Mon commentaire "économique" portait sur un système dans lequel la SACEM rémunèrerait son protégé non plus au pro rata de la diffusion de ses z'oeuvres immortelles mais au kilo de CD, et clés USB vierge vendus au public, c'est à dire en dehors de tout critère de popularité ou de valeur artistique intrinsèque des oeuvres protégées. Voilà l'aberration, et voilà la prébende.
Concernant le reste: nos z'artistes (je pense tout à coup à ce poète immortel, Maxime le Forestier, qui pousse des cris d'effraie, et dans les mauvais moments, quand il est vraiment fâché, des cris d'orfraie, face au "téléchargement illégal" qui, prétend-il, le met sur la paille) risquent d'avoir une mauvaise surprise: ce qui est téléchargé en quantités industrielles, n'est nullement leurs dernières créations, qui ne valent pas un pet de hanneton, mais leurs vieilleries touchantes, celles du temps des gauloises bleues, que l'on entend parfois sur Radio Nostalgie, bref les créations d'autrefois, quand la chanson française existait encore, oui la chanson française, car désolé cher Marcel, mais ce ne sont pas prioritairement les concerts historiques de Jonathan Dugenou à la salle Playel dans les années 57-59, ses meilleures, que les foules s'arrachent sur Internet; risquent d'avoir une mauvaise surprise car pfffuit: pendant la suspension du téléchargement, la mévente de leurs "créations" se poursuivra. Pourquoi ?A vrai dire, le disque n'a guère augmenté de prix en termes bruts et absolus, il est vrai, mais quand on considère qu'une chanson de Charles Aznavour chantée par son auteur, pour peu qu'elle ait été fredonnée par le plombier de l'époque, et dont le prix de vente revenait à 1,50 francs en 1969 quand elle est sortie en disque 45 t ou 33 t vinyl, a été redistribuée, et réédité dans des dizaines de compilations et rééditions depuis cette époque, toujours pour le même prix (suivant votre base de calcul qui donne à un franc de l'époque la valeur d'un euro d'aujourd'hui), et sur des supports ouverts à toutes les techniques de reproduction,
ce qui n'était pas le cas du vinyle en 1969, force est de se rendre à l'évidence: le disque numérique est très cher pour ce qu'il offre de consommable.
Le téléchargement légal propose la chanson de C. Aznavour à 0,99 euros, la vieillerie genre "Emmenez-moi au bout de la Terre" sortie en 1969. Or 0,99 euros, ça n'est pas du tout 1,50 francs, pour une vieille chose usée jusqu'à la corde et qui est étrangère à toute création nouvelle. En 1969, son prix vendue sur support non transférable était justifié, en 2009, plus du tout.
Quand au "packaging" du CD, nous touchons à l'injure au client: pochettes de plastique dur qui se brisent dès le troisième usage, froissent les livrets qui y sont bourrés, ne peuvent s'empiler (glissent les unes sur les autres, tombent et se brisent comme des oeufs), sont volumineuses au point d'obliger leur collectionneur à se remeubler pour pouvoir les ranger dès que leur nombre prend des proportions intéressantes , etc.
Si le téléchargement illégal doit être réprimé du point de vue de ceux qu'il lèse, c'est parce qu'il entame leur rente sur leurs vieilles productions; les artistes plus audacieux, plus jeunes aussi, ont un point de vue plus modéré sur la question: ils savent que leurs oeuvres doivent être connues, diffusées, risquées au grand public avant de leur faire gagner de l'argent, et le téléchargement illégal qui contribue largement à cela, peut leur être un atout.
Enfin qui osera dire tout haut cette vérité simple: plus on télécharge ce qu'on aime, plus
on achète et demande du même matériau, au fur et à mesure que l'on éduque et affine son goût.