de toute altérité au profit d’une célébration consensuelle de la différence, c'est, je crois, le retour d’une violence sacrée, i.e. fondatrice. Rares sont ceux qui, comme lui, se sont réellement battus, je veux dire physiquement (guerre du Liban) - en clair, rares sont ceux qui ont vraiment foutu leur peau sur la table (parler "d'épaisse couverture de risque" me paraît quelque peu déplacé).

Millet est un grand écrivain, c'est donc un expérimentateur, et il continuera d'explorer les obscénités, les zones de pénombre, de déplacer et de manipuler des matières où la conscience quotidienne n’est plus vraiment présente.
Fatigue du sens. Et bien de quoi voulez-vous débattre ? Il n'y aucune littérature là-dedans, pour commencer. La littérature devrait, sinon servir, sinon se donner pour rôle du moins faire que les constats sociologiques et socio-politiques, socio-masochistes courants (courants comme ils le sont ici, sur ce forum) soient dépassés, remis au doute, livrés à l'imprévu et à leur néantisation, abolis dans plus complexe et plus grands qu'eux-mêmes quitte à y survivre après s'y être retrempés, or Millet ne fait pas cela, ne s'intéresse pas à cela, ne s'intéresse pas à une littérature qui oserait cela, y compris même par accident. Il écrit, dans FdS (qui sont les lettres initiales de cet opus comme elles le sont du site François de Souche, avez-vous remarqué cela ?)

A enseignement malade, littérature insignifiante, misère linguistique, détresse nationale: ce sont les symptômes de la nouvelle pauvreté, laquelle est aussi bien spirituelle que matérielle -- la misère linguistique étant la plus frappante, autant chez les immigrés soucieux de s'intégrer que chez les indigènes : on parle, on écrit au plus bas de la langue, là où on est incapable même de prier.

C'est une des perversions de l'antiracisme que d'enseigner à feindre d'ignorer d'où l'on vient et où l'on va; on est là, dans le flux de l'informe qui consiste, comme les capitaux, à passer d'un pays à l'autre, d'exister sans territoire, l'homme n'étant plus l'étalon-or de l'économie spirituelle, ni même ce risqeu sur quoi parier, mais une monnaie soumise à une inflation ou à une dévaluation permanentes.


Ces deux paragraphes sont extraits du volume imprimé en mai 2011, or cela fait bien sept ou huit ans que l'on peut lire cette déploration quasi-quotidiennement ici-même dans des mots à peine mieux ou à peine plus mal choisis et qu'une bonne douzaine d'auteurs francophones (je passe sur les autres) l'écrivent (Michéa, Taillandier, etc.), le tartinent sur tous les tons.

Où, dans quel ouvrage littéraire de votre auteur, l'émergence à la conscience, la genèse sinon, de cela, ce phénomène, cette complexe problématique, est-elle prédiquée, mise en acte, dans sa soupe sociale et psycho-sociale, avec dialogues? Nulle part. Trop difficile, trop risqué. Trop incertain. Peu vendeur. Trop "fait divers" madame.

La conceptualisation, le discours, le plat discours qui coule sur le dos de la censure, ça oui, notre Millet en est capable. Quant à l'action littéraire et romanesque qui ferait "vivre cela" pour employer le cliché publicitaire... enfin vous n'y pensez pas ! mieux vaut éditer comme un cochon Les Bienveillantes qui nous en tiendront à l'abri. (Certains linguistes se sont attachés à recenser les fautes de grammaires les plus grosses de ce roman édité par votre auteur: des centaines)
Je tiens la trilogie corrézienne pour une vraie réussite et La Gloire des Pythre pour son sommet. Depuis, Richard Millet n’est, pour moi, que déception. Un romancier dont l’inspiration semble tarie, comme soufflée par un tonneau de bile et dont l’expression (surtout à l’oral) devient ânonnante. Probablement un suicidaire esthétisant.

Eloge littéraire d'Anders Breivik
Nous ne pouvons en aucune façon nous solidariser avec un pareil titre, qui est totalement contraire à l’esprit de l’IN-NOCENCE.
Utilisateur anonyme
21 juillet 2012, 23:07   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
Un peu bizarre votre acharnement, M. Marche... Millet est un homme du passé - un homme qui, malgré sa culture, son intelligence, se trouve complètement désemparé devant le nouveau monde (monde postpolitique où l’universalisme abstrait et le multiculturalisme "tolérant" se doublent d’explosions de violence fondamentalistes et racistes) qui éclot devant lui.
Pas du tout. Millet n'est pas un homme du passé. Millet est un homme du présent. Le présent est suffisamment vaste et contradictoire pour contenir Millet et lui ménager une place de choix. Le présent, semblable en cela à Richard Millet, a les reins solides.
Tiens, c'est curieux, c'est la première fois, cher Francis, que je lis chez vous un jugement aussi défavorable à Millet. Aurais-je manqué des conversations ? Je suis tout à fait d'accord avec vous pour "Fatigue du sens", et pour quelques autres de ces pamphlets qui se veulent provocateurs. Moins d'accord pour Millet romancier, que j'aime beaucoup, notamment "La Gloire des Pythre", "Dévorations", "La Voix d'alto" et quelques autres.

Millet, un homme du présent ? C'est audacieux, et comme toujours j'admire que vous preniez les choses à rebrousse-poil.
Utilisateur anonyme
21 juillet 2012, 23:17   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
Fatigue du Sens est un livre intéressant, un peu une œuvre de posture.
Evitez Laura Mendoza, si vous aimez les jeunes filles en fleurs Le Chant des Adolescentes s'impose.
Si vous aimez prendre de grands coups (littéraires) dans la figure :
Ma vie parmi les ombres (ajouter y un dose de La Gloire de Pythre)
et La Confession négative
et vous connaîtrez Monsieur Millet, vous aurez certes un pieds en enfer (un autre dans ma merde), mais vous aurez lu quelque chose. Nous savons tous ici que c'est devenu rare.
En prime vous cesserez d'associer la Corrèze aux Chirac Hollande et je ne sais quoi .
Sérieusement vous ne pouvez pas mourir avant d'avoir connu ces œuvres.
Monsieur Chassaing, comme vous y allez... On peut mourir tout à fait heureux sans avoir lu une ligne de Millet, je vous assure.
Utilisateur anonyme
21 juillet 2012, 23:21   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
"Le présent est suffisamment vaste et contradictoire pour contenir Millet et lui ménager une place de choix".

Se déclarer, sur un plateau T.V (Taddei), "malheureux d’être le seul blanc au métro Châtelet, à 18 heures", et expliquer que pour lui "les mosquées en France, ce n’est pas possible, que c’est une terrible souffrance", libre à vous d'appeler ça "une place de choix"...
Utilisateur anonyme
21 juillet 2012, 23:32   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
Citation
Bruno Chaouat
Monsieur Chassaing, comme vous y allez... On peut mourir tout à fait heureux sans avoir lu une ligne de Millet, je vous assure.
Mais il s'agit de mourir malheureux.
Utilisateur anonyme
21 juillet 2012, 23:34   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
Millet a des couilles, c'est clair.
Bien vu, cher Monsieur Chassaing !
Je me méfie de ma propension à l'effacement, à l'échec, au renoncement : la décadence est un terrible accélérateur de perspectives et l'époque une formidable machine à réprouver (fut-ce par auto-censure) les déviants que sont les écrivains qui s'obstinent à écrire envers et contre tout; ce qui me fait considérer avec joie une solitude dont j'étais près de me plaindre alors que j'en tire ma force, mon sourire, ma détermination à ne pas vous ressembler...

Richard Millet Le dernier écrivain Ed. Fata Morgana 2005
Utilisateur anonyme
22 juillet 2012, 00:01   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
Citation
Jean-François Chassaing
Citation
Bruno Chaouat
Monsieur Chassaing, comme vous y allez... On peut mourir tout à fait heureux sans avoir lu une ligne de Millet, je vous assure.

Mais il s'agit de mourir malheureux.


Millet est un homme du futur, il est LE futur (hein Francis ?) : Millet ne peut pas mourir.
"être malheureux": soyez malheureux, ou ayez l'air tel, ou posez comme tel, et, en France, vous serez absout, sinon pardonné. L'éponge de l'époque, sur votre dos las, glissera comme par le geste d'une main féminine et pardonnante.

Presque jamais, Renaud Camus, dans son oeuvre, ne se montre malheureux de ce qui advient. Il n'écrit jamais, par exemple, je suis malheureux de voir mon pays perdre tout visage, se déliter, se banaliser, ne plus être où je l'attendais ou de le trouver, dans les lieux et les comportements publics observables, en dessous de tout. Il ne se vêt ni ne se caparaçonne d'état d'âme qui le ferait passer pour un meurtri à prendre en sympathie. Il dénonce ce qui s'offre à ses yeux et à ses tympans tantôt froidement, tantôt avec humour, détachement, ou passion, c'est selon, mais nous fait grâce, en général, de toute invite à pleurnicher avec lui.

Richard Millet est un auteur sans humour, ce qui dévalorise ses affres, les banalise. Il nous livre, dans cet ouvrage, Fatigue du sens, le direct de son présent état malheureux comme d'autres, moins aptes que lui à l'écriture, leur minuscule bonheur actuel.
Utilisateur anonyme
22 juillet 2012, 00:22   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
"Presque jamais, Renaud Camus, dans son oeuvre, ne se montre malheureux de ce qui advient."

Millet : moins malheureux qu'excessif, jusque dans son lyrisme désabusé, peu vraisemblable, violent toujours, comme lorsqu'il met en scène les malheurs d’une société qui a oublié d’où elle vient et qui ne sait pas où elle va. Constat pessimiste, déjà entendu, mais ce qui importe, finalement, c’est une forme de beauté dans l’errance, parce qu’inadaptée.
La souffrance de Millet est universelle bien qu’absolument particulière ; elle est celle qui afflige, en définitive, la condition humaine. Millet n'est pas malheureux, il est inadapté (à ce qui advient).
Francis, très juste : je trouve que Millet dépolitise et "médicalise" son sentiment, ou sa "fatigue" (du reste, "fatigue du sens" ne signifie pas grand-chose, j'ai le plus grand mal à comprendre ce qu'il entend par là, "fatigue du sang", peut-être ?). C'est pour le moins égocentrique, et ça lui vaut l'indulgence et la compassion des médias.
Utilisateur anonyme
22 juillet 2012, 00:30   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
"je trouve que Millet dépolitise et "médicalise" son sentiment, ou sa "fatigue"

???? - Vous avez déjà essayé de politiser, ou de dépolitiser, votre fatigue... ? Comprends pas.
Utilisateur anonyme
22 juillet 2012, 00:32   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
Si, tout de même, la fatigue du sens, on voit bien de quoi il s'agit. Plus rien n'a de sens ; les choses ont lieu, désordonnées, quelques jeunes gens se retrouvent à marcher au bord d'une route nationale en sortant d'une forêt, ça n'a pas de sens et pourtant ça a lieu (et le dire n'a pas plus de sens), on parle, on parle, on écrit, on tweete : aucune grandeur ; on ne sait pas quelles sont les entreprises en cours, ce qu'on défend, pour quoi on se bat. Qui est prêt à mourir pour un micro-ondes ? Tout ça n'a pas de sens, ou alors, si, un tout petit peu, un sens fatigué, amoindri. Voilà deux-mille ans que nous existons et nous sommes fatigués. Le sens veut dormir.

On peut critiquer Richard Millet (à la façon de Francis Marche, toujours aussi brillant), mais cette formule est riche.
C'est juste Monsieur Leroy. "Fatigue du sens", après tout, c'est fort bien trouvé. Merci pour votre exégèse impromptue.
» "fatigue du sens" ne signifie pas grand-chose, j'ai le plus grand mal à comprendre ce qu'il entend par là

Et moi qui ai toujours tenu en admiration ce titre mat de Pavese, Travailler fatigue, alors que je n'ai jamais été grand travailleur, et que Millet, lui, Paul Wenner a raison sur ce point, a risqué se faire trouer la peau pour ses idées, je ne vois pas comment appeler cela autrement.

(Il m'étonnerait qu'on pleurnichât beaucoup dans les milices chrétiennes, quand même, cher Francis...)
Utilisateur anonyme
22 juillet 2012, 01:30   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
Je viens de découper un livre datant de 1963 et qui ne l'avait pas été jusqu'à ce soir. Voilà qui a du sens.
C'est l'usage que je réserve à mon coquet canif rouge Ingeba de l'armée suisse, tous mes Corti y sont passés, en attendant de me battre au couteau.
Citation
tous mes Corti y sont passés, en attendant de me battre au couteau.

J'avais oublié le plaisir incomparable d'ouvrir un Corti avec un couteau de cuisine. Merci Alain.
Hérésie ! On ne découpe pas les pages avec un couteau qui coupe.
Utilisateur anonyme
22 juillet 2012, 10:18   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
Citation
Francis Marche

Richard Millet est un auteur sans humour, ce qui dévalorise ses affres, les banalise. Il nous livre, dans cet ouvrage, Fatigue du sens, le direct de son présent état malheureux comme d'autres, moins aptes que lui à l'écriture, leur minuscule bonheur actuel.

Monsieur Marche je pense qu'il faudrait nuancer fortement l'idée du manque d'humour de Richard Millet. Certes dans son œuvre critique et « politique » nous n'en trouvons guère. L'humour est cependant très présent dans l'oeuvre littéraire, je pense en exemple à La Gloire des Pythre :
Un humour triste d'inadapté et en ce point Paul Wenner a raison.
Je regrette de voir l'oeuvre de Millet abordée ici surtout par La Fatigue du Sens. Enfin je l'ai expliqué plus haut.
Je pense aussi que la différence entre Renaud Camus et Richard Millet nous renvoie à la défense de Renaud Camus. Chez ce dernier il n'y a pas de haine, seul le MRAP en trouve, chez Millet nous trouvons une haine assumée qui nous conduit, pour le bien, aux portes de l'enfer. Sacré paradoxe.
Si laisser faire le pire quand un simple geste ou une parole pourrait l'éviter c'est avoir de l'humour, alors oui, je préfère les hommes sans humour !
Et j'imagine que ça ne doit pas être simple tous les jours de tenir tête à la lâcheté généralisée, mais de là à parler de haine assumée ... considérer avec joie une solitude va au-delà.
Ce n'est pas très compliqué.

Quand on lit Renaud Camus, on se prend de nostalgie pour la France d'autrefois, et on entend l'angélus.

Quand on lit Millet Richard (de l'importance du prénom), on entend un tiroir-caisse et on se dit (importance du nom) "Millet se fait du blé".
Utilisateur anonyme
22 juillet 2012, 11:33   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
Citation
Marie Cournou
Si laisser faire le pire quand un simple geste ou une parole pourrait l'éviter c'est avoir de l'humour, alors oui, je préfère les hommes sans humour !
Et j'imagine que ça ne doit pas être simple tous les jours de tenir tête à la lâcheté généralisée, mais de là à parler de haine assumée ... considérer avec joie une solitude va au-delà.

Lisez, Madame, la Confession Négative, et vous comprendrez la haine assumée.
Utilisateur anonyme
22 juillet 2012, 11:54   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
Citation
Jean-Marc
Ce n'est pas très compliqué.

Quand on lit Renaud Camus, on se prend de nostalgie pour la France d'autrefois, et on entend l'angélus.

Quand on lit Millet Richard (de l'importance du prénom), on entend un tiroir-caisse et on se dit (importance du nom) "Millet se fait du blé".

Vous êtes, cher Jean-Marc, injuste, ce qui est rare chez vous sauf quand vous parlez de Richard Millet. Il a une situation dans le monde de l'édition, mais convenez (non, vous n'allez pas le faire) qu'il écrirait autre chose que Ma Vie Parmi les Ombres s'il n'avait que le  blé comme objectif. J'ai un certain mal à classer sa littérature dans la catégorie commerciale. D'autre part Richard Millet a une œuvre de critique musicale, qui ne porte pas sur Bertrand Cantat. Enfin je n'espère pas vous faire changer d'avis.
[D'autre part Richard Millet a une œuvre de critique musicale, qui ne porte pas sur Bertrand Cantat]

Si dans une heure, mes invités me demandent pourquoi je ris bêtement tout seul, il va bien falloir que je leur explique...
Richard Millet est un monstre officiel. C'est Léon Bloy directeur de collection au Mercure de France, la bonne blague !
Citation
Vous êtes, cher Jean-Marc, injuste, ce qui est rare chez vous sauf quand vous parlez de Richard Millet.

ou de Philippe Muray ... le mot rare me fait un peu sourire !
Après fasciste, nazi, raciste, voici "monstre", la nouvelle accusation en vogue... Qu'est-ce qu'un monstre pour vous ?
Bien !
Je vois vois que j'ai devant moi des lecteurs assidus et critiques de l'œuvre. Je n'en suis pour ma part qu'a l'aube de la lecture de la FdS, soit "l'asthénie du signifié", le déclin dépressif de l'homme moderne occidental, le francais sous prozac, avec pour seul horizon le gris, le noir, l'indistinction et le flou. Amateur de photos, je suis très sensible à ces délicates nuances de gris qui font le charme du noir et blanc.
Alors, que lire en urgence de ce monsieur Millet ?
Merci
HPH
Utilisateur anonyme
22 juillet 2012, 13:46   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
« Il y a toute sorte de gris. Il y a le gris plein de rose qui est un reflet des deux Trianons. Il y a le gris bleu qui est un regret du ciel. Le gris beige couleur de la terre après la herse. Le gris du noir au blanc dont se patinent les marbres. Mais il y a un gris sale, un gris terrible, un gris jaune tirant sur le vert, un gris pareil à la poix, un enduit sans transparence, étouffant, même s'il est clair, un gris destin, un gris sans pardon, le gris qui fait le ciel terre à terre, ce gris qui est la palissade de l'hiver, la boue des nuages avant la neige, ce gris à douter des beaux jours, jamais et nulle part si désespérant qu'à Paris au-dessus de ce paysage de luxe, qu'il aplatit à ses pieds, petit, petit, lui le mur vaste et vide d'un firmament implacable, un dimanche matin de décembre au-dessus de l'avenue du Bois... »

Louis Aragon, Aurélien.
Utilisateur anonyme
22 juillet 2012, 13:49   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
Citation
Hans Peter Hartung
Bien !
Je vois vois que j'ai devant moi des lecteurs assidus et critiques de l'œuvre. Je n'en suis pour ma part qu'a l'aube de la lecture de la FdS, soit "l'asthénie du signifié", le déclin dépressif de l'homme moderne occidental, le francais sous prozac, avec pour seul horizon le gris, le noir, l'indistinction et le flou. Amateur de photos, je suis très sensible à ces délicates nuances de gris qui font le charme du noir et blanc.
Alors, que lire en urgence de ce monsieur Millet ?
Merci
HPH
Mon choix personnel :
Ma vie parmi les ombres
La Confession négative
Bonne lecture.
Pour les amateurs de noir et blanc, grande expo de Martin Chambi cet été à Porto, Portugal.
Un "monstre", c'est ce que l'on montre pour provoquer la stupeur de ceux qui, alors, sont convaincus de n'être pas des monstres. Renaud Camus ne fait pas un bon monstre, ce qui lui vaut une animosité bien plus grande de la part des "médias".
Utilisateur anonyme
22 juillet 2012, 15:26   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet ?
Voyez-vous Richard Millet tant que ça, dans les “médias”, cher Orimont ?
Un "monstre", c'est ce que l'on montre pour provoquer la stupeur de ceux qui, alors, sont convaincus de n'être pas des monstres. Renaud Camus ne fait pas un bon monstre, ce qui lui vaut une animosité bien plus grande de la part des "médias".
C'est en effet une accusation très grave. J'espère que vous savez de quoi vous parlez parce que vous commettriez une terrible injustice si Richard Millet n'avait jamais eu de telles intentions ou fait preuve d'une telle perversion en rentrant dans un tel jeu.
De plus, dénoncer un mal qu'ont vécu vos proches ou que vous avez vécu pourrait alors être qualifié de monstrueux sous prétexte qu'on risquerait de créer la stupeur.
J'avoue ne pas très bien vous suivre et rester extrêmement perplexe.
Mais, "monstre" ou pas, bon ou mauvais, l'essentiel est de savoir si R.M est sincèrement accablé de ce qu'il voit et vit en France. Je pense que c'est le cas et je ne vois pas en quoi profiter de sa position de "monstre" pour exprimer cet accablement serait condamnable. Au contraire. Il serait souhaitable que d'autres "monstres" profitent de leur exposition à l'écran pour exprimer, chacunà sa façon, le même sentiment . Nous nous sentirions moins seuls.
Mais il s'agit ici de pervertir les autres, je ne trouve pas cette position défendable. S'il s'agit bien de cela alors je comprendrais qu'un monstre refuse de servir d'objet de perversion.
Utilisateur anonyme
22 juillet 2012, 16:55   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet ?
Citation
Jean-Michel Leroy
Voyez-vous Richard Millet tant que ça, dans les “médias”, cher Orimont ?

Je pense, comme vous, que la dimension médiatique de Richard Millet est exagérée ici. Dommage !
Pour faire peur il y a les requins, si toutefois l'homme ne les massacre pas tous, bien que le contraire s'annonce malheureusement. Si c'est pour créer d'autres monstres à tête d'homme à la place, ce monde risque d'être bien laid, il n'est déjà pas très réjouissant.
Mon opinion n'est évidemment pas que Millet est un "monstre". Je voulais simplement émettre l'hypothèse qu'il tient ce rôle à chacune de ses apparitions dans les "médias", qui, ces apparitions, sont peut-être rares, je n'en sais rien, je ne me fie qu'à cette émission donnée en lien sur ce forum où il faisait remarquer être le seul de sa race présent parmi les invités et j'émets l'hypothèse suivante que la même constatation, émise dans les mêmes conditions par Renaud Camus, eût déclenché beaucoup plus d'indignation parce que faite, cette constatation, dans un mélange d'élégance, de détachement et de combativité, propre à révolter bien plus l'assemblée que le spectacle d'accablement, de défaite, donné par Millet, lequel spectacle conforte ses opposants dans l'idée que l'avenir leur appartient. De même, dans un tout autre genre, Nabe ne peut servir de repoussoir.

Et pour en revenir à la "visibilité" de Richard Millet dans les "médias", on ne peut, à mon avis, se contenter de la mesurer aux apparitions télévisuelles. Renaud Camus (ou Nabe) ne trouve plus d'éditeur. Millet occupe un poste de choix dans l'une des plus prestigieuses maison d'édition française, ce qui ne va pas, dites-moi si je me trompe, sans un gros minimum de "relations publiques" à entretenir avec des auteurs, des journalistes, des "faiseurs d'opinion" etc.
A par ce que j'ai souligné plus haut, je suis d'accord avec vous, Orimont.
Utilisateur anonyme
22 juillet 2012, 17:13   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet ?
Précision utile, cher Orimont : sur le plateau de l'émission de M. Frédéric Taddeï, “Ce soir (ou jamais !)”, Richard Millet avait déploré être le seul Blanc sur les quais du RER, au Châtelet, à six heures du soir, pas être le seul représentant de sa race sur le plateau...
Cher Orimont,
On ne saurait comparer le style de Millet à celui de Nabe. Millet n'écrirait pas "L'Enculé", par exemple... Quelque réserve que je puisse avoir sur ses ouvrages polémiques, et sur la posture d'accablement et d'affliction, je tiens Millet pour un très grand écrivain.
Citation
Millet occupe un poste de choix dans l'une des plus prestigieuses maison d'édition française, ce qui ne va pas, dites-moi si je me trompe, sans un gros minimum de "relations publiques" à entretenir avec des auteurs, des journalistes, des "faiseurs d'opinion" etc.

On remarquera quand même que deux de ces derniers livres ont été publiés chez d'autres éditeurs que Gallimard. La fatigue du sens chez Pierre Guillaume de Roux et Arguments d'un désespoir contemporain chez Hermann.

Oui son travail chez Gallimard lui apporte une certaine protection (dans les médias) dont Renaud Camus ne peut pas bénéficier mais on ne peut pas lui en faire le reproche.

Ses apparitions à la télévision sont désastreuses car n'étant ni une grande gueule ni un cabotin il souffre d'être là, de ne pas pouvoir dire ce qu'il pense vraiment.

Il n'y a dans son comportement aucune posture et son malaise est authentique.
Certes l'attitude de RM donne tellement l'impression qu'il s'avoue vaincu que ça rassure les Amis du Désastre qui du coup consentent à lui faire la fleur de le laisser s'exprimer à....trois ou quatre contre un, histoire de limiter les dégâts. Une fleur ça va ... on connaît la suite. Faudrait quand même pas pousser.
"(...) sur le plateau de l'émission de M. Frédéric Taddeï, “Ce soir (ou jamais !)”, Richard Millet avait déploré être le seul Blanc sur les quais du RER, au Châtelet, à six heures du soir, pas être le seul représentant de sa race sur le plateau..."

Oui, vous avez raison, je me suis laissé allé à l'approximation par pure et simple flemme et j'ai évoqué Nabe, non pour établir une quelconque comparaison stylistique mais passer en revue les "monstres" possibles.
J'aime les livres de Millet. Une chose me dérange cependant. Il dit qu'il n'a jamais voté.
Donc, il se complet et se morfond dans le fatalisme. Tout fout le camp et on n'y peut rien.
Consternation et mépris pour notre société mais la politique ne peut rien. C'est désespérant.
A moins que ce soit une posture.
Utilisateur anonyme
22 juillet 2012, 18:20   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
Cher M. de Brindamour, peut-être semble-t-il dérisoire d'aller voter à quelqu'un qui a connu la vraie guerre, avec les vraies armes et les vrais morts ? Je ne sais pas.
Pardon cher Bruno Chaouat, Nabe est aussi un grand écrivain. Insortable, certes, mais grand. C'est ainsi.
Citation
Francis Marche
Fatigue du sens. Et bien de quoi voulez-vous débattre ? Il n'y aucune littérature là-dedans, pour commencer. La littérature devrait, sinon servir, sinon se donner pour rôle du moins faire que les constats sociologiques et socio-politiques, socio-masochistes courants (courants comme ils le sont ici, sur ce forum) soient dépassés, remis au doute, livrés à l'imprévu et à leur néantisation, abolis dans plus complexe et plus grands qu'eux-mêmes quitte à y survivre après s'y être retrempés, or Millet ne fait pas cela, ne s'intéresse pas à cela, ne s'intéresse pas à une littérature qui oserait cela, y compris même par accident. Il écrit, dans FdS (qui sont les lettres initiales de cet opus comme elles le sont du site François de Souche, avez-vous remarqué cela ?)

Je retiens, après relecture du fil, ce paragraphe remarquable de Francis Marche, qui me semble souligner l'insuffisance symétrique d'une littérature de l'approbation (genre Bobin) et d'une littérature de la désapprobation (Millet et autres). Ces deux formes rhétoriques littéraires apparemment opposées ont leur public, leurs réseaux (les actionnaires d'un côté, les réactionnaires de l'autre) et leur face à face n'avance à rien (ou parfois il éveille les esprits, comme firent le Renaud Camus critique et le Philippe Muray satirique pour moi). Ce face à face marque un certain point d'arrêt de la création littéraire, car l'approbation ou la désapprobation du réel ont un point commun : l'axiologie, le jugement de valeur obligatoire sur ce qui est. Or la littérature ne se limite pas à l'axiologie, les Journaux de Renaud Camus ne se résument pas à des plaintes sur les portes d'hôtels qui claquent ni sur les paysages ravagés. Les essais de Philipppe Muray ne sont de simples outrages, bêtement blasphématoires, à la gauche divine ("provocation, cet hommage du croyant à son idole"). Il y a littérature quand le cercle du présent, le cercle dévolu au journalisme, est dépassé et aboli dans plus grand que lui-même. Je regrette de ne plus retrouver ce texte si fin, si simple, de Michel Houellebecq, où il explique que le roman véritable consiste à faire regarder le monde réel de l'extérieur, comme par une fenêtre. Le journalisme est parvenu à nous faire croire que le monde tel qu'il le voit et le dit, est le monde. Les premiers à le croire sont les écrivains : les uns le fuient, les autres l'étreignent, d'autres le cognent, tous s'y réfèrent, et presque aucun ne songe que la littérature essaie de faire autre chose : comme le remarque Proust, changer les lentilles et le point de vue. Faire de l'impensé. On me trouvera courtisan plat et outré, mais tant pis : j'ouvre un volume de Camus comme un Saint-Simon (sachant qu'il classe les Mémoires de Saint-Simon parmi les lectures faciles, je vais avoir des ennuis). Je sais à quoi m'attendre dans Saint-Simon, mais je finis toujours stupéfait.

J'ai lu une partie de Lauve le Pur, un jour. Je connaissais les lieux pour y avoir travaillé (Chelles, devenu Helles), le désespoir du professeur, etc ... J'ai reçu ma propre vie dans la figure, et cela ne m'a avancé à rien : c'était un effet de réel comparable à la nouvelle technologie 3D. Les Aliens de Prometheus sortaient de l'écran, oui, bon, et alors ? Quelque chose de similaire m'est arrivé à la lecture des Particules élémentaires : le même puissant effet de réel, mais drôlatique, à la distance nécessaire des contes du même nom. Bien sûr, ceci ne prouve rien, sauf peut-être une certaine imprégnation nihiliste chez le premier auteur, et un certain rire discret chez le second.
Qu'on arrête de grâce, avec ces gens qui ont connu "la vraie guerre" ! Il est des grands reporters de guerre français qui meurent tous les ans sur les champs de bataille. Richard Millet, lui, n'est pas mort. Tant mieux pour lui, et félicitations à lui. La "vraie guerre", pour commencer, qu'est-ce que c'est ? La vraie guerre c'est Toulouse, où un père de famille et ses deux enfants ont été abattus en début d'année par un "vrai soldat", au sortir de l'école; c'est un trottoir d'un bourg de l'Essonne où l'on vous jette au canal parce que vous n'avez pas eu de cigarettes à tendre à un gang de racailles déterminés à vous enseigner par les grands moyens à qui appartient la ville après 19 heures.

Tous les "vrais anciens combattants" vous le diront: les vrais héros, ceux qui ont connu "la vraie guerre", ne sont pas là pour vous en parler, et si tel est le cas c'est parce qu'ils n'en sont jamais revenus. Les héros se taisent, ne paraissent pas sur les plateaux télé. La "vraie guerre", ceux qui l'ont connue ne l'évoquent jamais, soit qu'ils ne sont plus là, soit que leurs amis et camarades d'armes qui y ont péri leur interdisent, par la pudeur des morts, d'en parler. La "vraie guerre" ne devient sujet de causerie et d'évocation, désormais, à cause de l'incommensurable violence qui l'entoure depuis un siècle, que chez ceux qui ne l'ont connue que par ouï-dire. Depuis le vingtième-siècle, le dit de la guerre naît d'un ouï-dire. C'est le cas au Japon, comme en Europe, ou comme ailleurs (Russie, Salvador, etc.), où les survivants sont des tombes, quitte à se montrer, si besoin est, tombe heureuse (comme, par exemple, l'admirable André Verchuren). La vraie guerre, Dieu soit loué ! échappe aux romanciers dès lors que ces derniers savent en réchapper.

La vraie guerre n'a jamais rendu ceux qui en reviennent malheureux. Cela s'observe partout: le retour de guerre, même de guerre perdue, dans le pire des cas, met un boeuf sur la langue, dans le meilleur, donne envie de vivre et d'être joyeux.
En fait, Jean-François, je reproche à M. Millet sa position de "révolté installé dans le système".

Je ne comprends pas comment quelqu'un qui a un tel poste chez Gallimard puisse, en même temps, écrire de telles choses.
Utilisateur anonyme
22 juillet 2012, 19:22   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
Citation
Jean-Marc

Je ne comprends pas comment quelqu'un qui a un tel poste chez Gallimard puisse, en même temps, écrire de telles choses.

Nous sommes d'accord sur ce point, et Richard Millet est bien mieux protégé que Renaud Camus, on peut trouver Millet hypocrite, mais (pour moi) c'est un immense écrivain et je regrette que dans ce fil ne soient mentionnées que des œuvres relativement mineures.
Cher Francis,
On ne peut pas dire que RM se soit beaucoup étendu sur sa guerre au Liban , hormis, très tardivement, dans la "confession négative" dont part ailleurs le style m'a déçue. Qui connaît aujourd'hui les massacres dont les chrétiens ont été victimes dans cette guerre et qui en parle ? Faut-il vraiment en vouloir à RM d'être à peu près le seul à l'avoir fait et en toute connaissance de cause, pas par "ouï-dire", puisque, héros ou pas, il a combattu dans les rangs chrétiens contre les "islamo-progressistes". Au reste, je n'ai pas du tout eu l'impression en lisant le livre qu'il se présentait en héros.
Citation
Je ne comprends pas comment quelqu'un qui a un tel poste chez Gallimard puisse, en même temps, écrire de telles choses.

Je me demande qui vous donne le droit d'émettre un tel jugement.

Vous êtes fonctionnare cad une personne mille fois plus privilégiée que RM qui lui peut à tout instant être congédié par son employeur car que je sache Gallimard n'a pas encore été nationalisé.

Votre critique des malheurs du temps est "risikolos". On ne peut pas dire autant de celle de RM.

En outre je suppose qu'au moment où il a obtenu ce poste chez Gallimard les positions de Richard Millet étaient autres et qu'au fil des années il a évolué.
J'ai terminé FdS à cette heure. J'en sors affligé du courage, de l'inconscience, voire de la profonde paralysie psychique de l'auteur. Le style est souple, clair, sans ambiguïté, mais le thème est sans solution, sans espoir autre que la posture de l'anachorète. Un Murray aurait mis du "Gai savoir" dans cet ouvrage. J'ai du mal à saisir dans texte la personnalité dudit auteur...L'asthénie est un signe du syndrome dépressif : perte de "tous" les appétits, anhedonie, ect...
En revanche vos propres propos me poussent furieusement à ouvrir encore plus la porte de RM.
Merci à la personne qui a bien voulu me glisser ces quelques mots sublimes d'Aragon.
HPH
Oui, je sais, je médicalise sa littérature ...
Mais, et Dantec alors, est-il à l'aise dans son moi. A lire son "Laboratoire de catastrophe générale " on se demande ?
Je crois que vous ne comprenez pas du tout. Je ne vous parle pas du risque couru par ce monsieur, je vous parle du grand écart intellectuel entre les deux activités.

Imaginez-vous un rédacteur de l'Humanité en 1950 publiant en même temps une "Vie édifiante de Thérèse de Lisieux" ?

Imaginez-vous Renaud Camus recruté comme "Vérificateur littéraire des écrits du MRAP" ?
"En fait, Jean-François, je reproche à M. Millet sa position de "révolté installé dans le système". "

Le comité de lecture de Gallimard est bourré de Jésuites, c'est tout dire.
Utilisateur anonyme
22 juillet 2012, 22:08   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
C'est plutôt l'inverse, cher Jean-Marc : c'est le Mrap qui est “vérificateur littéraire” de Renaud Camus...
Citation
Imaginez-vous Renaud Camus recruté comme "Vérificateur littéraire des écrits du MRAP" ?

Comparaison déplacée.

Je vous avais parfaitement compris mais vous êtes de temps en temps très surprenant. Car que savez-vous des activités de RM aux Editions Gallimard ?

En quoi un travail de publiciste dans une grande maison d'édition serait-elle incompatible avec une oeuvre d'essayiste critique ?
Utilisateur anonyme
22 juillet 2012, 22:36   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
(Je suis assez d'accord avec le sieur Rogemi.)
Cher Francis,
Que faut-il lire de Nabe ? Je suis plongé dans "Kamikaze" et je suis pour le moment peu sensible à ses qualités, fors, peut-être, les pages sur la musique de jazz... Merci pour vos suggestions.
J'ignorais qu'il préparait un "Éloge d'Anders Breivik"...
A voir sur une autre discussion.
HPH
Citation
Rogemi
En quoi un travail de publiciste dans une grande maison d'édition serait-elle incompatible avec une oeuvre d'essayiste critique ?

Il y eut des temps plus civilisés que le nôtre où des adversaires politiques, littéraires ou autres, se parlaient et se fréquentaient : je vois cela à chaque page de la vie de Louis Massignon de Christian Destremau et de Jean Moncelon. Cela n'empêchait pas les duels, ni les guerres, dont on sait la cruauté. Mais au cours du XX°s, l'adversaire est devenu un ennemi absolu, l'opposant un animal, et le combat une guerre d'extermination, d'annihilation ou de purification ethnique de l'ennemi. En ce domaine comme en d'autres, communistes, nationalistes nouvelle mode et fascistes étaient parfaitement sur la même longueur d'onde : on avait ordre d'éliminer le père (républicain) de Maria Casares comme une vermine s'il revenait en Espagne, et rien n'est plus poignant que la mention "sans retour" tamponnée sur les passeports des Arméniens ayant franchi une dernière fois la frontière ottomane.

Sans aller à ces extrémités, les livres de Richard Millet salissent les mains des "antifascistes", ceux de Renaud Camus souillent les rayonnages des libraires bien pensants. On trouve étrange qu'un Millet puisse trouver du travail dans sa profession. Nous sommes tellement gauchis par le soviétisme que personne ne s'indigne que Renaud Camus n'ait pas d'éditeur. On boycotte tel ou tel artiste s'il n'est pas du bon côté (dans le théâtre contemporain, tout le monde est du bon côté, c'est une chance!). On ne se parle pas entre gens qu'oppose un désaccord politique : je ne me suis même pas rendu compte qu'on m'avait boycotté dans mon lycée au moment de l'affaire Guy Mocquet, jeune homme au sujet de qui j'ai demandé aux élèves une heure de réflexion. Si j'avais su, j'aurais fait comme les Jaïns de l'Inde, me promenant tout nu, avec un masque, la balayette à la main...
Citation
On boycotte tel ou tel artiste s'il n'est pas du bon côté (dans le théâtre contemporain, tout le monde est du bon côté, c'est une chance!).

Tres beau texte cher Henri sur les malheurs de notre temps.

Rappelez-vous la dé-programmation d'une pièce de Peter Handke par l'administrateur général de la Comédie-Française, Marcel Bozonnet pour avoir fait un discours favorable à la Serbie lors des funérailles de Milosevic.
Je me souviens très bien de l'épisode que vous mentionnez, de même que des remous que tel metteur en scène de Salzbourg provoqua pour son d'Idoménée. Il avait dans l'idée de poser sur une table des têtes coupées figurant Moïse, Jésus et ... Mahomet (on se demande quelle idée ces gens se font du niveau intellectuel des spectateurs d'Idoménée). Le projet fut abandonné, probablement pour ne pas heurter la sensibilité de la communauté juive résiduelle de Salzbourg.
Je me souviens très bien de l'épisode que vous mentionnez, de même que des remous que tel metteur en scène de Salzbourg provoqua pour son d'Idoménée. Il avait dans l'idée de poser sur une table des têtes coupées figurant Moïse, Jésus et ... Mahomet (on se demande quelle idée ces gens se font du niveau intellectuel des spectateurs d'Idoménée). Le projet fut abandonné, probablement pour ne pas heurter la sensibilité de la communauté juive résiduelle de Salzbourg.

C’est exact (mais c’était à Berlin, et c’est la tête de Mahomet qui posait problème). Mais la directrice de la salle qui avait annulé le spectacle se fit taper sur les doigts par la Frau Bundeskanzlerin en personne. En fait, la malheureuse directrice avait sur-réagi à des indications de la police (?) quant aux risques terroristes.
Henri Bès, on ne peut que partager votre constat.
Mais comment remonter une telle pente ?
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Loik A.
Mais comment remonter une telle pente ?

Ah, Monsieur Loïk, vous ne savez pas les risques que vous courez en me posant pareille question : ma réponse va prendre des tomes (sans parler des notes, notes de notes, apostilles et notules, ma passion - l'auteur de notes que j'admire le plus est Bayle), alors que votre question occupe une demi-ligne...

Comment remonter la pente, dites-vous. Le préfixe contient toute la politique que je rejette, la politique de la Restauration. Je la rejette bien à regret, croyez-le, car l'entreprise de Louis XVIII et de Charles X (de loin) a toujours eu toute ma sympathie (même quand j'avais treize ans et que je lisais tout ému la visite de Chateaubriand au Hradchin à son roi tombé). Les Restaurations ne marchent jamais : non qu'on ne puisse remonter le temps et autres cours d'eau, mais les Réparateurs, ayant vécu les révolutions, y ayant participé, en ayant été modifiés, qu'ils le veuillent ou non, puisqu'ils en étaient les contemporains, ne peuvent pas reconstruire l'ordre ancien dans l'esprit où il fut élaboré, puisqu'ils sont devenus autres. Ils sont condamnés au pastiche, à l'imitation des formes extérieures, au formalisme, tels ces Russes "hors-frontières" qui arrêtèrent le temps en 1917, s'établirent aux Etats-Unis et se coupèrent du monde, parallèlement à la clôture monastique de l'URSS avec son homme nouveau. L'axiome est que l'ennemi fait la loi de l'autre : le révolutionnaire et le contre-révolutionnnaire sont frères en histoire, en action et en idées, ils agissent l'un sur l'autre et se modifient l'un l'autre. François Furet, commentant le refus d'Henri V de renoncer au drapeau blanc en 1870, y voit un geste purement révolutionnaire.

Aussi, lisant la dénommée "réacosphère", sur internet, elle est le miroir de ses ennemis : c'est bien normal, puisqu'ils sont en permanent dialogue. Le réac sait très bien ce qui fera bondir le mélenchonniste, et vice-versa. J'ai tendance à les laisser à leur duo lyrique et à aller voir ailleurs.

Comment remonter la pente ? En réfléchissant à votre question, j'ai pensé aux nombreuses observations que fait Renaud Camus dans ses Journaux ou Journaux de voyage sur les restaurations de monuments. Peut-être en va-t-il de même en politique : l'ancienne France meurt, et remonter la pente, restaurer la France, ce serait faire un pastiche de l'ancienne, une espèce de château de Pierrefonds plus médiéval et plus pointu que nature, un archéo-parc à thème, une néo-France moisie telle que les progressistes, les immigrationnistes, la voient. Restaurer mal, c'est faire du gothique troubadour.

Faut-il tout laisser tomber, comme font les eurocrates que nous avons élus ? Certes non. Faut-il aller dans le sens du vent ? Encore moins. Il nous incombe d'inventer autre chose, à partir du passé (qui fait toujours l'objet d'un choix, c'est le sens même de l'acte d'hériter) et de ce que le présent nous oblige à admettre (sans quoi nous ne serions plus des Français, mais des sortes de Jeunes-Turcs génocideurs). Voilà pourquoi je fuis le combat politique, ne représentatnt aucune force personnelle et supportant aussi peu les Ultras que les Libéraux, puisque ni les uns ni les autres ne pensent à autre chose qu'à leur adversaire, et non à ce pour quoi ils se combattent. Finalement je suis Chateaubriand et rien.

(Je ne suis pas enterré au Grand Bé comme Chateaubriand, aussi épargnez-vous la peine d'aller pisser sur ma tombe comme fit le grand Sartre).

Comment remonter la pente ? En arts du spectacle, pour y revenir, il y a la méthode Stendhal : "C'est toujours un grand malheur, une grande cause de découragement pour des artistes, que de n'être payés que par un gouvernement, si éclairé soit-il. Ils sont ainsi privés des leçons directes du public" (phrase citée par Benoît Duteutre, Requiem pour une avant-garde, p. 174). Subventionnons moins avec les deniers publics, on verra moins de têtes coupées sur les tables.

Il y a sûrement de nombreuses solutions ponctuelles pour éviter des chevaux de manège aux Troyens de Berlioz ou des gestapistes forçant le peuple à pleurer la mort d'Admète au début d'Alceste. Le public ne manquerait pas d'imagination, ni les marchés de tomates.

Pardonnez ma prolixité, mais votre question touchait vraiment a raw nerve...
Utilisateur anonyme
24 juillet 2012, 15:30   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Utilisateur anonyme
24 juillet 2012, 15:31   Re : Qu'y a-t-il au-delà de Richard Millet?
Si même Henri Bès se met à écrire des messages tels que celui-ci alors de deux choses l'une, ou bien tout fout le camp ou bien le cygne noir se rapproche et nous entrons dans des temps cataclysmiques (tsunami ? astéroïde ? krach géant ? retour du Jedhi ?).
Jedi, Agrippa, Jedi.
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