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Les auditeurs de France Culture y peuvent pas tout savoir, non plus

Envoyé par Pierre-Marie Dangle 
Ce matin, dans les Matins de France Culture, l'ineffable Baddou interrogeait Pierre Boulez. A un moment donné, Alain-Gérard Slama intervint dans la discussion, en évoquant au passage Sviatoslav Richter, Patrice Chéreau et George Bernard Shaw ; notre bon Ali crut bon, alors, de préciser que tous les auditeurs de France Culture n'étaient pas censés connaître ces personnes...*
Heureusement, Slama a eu le réflexe de protester, et a rétorqué que si, bien sûr, tous les auditeurs de cette chaîne les connaissaient, voyons...
Voilà une anecdote qui en dit long sur l'état d'esprit de ceux mêmes à qui sont confiées les rênes d'un lieu où, il n'y a pas si longtemps, l'on n'aurait pas songé une seconde à envisager une telle éventualité, et encore moins à en faire la remarque.
J'ajoute cependant que, pour une fois, A.B. a laissé parler Boulez sans du tout l'interrompre, lui permettant de développer son discours jusqu'en ses incises, ce qui était souverainement appréciable. J'ignore pourquoi ! Respect, intimidation, dûs à la forte personnalité, à l'autorité, au savoir de l'interviewé, probablement.

*Je ne résiste pas au plaisir de citer exactement le passage :
Baddou : "N'oubliez pas que nous avons des auditeurs qui ne connaissent pas tous ni Richter, ni Bernard Shaw, ni les autres !"
Slama : "Mais si, les auditeurs de France Culture ils connaissent, et en tout cas ils ont compris que Richter est un pianiste et que Patrice Chéreau est un metteur en scène et que Pierre Boulez, ça, je pense que tout le monde le connaît !"
Utilisateur anonyme
12 novembre 2008, 14:25   Re : Les auditeurs de France Culture y peuvent pas tout savoir, non plus
Ali Baddou a même fait un grand compliment au Maître en le qualifiant d' "artiste rock". Cela a dû lui aller droit au coeur ! Cela dit, je partage votre sentiment sur l'émission qui a été d'une très bonne tenue.
Très bonne tenue ? Allons donc ! Redoublement du sujet chez l'insupportable Slama, le crétin interdisciplinaire, "les auditeurs [...], ils..." et du Boulèzzze en veux-tu en voi-là.
Utilisateur anonyme
12 novembre 2008, 15:18   Re : Les auditeurs de France Culture y peuvent pas tout savoir, non plus
et du Boulèzzze en veux-tu en voi-là.

Et comment dites-vous ? Boulé ?
Bien évidemment Alexis. L'aronien que vous êtes ne prononce-t-il pas Baveré quand il évoque l'immense Baverez ?
12 novembre 2008, 15:50   A l'aise, Boulèze
C'est amusant, c'est exactement la question qui m'est venue à l'esprit ce matin... Pour ma part, je dis Boulèze, tout en me demandant si c'est bien ce qu'il faut dire ; mais je n'ai jamais, au grand jamais, entendu dire Boulé par qui que ce soit (ce qui, je vous l'accorde, n'est pas pour autant une garantie quelconque...)
"Boulé dans le Béar" c'est pourtant très beau.
12 novembre 2008, 16:18   Redoublement du sujet
Il se trouve que, pour des raisons de recherches personnelles, je procède à une écoute des bandes enregistrées de la Maison Blanche, circa 1960. J'ai récemment entendu l'enregistrement d'une conversation entre Lyndon B. Johnson et Edward R. Murrow : il s'agissait de l'appel passé par Johnson à Murrow pour lui lire les termes de la lettre d'acceptation de démission qu'il allait lui adresser (Murrow était très malade), et de questions sur le choix de son remplaçant.

Johnson et surtout Murrow étaient célèbres pour leur art oratoire. On est frappé de lire le texte, qui est un peu boîteux en anglais classique, et d'entendre le texte, qui, au contraire semble tout-à-fait correct. Cela me conforte dans l'idée qu'il y a une langue orale et une langue écrite.

Le redoublement du sujet est certes malheureux, mais je préfèrerais m'attacher au fond du propos, qui me semble pertinent.

Pour ce qui est de la prononciation de "Boulez", c'est un cas très intéressant. Il est originaire, je crois, de Montbrison (en Forez). Suivant le versant du Forez dont sa famille est originaire, on prononce "Boulèze" ou "Boulé", c'est une des curiosités linguistiques régionales (en fait, la limite des parlers franco-provençaux).

Il conviendrait de savoir comme Boulez se nomme lui-même.
Eh bé... Après le redoublement du sujet, le soi-mêmisme maintenant.
Utilisateur anonyme
12 novembre 2008, 16:43   et du Boulèzzze en veux-tu en voi-là.
Il se nomme Pierre Boulèze, et je n'ai jamais entendu quiconque l'appeler autrement.
12 novembre 2008, 17:03   Soi-mêmisme
Bien cher Petit-Détour,


Où voyez-vous du soi-mêmisme là dedans ?
Pardonnez-moi, cher Jmarc, je reviens d'une chevauchée d'une semaine dans le Sobrarbe au cours de laquelle j'ai contracté une camusite aigüe. Je me soigne un peu en lisant la biographie de Simone Weil écrite par Laure Adler.
12 novembre 2008, 17:24   Sobrarbe
Mon Sobrarbe est actuellement dans les limbes amazoniens. Est-ce abuser de votre patience que de vous demander, à nouveau, ce que cette allusion au soi-mêmisme signifie ?
Utilisateur anonyme
12 novembre 2008, 17:36   Les deux langues
"Cela me conforte dans l'idée qu'il y a une langue orale et une langue écrite."

Tout à fait exact. La question qui, cependant, demeure est de savoir laquelle de ces deux langues est subordonnée à l'autre, ou, plutôt, laquelle de ces deux langues donne le ton à l'autre, puisqu'elles ne sauraient se développer indépendamment l'une de l'autre. Il me semble que la langue orale a très longtemps eu en point de mire la langue écrite, qu'elle s'est efforcée de l'atteindre et de la parler couramment, tout en sachant qu'elle n'y parviendrait pas. La bonne langue écrite représentait ce vers quoi devait tendre la langue orale.

L'extraordinaire et hégémonique présence d'une parole enregistrée et diffusée a inversé l'ancienne préséance. Désormais, c'est la langue écrite qui court désespérément après une langue orale livrée à elle-même, c'est-à-dire à tous les caprices de l'immédiateté. Il ne s'agit pas pour la langue écrite de se hisser à la langue orale, mais simplement de ne pas être semée par elle.
12 novembre 2008, 18:21   Re : Les deux langues
Tout à fait d'accord avec vous, cher Orimont !
J'ajouterais même, pour faire bonne mesure, que les deux langues, écrite et orale, et dans le mesure où elles sont encore du français, courent désespérément après ce qu'elles croient être de l'anglais !
12 novembre 2008, 19:56   La pesantude et la grâce
Cher M. Petit-Détour, puis-je vous demander ce que donne cette biographie de Simone Weil par la dame Adler ? Je m'étonne qu'on puisse la lire (celle-ci, pas celle-là), aussi cela m'intrigue. Pour ma part, j'ai trouvé ceci en pérégrinant :

C’est dingue !

La semaine dernière (France 5, 2 octobre), dans “La Grande Librairie”, François Busnel (sourire commercial de vendeur de voiture) recevait Jean d’Ormesson (teint toujours aussi jaune, yeux toujours aussi bleus), Bernard Pivot (”personnalité-culte” venue cautionner l’émission), Laure Adler (”intellectuelle chic-choc tueuse” pour sa biographie de Simone Weil) et François Bégaudeau (”prof malin”). L’émission démarre, tour de table des convives, Madame Adler est présentée en 3 mots: regard au laser, le petit Busnel n’en mène pas large, il envoie un reportage “brosse à reluire” d’une minute trente sur la carrière de madame qui soudainement reparaît à l’image avec un sourire extatique… Les 34 ans de la vie de et les 34 000 pages de l’œuvre de Simone Weil sont expédiés en 3 minutes et 40 secondes. Extraits (surnageant au milieu d’une purée de banalités et de clichés simplistes):

“… le style de S. Weil, c’est absolument dingue !!!” (Madame Adler)

“… elle va essayer de se faire parachuter en France pour lutter contre les nazis, c’est quand même dingue !!! C’est fou !!!” (Madame Adler)

“… C’est une femme d’excès (B. Pivot). Oui, elle un peu barjot !” (Madame Adler avec le doigt sur la tempe)

“... Elle n’a pas peur de la mort (F. Busnel). Ben oui, elle en a rien à foutre !” (Madame Adler)

Je m’honore d’avoir un peu lu Simone Weil et d’aimer autant l’audace et le courage de sa pensée que la beauté et la force de son style.
Je ne lirai pas Simone Weil l’insoumise de Laure Adler.
14 novembre 2008, 15:23   Re : Sobrarbe
Cherchez pas Jmarc, pour Petit-Détour, le Forez, c'est du Fauré, tout juste un peu rustique, et encore... Et la Corrèze, c'est la Corée. Un grand camusien, au fond, ce Piert Detr.
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