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Communiqué n° 1757 : Sur la nécessité d’une protection esthétique du rez-de-chaussée des immeubles anciens

Communiqué n° 1757, samedi 20 septembre 2014
Sur la nécessité d’une protection esthétique du rez-de-chaussée des immeubles anciens

Le parti de l’In-nocence observe que le XXe siècle a consisté surtout, s’agissant de la gestion urbanistique et esthétique des rues et avenues marchandes de nos villes, en l’adaptation du rez-de-chaussée des immeubles à des fins commerciales et publicitaires, le plus souvent sans tenir le moindre compte du style des immeubles concernés. Il estime qu’il est grand temps de réagir à cette évolution moderniste et économiste, qui n’a plus aucune raison d'être aujourd’hui, même commerciale, les devantures modernes et modernistes s’étant toutes démodées les unes après les autres et n’attirant pas l’œil ni le désir plus que les échoppes et boutiques de jadis, bien au contraire. Il juge donc souhaitable que ne soit plus accordée la moindre autorisation de travaux commerciaux qui ne respecteraient pas l’esprit des immeubles concernés dans leur ensemble, et que, partout où c’est encore possible, là où les structures anciennes ont été conservées sous les revêtements modernes (ce qui est très souvent le cas), on revienne aux formes et volumes originels.
Je n'approuve pas ce communiqué trop rigoriste dans sa formulation.Je comprends le sens mais je n'en saisis pas les limites.
Doit on "muséifier" nos villes au prétexte qu'il n'y a que certaines lignes architecturales qui soient de bon goût?
Il ne s'agit pas de transformer la place des vosges en y plantant un Mac do illuminé par coca cola, l'administration des batiments historiques y veille.Mais que la vie dans une cité s'exprime ,avec plus ou moins de justesse, par son activité commerciale me semble nécessaire.
Je me faisais cette réflexion l'autre jour dans Paris .Je suis dans une ville musée qui ne propose plus que ces anciens attraits contrairement à Londres où la création surgit dans tous ses quartiers,tout en conservant le "must" de son patrimoine.
Je conçois que l'équilibre entre la conservation de monuments superbes et prestigieux dans leur environnement et la liberté nécessaire à une vie foisonnante et créative soit difficile à tenir. Mais de là à scléroser une ville dans son passé..........
Je ne suis pas insensible à la dégradation de nos paysages par la croissance éxagérée de façades commerciales aussi laides qu'éphémères, mais n'est ce pas le prix à payer pour qu'un jour surgisse la coupole des galeries lafayette?
Faut il réglementer ,encore réglementer? Préservons des espaces mais laissons par ailleurs la vie s'exprimer et lui donner la possibilité de s'inscire dans l'Histoire même si cela doit passer par de trop nombreuses erreurs ou fautes .Le temps fera le tri.
Cher ami,

A l'occasion, passez dans le Marais et voyez l'Hôtel d'Albret. Il est complètement muséifié et actuellement occupé par une vague administration.

Il y a presque quarante ans, circa 1975, un des amis habitait à deux pas. Je me rappelle très bien ce quartier à l'époque, avant l'invasion bobo et avant cette muséification. Cet hôtel était un bâtiment vivant, hébergeant une petite entreprise (de cordonnerie, je crois, mais je ne suis pas sûr) dans les communs et comportant plusieurs logements.

Le voici au début du siècle dernier, dans son aspect "commercial et industriel" :

Tout cela est d'ailleurs, cher Bertrand, bien étonnant.

Au long de notre histoire, on a su très bien construire en détruisant sans grandes interrogations les monuments du passé.

A Paris, on pense à Haussmann. On oublie que bien après Haussmann les "Beaux quartiers" furent, jusqu'à la guerre de 14, l'objet de beaucoup de travaux, voir par exemple Passy et la rue de l'Alboni, c'est typique. On oublie que la France épuisée de l'entre-deux-guerres sut profondément modifier le VIIème arrondissement, par exemple vers le quartier Fontenoy-Ségur.

Il semble maintenant qu'on soit saisi de terreur à l'idée de toucher la moindre vieille pierre.

Alors oui, protégeons ce qui est vraiment digne d'être protégé, mais que nos villes ne deviennent pas des cimetières, la première fonction d'une ville c'est d'être habitée, d'être un lieu d'échange et de travail, pas d'être un ensemble de rues mortes, qu'on fasse un peu la part des choses.
Il me semble que les commerçants et artisans de jadis étaient tout de même plus respectueux des façades des immeubles, ne serait-ce que parce qu'ils n'avaient pas encore les moyens techniques de répandre toute cette laideur boutiquière, toute cette matière plastique qui nous empoisonne aujourd'hui.

Ainsi l'on ne peut nullement mettre sur le même plan les enseignes artisanales de jadis et les enseignes “commerciales” d'aujourd'hui, celles des diverses “chaînes” (banques, assurances, vêtements, restauration rapide, agences immobilières, etc.) qui, après avoir évincé tout le reste, font que, de façon sinistre, on retrouve toujours la même camelote où qu'on aille, la même laideur partout, dans toutes les villes.

Par exemple, il y a encore quarante ans, on échappait largement, je crois, aux infamies de ce genre, qui sont pour moi une humiliation (mais ça n'a pas l'air déranger grand monde, au contraire) :


Ce n'est là, bien entendu, qu'un exemple entre cent mille. Et bien sûr, dès qu'on a le malheur de protester (un peu), on vous refait le coup habituel du chantage au chômage et à la croissance. Sauf qu'après quatre décennies d'outrages et d'avilissement, on en est toujours au même point : bla bla bla croissance, bla bla bla chômage, courage mes amis, nous sommes en fait au milieu du gué : encore un lotissement, encore un Mc Donald's, encore une dose de pédagogisme à l'école, et là vous verrez, y aura d'la croissance et d'l'emploi, nos enfants parleront anglais, tout ira bien, le bonheur pavillonnaire pour tous est à portée de main...
24 septembre 2014, 07:26   La position de l'In-nocent
» Au long de notre histoire, on a su très bien construire en détruisant

Peut-être, mais si l'on estime être entré dans une ère on l'on ne sait plus que détruire en ne construisant rien qui soit une construction digne de ce nom, alors peut-être vaut-il mieux en effet se ramasser dans la position essentielle de l'In-nocent, si j'ose dire, le dos arc-bouté contre la flèche du temps, contre le monde comme il va et ne peut plus qu'aller, les jambes calées contre le sol, raidi dans un effort constant de freinage éperdu, le mouvement imposé étant devenu mauvais en soi.
C'est là l'esprit de réaction pure, métaphysique, et de tels communiqués sont ma foi assez réjouissants...
24 septembre 2014, 16:14   Re : La position de l'In-nocent
Il serait instructif qu'à ce communiqué intéressant et technique fussent adjointes des photos.
24 septembre 2014, 18:28   Re : La position de l'In-nocent
Je n'ai jamais compris pourquoi ceux qui emploient le mot "muséifier" le faisaient péjorativement : il me plairait de me promener, d'aller acheter de la viande, d'aller travailler en empruntant les vastes, propres, élégantes avenues d'un musée. Que ceux qui préfèrent le changement perpétuel et le chaos (des enseignes, des façades etc.), la saleté de ce qui bouge et qui vit, les criarderies des quartiers chinois ou arabes, il leur reste des milliers, des centaines de milliers d'autres villes ou rues ou quartiers.

Je ne sais pas afficher les photographies ici, mais je conseille une vue du boulevard Voltaire, entièrement défiguré par les enseignes des boutiques de textile chinoises, une de la rue du Château d'eau, massacrée esthétiquement par les coiffeurs africains, une autre de la rue St Antoine à Cannes, enlaidie par les restaurants, leurs terrasses et mobiliers immondes... En contre exemple, je me souviens d'un Mc Donald's qui, peut-être sous la contrainte de la ville, avait fait de très gros efforts pour intégrer son affreuse signalétique au style et à l'architecture du bâtiment et du quartier qui l'accueillaient.
Utilisateur anonyme
24 septembre 2014, 18:56   Re : La position de l'In-nocent
Il suffit du reste de passer quelques jours à Rome pour se rendre compte que le massacre est, dans bien des cas, tout à fait évitable. Là-bas le cancer boutiquier a su être domestiqué et les rez-de-chaussée anciens sont, dans leur grande majorité, préservés, sans que cela n'entrave l'activité commerciale normale de la cité.

Quant à cette critique de la prétendue “muséification” des villes, et notamment de Paris, il suffit, pour comprendre ce que cela peut bien vouloir dire, de regarder qui parle en ces termes. Le plus souvent, des Amis du Désastre.
M. Page, fussent.

M. Dellinger, vous êtes le M. Jourdain du désastre, du moins à ce que je lis de M. Davoudi. Nous sommes deux.
24 septembre 2014, 19:44   Re : La position de l'In-nocent
Voici, à Guingamp, deux exemples.
Ceci, qui illustre le communiqué :




et, juste à côté :

Utilisateur anonyme
24 septembre 2014, 21:01   Re : La position de l'In-nocent
« M. Dellinger, vous êtes le M. Jourdain du désastre, du moins à ce que je lis de M. Davoudi. »

Celle-là, vous auriez pu vous abstenir de l'écrire...
Il va sans dire que je ne pensais nullement à M. Dellinger, avec qui j'ai eu cet été des conversations aussi amicales que stimulantes, mais à tous les promoteurs du béton, de la noce, de Paris-Plage, bref, tous ceux qui, dans les associations de fêtards, les mairies, les conseils généraux, veulent que ça bouge, et qui à ce titre semblent toujours bénéficier, au cours des débats, d'une espèce de prééminence aussi stupide qu'injustifiée.
Pourquoi vous inquiéter ? Sous peu, chacun disposera de lunettes à son goût qui délivreront le décor qui sied à chacun. Chaussant ses "Google glass", Renaud Camus pourra faire disparaître à loisir tout hangar à portée de vue. Vous êtes partant ?
24 septembre 2014, 21:25   Re : La position de l'In-nocent
Pardon : peut-on me dire si les images que j'ai mises en lien ci-dessus sont visibles (moi je ne voix que les petits carrés verdâtres qui indiquent une image que l'ordinateur ne sait pas lire...
24 septembre 2014, 21:27   Re : La position de l'In-nocent
Sinon, voici les deux adresses :

Le rez-de-chaussée vandalisé :

[www.google.fr]


L'autre :

[www.google.fr]
Tout d'abord merci, cher Afchine Davoudi, j'aurais été peiné de vous avoir offusqué, comme d'ailleurs quiconque sur ce site des in-nocents .
Merci Marcel Meyer d'avoir remis des liens qui illustrent le propos.
Je voulais ,dans ma dernière intervention, juste souligner, qu'entre une totale sanctuarisation, impérative dans certains espaces historiques ,et le massacre,l'horreur, de la rue du chateau à Paris, l'administration ,tout en veillant au respect de la salubrité et de la sécurité ,devait laisser une liberté d'expression aux propriétaires des lieux.
Cette liberté d'expression pouvant déboucher sur des ignobles verrues comme sur de charmants établissements parfaitement intégrés dans le site ou,encore mieux, des créations dignes d'intèrêt.Tout dépendant de l'état de culture du propriétaire et, malheureusement ,de ses moyens financiers.
Les horreurs finiront à la poubelle ,les élèments intéressants perdureront en partie, contribuant à l'enrichissement de notre patrimoine.
Je reconnais bien volontiers que notre époque produit peu de beaux batiments et que les entrepreneurs ,autant privés que publiques, sont plus motivés par une éfficacité immédiate de rentabilité ,financière ou électorale, que par l'esthétique de l'environnement.
Cependant ,certains ont encore la volonté de bien faire.Bien que je ne soit pas de son côté,je dois reconnaitre que Monsieur Juppé a bien oeuvré pour Bordeaux.
La deuxième photographie de Marcel Meyer est particulièrement éclairante, puisqu’on a les deux cas côte-à-côte.
Cher Monsieur Davoudi,

Je me bornais, avec un peu de malice, certes, à mettre en regard votre commentaire général "Quant à cette critique de la prétendue “muséification” des villes, et notamment de Paris, il suffit, pour comprendre ce que cela peut bien vouloir dire, de regarder qui parle en ces termes" avec le fait que le terme avait été introduit dans le débat par M. Dellinger.

Il me semble que le terme, en réalité a été largement promu par Jean Clair, qui a horreur de la "muséification" et qui est un homme d'une grande culture, qui s'y connaît en musées et qui n'est pas du tout un "Ami du désastre". Pensez à une chose : la muséification, c'est la perte du sens.

Au fond, je ne peux que souscrire à ce que dit M. Dellinger : "... entre une totale sanctuarisation, impérative dans certains espaces historiques ,et le massacre,l'horreur... l'administration ,tout en veillant au respect de la salubrité et de la sécurité ,devait laisser une liberté d'expression aux propriétaires des lieux."

C'est d'ailleurs l'esprit des grandes lois sur les secteurs sauvegardés. Il y a cinquante ans, Malraux protégeait des édifices et des quartiers remarquables, avec des crédits importants. Maintenant, on protège tout et n'importe quoi, rendant la moindre opération "économique" impossible dans bien des endroits, avec des crédits ridicules. Connaissez-vous le nombre d'inscriptions au titre des monuments historiques depuis 1970 ? plus de vingt mille ! mais ce n'est pas possible, c'est une fumisterie, il n'y a pas vingt mille bâtiments ainsi sortis du néant !

Il faut, Monsieur Davoudi, qu'il y ait un équilibre entre tous les intérêts. Le droit de propriété est un droit fondamental, certes critiqué par la bien-pensance, il est aussi légitime que votre droit à regarder ce qui vous plait, et il est plus ancien.

Le fait qu'il y ait un aspect "économique" dans les choses ne les rend pas impures, les villes ayant un sens économique. Vous nous parlez d'un "cancer boutiquier", ce sont vos mots. Prenez garde à ne pas le remplacer par la peste règlementaliste.

Si vous contemplez les profondeurs de ce forum, vous verrez que les activités économiques sont critiquées en centre-ville, mises à l'index en entrées de ces mêmes villes et vilipendées à la campagne. Où peuvent-elles se mettre ?

Vous êtes végétarien, c'est un choix estimable, ne forcez pas, par un programme intégriste, les autres à manger de l'herbe.
25 septembre 2014, 13:39   Remèdes des époques
Citation
Thomas Rothomago
Pourquoi vous inquiéter ? Sous peu, chacun disposera de lunettes à son goût qui délivreront le décor qui sied à chacun. Chaussant ses "Google glass", Renaud Camus pourra faire disparaître à loisir tout hangar à portée de vue. Vous êtes partant ?

Oui, si le néant est inéluctable, autant l'illusion.
Citation
Jean-Marc du Masnau
Le fait qu'il y ait un aspect "économique" dans les choses ne les rend pas impures, les villes ayant un sens économique. Vous nous parlez d'un "cancer boutiquier", ce sont vos mots. Prenez garde à ne pas le remplacer par la peste règlementaliste.
(...)
Vous êtes végétarien, c'est un choix estimable, ne forcez pas, par un programme intégriste, les autres à manger de l'herbe.

Deux choses, Du Masnau :

1/ Vous ignorez complètement le fait que j'aie pu parler d'activité commerciale normale de la cité. Simplement, ce n'est pas parce que l'économie est en effet un élément fondamental des sociétés humaines qu'il faut, en son nom, tout massacrer. Je ne dénonce pas l'économie, ce qui serait absurde, mais le chantage permanent (et du reste inefficace) qu'on fait en son nom.

2/ Je ne vois pas du tout ce que le fait d'être végétarien vient faire ici. Et votre façon si grotesque et si insultante d'assimiler le végétarisme au fait de « manger de l'herbe » (sic), pour ne rien dire de votre tendance à me prêter des intentions vaguement totalitaires, me prouve que je n'ai absolument rien à vous dire, espèce de (non, rien).
Ne soyez pas si susceptible ! prenez mes propos, mettez un bémol, et vous les lirez tels qu'ils doivent être compris. Quand vous écrivez "cancer boutiquier", vous êtes à mon avis dans le registre de l'exagération, vous aussi. Je reconnais que j'exagère, vous pouvez le faire aussi (pas exagérer, le reconnaître).
Personnellement j'assume très bien l'expression “cancer boutiquier”, laquelle a le mérite, je crois, d'illustrer clairement ce qui arrive aux rez-de-chaussé de maints beaux bâtiments de ce pays.

S'agissant de la dite "muséification”, je sais que c'est un mot à la mode ces temps-ci, mais j'avoue ne pas voir en quoi Paris ou une autre grande ville de France serait particulièrement muséifiée, de nos jours — à moins d'appeler muséification certaines restaurations un peu extrêmes de quelques monuments historiques...

À Paris il y a Paris-Plage, des bus de nuit, des roller pride chaque semaine, ainsi que d'innombrables bars, boîtes et cafés devant lesquels les gens, un verre à la main, se consacrent à la corvée de l'amusement. Les quais de Seine sont une vraie foire, les rues semblent être sans arrêt en travaux, chacun vaque à ses occupations, et l'on refait entièrement les Halles. Paris n'est donc pas muséifiée — pas plus que Rome ou Londres, en tout cas. Après, il y a toujours des membres d'associations de fêtards qui voudraient davantage de rave parties, mais bon...
Vous n'avez pas tort, il y a effectivement bien des dérives, mais l'interdiction générale et absolue posée par le communiqué est une réponse inadaptée, de mon point de vue.

A propos de la muséification, le mieux, pour vous faire une idée, serait de regarder ce qu'a dit et écrit Jean Clair, déjà cité.

Je vais développer mon point de vue : il existe, en France, tout un arsenal pour protéger les monuments historiques, notamment les textes sur les secteurs sauvegardés, dans lesquels l'avis conforme de l'architecte des Bâtiments de France est requis pour toute modification des façades, ou les textes sur la co-visibilité d'avec les monuments en question. Il faut l'appliquer à bon escient, pas forcément le développer, cet arsenal.

Je prends un exemple concret, celui de mon département.

Dans le Tarn, il faut, de mon point de vue, très fortement protéger le centre ancien d'Albi, qui a une unité réelle et qui est magnifique. Les devantures y sont d'ailleurs fort correctes, les commerces, cafés et restaurants opulents, tout le monde y trouve son compte, les acteurs économiques aussi. Dans les cas de Mazamet, Lavaur, Graulhet, Castres même, il n'y a rien de bien intéressant, en fait, sauf quelques bâtiments fort beaux, mais noyés dans un environnement sans intérêt. Là, nul besoin de tracasser les commerçants.
Voici maintenant, pour illustrer mon propos relatif au secteur sauvegardé, deux photographies des arcades de la Place du Capitole, à Toulouse, circa 1930 :



Et maintenant :



La fonction de la place a été préservée, l'horrible parking aérien a été supprimé et, de mon point de vue, les façades n'ont pas été saccagées, loin de là, voyez les publicités criardes d'autrefois.
Certes, mais la Place du Capitole est un site majeur, une vitrine (pour le coup...) pas forcément représentative.
Pour un site de ce genre emphatiquement préservé, combien de beautés mineures humiliées ?
C'est là le vrai débat, il me semble.

La logique du système des secteurs sauvegardés, qui remonte à Malraux, est de déterminer quels quartiers doivent être, justement, sauvegardés, et ce à un coût parfois très élevé. Elle n'est d'ailleurs pas très éloignée d'une vision élitiste de l'architecture. Elle ne laisse effectivement que peu de place aux beautés mineures, comme vous dites justement. C'était aussi la logique présidant à la promulgation de la loi de 1913 sur les Monuments historiques : hors du champ de la protection, charbonnier est maître chez lui. Aussi bien le législateur de 1913 que Malraux cinquante ans plus tard avaient une vision "par exception" : on protège l'exceptionnel et on ne s'occupe pas de l'ordinaire. La seule différence est que la loi de 1913 pense "monument" alors que Malraux pense "quartier homogène". Si vous regardez dans de vieux grimoires quels furent les débats autour de la loi Malraux, vous verrez que Malraux s'était attaché à ce que sa loi soit "supportable" par les intérêts économiques concernés.

Je vais prendre un exemple éloigné, celui des aménagements pour handicapés. Tout le monde est d'accord pour faire des choses raisonnables, par exemple pour que les handicapés puissent se déplacer correctement en ville, ou qu'ils puissent, par exemple, entrer dans un hôpital. En revanche, modifier en profondeur la mairie de Plieux pour qu'un handicapé puisse, en se présentant à n'importe quel moment assister à n'importe quelle séance, c'est de la folie.

Je veux dire simplement qu'il faut savoir, en tout, faire la part des choses, et que cela s'applique à l'architecture et à la préservation des sites. On ne peut tout protéger tout le temps, sinon on se rend odieux. Ceci dit, une fois qu'on a décidé de protéger les choses importantes, il faut le faire et bien le faire. Tel est en tout cas mon point de vue.
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