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L’analyse sémiologique de la Manif pour tous

Envoyé par Henri Chatterton 
Dans Le Monde du 13 avril, diatribe contre... les couleurs bleue et rose de la Manif pour tous, et contre le désormais célèbre logo de la famille nucléaire, écrite par une dame qui se présente comme normalienne, agrégée et professeur de latin à Paris-Diderot, et dont il faut souhaiter qu’elle soit meilleure latiniste que polémiste.

[www.lemonde.fr]

Premier paragraphe : « La médecine, l’état civil et ses premiers vêtements enferment l’enfant à peine né dans l’alternative du genre. » Un paragraphe plus loin : « Le bébé bien propre dans sa couche est asexué. » Alors, genré dès l’origine ou asexué ? Il faudrait savoir.
L’article dans son entier représente un remarquable spécimen de bêtise universitaire, l’auteur essayant de faire passer pour une analyse savante ce qui n’est que l’expression de ses petits préjugés, en étalant son capital culturel et en produisant, de fait, du sous-sous-sous Roland Barthes. Pour démontrer que le fameux logo de la Manif pour tous est « clairement sexiste », l’auteur convoque la sémiotique façon Jean Umiker-Sebeok (« Les adultes sont grands, les enfants sont leurs doubles en petit. Ils sont identifiables par les signes extérieurs de leur genre, distribués en marqueurs binaires. »), les women studies et les gender studies, qu’elle mélange avec un préchi, précha démagogique emprunté à la rhétorique télévisuelle (« la France black, blanc, beur », l’Afrique du Sud « nation arc-en-ciel »). Un souvenir confus de Bourdieu (la jupe comme entrave sociale) donne cette remarquable analyse iconologique du logo  : « Toutes deux [la femme et la fille] ont une jupe qui entrave leur marche, au point que la fillette a les deux jambes soudées. »
Ayant dit toute la défiance que lui inspirait le choix des couleurs bleue et rose, l’auteur en vient à déplorer que le logo lui-même évoque une guirlande d’école primaire en papier découpé : « Toutes les familles sont identiques. Ce sont des clones. » Puis, une idée en amenant une autre — et ces gens-là n’ayant pas beaucoup d’idées —, notre auteur exprime le fond de sa pensée : « Aucune place pour les pères à cheveux longs, les femmes et les filles en pantalon, les mères voilées, les pères en boubou ! » Parce que des musulmanes voilées n’évoquent aucune idée d’uniformité ! Des musulmanes, n’est-ce-pas, ne sauraient être réduites à des clones par le « voile », marquage religieux et identitaire dont la visée est pourtant spécifiquement de les priver de leur individualité, en effaçant les cheveux, la forme du visage, les oreilles et le cou (dans le meilleur des cas, celui de l’improprement dénommé « foulard »). Sous la plume de notre auteur, des termes comme uniformité, différence ou diversité sont des appréciations d’ordre idéologique, sans aucun rapport avec les référents naturels ou iconiques qu’on prétend pourtant analyser. Une foule bigarrée d’opposants au mariage gay ne peut être qu’uniforme. Une foule de femmes en hijab représente forcément la différence ou la diversité.
Notre madame Homais conclut sa diatribe sur : « Papa bleu et maman rose ne sont pas un couple hétérosexuel, mais une paire de reproducteurs “blancs” » — autrement dit sur l’accusation de « racisme », dont on aurait tort de se priver, puisqu’elle est auto-justificatrice (une fois qu’elle est portée, il n’y a aucune façon d’y répondre ; si on se défend, c’est la preuve qu’il y a du louche), mais accusation qui, dans l’espèce, n’est étayée par rien, ni dans le logo ni dans l’analyse fantaisiste qui en est faite — hormis le fait que, sur les fanions, le logo montre quatre silhouettes blanches, sur fond rose ou bleu ; seulement ce n’est pas le cas sur le reste de la communication, tracts, bannières, badges, textiles, etc., où la famille est tout ce qu’il y a de plus magenta.
Enfin, quoi, il faut la comprendre, cette dame, elle s'appelle Florence Dupont... Vous pensez bien qu'avec un patronyme pareil, il faut redoubler de zèle pour prouver qu'on est du bon côté...
Tiens ! Florence Dupont ? La traductrice de Sénèque pour la scène ? Grâce à son travail, les acteurs disposent d'un texte français écrit, dit-elle, pour être jouable. J'ai vu, un été, dans le théâtre d'Alba la Romaine, Les Troyennes dans sa version. Hélas, elle produit aussi des essais affligeants sur le multiculturalisme et le vivrensemble dans la Rome antique, et des théories littéraires d'IUFM.
Cette dame a découvert, en écrivant dans Le Monde, que la terre n'était pas plate. La belle affaire ! Des hommes et des femmes manifestent avec leurs enfants dans les quelques rues de Paris ou de grandes villes de province où ils ont été autorisés à manifester, et pour faire comprendre au public (pour "communiquer") ce pour quoi ils manifestent, à savoir pour défendre une conception donnée de la famille, qui plus est de la famille nucléaire (rappelons, ce que cette dame, toute professeur des universités qu'elle est, ancienne de l'ENS, agrégée des lettres, ignore, que ce type de structure familiale est le plus "progressiste" qui ait été inventé et qu'il est homologue des libertés individuelles et de l'égalité des citoyens), ils ont forgé ou utilisent des "signes" - couleurs et dessins - dans lesquels se condensent leurs revendications, valeurs, croyances. C'est sans doute sommaire, mais la communication fait dans le sommaire. C'est ainsi que les citoyens, quand ils se réunissent pour exprimer publiquement des opinions, procèdent. Il n'y a rien de plus "culturel", c'est-à-dire de plus convenu, que le choix des couleurs et des dessins. Les partis politiques ou les syndicats font pis à la fois dans les choix des dessins, des slogans et des couleurs : les Rouges, les Verts, les Bleus, les Blancs, les Bleus Blancs Rouges, etc.

Si cette dame n'avait pas été bouffie d'arrogance et si elle avait été un peu savante (apparemment, c'est trop demander à un professeur d'université), elle n'aurait pas exposé publiquement, dans une langue pleine d'approximations vipérines ou malveillantes ("ils déferlent dans les rues de la capitale", "ils ont saturé les écrans télé", "la croisade des enfants" : de toute évidence, elle ignore ce que signifient "déferler", "saturer les écrans", "croisade des enfants"), cet enfoncement de portes ouvertes, qui ne relève même pas d'une étude que l'on est en droit d'attendre d'un étudiant de licence... Et si elle avait été un peu cultivée, au lieu d'enfiler des perles, elle aurait étudié dans la perspective, ouverte par M. Pastoureau, de la symbolique des couleurs et de l'histoire culturelle des couleurs, comment, pourquoi, quand, à la suite de quels événements, dans quelles circonstances, le rose et le bleu pâle sont devenus la couleur symbolique des bébés et de la différenciation sexuelle (pardon "gendrée") à la naissance. Si elle avait été insolente (là encore, c'est trop demander à la dottoressa Balorda), elle aurait pu se gausser du français enfançon (un "papa" et une "maman") des militants de la "manif pour tous" ou, mieux encore analyser l'imposture des mouvements homos quand ils "récupèrent" (au sens politique de ce terme) l'oriflamme arc-en-ciel de Mandela, de l'ANC, des Noirs d'Afrique du Sud, pour en faire leur "signe", établissant de fait une analogie victimaire honteuse (honteuse pour les Noirs victimes de racisme) entre l'émancipation des esclaves et des orientations sexuelles choisies en toute liberté et qu'aucune loi n'interdit.

On peut se demander quels objectifs (si tant est que ce journal ait quelque intention) poursuit Le Monde quand il publie des âneries semblables : discréditer un peu plus les professeurs d'université dont le crédit en matière de culture, de langue, de savoir, etc. approche de façon inquiétante le zéro; prouver à ses lecteurs (s'il lui en reste), surtout s'ils ne sont pas docteurs en langue et civilisation latine, qu'ils sont plus intelligents et plus cultivés que les phénix de l'Université; ne plus dissimuler le mépris qu'il voue à ses lecteurs; aucun objectif ?
Aucune place n'est faite aux enfants différents ! Aucune place pour les pères à cheveux longs, les femmes et les filles en pantalon, les mères voilées, les pères en boubou ! Aucune place pour les familles différentes aux parentés multiples – monoparentales, recomposées, adoptives – ! Aucune place pour les familles arc-en-ciel.

Y-a-t'il dans le monde désir de famille monoparentale, désir de créer de la famille recomposée ? Il y a certes désir de créer des familles adoptives, mais ces trois cas sont des désirs par défaut, des faute-de-mieux. Non point que la famille "du noeud de vipères" soit enviable, séduisante, et "épanouissante pour l'individu" (pour reprendre ce langage des bobos post-soixante-huitards aux sourires aujourd'hui griffés de pattes d'oie) mais au moins, elle peut encore se targuer de n'avoir jamais été désirée par défaut ! Si cette famille stéréotypée n'était pas la plus civilisée et la plus solidement établie comme norme de désir, comment expliquer que des milliards de personnes continuent de s'y faire piéger comme le moucheron dans la cuve du népanthès malgré Gide, Hervé Bazin et jusqu'à Platon s'il faut remonter à lui ? Voilà une question philosophique suffisamment pure pour ne pas être entachée d'idéologie ni d'arrière-pensée (on connaît ma répulsion personnelle pour le modèle historique dominant de la famille, dont j'ai dû faire état un peu à mon corps défendant dans ce débat sur le mariage pour tous) et qui appellerait une authentique réflexion non militante, et des éléments de réponse qui restent à fournir.

Recruter les mères voilée et les pères en boubou dans la mouvance arc-en-ciel en soutien à la loi Taubira, voilà qui ne manque pas de saveur. Mais Le Monde, désormais, ose tout, et c'est à ça qu'on le reconnaît, etc..
Bon, la question essentielle n'est-elle pas maintenant celle-ci : croyez-vous que le feu va prendre à partir des Manifs pour tous et du mépris auquel elles se heurtent et qui ne fait que les exacerber ? Dans ce cas, comment se positionner, puisque la cause est pour le moins ambiguë (et pourtant c'est bien la seule à l'heure actuelle qui fasse descendre dans la rue la France excédée) ?
Après le vivrensemble à Rome, le mythe de la Grèce blanche :
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Le régime pourrait bien en effet périr par où il a abondamment péché: le sociétal, cache-misère de toutes ses incompétences (économiques) et sociales (abandon du pays aux flux migratoires, à la violence et à la régression civilisationnelle). L'ironie de l'affaire est que le mariage gay ou, par exemple, le projet d'octroi du droit de vote aux étrangers,-- cette dernière mesure n'étant qu'une remise à l'équilibre d'une situation injuste pour les contribuables ressortissants d'une nation européenne résidents en France quand, en Grande-Bretagne par exemple, les ressortissants français jouissent du droit de vote aux élections nationales du Royaume -- sont parmi les moins nocentes de ses spéculations. Mais c'est ainsi: les foules déchaînées sont injustes, les frondes sont aveugles et leur pesée des torts et des raisons d'un gouvernement s'opère au kilog, à la tonne, et non à l'once, ou à l'aune des priorités politiques fondamentales. C'est une des lois événementielles du politique : tout y est prétexte à tout et à n'importe quoi et rien, jamais, n'advient de ce que l'on croyait possible, ni tout à fait ou complètement de ce que l'on croyait impossible.
Certes mais je ne sais pas si "du bon" pourra sortir de cet improbable-là, une révolte fondée sur le rejet des revendications homosexuelles...
Pour répondre à la question d'Anton : Comment se positionner..., je dirai pour ma part (cela n'engage que moi) que le parti de l'In-nocence ne peut que se retirer sur l'Aventin en cette circonstance. Même si cela peut "démanger" certains sympathisants de grossir encore les foules anti-Hollande, cette réaction n'est qu'épidermique et à la réflexion
elle ne tient pas. Ni mariage gay ni manif pour tous. Le ridicule, l'obscénité sont équivalents des deux côtés. Le mariage est une institution peut-être utile (ou qui a eu son utilité sociale) mais vermoulue ; et qui ne garantit nullement la pérennité d'une France non entièrement vouée à la dite diversité, que nous appelons de nos voeux. La preuve : les seuls fanatiques du mariage sont aujourd'hui certains gays et les minorités ethniques qui - Dieu sait - cultivent les vertus familialistes basiques que les Européens ont dépassées depuis belle lurette, à juste titre. Le mariage, la famille sont ringards. Et les vecteurs d'un remplacement de peuple accéléré. On peut avoir l'impression superficielle que la manière la plus efficace, en ce moment, de lutter contre le régime-Hollande, est de se ranger en faveur du mariage classique, de la famille "nucléaire", comme ils disent. Mais c'est un trompe-l'oeil. Une erreur à ne pas commettre. N'oublions pas que c'est le regroupement familial qui est à l'origine de la dilution puis de la submersion et de l'effacement de notre peuple.
Certes, Thierry Noroit, mais si les Manifs Pour Tous s'avèrent le déclencheur d'un autre processus, beaucoup plus ample, sera-t-il possible de se tenir à l'écart ?
(Relire "Lénine à Zurich" de Soljenitsyne...)
"Nous devons être le parti de ceux qui refusent de changer de civilisation." écrit Camus.

"Le mariage est une institution peut-être utile (ou qui a eu son utilité sociale) mais vermoulue (...)
Le mariage, la famille sont ringards." écrit Noroit.

Ces affirmations sont-elles compatibles ?
Cher Rothomago,

Choisîtes-vous le nom de Rothomago à cause du mariage pour tous ?
Oh, vous savez, j'ai toujours été émerveillé par l'acrobatie intellectuelle qui consiste à faire un si grand cas de la question patronymique, dont le moins qu'on puisse dire c'est qu'elle est "familialiste", autrement dit franchement vermoulue et ringarde, et, simultanément, de se résigner sans beaucoup d'émotion à voir sombrer l'institution du mariage, naufrage auquel, une fois n'est pas coutume, on semble assister, ici ou là, avec une indifférence mâtinée, dans bien des cas, d'une satisfaction à peine feinte, recouverte d'une sorte de "que voulez-vous qu'on y fasse", qui tranche singulièrement avec d'autres appels martiaux à ne rien lâcher de nos traditions séculaires.

Un effort, Noroit, dans votre examen des choses vermoulues et ringardes. Dites-nous si la reproduction sexuée, selon vous, n'est pas un peu moisie aux entournures, à voir que ceux qui s'y livrent avec entrain se recrutent plus volontiers parmi les "remplaçants".
À vrai dire, cher Thomas, la reproduction asexuée leur conviendrait aussi bien, et même davantage, eu égard au mode de réplication désespérément mémétique (de "même") qui leur est imputé...
Utilisateur anonyme
17 avril 2013, 08:22   Re : L’analyse sémiologique de la Manif pour tous
Ah, quand même, ça fait du bien de lire ces remarques de M. Rothomago !
C'est que, cher Thomas, Rothomago fut longtemps lié, dans l'esprit des étudiants en lettres (à une époque durant laquelle les étudiants en lettres étudiaient les lettres, il est vrai) au thème de l'homosexualité.

Jugez-en plutôt à la lecture de cette charade.

Mon premier est une tapette.

Mon second est une tapette.

Mon troisième est le complice d'une tapette.

Mon quatrième est le complice du complice d'une tapette.

Mon tout est un personnage de Victor Hugo.


La réponse :

Ro, parce que Ro baise Pierre.

Tho, parce que Tho pine Hambourg.

Ma, parce que Ma cache Bono pendant que Bono baise Héf.

Go, parce que, pendant ce temps, Go guette.
Cher Thomas Rothomago, la discussion est libre sur ce forum et, pour peu que les participants respectent les principes généraux définis dans la Charte d'utilisation, ils ont la possibilité d'exprimer les opinions les plus diverses. Je comprends bien que les positions que j'avance au sujet du mariage et de la famille puissent paraître quelque peu scandaleuses auprès de la fraction la plus conservatrice des sympathisants de l'In-nocence. Le débat est ouvert, de nombreux arguments ont été échangés précédemment à ce sujet. Le parti de l'In-nocence, ne vous en déplaise, en tant qu'institution, n'a jamais favorisé les tenants de la manif pour tous. Ni ceux d'en face, d'ailleurs. Vous avez des opinions différentes des miennes, c'est votre droit. J'apprécie moins que vous tentiez de me discréditer en me mettant en contradiction avec ce que vous croyez être la ligne de l'In-nocence et en citant une phrase de M. Camus. Je regretterais infiniment de ne pas partager ici les positions de M. Camus, pour qui mon admiration est vive, mais, même si cela devait être le cas, il n'y aurait aucun mal à le faire courtoisement en ces lieux. N'appartenant pas au parti, et m'exprimant sur un forum public dont je respecte la Charte, ainsi que toutes les personnes qui s'y expriment, il n'est pas douteux que je dispose de la faculté de critiquer ce qu'est devenue dans nos sociétés la pauvre institution du mariage - sans subir vos foudres pour autant. Répondez par des arguments, cher ami, plutôt que d'aligner ce que vous croyez être des évidences et plutôt que de chercher à me mettre en contradiction avec ce que vous croyez être les Tables de la Loi. - Conserver, c'est très bien, c'est très beau et, de nos jours, très méritoire. Mais un conservateur avisé ne conserve pas n'importe quoi.
Vous avez le droit, vous avez le droit, bien sûr.

Cela dit je suis marié, heureux de l'être et ne crois pas du tout à la disparition de la famille traditionnelle.
« Conserver, c'est très bien, c'est très beau et, de nos jours, très méritoire. Mais un conservateur avisé ne conserve pas n'importe quoi. »

Vaste proposition, qui pourrait passer pour le cœur de la question actuelle.

Si je me suis permis d’accoler une de vos assertions sur le mariage, la famille, avec une phrase extraite du récent discours de Camus, c’est que je sens qu’elles font assez bon ménage dans le « corpus idéologique » de l’In-nocence, alors que j’estime qu’elles sont difficilement compatibles. Du même discours, j’aurais dû citer une autre phrase, celle-ci : « Il faut refuser de changer de calendrier, il faut refuser de changer de langue, il faut refuser de changer de costume, de visage, d’horaires, de nourriture, d’interdits, d’histoire, de passé, d’avenir, d’être, d’identité. »

On tient là, en quelque sorte, la liste des choses à conserver. Pas un mot clairement audible (mis à part, peut-être, en tendant vraiment l’oreille, sous la forme d’une référence aux « interdits » dont il ne faudrait pas changer), adressé en faveur du maintien des institutions familiales sur lesquelles s’est bâtie notre civilisation. C’est, à mon avis, un point aveugle du discours, qui me laisse entrevoir chez l’orateur une sorte d’acquiescement au jugement que vous portez sur le mariage « classique » et la famille que, selon vous, « les Européens ont dépassées depuis belle lurette, à juste titre… »

Sur la question du «mariage pour tous », vous préconisez un retrait « sur l’Aventin ». On aurait beau jeu de vous plaisanter sur le choix de cette formule, vous qui tranchez du « vermoulu » et du « ringard », en vous faisant observer que, s’il fallait juger de l’opportunité du maintien des formules d’après la quantité de personnes susceptibles d’en saisir le sens, celle-ci serait bonne à mettre dans les sous-sols du musée, bien plus encore que le mariage « classique »… Mais non, elle ne fait pas partie, puisque vous l’employez, fût-ce plaisamment, du « n’importe quoi » que le conservateur avisé cesse de conserver, dans son bon tri. Trêves de plaisanterie.

La position de l’In-nocence, à travers les interventions de son président, ne manque pas d’être inédite. Un parti politique soucieux du maintien des traditions qui ont fait la patrie qu’il entend défendre, un parti inlassablement attaché à son passé, à son identité séculaire et à sa civilisation, un tel parti a-t-il jamais prospéré sur la base d’une quasi-absence de soutien vibrant à la famille, voire une acceptation sans nostalgie à l’égard de sa disparition programmée ? Je crois que c’est un cas unique, assez caractéristique, somme toute, d’une tournure d’esprit très contemporaine.

Dans cette façon de considérer d’assez haut, ou du seul point de vue de « l’enfumage » spectaculaire, les questions de l’évolution de la famille et du mariage, on pourrait déceler une sorte de « post-modernisme » à l’œuvre, peut-être même de « trans-humanisme » par omission. Car c’est refuser d’envisager la suite absolument logique du « mariage pour tous. », qui est d'aller au bout de la dissociation, entamée au XXème siècle, entre sexualité et reproduction et, par conséquent, de modifier radicalement la condition humaine. Au fond, c’est peut-être cela, le « conservatisme éclairé », le progressisme passéiste qui caractériserait la pensée in-nocente...
la dissociation, entamée au XXème siècle, entre sexualité et reproduction et, par conséquent, de modifier radicalement la condition humaine. Au fond, c’est peut-être cela, le « conservatisme éclairé », le progressisme passéiste qui caractériserait la pensée in-nocente...

Etes-vous sûr de bien dater cette dissociation ? Il me semble que le libertinage n'a pas été inventé au XXème siècle ou bien si ? Si la sexualité (depuis quand ? toujours sans doute) est libre du souci de reproduction comment la reproduction pouvait-elle être longtemps tenue exclue d'un envol symétrique, comment pouvait-elle encore longtemps retarder son propre déchaînement hors la contrainte sexuelle ? Si A se trouve de longtemps dissociée de B, comment envisager que B ne deviennent pas, même avec retard, dissocié de A ?

L'humanité, fondamentalement, se trouve prise aux rets de la logique la plus ordinaire. C'est un peu une des caractéristiques de sa condition: la sexualité, la reproduction, sont de prodigieux miracles en même temps que choses soumises à des logiques aussi rudimentaires que celles qui président au tri des lentilles ou à l'écossage des petits pois. Dieu ne manque pas d'humour.
Evidemment ! J'aurais dû préciser : dissociation légale, encadrée par la loi, mise au débat, dotée de moyens techniques efficaces etc. On n'a certes pas attendu le XXème siècle pour explorer les chemins du plaisir sans autre reproduction que lui-même.

"Si A se trouve de longtemps dissociée de B, comment envisager que B ne deviennent pas, même avec retard, dissocié de A ?"

Ce serait donc une évolution normale, une figure du progrès, la perspective d'une reproduction humaine totalement modifiée d'ici à quelques décennies, avec tout ce que cela aurait pour conséquences imprévisibles, de sorte que les histoires de "remplacement de peuple" paraîtraient ultimes et vains sursauts de "problématiques" déjà obsolètes car ce ne serait plus tel ou tel peuple qui se verrait remplacé, mais la rudimentaire espèce soumise au coït artisanal.

On se demande d'ailleurs si, derrière le reproche fait aux "remplaçants" et à leurs complices, de vouloir effacer le passé de l'Europe, ne se cache pas un tout autre grief : celui de retarder l'avenir de l'Europe, de lui mettre les bâtons dans les roues dans l'accomplissement de son destin prométhéen.
On se demande d'ailleurs si, derrière le reproche fait aux "remplaçants" et à leurs complices, de vouloir effacer le passé de l'Europe, ne se cache pas un tout autre grief : celui de retarder l'avenir de l'Europe, de lui mettre les bâtons dans les roues dans l'accomplissement de son destin prométhéen

Amusant. Mais pourquoi pas ?
Cher Thomas Rothomago, je croyais que vous cherchiez à me mettre en contradiction avec une déclaration de
M. Camus. Au contraire, vous trouvez finalement que ses positions et les miennes font bon ménage. J'avais donc mal compris. J'en suis fort aise. Le reste de votre propos ne me paraît pas pertinent. Toute la pensée politique française des origines à nos jours était élaborée à peuple constant. Dans la mesure où nous sommes contraints de raisonner désormais à peuple changeant aucune catégorie antérieure n'est plus de mise. Peut-être que le parti de l'In-nocence est le seul organe à avoir "intégré ce nouveau logiciel" (parodie d'un langage à la mode), c'est pourquoi vous êtes si surpris de lui trouver des positions paradoxales, contradictoires, en tout cas inédites (c'est votre mot).
Chers Noroit et Rothomago, vous devez bien subodorer, quand même, que vous êtes tous deux du genre "vieux de la vieille" en ce qui concerne la fréquentation de ce site... Comment se fait-il que vous réagissiez comme si vous vous découvriez ?
» Dans cette façon de considérer d’assez haut, ou du seul point de vue de « l’enfumage » spectaculaire, les questions de l’évolution de la famille et du mariage, on pourrait déceler une sorte de « post-modernisme » à l’œuvre, peut-être même de « trans-humanisme » par omission

On pourrait aussi y déceler la volonté obstinée de préserver son pré carré de droit de retrait, de non-chaloir, de suspension nécessaire du jugement, d'indifférence assumée à certaines affaires du monde, parce qu'on ne veut ni ne peut se mêler de tout, influer sur tout, avoir son avis sur tout, et qu'il ne faut pas confondre certaine attitude réactionnaire à l'hyper-réaction qui transforme en prurit généralisé n'importe quelle piqûre de société.

Il ne serait pas si difficile, historiquement, d'établir un lien entre l'éclairage tous azimuts, impliquant presque mécaniquement l’interventionnisme intempestif, et le progressisme doctrinaire, quand un conservatisme rétif, suivant en cela une pente toute naturelle, voudra avant tout préserver sa part d'ombre, si l'on peut dire.
"Comment se fait-il que vous réagissiez comme si vous vous découvriez.

Franche question de moineau.
Ah enfin une saine et solide réaction de la part de Rothomago. Merci et bravo !

Comme toujours Marche et co se roulent dans la fange. Autant dire que je ne regrette pas une seule seconde mon départ.
Gérard Rogemi écrit : Comme toujours Marche et co se roulent dans la fange. Toujours aussi nuancé, l'ami Rogemi ! Je crois me reconnaître dans ce négligeable et co. Je n'aurais jamais supposé qu'émettre quelques réserves à l'encontre d'une manifestation pour tous ayant pour emblème une famille rose ou bleue tendre traînant sa progéniture et dont le porte-parole est l'éminente, l'exemplaire Frigide Barjot, revenait à se rouler dans la fange. Mais puisque vous le dites...
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