Monsieur,
Les valeurs sont selon moi ce qui me rattache à l'humanité. Elles n'ont donc rien à voir avec la nature ni avec une transcendance quelconque.
Or l'humanité ne s'exprime que par l'acceptation, le respect, le culte d'un ensemble de codes qu'on appelle civilisation, rites, valeurs. Il n'y a pas d'humanité en soi (raison pour laquelle les Droit de l'homme me semblent être une fumisterie).
L'égotisme turgescent d'une certaine jeunesse ne mérite aucun respect. Cette belle jeunesse estime qu'on doit la prendre et la respecter pour ce qu'elle est et telle qu'elle est. Mais elle n'est rien en elle-même quand son humanité ne dépasse pas celle d'une nichée de chiots se pissant dessus.
Ces rites m'ont été transmis par mes parents et par ceux avec qui je vis tous les jours, le plus souvent mes supérieurs : instituteurs, professeurs, vieillards, patrons.
Ces valeurs sont conventionnelles, différentes d'une société à l'autre, d'une époque à l'autre. Et ces codes sont édictés par la classe socialement supérieure. Pas seulement pour les classes inférieures mais pour elle-même aussi :
"Le duc de Ding demanda comment le souverain devait traiter ses ministres et comment les ministres devaient servir leur souverain. Confucius répondit : "Le souverain traite ses ministres selon les rites et les ministres servent leur souverain avec loyauté". (Entretiens III-19).
Avec loyauté et en respectant les Rites oserai-je ajouter.
Le Rite est un rempart contre l'arbitraire du pouvoir. Le mépris du Rite par le pouvoir conduit au despotisme. Le mépris du Rite par le peuple conduit à la sauvagerie et l'animalité.
Très concrètement : respecter la propriété d'autrui, soutenir ses parents dans la difficulté, saluer courtoisement les personnes avec lesquelles je suis en relation sont les valeurs dont l'affranchissement nous conduit à la sauvagerie.
Voilà très maladroitement et très trivialement ce qui, selon moi, départage les valeurs "valables" et celles qui ne le sont pas.
Pour finir une anecdote personnelle. Dans ma famille il y avait une branche qui avait assez mal tourné. Cette branche n'avait gardé que très peu de liens avec le reste de la famille qui la méprisait. Après le décès de ma grand-mère toute la famille était réunie au cimetière sauf les représentants de cette branche ce qui ne choqua personne. Au moment de sortir de cet endroit une personne s'approcha très discrètement de mon grand-père lui chuchota quelques mots et le conduisit un peu à l'écart. Je les suivis et vis alors tous les membres de cette famille ostrascisée venir lui présenter leur condoléances. Aucun ne s'était senti digne se se mêler au reste de la famille lors de l'enterrement mais tous avaient tenu à témoigner leur soutient au mari de leur cousine. Et à le lui témoigner discrètement.
De la part de gens socialement très bas, j'ai trouvé que c'était là la marque d'un certaine grandeur. Par ce respect du Rite, ces cousins éloignés retrouvaient à mes yeux leur humanité.