Le site du parti de l'In-nocence

La démographie engendre la futilité ?

Envoyé par Jonathan Baudoche 
Je me permets de porter à votre connaissance les grandes lignes d'une thématique que je soumets en ce moment à ma réflexion, et que je soumets à la vôtre.

L'augmentation du nombre d'habitants dans nos sociétés (je cible volontairement nos sociétés plutôt que d'aborder la question à l'échelle du monde, puisque le fait reviendrait à considérer comme bien-fondée l'appréciation selon laquelle il existerait une "démographie mondiale", or je fais mien le propos de Jean-Claude Chesnais, qui explique que le concept de démographie mondiale n'existe pas, pour des raisons que nous pourrons approfondir dans la présente discussion), résultat de l'augmentation de l'espérance de vie notamment, et des conditions sanitaires modernes, fait également monter le nombre de "bouche à nourrir". Rassurez-vous, je ne viens pas ici défendre les thèses, souvent écologistes, qui promeuvent la réduction du nombre d'êtres humains sur terre.

Une société a besoin de produire, dans le sens large du terme, pour permettre à autant de monde de pouvoir subvenir aux besoins élémentaires, à commencer par celui de manger et de se loger. En errant dans les rues de nos villes, et en portant sur notre société un regard panoramique, nous constatons, encore plus lorsque l'on fait l'inventaire des "métiers et jobs" qui existent, que le futile est omniprésent. Et que nombreux sont les "nouveaux métiers" qui poussent comme des champignons depuis l'ère post-industrielle, c'est à dire depuis qu'il faut donner quelque chose à faire au maximum d'hommes et de femmes en âge de travailler, maintenant que nous avons tué notre industrie. Aussi pour occuper cette population qui a augmenté ces dernières dizaines d'années, nous avons créé des nouvelles branches professionnelles, d'où naquirent d'autres sous-branches, provoquant tel ou tel autre nouveau métier.

Par exemple, la valorisation du "people", nouvelles stars et autres coqueluches, a fait naitre des métiers comme "journaliste people", un bandeau qui, à chaque fois qu'il me passe sous les yeux, me met dans un état de désolation. Mesurant qu'il est désolant d'une part que des "journalistes" s'éprennent de la vie des "peoples", d'autre part parce que cela préjuge qu'il existe une partie de la population qui s'y intéresse, au point de consommer du "journalisme people" payant. Une industrie est née qui génère, malgré une futilité qui confine à l'absurde, des emplois, des mouvements d'argent.

D'où le propos que je soulève ici, qui part d'un constat (que je viens de faire) et va à une conclusion : l'augmentation de la population, parce qu'elle augmente le nombre de personnes en âge de travailler, favorise l'apparition de métiers futiles, c'est à dire de tendances futiles, d'occupations futiles, de sujets de conversation futiles, bref le règne du futile, du consommable, de l'interchangeable. Créant un effet de vase communicant entre l'un et l'autre. Aussi faut-il s'attendre à une démocratisation toujours plus large du futile.

L'état de fait serait moins alarmant si, hélas, tout ce futile n'avait pas pour principal effet de se substituer au reste, j'entends au nécessaire, et dans nécessaire je veux dire : le devoir nécessaire de comprendre le monde, les choses, l'impératif nécessaire de faire des choix dans la vie, de prendre la mesure de la gravité des problèmes qui s'imposent à nous, surtout.
J’ai toujours été sensible à la vague “théorie” indienne, rencontrée un jour par hasard, selon laquelle il y aurait pour le monde une quantité constante d’“âme”, et donc un peu moins pour chacun à mesure qu’il y avait plus d’humains. Les pays à faible densité démographique me paraissent en effet de plus haute teneur spirituelle. Et le prix attaché à la vie humaine, et la considération attachée à la gravité des crimes, semblent bien varier selon le taux de reproduction. Je signale à ce propos (plus ou moins) le petit livre de Georges Sebbag, Microdurées (éditions de la Différence), sur le rapport entre densité démographique et conceptions du temps.
La "théorie indienne" est extensible à tout le vivant: l'explosion démographique fait reculer la biodiversité -- des espèces végétales et animales disparaissent sous l'effet de la pollution humaine et de la compression de leurs habitats, etc.. Ce rétrécissement du vivant (moins de criquets, de baleines ou de phacochères en lesquels se réincarner) entraîne une errance des âmes, une surcharge d'humains dérangés (meurtres gratuits, etc.) par les âmes errantes qui les parasitent, les occupent... et les réduisent à l'état de bêtes, de brutes, etc... de manière conforme à leur destinée première qui n'a point trouvé les bêtes originelles en lesquelles accomplir le cycle promis de la métempsychose des sujets non méritants. L'humanité engendre alors des monstres en nombre croissant dont la survenue s'explique par la nécessité de remplacer le contingent des bêtes tuées et des espèces disparues que requiert ce cycle.

Limite fout la trouille.
J'ai envie de répondre à Baudoche qu'une société sans futilité est en effet possible et qu'elle a existé: celle des Khmers Rouge cambodgiens (tout le monde à la production "utile").

Méfiance, donc. La musique, la danse, la peinture à l'eau, l'amour courtois, le théâtre, sont futiles. L'ennemi n'est pas la futilité. Et sans "sujets de conversation futiles", nous mourrions étouffés par nos pensées.
Jonathan,

Il me semble que certains exemples historiques infirment cette idée de futilité liée à l'augmentation de la population.

Prenons le cas de l'Angleterre, et de son grand siècle d'expansion.

De 1801 à 1901, l'Angleterre passe du statut de puissance moyenne à celui de puissance majeure, à la tête d'un immense empire. Sa société a très fortement évolué, et je ne pense pas que les valeurs victoriennes soient à rebours du projet de l'In-nocence, ni très futiles.

Les paysages de la campagne anglaise sont quasi-intacts en 1901 (la population est urbaine, dans des villes au tissu très serré).

Or, de 1801 à 1901, la population est passée de huit millions d'habitants à plus de trente, ce qui est sans commune mesure avec les hausses qu'on a vu en France.


Si vous considérez l'Espagne, et spécialement les Castilles, vous verrez que la population stagne du milieu du XVIIème jusqu'au début du XIXème, après une forte hausse aux XVème et XVIème siècle. Expansion politique puis Siècle d'or : hausse de la population ; déclin : stagnation.
J"'ai envie de répondre à Baudoche qu'une société sans futilité est en effet possible et qu'elle a existé: celle des Khmers Rouge cambodgiens (tout le monde à la production "utile").

Méfiance, donc. La musique, la danse, la peinture à l'eau, l'amour courtois, le théâtre, sont futiles. L'ennemi n'est pas la futilité. Et sans "sujets de conversation futiles", nous mourrions étouffés par nos pensées."

En effet.
"Les hommes sont comme des pommes, quand on les entasse, ils pourrissent."
Mirabeau
Il me semble que vous affectez de ne pas comprendre ce que vous dit M. Baudoche (dont j’ai bien connu l'arrière-grand-mère, au temps des “Bastions de l'Est”...). Je doute qu’avec son terme de “futilité” il songe à l’amour courtois, à la poésie en général, au quatuor à cordes, à la calligraphie, aux songeries dans les pavillons verts. Je crois qu'il pense plutôt, mais je m’avance peut-être un peu, à l’industrie de l’hébétude, comme dit Machin Truc-Chose, au démon de l’amusement, à Patrick Sébastien & à Laurent Ruquier, au règne des amuseurs, au triomphe des marques, à la sonorisation forcée, à l’impossibilité d’entendre ou de faire entendre trois minutes une parole un peu “tenue”, à la débilisation massive & complaisante de l’adolescence ; et cela c’est bien lié aux sociétés de masse, où l’individu n’est rien et veut que cela se sache, se voie, s’entende dès qu’il ouvre la bouche.
Utilisateur anonyme
23 novembre 2012, 11:34   Re : La démographie engendre la futilité ?
Citation
Renaud Camus
Il me semble que vous affectez de ne pas comprendre ce que vous dit M. Baudoche (dont j’ai bien connu l'arrière-grand-mère, au temps des “Bastions de l'Est”...).

Ah ! depuis l'arrivée de monsieur Baudoche je n'ose lui demander s'il connait une Colette dans sa famille.
Jonathan, sur le fond, maintenant.

Il me semble que ce que vous évoquez est plutôt lié à une question de rapport au travail dans une société donnée. Il semble assez évident qu'une société fortement productive (c'est à dire une société dans laquelle il faut peu d'heures de travail pour produire les biens jugés nécessaires, soit parce que les "machines" travaillent à la place des gens, soit parce que d'autres personnes travaillent pour eux) permet l'exercice des activités que vous décrivez.

Considérez des exemples historiques anciens, ceux de Rome et de Byzance.

Dans les deux cas, un vaste empire permet de "subventionner" des foules oisives urbaines. Il y a là une productivité par exploitation interposée, si je puis dire.

Ces foules oisives se repaissent de distractions futiles.

N'est-ce dont point l'oisiveté qui engendre cette futilité ? l'Angleterre victorienne, citée supra, n'est pas futile quoique peuplée, car cette Angleterre travaille.
"Je doute qu’avec son terme de “futilité” il songe à l’amour courtois, à la poésie en général, au quatuor à cordes, à la calligraphie, aux songeries dans les pavillons verts. Je crois qu'il pense plutôt, mais je m’avance peut-être un peu, à l’industrie de l’hébétude, comme dit Machin Truc-Chose, au démon de l’amusement, à Patrick Sébastien & à Laurent Ruquier, au règne des amuseurs, au triomphe des marques, à la sonorisation forcée, à l’impossibilité d’entendre ou de faire entendre trois minutes une parole un peu “tenue”, à la débilisation massive & complaisante de l’adolescence ; et cela c’est bien lié aux sociétés de masse, où l’individu n’est rien et veut que cela se sache, se voie, s’entende dès qu’il ouvre la bouche. "
En effet.
Mon propos mérite sans doute d'être précisé, et approfondi.

La comparaison avec le régime et la société des Khmers Rouges est excessive, car il va de soi qu'en pointant d'un doigt critique le règne de la futilité, je n'envisage pas de lui préférer ce que les sociétés communistes totalitaires ont mis en place.

Sans que ce soit une pirouette, je peux même dire que mon propos est un constat reposant sur du factuel, plutôt qu'une interprétation personnelle, et par conséquent partisane, de la tournure prise par nos sociétés. En effet, l'augmentation démographique est un fait, l'émergence de nouveaux métiers aussi ; que des activités de toutes sortes gravitent autour des nouveautés de la société n'est pas contestable également. Les avis peuvent diverger quant à l'appréciation que l'on porte à ces nouveaux métiers et ces nouvelles activités. Par exemple, les défenseurs du tout économique, et certaines branches du libéralisme, peuvent parfaitement se féliciter de cette situation dans la mesure où elle alimente la machine économique, génère des emplois. Par ailleurs, les détenteurs du Pouvoir -et je parle du véritable pouvoir, celui qui est entre les mains des décideurs permanents, non les gesticulations des gouvernements éphémères-, et je peux dire "du Système en place" pour qualifier le Pouvoir, peuvent également se féliciter de cette situation, conscients qu'un peuple occupé à zapper d'une chaine de télévision à l'autre, à batifoler sur le sable de Paris Plage, à s'instruire dans la presse people, ne trouve plus le temps ni de prendre conscience de notre situation, ni d'envisager interférer dès lors qu'un éclaire de lucidité leur aurait ouvert les yeux par miracle. Par là, le parallèle avec la société communiste totalitaire trouve une nouvelle raison d'être contesté, puisque nos sociétés occidentales modernes, pour assagir et endormir le bon peuple, procède de façon diamétralement opposée : là où les Khmers réduisait le champ des activités au maximum, nous l'avons élargi au possible. Entre la diète et l'orgie, on doit pouvoir trouver un juste milieu.

Aussi il n'est pas idiot de se demander à qui profite le crime ? Mais c'est sans doute un autre débat.

Pour en revenir au sujet, j'ai voulu, en utilisant le terme "futilité", qualifier tout ce qui relève d'activités, de domaines, de sujets, de mouvements, dont nos sociétés s'étaient passés jusqu'alors, et qui, depuis qu'elles en sont gavées, déclinent explicitement. Je cite encore l'exemple de la presse people : en ayant créé cette demande de toute pièce pour ensuite répandre l'offre, nous avons sans doute créé, chez nos concitoyens, des centres d'intérêts qui risquent fort, je le crains, de les rendre moins réceptifs aux thématiques que nous affectionnons, comme la littérature, l'activité de l'esprit (une expression chère au Maitre qui a conté l'histoire de mon arrière-grande-mère), la conscience des lendemains qui pleurent, au Grand Remplacement, et à d'autres choses. Voilà pour la partie de mon exposé où, mea cupla, je "prends parti".

Pour répondre à notre ami Jean-Marc du Masnau, sur l'hypothèse qu'en réalité ce soit l’oisiveté qui génère la futilité que je mets, moi, sur le compte de l'augmentation démographique. Je suis d'accord avec la responsabilité de l'oisiveté, mais j'évalue qu'elle est une conséquence, précisément, de cette augmentation démographique. Jean-Marc, en prenant les exemples de Rome et de Byzance dans les termes que vous avez exposé, vous ne me donnez par tort mais raison, simplement en intégrant, dans mon schéma, une étape supplémentaire entre l'augmentation démographique et la futilité. Etape que je n'ai jamais oublié de prendre en considération dans ma réflexion, mais peut-être dans mon premier message.

Pour apporter une précision en réponse à la phrase : "Il me semble que certains exemples historiques infirment cette idée de futilité liée à l'augmentation de la population", j'aimerais apporter un élément : je ne pense pas qu'un contexte ayant valu, dans un endroit précis, à une époque précise, à une situation de prendre telle ou telle tournure suffise à en faire une règle. Les choses sont tellement différentes selon les époques, les endroits, les contextes sociaux, politiques, qu'un évènement peut avoir, ici, une incidence mineur et là, des conséquences dramatiques.

Mon propos, et la plupart de ceux que vous serez amené à lire sous ma plume, sauf contre-indication, considèrent toujours un élément dans son contexte politique, historique, et temporel, ou, au moins, dans celui que je lui attribue d'après mes analyses.
En fait, je ne vois pas bien le lien de cause à effet entre niveau de population et élévation de ce que je nommerai le "taux de futilité".

Qu'il y ait, dans un pays, 50 ou 70 millions d'habitants, peu importe, c'est le mode de vie qui va imposer ce taux de futilité.

Prenons le cas actuel de l'Italie. En trente ans, sa population n'a augmenté que de 5%, ce qui, de mon point de vue, ne devrait pas conduire à des changements majeurs. Or, si vous observez les médias italiens, si vous regardez les télévisions italiennes, si vous voyez la "presse people" de ce pays-là, vous verrez que nos voisins italiens sont passés de la grippe au choléra. En France, nous n'avons certes pas été très brillants, mais tout de même pas à ce point.

D'autre part, si on considère les catégories d'âge, on voit qu'une hausse de population dans les pays occidentaux actuels se fait largement au profit de la population âgée, a priori la moins futile. Il naît ces années-ci moins d'enfants en France qu'il n'en naissait en 1901, alors qu'il y a beaucoup plus de vieillards.

Enfin, considérons des zones à démographie déclinante ou stagnante, comme la Lorraine. Je ne crois pas que la futilité y régresse de façon considérable, ou que la presse people y soit moins lue qu'ailleurs.
Mais quand Patrick Sébastien ou Laurent Ruquier remplissent une fonction politique indispensable (hébéter, etc.) aux maîtres de notre temps (aux maîtres du temps) sont-ils encore futiles ?

Futilité et perte de temps (comme le "divertissement" chez Pascal) devraient être, sont, le tissu conjonctif des pensées et de l'action chez les êtres incomplètement occupés, qui ne sont pas "des êtres supérieurs", de ceux qui se montrent ou se disent capables de "se reposer d'une activité dans une autre", qui vivent leur vie dans cette plénitude et cette implacable rigueur (Cocteau, etc.)
Citation
Jean-Marc du Masnau
En fait, je ne vois pas bien le lien de cause à effet entre niveau de population et élévation de ce que je nommerai le "taux de futilité".

Je vais prendre l'exemple du petit bourg à la française, et plus généralement du petit village à la française : chacun y a une place et un rôle, un peu comme dans le village d'Astérix. Il y a le poissonnier, le boulanger, le salon de coiffure, le bureau de poste, l'épicerie, etc. Il y a une activité agricole, une petite manufacture en marge du village, des infrastructures sportives qui occupent un peu de personnel. Les trois ou quatre milliers d'habitants de ce village ont chacun un rôle, soit au titre de l'activité professionnelle directe -certains sont le boulanger, le boucher, le coiffeur, etc) soit en fonction de leur contribution à cette économie -certains sont les consommateurs du pain du boulanger, de la viande du boucher, etc. Il y a une harmonie entre l'offre et la demande.

Demain, ajoutez à ces trois ou quatre milliers d'habitants un arrivage de 40 000 nouveaux venus. L'économie va s'en trouver nécessairement bousculée, au même titre que l'équilibre qui régnait dans cet endroit. Parmi les points positifs, cela va créer, dans un premier temps et dans une mesure limitée, des emplois : le boulanger ne pourra plus assumer seul la production pour ces dizaines de milliers de voisins, il va recruter de nouveaux boulangers, très bien. Même mécanisme pour les autres commerçants, très bien encore. Mais pour fournir ces presque 45 000 habitants, il ne va pas falloir non plus 1000 boulangers ni 1000 salons de coiffure, et pourtant il va bien falloir que tout ce beau monde contribue à l'activité économique du village, ce qu'il ne parviendra jamais à faire sans travailler, sans produire quelque chose, sans participer aux mouvements d'argent.

De là vont naitre des activités dont certaines vont relever du futile, d'autres, certes, de l'amélioration de la vie dans la Cité. Par exemple, là où avec 4 000 habitants les bras et les fonds manquaient pour, imaginons, l'élévation d'un théâtre, la chose sera rendue possible maintenant que le village est plus important en nombre d'habitants. C'est très bien, mais le théâtre ne va pas embaucher des dizaines de personnes, et le peu de personnel devra être rémunéré. Ce qui va imposer de rendre payante l'entrée au théâtre, et pour payer sa place, il faut de l'argent. Pour en trouver, il va bien falloir proposer des choses, des produits comme des services, ce qui va induire de créer de toute pièce toute sorte de demandes pour proposer ensuite toute sorte d'offres. Dans ce domaine, nos sociétés nous ont montré une spectaculaire imagination lorsqu'il a s'agit d'inventer des demandes et des offres. L'exemple de la presse people revient : imaginons que dans notre petit village modèle, un coquin s'éprenne de l'idée de fouiller les vies privées de ses voisins, et d'en produire, à fréquence régulière, des compte-rendus qu'il propose ensuite à la vente. C'est tout de même très futile, passablement malsain aussi, et c'était inimaginable, et d'ailleurs logistiquement peu probable, que le village produise pareil phénomène lorsqu'il comptait 4 000 âmes. Après lui, un autre coquin décide qu'il va lancer une nouvelle mode vestimentaire, et proposer au coquin qui diffuse ses feuilles de chou de faire paraitre, sur la couverture du prochain numéro, des images de sa trouvaille vestimentaire. La chose va se faire, et le phénomène de masse va entrainer un intérêt populaire pour ce qu'on voit publiquement (phénomène de mode : dès lors qu'un vêtement a été vu, par exemple du fait d'une campagne publicitaire, par le plus grand nombre, le naïf va se l'imaginer comme ayant gagné en intérêt et en valeur, et va se procurer ce vêtement).

La mécanique folle est engagée ! Pour continuer à s'acheter sa presse people locale, et pouvoir assumer son nouveau goût pour la mode vestimentaire, le consommateur va devoir trouver de l'argent, et comme il y a déjà quatre boulangers dans la boulangerie, deux-cents ouvriers dans la manufacture qui compte deux-cents postes, il va bien falloir trouver quelque chose d'autre. De là va naitre, encore, des trouvailles insolites, qui naissent des précédentes et qui vont en engendrer d'autres, et ainsi de suite.

J'espère que mon petit village modèle a permis que j'exprime mieux ma pensée.
Votre exemple de village théorique risque fort n'avoir jamais eu le moindre début de réalité; et "l'équilibre entre l'offre et la demande" n'existe nulle part ailleurs que dans certains manuels d'économie complètement dépassés ou peut-être dans certaines montagnes d'Afghanistan où sévissent les Talibans.

D'abord, même s'il est situé sur une île perdue, et à plus forte raison s'il est situé sur une île perdue ! votre village n'a jamais eu une population stable (que le boulanger fournirait en pains, etc.) cela à cause du tourisme, paramètre que vous n'intégrez point. Pourquoi les humains font-ils du tourisme ? Etrange question. Début de réponse: parce que les équilibres que vous évoquez sont profondément insatisfaisants, et surtout parce qu'ils ne sont pas spontanément recherchés et désirables, pas plus que l'égalité si vous voyez ce que je veux dire.

A partir de là, il est à craindre que toute la suite de vos spéculations s'égare plaisamment, et un peu vainement. Vous m'en voyez désolé. Le monde serait si simple à comprendre s'il était ce que vous en dites, si les utopies étaient viables. C'est bien dommage qu'elles ne le soient pas.

Le tourisme, de nature divertissante et exploratoire, futilité par excellence, doit remplir certaines fonctions vitales chez les hommes puisqu'il est partout pratiqué (les Indiens, les Chinois, les Africains même (en Asie), s'y adonnent, il ne s'agit donc pas d'un mal occidental vulgaire parmi d'autres). Et à lui seul, il fiche en l'air toute votre construction.
En parlant du tourisme :

Citation
Francis Marche
paramètre que vous n'intégrez point

Il ne vous aura pas échappé qu'il y a bien des aspects que je n'intègre pas dans mon exposé, par manque de place notamment, il faudrait tout un livre pour tout évoquer, et donc beaucoup plus de temps. Cela dit, la discussion n'est pas terminée et les points a priori manquants ne manqueront pas d'être abordés dès lors que le besoin l'imposera.

L'équilibre entre l'offre et la demande, cette expression qui semble agir sur votre chevelure, n'est évidemment pas qu'une notion théorique pour manuels d'étudiant. Il suffit simplement de bien saisir ce qu'elle dit, notamment dans mon petit village modèle. Mais je ne sais pas comment vous répondre, et vous contredire, sans redire ce que j'ai déjà dis ?

Voyons l'avis des autres pour avancer.
Un petit conseil: avant de songer à redire ce que vous avez déjà dit, essayez de relire ce que l'on vous écrit en gardant pour présupposé que l'on vous a bien lu et bien compris. Vous verrez, ça change, et ça peut éviter de tomber dans les dialogues de sourds et aveugles dont le net est rempli.
Je ne songe aucunement à redire ce que j'ai déjà dit, éventuellement à préciser, peaufiner un propos à qui aimerait mieux comprendre, mais vous ne m'avez pas l'air d'être de cette trempe, ayant visiblement déjà décidé que j'avais tort sur toute la ligne.
Si vous avez tort sur toute la ligne, ce n'est pas parce que je l'ai décidé mais parce que vous vous fourvoyez dans les grandes largeurs. Le village d'Astérix n'a jamais existé. Comment faut-il vous le dire ?
Si la discussion doit tourner en polémique, qu'on me le dise et je cesse de l'alimenter après ce message. J'ai l'impression de parler avec Juan Asensio et cette sensation n'est ni agréable, ni ce que je suis venu chercher sur un aussi érudit forum.
Juan Asensio ? c'est le début du point Godwin ?

Je vous ai exposé mes arguments de manière que je crois articulée et polie. Vous vous braquez en m'accusant d'avoir "décidé" que vous aviez tort. Peu m'importe que vous ayez raison ou tort. Le raisonnement que vous proposez repose sur du vent. J'ai tenté de vous le faire comprendre par des arguments rationnels (les situations d'équilibre de l'offre et de la demande ne sont pas désirables ou désirés parce qu'elles sont d'ordre statique, dès lors en faire une prémisse est injusfié et fallacieux; les humains sont mobiles et recherchent de la nouveauté dans l'expérience afin de stimuler l'innovation, tout cela est en substance dans mes réponses supra). La question du tourisme n'est pas un détail annexe que vous seriez fondé d'omettre par souci d'aller à l'essentiel ou que sais-je : elle est au coeur du dispositif que je vous dis; le "tourisme" permet d'échapper à la consanguinité (c'est ainsi que le "tourisme sexuel" est presque une tautologie; il est vieux comme le monde et il probablement sauvé l'humanité de l'arriération biologique); il permet au "village d'Astérix" théorique de diversifier ses sources d'alimentation et donc de pallier les carences, etc. Si je vous écris que le village d'Astérix n'a jamais existé ce n'est pas par impatience ou impulsivité ou désir de me débarrasser de vous mais bien pour vous inviter à réfléchir à tout cela.
Voyons cela en détail, Jonathan, et prenons l'arrondissement de Castres.

Sa population n'a que peu augmenté en cent ans.

Castres et sa banlieue, si on peut dire, ont connu, c'est vrai, un développement considérable, notamment les villages voisins qui sont devenus des dortoirs.

En revanche, les villages (ou, plutôt, les bourgs) de la Montagne se sont quelque peu dépeuplés. Là où on trouvait cafés, artisans, commerçants, un coiffeur effectivement, on ne trouve plus rien. Cependant, il me semble que ces effets d'offre et de demande sont dus non à des augmentations ou de diminutions de population : c'est surtout l'augmentation de la mobilité qui fait que du village on va au bourg et du bourg à la ville, pour ses courses. C'est aussi l'augmentation de la mobilité (et aussi la facilité des communications, notamment audiovisuelles) qui rend la futilité facile. Le rural d'autrefois, à six heures l'hiver, n'avait comme futilité possible que la partie de cartes, l'écoute d'un peu de radio et la lecture. Il a maintenant 300 chaînes. De même, il peut en une demi-heure se rendre à la ville, quand son ancêtre devait mettre des heures à pied, ou en carriole.

Comme le disait plaisamment un homme politique tarnais aujourd'hui décédé, le paysan d'autrefois amenait sa vache au taureau, le rural actuel emmène sa femme au Mammouth.
Utilisateur anonyme
23 novembre 2012, 17:20   Re : La démographie engendre la futilité ?
Citation
Francis Marche
Si vous avez tort sur toute la ligne, ce n'est pas parce que je l'ai décidé mais parce que vous vous fourvoyez dans les grandes largeurs. Le village d'Astérix n'a jamais existé. Comment faut-il vous le dire ?

Cher Francis,

notre président cherche à recruter, pas à faire fuir.
Ah bon Christophe ? si notre Président cherche à recruter n'importe qui, et à laisser écrire ici n'importe quoi parce qu'il va falloir des bras pour tenir les banderoles, qu'on me le dise. Je le laisserai faire de bon gré et me retire.
« La question du tourisme n'est pas un détail annexe que vous seriez fondé d'omettre par souci d'aller à l'essentiel ou que sais-je : elle est au coeur du dispositif que je vous dis; le "tourisme" permet d'échapper à la consanguinité (c'est ainsi que le "tourisme sexuel" est presque une tautologie; il est vieux comme le monde et il probablement sauvé l'humanité de l'arriération biologique); il permet au "village d'Astérix" théorique de diversifier ses sources d'alimentation et donc de pallier les carences, etc. Si je vous écris que le village d'Astérix n'a jamais existé ce n'est pas par impatience ou impulsivité ou désir de me débarrasser de vous mais bien pour vous inviter à réfléchir à tout cela. » (Marche)

Quand on observe les dégats plus ou moins directs que le tourisme engendre, cette invitation semble vraiment comique.

Non, la seule voie que je pourrais vous donner, cher Baudoche, serait celle qui invite à vous préoccuper en particulier de la démographie des villes & entours, lieux précis du problème (de futilité excessive, entraînant par suite son lot de maux).
Citation
Louis Piron
Non, la seule voie que je pourrais vous donner, cher Baudoche, serait celle qui invite à vous préoccuper en particulier de la démographie des villes & entours, lieux précis du problème (de futilité excessive, entraînant par suite son lot de maux).

Très juste. Les villes sont effectivement, en cela que leur volume amplifie par définition un phénomène, l'épicentre du problème, d'un point de vue pratique et logistique. Ensuite, l'émergence des médias de masse et de la communication facile et permanente, notamment la multiplication des chaines qui émettent depuis les grandes villes mais touchent tout le territoire, jusqu'aux contrées les plus reculées, permettent aux futilités des grandes villes de toucher, et de gagner, les esprits de ceux qui, pourtant, semblaient géographiquement protégés.
En pensant à cette discussion, « Les villes tentaculaires » me revinrent à l'esprit : leur absence d'horizon, leur chaos, etc.
Plus que du nombre, il me semble que vous faites une critique de l'échange. Or, il se trouve qu'avec l'augmentation du nombre, l'échange se dégage des raisons qui le précèdent et s'impose comme l'unique raison sociale.

Quand le nombre est réduit, l'échange n'a pas d'autre raison que de permettre la spécialisation des producteurs afin que chacun produise au mieux. La production et donc le don restent premiers. La satisfaction de la communauté est le but de l'effort productif.

Le nombre augmentant, du fait des économies d'échelle, les gains de productivité liés à la spécialisation progressent plus vite que n'augmentent les besoins. Dès lors, l'échange n'est plus seulement une conséquence de la spécialisation des producteurs. Il devient une ressource. Par suite, on produit pour échanger, on échange pour prendre plus que l'on donne, pour gagner aux dépens d'autrui. Que la somme de ces gains dépasse la somme de ces pertes, bref que l'enrichissement soit général, n'empêche pas l'appauvrissement des coeurs : la production n'est plus un don, elle est un mal nécessaire pour arracher au client, au partenaire, à l'employeur de quoi combler son manque.

L'échange est contraire à la vie. La vie est ce don paradoxal qui nous laisse assaillis par le manque. Soit le manque, qui est le sens du monde, est comblé par le don, le monde étant reçu comme un deuxième don (l'économie seigneuriale du chasseur cueilleur) ou comme la matière à redoubler le don de la vie (l'économie de production), soit le manque est comblé par l'échange, en contradiction avec le don de la vie.

La disparition de la classe ouvrière et l'emprise délétère de l'échange exigent une reprise civilisationnelle des raisons philosophiques de la production.

***

Si l'on tient que la quantité d'âme est fixe, la disparition des âmes collectives multiplie les effets de l'essor démographique. Inversement, l'émergence d'une âme collective en soulage aussitôt les effets. Les orchestres ou les corps de ballet donnent une idée de cette équation.
L'échange est contraire à la vie.

Je crois que l'heure est venue pour moi de rejoindre l'honorable cohorte des déserteurs de ce forum. Je vous salue tous affectueusement, et bien bas.
Franciiiiiiiiiiis ... ! Non ... on ... on ...on ...!
Francis,

Ce forum a besoin d'hommes d'expérience, de viri probati.

Je note qu'il y a un assez grand nombre de nouveaux intervenants qui ont sans doute l'enthousiasme de la jeunesse mais qui devraient peut être comprendre qu'asséner n'est pas démontrer (je ne m'adresse pas à Jonathan en particulier).

Dire une bêtise avec assurance ne la transforme pas en vérité.
J'ai peine à croire que le guerrier Marche trébuche sur si minuscule obstacle, qu'il s'effarouche d'une écharde dans le doigt...
Je suppose que Francis est dans la situation du taureau qui est harcelé par les taons, ou, pour prendre un exemple moderne, du dromadaire auquel une dernière paille brise le dos.
Je serais le premier à regretter le départ de Francis Marche dont le style et la culture sont remarquables mais je me demande pour quelle raison il vit si mal les premières interventions des nouveaux intervenants : il semble indisposé par le bizutage initiatique qu'il leur inflige. Étrange non ? (Là je crois que je vais en prendre plein la g...).
Puisque c’est comme ça, je m’en vais. Vous n’entendrez plus parler de moi. Adieu.
Bon. J’ai réfléchi. Surtout j’ai été très sensible aux divers messages privés des uns et des autres me suppliant de revenir sur ma décision. D’accord. Puisque vous insistez, me revoici.

(La démographie engendre la futilité).
C'était pourtant quand même pas difficile de trouver un nom qui ait l'air crédible, M. "Camus"...

Ah mais vous revoilà...
Look who is talking...
Hop, je suis-là.
Hop, je ne suis pas là.
Hop, je suis-là.
Hop, je ne suis pas là.
. . .

Chez les chats, la démographie galopante engendre un 3e état, l'état à_la_fois_vivant_à_la_fois_mort. (voir donc le chat de Schröedinger, et son cousin tigré, le chat du Cheshire).



Citation
Jean-Marc du Masnau
Je note qu'il y a un assez grand nombre de nouveaux intervenants qui ont sans doute l'enthousiasme de la jeunesse mais qui devraient peut être comprendre qu'asséner n'est pas démontrer (je ne m'adresse pas à Jonathan en particulier).

La partie entre parenthèses me rassure. Ayant initié cette discussion en lui proposant un titre interrogatif et non affirmatif, précisément pour insister sur le caractère en construction de ma réflexion sur ce sujet, et ayant précisé, dès le premier message, qu'il s'agissait effectivement d'une réflexion en cours, qu'en plus je mettais à disposition des autres, il m'aurait été difficile de comprendre, même avec la meilleure volonté, que l'on m'accuse d'asséner plutôt que de démontrer.

J'espère en tout cas que cette polémique un peu théâtrale qui s'achève par un départ non moins théâtral est terminée, et que nous allons pouvoir continuer à discuter de la responsabilité de l'augmentation de la masse démographique dans l'émergence d'éléments futiles dans nos sociétés.
Utilisateur anonyme
24 novembre 2012, 16:53   Re : La démographie engendre la futilité ?
Je n'ai jamais vu un tel ramassis de déserteur, claqueur de porte (ce forum est un peu un théâtre), démissionnaire professionnel, donneur de congé à répétition, de retenez-moi-ou-je-fais-un-malheur.

Ils sont plus nombreux que les adhérents de ce beau e grand parti.
Oui, c’est le syndrome Chevènement...

Cela dit, je suis très intrigué par vos singuliers (après ramassis de), si insistants qu’ils ne peuvent être attribués à un lapsus clavieri...

D’autre part, je ne voudrais pas être accusé de participer au bizutage des petits nouveaux, mais « initier une discussion » fait souffrir, tout de même. Et vous l’avez initiée à quoi, cette malheureuse ?

(J’avais cru remarquer aussi une dame, récemment, à laquelle on brûlait d’apprendre qu’il ne fallait pas d'espace avant les virgules et qu’il en fallait après — elle suivait très obstinément la règle inverse, ce qui la rendait, hélas, presque illisible. Mais je n’ai pas osé parler et depuis elle a disparu. Qu’eût-ce été si j’avais dit quelque chose, et procédé marchiennement à une séance d’initiation aux traditions du groupuscule de masse...)
Citation
Renaud Camus
D’autre part, je ne voudrais pas être accusé de participer au bizutage des petits nouveaux, mais « initier une discussion » fait souffrir, tout de même. Et vous l’avez initiée à quoi, cette malheureuse ?

En fouinant sur le dictionnaire en ligne Larousse, j'ai trouvé cette définition de "initier" : "Faire démarrer un processus, une réaction, avoir l'initiative d'un projet". C'est à peu près le sens que j'avais donné à ce mot lorsque je l'ai utilisé dans mon précédent message.
Utilisateur anonyme
24 novembre 2012, 17:45   Re : La démographie engendre la futilité ?
"Cela dit, je suis très intrigué par vos singuliers (après ramassis de), si insistants qu’ils ne peuvent être attribués à un lapsus clavieri..."

J'avais quelques noms en tête, effectivement.
Oh mais si vous suivez le Larousse, alors ! C’est un collabo de première, le dictionnaire officiel des Amis du désastre langagier. Il ne cesse de procéder à des régularisations de masse. Initier une discussion, c’est de l'anglais. Initier une vierge aux plaisirs de l’esprit, c’est du français. Je vous parie tout ce que vous voulez que du Masnau est dans votre camp, c’est dire !
Je suis la honte de la famille Baudoche, mais je me soigne, petit à petit, au gré de mes lectures et des rencontres, réelles ou virtuelles, qui, bien choisies, sont source d'enrichissement. Ainsi n'hésitez pas à me reprendre à chaque fois qu'il sera nécessaire de le faire. J'ai bien peur que cela arrive souvent !
Utilisateur anonyme
24 novembre 2012, 18:17   Re : La démographie engendre la futilité ?
Citation
Jonathan Baudoche
Je suis la honte de la famille Baudoche

Sûr que Colette doit se retourner dans sa tombe, la pauvre.
"Je note qu'il y a un assez grand nombre de nouveaux intervenants qui ont sans doute l'enthousiasme de la jeunesse mais qui devraient peut être comprendre qu'asséner n'est pas démontrer (je ne m'adresse pas à Jonathan en particulier).

Dire une bêtise avec assurance ne la transforme pas en vérité. " Jean-Marc du Masnau

Cher Jean-Marc, je doute que votre bienveillante condescendance apaise la subite fureur de quelques-uns. Déplorer que nos sociétés ne soient que d'échange est une antienne dont l'énoncé ne démontre aucun excès d'assurance. A la "source de la mentalité échangiste, il y a un être pour qui les autres ne sont jamais que des instruments au service de ses volontés, il y a un être qui jamais ne considère autrui comme une fin mais toujours comme un moyen, il y a un être qui est à ses propres yeux le vrai centre du monde, auquel tout doit se rapporter, il y a en un mot ce que j'appelerai la subjectivité absolue. Se donner la subjectivité absolue, c'est se donner le développement des échanges, le principe générateur de la mentalité échangiste, parce que c'est se donner un être qui ne peut concevoir d'autre mode de relation avec ses semblables que celui de l'échange, un être qui ne peut vivre que solitaire ou d'échanges." Claude Polin, l'auteur de ces lignes, serait-il un jeune prétentieux ?

Critiquer la mentalité échangiste qui nous vaut le communiqué n° 1479 n'est pas renoncer à l'échange. J'ai noté que notre société est ouverte, entendu parler de "l'heureux commerce", constaté que les affaires sont l'occasion d'aventures parfois rocambolesques. Mais l'amitié et l'aventure qui peuvent accompagner l'échange sont étrangères à l'échange lui-même dont le calcul ne renvoie qu'à notre manque, à notre vie limitée. L'échange est contraire à la Vie.
Citation
Jonathan Baudoche
Je suis la honte de la famille Baudoche, mais je me soigne, petit à petit, au gré de mes lectures et des rencontres, réelles ou virtuelles, qui, bien choisies, sont source d'enrichissement. Ainsi n'hésitez pas à me reprendre à chaque fois qu'il sera nécessaire de le faire. J'ai bien peur que cela arrive souvent !

Ah bien, alors, si vous nous en priez... il faudrait tâcher, pour votre prochain titre interrogatif, de redoubler le sujet, par exemple. Parce que là, ça ressemble trop à un titre du Monde.
Initier une vierge aux plaisirs de l'esprit : il a d'ces idées, l'patron, des fois…
C'est quand même plus excitant qu'initier une analphabète aux plaisirs de la chair.
Tout dépend de notre état de sobriété.
Monsieur Meyer, je m'inscris violemment en faux contre votre assertion. En tout cas si je me réfère à de déjà lointains souvenirs.
Pour aller dans le sens des dernières remarques, n'oubliez tout de même pas que l’accroissement de la population résulte d'un bref moment d'équilibre réalisé entre l'offre et la demande. À l'origine de toute dissipation délétère d'énergie il y a toujours, au préalable, un système "à l’équilibre", dont la nature et la vocation mêmes produiront de l'entropie, ce qui veut dire, si j'ose ainsi m'exprimer, qui à un moment ou à un autre partira en couille.

Je crois que Francis a fondamentalement raison : la demande excède toujours l'offre, la demande est un abîme sans fond, comme est insatiable le désir et térébrant "le sentiment de l'incomplet de sa destinée" ; or l'utile, en économie, est tout ce qui peut satisfaire un désir.

Toujours est-il que j'espère qu'il n'est rien arrivé de fâcheux à la chevelure de Francis.
Citation
Alain Eytan
Je crois que Francis a fondamentalement raison : la demande excède toujours l'offre, la demande est un abîme sans fond, comme est insatiable le désir et térébrant "le sentiment de l'incomplet de sa destinée" ; or l'utile, en économie, est tout ce qui peut satisfaire un désir.

Je m'arrête sur votre phrase : "la demande excède toujours l'offre". Je pense que nous pouvons "séquencer" ce mécanisme de l'offre et de la demande comme suit :

1) Il y a un besoin.
2) On y répond, par la production.
3) Ayant satisfait ce besoin, nous voilà disponible pour s'éprendre de nouveaux besoins, les plus élémentaires ayant été satisfaits.
4) Et on recommence indéfiniment.

Mécaniquement, l'étape 3 correspond à votre phrase : "la demande excède toujours l'offre", mais cette affirmation (fondée) n'est qu'une conséquence d'un état de fait antérieur, chronologiquement antérieur. Ce qui revient à évaluer que chaque besoin satisfait en appelle un autre, et plus nous en redemandons, plus nous nous éloignons des premiers besoins (les besoins élémentaires) pour tendre vers des besoins de plus en plus futiles. Par "futiles", j'entends : tout ce qui n'est pas élémentaire, reste ensuite à nous entendre sur ce qui, dans nos sociétés, est élémentaire (fondamentalement, biologiquement même : se nourrir pour ne pas mourir de faim, se chauffer pour ne pas mourir de froid, etc.) et, au-delà de ces étapes très primaires, établir jusqu'à quel seuil des besoins sont bénéfiques aux hommes (culture, sport, passions et collections, etc.). Je fais cette parenthèse pour répondre, à contre-temps, à Marche qui feignait de penser que je faisais la promotion d'une société entièrement épurée de toute activité, à la manière de la société khmer rouge.

Poursuivant mon propos, et pour apporter de l'eau à ma réflexion sur la responsabilité dans ce phénomène de l'explosion démographique, je pense que celle-ci créé un autre phénomène : la synergie. En effet, le futile se nourrit du futile comme un monstre glouton, et plus se trouvent de personnes dans le même réduit géographique, plus elles sont tentées de se nourrir du futile du voisin, ce qui appelle une surenchère permanente, une course en avant, comme cela s'est vu depuis des années.
Puisque vous nous l’avez si gentiment demandé :

« nous voilà disponible pour s'éprendre » — non, ça ne va pas, vous ne pouvez pas écrire cela. Or la faute qu’il y a là est immensément caractéristique de celles qu’on trouve dans les copies d’élèves et d’étudiants, et qui relèvent de ce que j’appellerais l’“instabilité du sujet”. On croirait toujours que ledit sujet n’arrive pas à se percevoir comme sujet, qu’il ne croit pas à lui-même, qu’il tremble constamment. En une page de texte, souvent, il change dix fois. On a un “il”, mais pour retrouver ce qu’il désigne il faut remonter quatre ou cinq phrases plus haut, et entre-temps sont intervenus toute sorte d’autres sujets, et souvent d’autres “il”. Je n'ai pas le temps de développer. Mais on verra ce que je veux dire. On est là au cœur de ce “jeu” logique (au sens où les rouages d’une mécanique s’emboîtent mal, patinent) qu’a entraîné l’effondrement de la syntaxe. On voit bien que celui qui parle ou qui écrit, comme souvent les journalistes de France Culture, ne comprend pas ce qu’il dit (là je ne parle plus du tout de vous — mais nous ne pouvons pas être disponibles pour s'éprendre).
Fallait-il donc écrire : "nous voilà disponible(s) pour nous éprendre" ?

Je mets le "s" entre parenthèses, car là encore je ne suis pas certain.
Disponible peut être au singulier ou au pluriel, là n’est pas la question, mais il faut en effet pour nous éprendre. Le sujet c’est nous. Ou alors il faudrait écrire : on est disponible pour s’éprendre. Mais la combinaison nous (première personne du pluriel) et s’ (troisième personne du singulier ou du pluriel), ce n’est pas possible — c'est ce que j’appelle l’instabilité du sujet...
» 1) Il y a un besoin




« Le sentiment de la nullité de toutes les choses, l'incapacité de tous les plaisirs à emplir l'âme et notre attirance vers un infini que nous ne comprenons pas tiennent peut-être à une cause des plus simples, et plus matérielle que spirituelle.
L'âme humaine (et il en est de même chez tous les être vivants) désire toujours essentiellement et vise exclusivement, bien que sous mille formes, le plaisir, ou le bonheur, qui, à bien y regarder, fait tout un avec le plaisir. Ce désir, cette tendance, n'a pas de limites, parce qu'il est inné ou connaturel à l'existence ; c'est pourquoi il ne peut trouver de terme dans tel ou tel plaisir, qui ne peuvent être infinis, mais ne prend fin qu'avec la vie. Et ce désir n'a de limites : 1. ni en durée ; 2. ni en extension. Il ne peut donc se trouver aucun plaisir qui égale : 1. sa durée, car aucun plaisir n'est éternel ; 2. son extension, parce qu'aucun plaisir n'est sans mesure et que la nature des choses implique que tout existe de façon limitée, que tout ait des bornes et soit circonstancié.
Ce désir du plaisir n'a pas de limites en durée, car, comme je l'ai dit, il ne s'achève qu'avec l'existence, et donc l'homme n'existerait pas s'il n'éprouvait ce désir. Il n'a pas de limites en extension, parce qu'il est substantiel en nous, non comme désir d'un ou de plusieurs plaisirs, mais comme désir du plaisir. Or cette nature du désir implique matériellement l'infinité, car si chaque plaisir est circonscrit, le plaisir, lui, ne l'est pas : son extension est indéterminée, et l'âme, aimant substantiellement le plaisir, embrasse toute l'extension imaginable de ce sentiment sans même pouvoir la concevoir, car elle ne peut se former une idée claire d'une chose qu'elle désire illimitée.
Venons-en aux conséquences : si vous désirez posséder un cheval, vous croyez le désirer en tant que cheval, en tant que tel plaisir, mais en réalité vous le désirez comme un plaisir abstrait et illimité. Quand vient le moment où vous possédez ce cheval, vous trouvez un plaisir essentiellement limité et vous éprouvez un vide dans l'âme, car ce désir que vous éprouviez effectivement n'est pas comblé. Si, du reste, il était possible qu'il fût comblé en extension, il ne pourrait l'être en durée, puisque la nature des choses implique que rien ne soit éternel. Et dans l'hypothèse où cette cause matérielle qui vous a procuré tel plaisir un jour subsiste toujours (par exemple, vous avez désiré la richesse, vous l’avez obtenue et pour toujours), elle subsisterait matériellement mais non plus en tant que cause de ce plaisir, car telle est l'autre propriété du réel que tout s'use, que toutes les impressions peu à peu se dissipent et que l'accoutumance, de même qu'elle efface la douleur, annule le plaisir. Ajoutez à cela que, quand bien même un plaisir éprouvé une fois subsisterait pour vous toute la vie, l'esprit n'en serait pas pour autant satisfait, car son désir est également infini en extension, si bien que, même si tel plaisir égalait la duré de ce désir, ne pouvant en égaler l'extension, le désir subsisterait toujours — soit le désir de plaisirs sans cesse nouveaux (comme il se produit en fait), soit le désir d'un plaisir qui emplisse toute l'âme.

Le fait est que, lorsque l'âme désire la satisfaction de son désir infini, elle désire vraiment le plaisir et non tel plaisir ; or, trouvant dans la réalité un plaisir défini et non pas un plaisir abstrait qui comprenne toute l’extension du plaisir, il s'ensuit que, son désir étant loin d'être satisfait, le plaisir est à peine un plaisir, car son insuffisance par rapport au désir, et de plus à l'espérance, n'est pas infime mais extrême. C'est pourquoi tous les plaisirs se trouvent être mêlés de déplaisir comme nous en faisons l'expérience, car, en les obtenant, l'âme quête avidement ce qu'elle ne peut trouver, c'est à dire une infinité de plaisirs ou, en d'autres termes, la satisfaction d'un désir illimité.

Venons-en à l'inclination de l'homme à l'infini. Indépendamment du désir du plaisir, il existe dans l'homme une faculté imaginante qui peut concevoir les choses qui ne sont pas et sous des formes dans lesquelles elles n'existent pas. Considérant la tendance innée de l'homme au plaisir, il est naturel que la faculté imaginante s'emploie principalement à imaginer le plaisir. Et, compte tenu de cette propriété de l'énergie imaginative, celle-ci peut se figurer des plaisirs qui n'existent pas, et se les figurer infinis : 1. en nombre ; 2. en durée ; 3. en extension.
Le plaisir infini qu'on ne peut trouver dans la réalité se trouve ainsi dans l'imagination, d'où dérivent l'espérance, les illusions, etc.
Il n'y donc pas lieu de s'étonner que : 1. l’espérance soit toujours supérieure au bien réel ; 2. que le bonheur humain ne puisse tenir que dans l'imaginaire et les illusions. »

Leopardi, Zibaldone
Je suis un peu étonné de voir qu'il n'y a ni fleurs, ni couronnes pour Francis, un homme qui a tant donné à ce forum.
Pour les fleurs, on attend son retour : on les lui donnera de la main à la main…
Et s'il ne revenait point ?
Citation

Je suis un peu étonné de voir qu'il n'y a ni fleurs, ni couronnes pour Francis, un homme qui a tant donné à ce forum.

Il est aussi un peu triste de constater qu'il n'y a quasiment pas eu de regrets pour deux personnalités qui se sont beaucoup investies dans ce forum : Orimont Bolacre et Rogemi.
Oh la barbe ! Ils ne sont pas morts, tout de même ! Chacun est libre d'intervenir ou de ne pas intervenir. Et je dois dire que je trouve un peu ridicules et ces adieux de Castafiore, toujours recommencés, et ces supplications rituelles, non, non, pitié, ne partez pas — surtout de la part de personnes qui, elles, ne sont pour ainsi dire jamais intervenues et choisissent de le faire à cette occasion. Nous ne sommes pas sur Facebook ! « Philippe, n’oubliez de fêter l’anniversaire de Véro, de Caro et de Stéfan, c’est aujourd'hui ».

J'ajouterais que le prétexte du “départ” annoncé de Francis Marche est tellement futile et absurde — une phrase qui ne lui a pas plu d’un nouvel intervenant tout à fait discret et dépourvu de prétention à l’autorité — qu’on peut difficilement le prendre au sérieux. Il était lassé de ce forum, il annonce qu’il s'en va, inutile de dire que c’est son droit le plus strict. Si un jour il décide de revenir il sera accueilli sans effusion mais avec grand plaisir comme l’ami et le brillant contributeur qu'il est. Mais pour l’amour du ciel n’allons pas instaurer de ces rites modernes de déploration conventionnelle, avec petits nounours enchaînés au grillage de la maison de Ludivine !

Que du Masnau essaie de f. la m. semer la zizanie, ça a toujours été sa fonction. Mais que des étrangers de passage s'y mettent aussi, il ne nous reste plus qu’à convoquer une cellule de soutien psychologique ! Ce fil aurait dû être coupé beaucoup plus haut, puisqu’il enfreint la règle selon laquelle ce forum n’est pas un forum sur le forum. Je regrette de ne l’avoir pas fait à temps. De même que je déplore que l’arrivée des nouveaux, outre les absurdes bizutages auxquels ils sont soumis, leur valent de ces claquements de porte de vaudeville.
Utilisateur anonyme
28 novembre 2012, 00:24   Re : La démographie engendre la futilité ?
Je suis assez d’accord avec les deux trois paragraphes précédents.
28 novembre 2012, 00:34   N'oublions personne
J'en profite pour déplorer aussi l'immersion remarquablement discrète de Marc Briand ; et Chaouat, où est passé Chaouat ???
Marcel, vous êtes le Tacite de ce forum. Certes, rien de plus, rien de moins.
Utilisateur anonyme
28 novembre 2012, 08:41   Re : La démographie engendre la futilité ?
Une marche blanche sera organisée en la mémoire de Francis M., Didier B. et consorts à 14h cet après-midi. Rendez-vous à 13h45 au pied du châteaux de Plieux. Un lâché de ballons est prévu.
Allons, allons, M. Rivoallan, ne voyez-vous pas que l’emploi auquel vous aspirez est déjà pris ?
Utilisateur anonyme
28 novembre 2012, 10:08   Re : La démographie engendre la futilité ?
Je sais, je sais, mais c'est que j'ai besoin de faire mon deuil, moi !
Sans compter, Christophe, qu'on ne sait jamais de quoi demain sera fait. La répétition des évènements est un grand sujet des fabliaux, genre français s'il en est. Je vous suggère spécialement la lecture de "La Housse partie".
Un message à ne surtout pas effacer.

Monsieur Christophe, cher et dérisoire roquet si prévisible,

Je vous invite à avoir la gentillesse de laisser les Didier B. et Francis M. tranquilles.

En forme d’hommage, je tiens à lister l’honorable cohorte des déserteurs, à ce jour :

Didier Bourjon,
Orimont Bolacre,
Francis Marche,
Rogemi,
Ostinato,
Eric Veron,
Jean François Chassaing,
Corto, alias Michel de Seelisberg,
Phénarète,
Chatterton
Julien Fleury,
Julien Beau (pas bavard comme d’aucuns, il ne laissera pas de trace dans ses écrits, mais il restera celui qui créa camus2012, défense de RC, et qui rendit possible les premiers Cahiers du P.I.),
Yannick Guillard,
et tant d’autres (qu’ils m’excusent de ne pas les nommer).
Il faudrait aussi citer ceux qui sont profondément mal à l’aise ou qui ne participent plus que du bout des doigts.

Je laisse à chacun le soin d’apprécier le désastre.

Hélas, notre Cricri et ses potes sont des nains à coté des partants.

Ce forum est mort, ce « parti » est redevenu un vain atelier d’écriture sous la férule dictée du « Maître », ses derniers errements politiques l’achèvent.

Monsieur Camus,

Contrôlez vos troupes, s’il vous plait, votre quarteron de jeunes groupies doit savoir qu’il y a une ligne jaune à ne pas franchir. Avant comme après le 5 décembre.
Le message précédent est en effet suffisamment éloquent, dit avec une sobre efficacité tout ce qu’il y avait à dire, rappelle à merveille, par son ton, ce que nous ne pouvons ni ne voulons oublier et servira excellemment à clore ce fil.
Désolé,vous ne pouvez pas répondre à cette discussion, elle est fermée.