Le lien évoqué par Marcel Meyer est clairement exposé dans l'article du
Monde qui suit. La culture générale est un facteur discriminatoire pour les Français issus de la "diversité" dans leur parcours vers l'intégration "citoyenne". Ce n'est plus la grande déculturation en marche, c'est l'éradication en marche.
La fonction publique espère diversifier son recrutement grâce à une "charte de l'égalité"
LE MONDE | 02.12.08 | 13h52 • Mis à jour le 02.12.08 | 18h45
Stimulée par l'élection de Barack Obama à la présidence des Etats-Unis, la majorité est décidée à reprendre l'initiative sur la question de la diversité. Invité de l'émission "Dimanche soir politique" (France Inter, i-Télé, Le Monde) du 30 novembre, le président du groupe UMP de l'Assemblée nationale, Jean-François Copé, l'a promis : "La diversité sera l'un des grands thèmes de l'année 2009".
Le 28 novembre, devant des élus d'outre-mer, Nicolas Sarkozy a annoncé qu'il prendrait début 2009 des mesures "pour que la diversité se traduise dans les élites françaises chez les préfets, les magistrats, les professeurs d'université". Selon son entourage, "il ne se passe pas deux semaines sans que le chef de l'Etat se plaigne du peu de diversité dans les nominations de hauts fonctionnaires qu'on lui propose."
Cette volonté affichée de longue date par le président se heurte à des obstacles juridiques de taille. Au-delà des nominations de hauts fonctionnaires, la mise en œuvre de mesures de discrimination positive basées sur des critères ethniques se heurterait au principe d'égalité inscrit dans la Constitution. La mission confiée par le chef de l'Etat à Simone Veil devra apporter des éléments de réponse à ce sujet.
Le ministère de la fonction publique a signé, mardi 2 décembre, une "charte pour la promotion de l'égalité". Par cet "engagement moral et concret", selon les termes du ministre André Santini, l'administration entend favoriser le recrutement d'enfants d'immigrés, de femmes, de seniors et de personnes handicapées.
Sous-représentés dans le secteur privé, les enfants d'immigrés le sont encore plus dans la fonction publique. Selon l'Insee, seuls 16,3 % des actifs ayant deux parents immigrés sont salariés de la fonction publique, contre 25 % des actifs n'ayant aucun parent immigré. À âge, sexe, diplôme et catégorie socioprofessionnelle des parents identiques, être descendant d'immigrés réduit la probabilité de travailler dans le public. Ceux qui parviennent à entrer dans la fonction publique sont le plus souvent recrutés sur des emplois précaires.
LA MISE À L'ÉCART SE JOUE À L'ÉCRIT
Dominique Meurs, chercheuse à l'INED, s'est intéressé aux candidats aux concours. Cette étude, qui a porté sur le suivi des candidats aux concours d'accès aux Instituts territoriaux d'administration (IRA), montre que la mise à l'écart se joue aux épreuves écrites. "Les enfants d'immigrés ne sont pas vraiment sous-représentés parmi les candidats, mais ils chutent sur la culture générale alors qu'ils réussissent tout aussi bien que les autres aux épreuves techniques. L'importance des épreuves formelles pénaliserait ainsi les secondes générations, et surtout celles d'origine africaine et maghrébine", relève Mme Meurs. Dans un entretien au Figaro du 1er décembre, M. Santini a annoncé sa volonté de remplacer dès 2009 les épreuves de culture générale, "trop académiques et ridiculement difficiles", par "des questions de bon sens" permettant de mieux détecter les aptitudes des candidats.
Plusieurs engagements figurent dans la charte de l'égalité : repenser les épreuves des concours, informer sur leur contenu et aider à leur préparation ; valoriser l'expérience, mais aussi "former et sensibiliser" recruteurs, membres de jury, "évaluateurs" de carrière, responsables de ressources humaines "aux préjugés, aux stéréotypes et aux risques de discrimination".
Pour la haute fonction publique, Richard Descoings, directeur de Sciences-Po, plaide en faveur d'une diversification des voies de recrutement : "Pourquoi l'ENA ne recruterait pas des élèves titulaires d'un master, diplômés d'une grande école, qu'elle évaluerait sur des stages, sur des épreuves permettant de savoir si leur profil intellectuel et humain correspond aux emplois ? En France, relève-t-il, nous avons si peu confiance dans la valeur des diplômes universitaires que l'on pense que le recrutement ne peut se faire que par concours".
Alors que le recrutement sur concours est censé garantir l'égalité des candidats, M. Descoings estime que seuls les 300 à 400 élèves de la filière service public de Sciences-Po sont préparés à la rédaction de copies académiques.
Laetitia Van Eeckhout
Article paru dans l'édition du 03.12.08