La Marseillaise a été sifflée lors du match France-Tunisie au Parc des Princes hier soir. Les commentaires des responsables politiques font songer à la pièce Rashomon (un meurtre a eu lieu, les témoins-interprètes de la vérité la livrent en un prisme collectif, qui masque et habille la vérité mais qui la constitue en même temps, tout entière, étant la vérité crue de
l'instance énonciative collective), ou encore, dans le domaine sportif, à la chanson "Qui a tué Davy Moore" de Dylan: chacun a son explication dans laquelle il transcrit sa vision du monde tout comme sa part de responsabilité. On notera le commentaire de Marie-Georges Buffet, secrétaire général du Parti des Fusillés, qui entonne à l'occasion un couplet bobo compatissant de la plus belle eau. L'état idéologique de la France politique d'octobre 2008 tient tout entier dans ces commentaires (extrait du Figaro), et le consensus national tient comme une devise nationale en quatre mots: IL FAUT LES COMPRENDRE, prononcé par un symbole vivant, en fin de texte:
«Les sifflets sont inacceptables», écrit quant à lui Razzy Hammadi, secrétaire national du PS. «En effet, même si la France a eu pendant des années une politique coloniale en Tunisie, même si les Français d'origine tunisienne, et plus largement les Maghrébins ou les Français d'origine maghrébine (...), sont trop souvent victimes de discrimination et de harcèlement policier (...) il n'en demeure pas moins que la République, en dépit de ses promesses non tenues, n'est pas à humilier en sifflant son hymne», écrit l'ancien président du MJS.
Marie-George Buffet, secrétaire nationale du PCF, a jugé que ces sifflets étaient l'expression de gens en «souffrance» qui «ne se sentent pas bien chez nous».
Quant à la chanteuse Lââm, elle a avoué avoir «eu un peu les boules» d'avoir été sifflée. «Pour un match amical c'est bête, a regretté la chanteuse. J'étais fière d'être là. Après il y a toujours trois abrutis, enfin là ils étaient un peu plus, pour siffler la Marseillaise...».
Pour sa part, Raymond Domenech s'est seulement dit «ému» par les hymnes, tout en ajoutant avoir été «un peu sourd» pour «le reste». C'est-à-dire les sifflets qui lui étaient également destinés, ainsi qu'aux joueurs.
Le plus conspué a été Hatem Ben Arfa. Le milieu de terrain de l'équipe de France, né à Clamart de parents tunisiens, avait en effet opté pour la sélection française malgré les sollicitations de la Fédération tunisienne.
Il a toutefois déclaré qu'«il n'en voulait pas» aux spectateurs. «On s'attendait tous à ça, a affirmé le joueur. On l'avait vu contre le Maroc et l'Algérie. (…) C'est un peu dommage mais ce n'est pas grave. (…)Ils ont besoin d'exister, il y avait plus de Tunisiens que de Français,
il faut les comprendre.»