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Dupont Lajoie: un hymne à la francophobie

Envoyé par Gérard Rogemi 
Sur le site F. Desouche je tombe ce matin dans un des commentaires postés sur le billet Dupont Lajoie:

Dupont Lajoie: un hymne à la francophobie

sur l'extrait de texte ci-dessous que je trouve d'une pertinence rare:

«En France, c’est le film «Dupont Lajoie» (Yves Boisset, 1974) qui illustre de manière à la fois emblématique et caricaturale, l’acte de naissance d’une nouvelle Gauche, dont le mépris des classes populaires, jusque-là assez bien maîtrisé, pourra désormais s’afficher sans le moindre complexe. C’est, en effet, au lendemain de la défaite sanglante du peuple chilien, défaite dont le pouvoir alors traumatisant est, aujourd’hui bien oublié, que cette nouvelle Gauche s’est progressivement résolue à abandonner la cause du peuple (dont chacun pouvait désormais mesurer les risques physiques que sa défense impliquait) au profit d’une réconciliation enthousiaste avec la modernité capitaliste et ses élites infiniment plus fréquentables. C’est alors, et alors seulement, que l’«antiracisme» (déjà présenté, dans le film de Boisset, comme une solution idéale de remplacement) pourra être méthodiquement substitué à la vieille lutte des classes, que le populisme pourra être tenu pour un crime de pensée et que le monde du showbiz et des médias pourra devenir la base d’appui privilégiée de tous les nouveaux combats politiques, aux lieux et place de l’ancienne classe ouvrière.»
Jean-Claude Michéa
Ne voudrait-on pas qu'il y ait un "air du temps" qui va qui vient qui change ? Faut-il comprendre ces variations comme l'expression de forces politiques sournoises et sombres. Comment opposer la petite-bourgeoisie au peuple alors qu'elle en constitue la majeure partie ? D'anciens souvenirs me reviennent sur la pureté du prolétariat et les purges qui s'en suivirent aussi bien dans les pays de l'est que dans les démocraties dotées d'un fort parti communiste.
Citation
Ostinato
Ne voudrait-on pas qu'il y ait un "air du temps" qui va qui vient qui change ? Faut-il comprendre ces variations comme l'expression de forces politiques sournoises et sombres. Comment opposer la petite-bourgeoisie au peuple alors qu'elle en constitue la majeure partie ? D'anciens souvenirs me reviennent sur la pureté du prolétariat et les purges qui s'en suivirent aussi bien dans les pays de l'est que dans les démocraties dotées d'un fort parti communiste.

Tout à fait exact !
Bien à vous.
Je suis entièrement d'accord, comme souvent, avec Michéa. La Gauche de plus en plus caviar n'a feint de respecter le peuple que tant qu'elle n'a pu faire autrement sans perdre la face, de même que l'Eglise n'a feint de respecter la laïcité que tant qu'elle n'a pu faire autrement . Mais toutes les deux piaffaient de saisir l'occasion qui leur permettrait à l'une de laisser libre cours à son mépris, voire à sa haine du populo, à l'autre de mettre à nouveau le religieux au centre de la société. Pour la première, les évènements du Chili, mais surtout le refus du peuple de prendre au sérieux la "révolution" de fils à papas que fut mai 68, constituèrent ce prétexte, et l'immigration l'aubaine d'un peuple de remplacement paré pour les besoins de la cause de toutes les vertus que l'on refuserait désormais de reconnaître à celui de souche. Quant à l'islam qui est une aubaine pour l'Eglise puisqu'il permet de remettre en cause la laïcité, il en est une autre pour la gauche caviar et une certaine droite : Le peuple divisé, remplacé par des communautés réduites aux aguets, n'est désormais plus à craindre.
En somme après avoir liquidé l'aristocratie avec l'aide du peuple et au nom de la nation, la caste bourgeoise au pouvoir liquide aujourd'hui le peuple et la nation avec l'aide de l'immigration. La boucle est bouclée.
Chère Cassandre,
A propos de la laicité et autres thémes avez-vous été visionner l'interview de Zemmour sur RCJ ?

Je le répéte Zemmour est non seulement profond mais magistral dans sa démonstration. Pour revoir ce clip cliquez I C I
Oui, je l'ai vu . Magistral en effet.
Citation
Cassandre
Je suis entièrement d'accord, comme souvent, avec Michéa. La Gauche de plus en plus caviar n'a feint de respecter le peuple que tant qu'elle n'a pu faire autrement sans perdre la face, de même que l'Eglise n'a feint de respecter la laïcité que tant qu'elle n'a pu faire autrement . Mais toutes les deux piaffaient de saisir l'occasion qui leur permettrait à l'une de laisser libre cours à son mépris, voire à sa haine du populo, à l'autre de mettre à nouveau le religieux au centre de la société. Pour la première, les évènements du Chili, mais surtout le refus du peuple de prendre au sérieux la "révolution" de fils à papas que fut mai 68, constituèrent ce prétexte, et l'immigration l'aubaine d'un peuple de remplacement paré pour les besoins de la cause de toutes les vertus que l'on refuserait désormais de reconnaître à celui de souche. Quant à l'islam qui est une aubaine pour l'Eglise puisqu'il permet de remettre en cause la laïcité, il en est une autre pour la gauche caviar et une certaine droite : Le peuple divisé, remplacé par des communautés réduites aux aguets, n'est désormais plus à craindre.
En somme après avoir liquidé l'aristocratie avec l'aide du peuple et au nom de la nation, la caste bourgeoise au pouvoir liquide aujourd'hui le peuple et la nation avec l'aide de l'immigration. La boucle est bouclée.


Fidèle lecteur de Michéa, je suis au regret de me trouver en désaccord avec lui - et donc vous - sur certains points. Il y a en effet un élément relevé par Ostinato ci-dessus et qu'il ne faut surtout pas omettre de prendre en compte, c'est que ce que l'on appelle peuple aujourd'hui, c'est la petite-bourgeoisie, la bourgeoisie en puissance, vérolée par l'obsession du confort, du chiffre sur la fiche de paie, tourmenté par le sacrosaint pouvoir d'achat (et je me permets de le dire d'autant plus que je n'ai personnellement que très peu d'un tel pouvoir).
Ainsi, même s'il est bien pratique d'opposer bon peuple et méchantes élites, qu'elles soient de gauche ou de droite, je pense que c'est une erreur. Nos élites pitoyables sont le reflet d'un peuple du même acabit. C'est le principe même d'une démocratie représentative.
D'autre part, lorsque vous dites que la gauche a abandonné le "peuple", je ne suis pas d'accord non plus. Certes, elle préférera miser sur l'immigration, non encore embourgeoisée et davantage réceptive aux sirènes de ses œuvres de bienfaisances, mais le credo de la gauche reste et demeure l'égalité, quitte à ce qu'elle soit liberticide, et son vecteur, c'est le nombre. Et pour faire nombre, il faut au contraire ménager le bon peuple en permanence, le prendre par la main et lui seriner que rien n'est jamais de sa faute.
Les conflits de classe que vous relevez sont le lot de l'époque moderne : nous sommes tous le bourgeois de l'un, le prolo d'un autre ; le prolo d'aujourd'hui sera le bourgeois de demain.
Tiens, voici un autre hymne à la francophobie qui va en faire bondir plus d'un (non, ce n'est pas un sketch des Inconnus) :

"Contenu supprimé".
Je ne réclame pas de préséance mais cette video pénible se trouve déjà dans le fil : " le cortex du rap" !!
Entendu, désolé, je ne savais pas.
Comment puis-je corriger ?
Ça n'a aucune importance !
Citation
mais le credo de la gauche reste et demeure l'égalité, quitte à ce qu'elle soit liberticide, et son vecteur, c'est le nombre

Ce n'est pas faux mais ne simplifions pas trop car cela voudrait dire que depuis 1977 les Dupont Lajoie dénoncés dans le film n'existent plus, entretemps laminés par l'agit-prop télévisée et dilués dans le grand chambardement démographique.

Parlons un peu de nombre.

S. R. a quand même fait plus de 47 % des votes en 2007. Quelles sont les classes sociales qui ont voté pour elle ?

Quelqu'un peut-il répondre à cette question ?

Depuis 30 ans les sans-papiers ont cent fois plus mobilisé les sociétés de vertus gauchistes que les innombrables fermetures d'usines qui ont lieu sur tout le territoire et qui ont mis à la rue des centaines de milliers d'ouvrières et d'ouvriers. .
Utilisateur anonyme
17 mars 2010, 13:30   Re : Dupont Lajoie: un hymne à la francophobie
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Citation
Rogemi
Parlons un peu de nombre.

S. R. a quand même fait plus de 47 % des votes en 2007. Quelles sont les classes sociales qui ont voté pour elle ?

Quelqu'un peut-il répondre à cette question ?

Nous sommes entrés dans un système individualiste et matérialiste au possible. La démocratie étant le régime du ressentiment, chacun regarde à présent la moindre promotion sociale du voisin comme une atteinte à ses droits propres. L'égalité, les gens s'y intéressent seulement vis-à-vis des gens plus haut qu'eux sur l'échelle sociale, jamais ils ne regardent en-dessous. Les seuls à le faire sont finalement les artistes bobos. Pourquoi ? Pas parce qu'ils valent mieux que les autres, certainement pas, mais parce qu'ils n'ont plus personne au-dessus.
Bref, dans la recherche du profit qui taraude toutes et tous, les frontières se brouillent, l'esprit bourgeois se diffuse, il n'y a plus ni vraie gauche, ni vraie droite, c'est le règne du "chacun-pour-soi" et c'est ce qui pousse Michéa et son mentor à rejeter droite et gauche dans le même camp, celui des Modernes.

Le pauvre d'hier n'avait ni l'électricité ni l'eau courante. Le pauvre d'aujourd'hui n'a pas de voiture et n'a qu'un poste de télé. Nous vivons à l'époque paradoxale où il est devenu plus difficile de ne pas avoir de télé du tout que d'avoir un écran plat. Jamais la société n'a été aussi égalitaire - je ne dis pas "égale", mais "égalitaire", dans sa dynamique - ce qui explique que la moindre inégalité est tout de suite montée en épingle par la gauche et qu'à entendre Besancenot et consorts, nous voilà revenus au temps de la monarchie.
Mais cher Gilgamesh, cet égalitarisme prôné par la gauche est une manoeuvre machiavélique pour assurer aux " héritiers " un pouvoir sans partage. Alors que l'école républicaine d'hier permettait aux enfants du peuple de s'en sortir par leur mérite et leurs efforts personnels, cette école " égalitariste " d'aujourd'hui, nivelle tout le monde par le bas. Dans ce système seuls les fils à papa, à coups de cours payés très cher ou de piston, sont désormais assurés de tenir le haut du pavé sans redouter de concurrence.
Vous pouvez, bien sûr, faire disparaître cette face d'abruti, cher Gilgamesh, en modifiant votre message.
Citation
Florentin
Vous pouvez, bien sûr, faire disparaître cette face d'abruti, cher Gilgamesh, en modifiant votre message.

C'est fait.
Citation
Cassandre
Mais cher Gilgamesh, cet égalitarisme prôné par la gauche est une manoeuvre machiavélique pour assurer aux " héritiers " un pouvoir sans partage. Alors que l'école républicaine d'hier permettait aux enfants du peuple de s'en sortir par leur mérite et leurs efforts personnels, cette école " égalitariste " d'aujourd'hui, nivelle tout le monde par le bas. Dans ce système seuls les fils à papa, à coups de cours payés très cher ou de piston, sont désormais assurés de tenir le haut du pavé sans redouter de concurrence.

Exactement, chère Cassandre.
Et vous prenez là le meilleur exemple qui soit : la faillite de l'école républicaine ou comment générer plus d'égalités en ayant l'obsession de l'égalité. Mais que l'égalité soit, portée à son excès, elle-même génératrice d'inégalités, voilà bien un paradoxe trop difficile à saisir par certains esprits de bons samaritains. C'est pour cette même raison, d'ailleurs, que je ne pense pas qu'il s'agisse, comme vous dites, d'une "manœuvre machiavélique", mais bien plutôt d'un aveuglement général par clientélisme électoral. Nos dirigeants prennent la démocratie au pied de la lettre, par où elle pèche et se délite elle-même. Qui veut faire l'ange, fait la bête.
Citation
Nos dirigeants prennent la démocratie au pied de la lettre, par où elle pèche et se délite elle-même. Qui veut faire l'ange, fait la bête.

Juste et les complotistes se gourrent la plupart du temps en croyant voir un marionnettiste à l'oeuvre dans la descente aux enfers actuelle.

Regardez les grands mouvements historiques du passé.
Les croisades voulurent conquérir la terre sainte et réaliser l'unité définitive du christianisme: elles provoquèrent la chute de Constantinople et détachèrent définitivement les nations occidentales de la prééminence unificatrice de la papauté.

La réforme engagea la lutte au nom de la liberté de la foi : elle finit par la plus rigoureuse dictature religieuse. Le principe du cujus regio ejus religio, la détermination autoritaire de la foi par le souverain, constitue l'idée fondamentale du traité de Westphalie qui termine cette éopque.

Un siècle plus tard, la bourgeoisie francaise entreprit de conquérir une souveraineté politique et économique qui. aprés 4 générations conduisit à Hitler et Staline.
Citation
Rogemi
Citation
Nos dirigeants prennent la démocratie au pied de la lettre, par où elle pèche et se délite elle-même. Qui veut faire l'ange, fait la bête.

Juste et les complotistes se gourrent la plupart du temps en croyant voir un marionnettiste à l'oeuvre dans la descente aux enfers actuelle.

Exactement.
Pas de complot, mais des responsabilités partagées, disséminées, et donc difficiles à admettre.
Le pire ennemi de la démocratie, c'est la démocratie elle-même. A partir du moment où elle se prend pour modèle, où elle se complet à contempler sa propre image dans le miroir, ses droits de l'homme et sa tolérance, la démocratie se saborde. C'est ce qui est en train de se produire sous nos yeux.
Cher Ganesh (vous permettez que je vous appelle par ce petit nom ?),

Le peuple n'a jamais eu le pouvoir parce qu'il est une entité trop complexe, fuyante, commode à invoquer mais impossible à définir. Cette entité demeure en fuite de pouvoir parce qu'elle ne parvient à accepter aucune des deux conditions, l'une ou l'autre, qui sont quintessentielles au pouvoir: celle de maître et celle d'esclave; le tout pouvoir de la relation maître-esclave, concevable il y a 150 ans, ne l'est plus. Tout ce que vous dites sur l'individualisme présumé qui règnerait dans les classes populaires est vrai mais partiellement seulement, c'est à dire que cette vérité partielle falsifie vos dires: la solidarité populaire existe, elle est celle de la cordée, très peu encadrée par les institutions qui s'en proclament (syndicats, assoces et autres). Les Resto du coeur par exemple: je suis atterré de voir à quel point chez ces "couches populaires qui n'existent plus", où "l'individualisme est la règle", cette institution qui ne fut jamais conçue pour en être une draine les dons et les dons de soi, comme assurance collective contre la faim, dans la société de l'écran plat et des vacances en Tunisie ou en République dominicaine, voire à Val d'Isère. Le peuple est paresseux à la révolte, au soulèvement collectif, et en ce sens, il n'existe plus: il est un grand invalide du pouvoir (renâclant à la soumission comme à la domination proclamée ou proclamable), voilà qui est indéniable, pourtant, l'individualisme ne l'a pas supplanté tout à fait: ce peuple qui n'existe pas, pour autant ne parvient à se dissoudre, à adhérer à la révolution idéologique qui voudrait (anti-racisme, TF1, téléréalité, prêt-à-penser, Licra/Halde) le dissoudre.
Je me souviens qu'autrefois j'allais, pour éviter les tentations du divertissement, réviser mes examens au monastère bénédictin d'En Calcat qui comptait plus d'une centaine de moines. Le père hôtelier, avec qui j'avais quelques conversations, me disait que la vie communautaire, "démocratique", était difficile, conflictuelle et qu'heureusement le père Abbé était là pour trancher. Le niveau intellectuel de ces religieux était impressionnant, agrégés, ingénieurs, etc. Par la suite j'ai toujours considéré la Démocratie comme un marché de dupes, au regard du niveau intellectuel des masses.


Merci, cher Gilgamesh, ça soulage !
Cher Francis,

Je pense que le peuple que vous avez à l'esprit est d'un autre âge. Le mythe de la cordée - ou de la chaîne chez Tocqueville - a fini par capoter sous les coups de boutoir de l'âge démocratique naissant. En 1848, à l'orée du vote universel, Guizot parlait d'une vague immense qui allait tout submerger si on ne la canalisait pas. Quelques mois plus tard, on a ouvert les vannes et les néo-citoyens ont mélangé la fin et les moyens en cours de route. La fin n'est plus l'accès à la maturité citoyenne, à la connaissance pour tous, mais à la jouissance, au confort universel et sans entraves. Le nombre n'a pas tenu ses promesses et les élites inconscientes peuvent être tenues pour complices.

Vous parlez des Restos du Coeur. Très bien. Mais il y a encore quelques années, jamais on aurait vu un sauvageon allait sciemment voler les Restos, comme ce fut le cas récemment !!! C'eût semblé délirant à tout le monde. Et non pour voler de la nourriture, ce qui n'est pas un crime en soi lorsque l'on crève de faim, mais des jouets ou du matériel informatique. Bien sûr, il y a encore des gens généreux, empathiques, soucieux de leur prochain, mais les droits de l'homme ont mis l'accent sur l'individu et ne peuvent gagner sur tous les fronts. Ils se veulent holistes, universels, mais sans être capables de promouvoir le moindre élément unificateur, autre que ce stupide appel du ventre, universellement partagé - même par les animaux - qu'aguichent constamment les revendicateurs de gauche (oui, j'adore la gauche...).

Tant que nous ne différencierons pas le citoyen du consommateur, tant que nous ferons l'économie d'un débat de fond sur la différence entre nature et culture, entre l'inné et l'acquisition, tant que nous serons hostiles à toute hiérarchie, nous serons voués à perte.
Citation

Cher Ganesh (vous permettez que je vous appelle par ce petit nom ?),

Moi, je ne permets pas, si vous permettez !
Ganesh pour Gilgamesh... Vous êtes tombé sur la tête ?
Citation
Bernard Lombart
Citation

Cher Ganesh (vous permettez que je vous appelle par ce petit nom ?),

Moi, je ne permets pas, si vous permettez !
Ganesh pour Gilgamesh... Vous êtes tombé sur la tête ?


C'est vrai que c'est un peu cavalier. Pas pour moi, mais pour l'illustre Gilgamesh...
Heureux de cette réaction de votre part, cher Bernard. Ma minuscule provocation n'aura pas été totalement inutile. Vous n'ignorez pas qu'en matière d'épopée, un nom peu en cacher un autre. Ainsi au Thibet, Gesar, sous l'épopée de qui se tapit César.
Citation
Francis Marche
Heureux de cette réaction de votre part, cher Bernard. Ma minuscule provocation n'aura pas été totalement inutile. Vous n'ignorez pas qu'en matière d'épopée, un nom peu en cacher un autre. Ainsi au Thibet, Gesar, sous l'épopée de qui se tapit César.

Entendu.
Mais alors il va falloir m'expliquer le lien entre Ganesh et Gilgamesh, il ne me saute pas aux yeux.
Je crois, à la rigueur, à la nécessité de " droits de l'homme " tempérés par le bon sens mais je ne crois pas du tout à la sincérité des " droits de l'hommistes " quand ils s'appellent, entre autres. Parisot, Dassault, Bébéar, Shneider (Louis), lesquels font de l'argent (sale) sur le dos des immigrés. Ils me font penser aux mafieux qui donnent le change en investissant dans les commerces de bondieuseries.
Citation
Cassandre
Je crois, à la rigueur, à la nécessité de " droits de l'homme " tempérés par le bon sens mais je ne crois pas du tout à la sincérité des " droits de l'hommistes " quand ils s'appellent, entre autres. Parisot, Dassault, Bébéar, Shneider (Louis), lesquels font de l'argent (sale) sur le dos des immigrés. Ils me font penser aux mafieux qui donnent le change en investissant dans les commerces de bondieuseries.


Le problème me semble être le suivant :
Dans la nature, il n'y a pas de "droits de l'homme" à proprement parler. Hormis bien sûr le droit à la liberté, et en particulier à la liberté de se nourrir et de se défendre, ce qui engendre la loi du plus fort. Ça, oui, c'est une règle universelle, mais chez les animaux. L'homme, lui, dispose de la culture pour niveler disparités, inégalités et injustices naturelles, que l'on appelle cela "droits de l'homme" ou autres. Mais le problème avec la culture, c'est qu'elle ne peut être universelle, je veux dire par là qu'à chaque région du monde correspond une vision de ce que l'homme est en droit d'amender dans l'inné naturel (pléonasme volontaire). Par conséquent, vouloir imposer ces "droits de l'homme" sur toute la planète est une bouffonnerie. Chinois et musulmans, en particulier, ne pourront jamais comprendre que les Occidentaux veuillent leur imposer un leur produit.

Le drame moderne est donc le suivant : soit on se fie à la nature, profondément inégalitaire, mais universelle, absolue, soit on se fie à la culture, qui, elle, est plus égalitaire, mais locale et relative. Les droits-de-l'hommistes, eux, veulent le beurre, l'argent du beurre et le cul de la laitière.
Oui le cul de la laitière !
Je ne sais pas si l'on peut ramener le débat sur les Droits de l'homme à un débat articulé sur celui de l'inné et de l'acquis, ou de la dichotomie culture/nature. Ce que vous appelez "le droit à la liberté" dépasse de très loin celui de se nourrir et de se défendre, en ce qui concerne les êtres humains. Enfin, il me semble. Ce débat philosophique un peu dix-huitiémiste pourrait nous mener loin, et vraisemblablement nulle part. Je retiendrai pour ma part que les animaux ne naissent pas nantis du droit imprescriptible de ne pas être mis en enclos, tandis que les hommes, ben... si.

Il existe des droits de l'homme fondamentaux : celui de ne pas être embastillé arbitrairement, de ne pas être torturé et de pouvoir dire ce que l'on pense des hommes ou du temps qu'il fait sans avoir la Licra sur le rable en sont trois exemples. Et puis il y a des droits de l'homme qui n'en sont pas: celui d'être nourri et logé par d'autres hommes quand on a faim et que l'on est à la rue; d'être parent quand la nature s'y refuse; d'avoir des rapports sexuels coûte que coûte quand personne ne veut de vous en sont trois autres qui me viennent sous la plume en cet instant. Les droits de l'homme authentiques existent à travers les cultures, ce me semble une évidence: aucun Chinois ne souhaite ni ne mérite d'être jeté en prison pour rien ou torturé plus que ne le souhaiterait ou ne le mériterait un Français que l'on puisse imputer sa différence sur ce point au fait qu'il soit Chinois. La tromperie du droit-de-l'hommisme est de donner la préséance dans les revendications sociales égalitariste à des "droits" qui n'en sont pas, qui sont en fait des passe-droits (des prétentions qui se font passer pour des droits).
Citation
Francis Marche
Je retiendrai pour ma part que les animaux ne naissent pas nantis du droit imprescriptible de ne pas être mis en enclos, tandis que les hommes, ben... si.....

Et je pense pour ma part que la "nature" se contrefout ne serait-ce que du mot "droit". Dans la nature, le mot droit s'applique au plus fort, à l'animal comme à l'homme. Qu'un homme démolisse un autre en pleine rue pour simple délit de sale gueule, la nature l'accepte pleinement. Ce qui rend ce geste insupportable, "injuste", c'est que l'homme n'est pas n'importe quel animal : c'est un animal politique. Partant, il sait qu'il est fait pour vivre en communauté, ce qui implique une interdépendance et une empathie spécifique. L'animal ressent aussi une certaine empathie vis-à-vis de ses congénères, mais lui n'en est pas conscient.

En tant qu'animal politique, l'homme devient en mesure, et en droit, d'amender la nature en vue de concourir au bien. Qu'est ce "bien" ? Cette fin ultime et universelle ? Le juste. Et pour se faire, il dispose de la culture. Chaque civilisation possède la sienne propre. Ce que l'on peut considérer comme commun, c'est la quête du juste, quels qu'en soient les moyens. La fin est commune et absolue, les moyens sont variés donc relatifs, que l'on considère les Chinois, les Malgaches, l'Égypte antique, les peuples scandinaves ou... les Iroquois.

Mais pour moi, les droits de l'homme ne peuvent prétendre à l'universalité. La grosse escroquerie s'est effectuée en deux temps, ce me semble, au cours des cinq derniers siècles (en gros). On a d'abord, et peu à peu, considéré que tout n'était que culture, que rien n'était de l'ordre de l'inné, car l'inné, c'est déjà le déterminisme de trop, insupportable aux esprits chastes, car éminemment discriminant. Puis on en est venu à faire de l'acquis un universel en le rabattant sur la nature, pour englober tout le monde dans le même sac. Aujourd'hui, à cause de cela, on en arrive aux délires de l'Éducation nationale qui considère, non seulement que chaque élève est l'égal du professeur car il est censé posséder spontanément la culture (acquise, donc) dispensée à l'école, mais que tous les élèves possèdent en partage et à égalité ce savoir spontané.

Voilà le fond de ma pensée et la raison pour laquelle je mets à la fois droits de l'homme et inné/acquis sur le tapis.
Oui, c'est vrai ça ! On pense à un éventuel manque de respect à Gilgamesh le Grand, à Gilgamesh le Petit, mais pas à ce pauvre Ganesh, si gentil et si rond, le dieu du bonheur, et le dieu des intellectuels, puisqu'il préside aux "ganas", qui ne sont autre que les catégories... (Évidemment, si vous vous fichez vos bidons dans la mauvaise catégorie, au revoir la chance, hein...)
Cher Bernard,

Les dernières consignes du Quartier général étant d'éviter que les fils ne partent en quenouille, si je puis dire en jouant sur les rimes, ou du moins en épis (avec leurs dangereux ergos hallucinogènes), j'en resterai là de Ganesh et laisse la voie libre à notre ami Gilgamesh et sa remise en cause des fondements de la civilisation.
Citation
Francis Marche
Cher Bernard,

Les dernières consignes du Quartier général étant d'éviter que les fils ne partent en quenouille, si je puis dire en jouant sur les rimes, ou du moins en épis (avec leurs dangereux ergos hallucinogènes), j'en resterai là de Ganesh et laisse la voie libre à notre ami Gilgamesh et sa remise en cause des fondements de la civilisation.

... Non. Dites plutôt et sa tentative de retrouver les fondements de notre civilisation. Merci.
Citation

... et sa tentative de retrouver les fondements de notre civilisation.

Ce Gilga-là m'est assez sympathique. Vous lisez Heidegger ? Les présocratiques ? Les écrits gnostiques ?
Tout de même, la culture est fondée par la nature humaine.
Ah oui ! Zut ! Les fils en quenouille !... Désolé.
Citation
Iphark
Tout de même, la culture est fondée par la nature humaine.

Oui, comme l'eau mouille.
Citation
Bernard Lombart
Citation

... et sa tentative de retrouver les fondements de notre civilisation.

Ce Gilga-là m'est assez sympathique. Vous lisez Heidegger ? Les présocratiques ? Les écrits gnostiques ?

J'essaie de tout lire. Mais en ce moment, l'auteur qui m'éblouit, c'est Leo Strauss.
Oui, comme l'eau mouille.[/quote]

Oui, je crois aussi.


On ne s'est pas compris : la culture vient de la nature (humaine), et par là le droit, et par là certains droits...
Il n'est pas très malin d'être bêtement juspositiviste...

Notez que "La tromperie du droit-de-l'hommisme est de donner la préséance dans les revendications sociales égalitariste à des "droits" qui n'en sont pas, qui sont en fait des passe-droits (des prétentions qui se font passer pour des droits)", c'est pas mal.
Citation
Iphark
On ne s'est pas compris : la culture vient de la nature (humaine), et par là le droit, et par là certains droits...
Il n'est pas très malin d'être bêtement juspositiviste...

Notez que "La tromperie du droit-de-l'hommisme est de donner la préséance dans les revendications sociales égalitariste à des "droits" qui n'en sont pas, qui sont en fait des passe-droits (des prétentions qui se font passer pour des droits)", c'est pas mal.

Oui, c'est pas mal non plus, c'est vrai, je n'avais pas relevé.

Si, je vous rassure, je pense que l'on s'est compris. Je raisonne simplement en terme d'absolu/relatif, ou d'universel/particulier. Pour moi, les fameux "droits de l'homme" sont de l'ordre du particulier (ou du droit positif si vous préférez), ils ne peuvent prétendre à une vocation universelle. Seul le droit naturel peut y prétendre, mais personne ne sait exactement quoi mettre dans le "droit naturel", puisque le témoignage des premiers hommes à ce sujet, à l'orée de l'état de nature, n'aura pu parvenir jusqu'à nous.
Prétendre que les droits de l'homme sont universels me paraît tout aussi prédateur que de prétendre qu'Allah est grand et qu'il règne sur la Terre entière.
Je comprends mieux ce que vous dites ; j'avais vite lu, ce qui n'est pas courtois lorsqu'on intervient.

Pour finir, je crois comme Francis Marche, si je l'ai bien lu, qu'il y a droits de l'homme et droits de l'homme...
Je crois qu'il existe certaines injustices que les hommes parviennent mal à ressentir autrement, sauf à y laisser une partie de leur santé mentale.

Cela me fait penser à ceci, de Condorcet : "On a dit encore : le colon, intéressé à conserver ses Nègres, les traitera bien, comme les Européens traitent bien leurs chevaux. [...]
D'ailleurs, un homme n'est pas un cheval [...]. Les animaux n'ont que des besoins, mais l'homme est misérable par des privations. Le cheval ne souffre que de la douleur qu'il ressent ; l'homme est révolté de l'injustice de celui qui le frappe." Etc.

Bon, rien de nouveau.
En fait, l'homme est conscient de son être, ce qui est à la fois un bienfait et une malédiction. Un bienfait parce qu'il progresse dans les sciences de l'esprit et qu'il est capable de faire profiter son entourage de sa réflexion ; une malédiction car, ayant conscience de sa mort, il sait aussi pertinemment qu'elle est inéluctable, ce qui le renvoie à sa condition de nabot.

Une fois qu'on accepte ça, le paradoxe du génie mortel, on peut vivre heureux. Mais l'homme s'y refuse obstinément et le mythe du progrès, la mort de Dieu, etc., ne l'y aident aucunement.
Oui, comme l'eau mouille.

Les canards s'inscrivent en faux contre cette assertion.
C'est curieux cela me rappelle une conversation que j'ai eue récemment avec une musulmane "modérée" (non voilée, peu pratiquante, "tolérante" et sans haine). Je me suis surpris à devoir lui dire que ce qui différenciait la bête de l'homme, c'était, à vrai dire, le sens du projet et le sentiment de l'avenir. Que de l'avenir l'on puisse faire un "progrès", n'a au fond qu'une importance secondaire. Ce qui fait souffrir les hommes: le viol de l'avenir, sous toutes ses formes, que cet avenir soit celui de l'individu (en rébellion contre la contrainte, l'enfermement non consenti, toute forme inintelligible de la contrainte) ou qu'il soit ressenti comme celui d'un groupe ou d'une collectivité. Vous ne priverez aucune bête d'aucun avenir, sauf à lui supprimer la vie.
"On a dit encore : le colon, intéressé à conserver ses Nègres, les traitera bien, comme les Européens traitent bien leurs chevaux. [...]
D'ailleurs, un homme n'est pas un cheval [...]. Les animaux n'ont que des besoins, mais l'homme est misérable par des privations. Le cheval ne souffre que de la douleur qu'il ressent ; l'homme est révolté de l'injustice de celui qui le frappe. Les animaux ne son malheureux que pour le moment présent ; le malheur de l'homme dans un instant embrasse toute sa vie."
Pour l'écrivain Renaud Camus, c'est la préciosité du temps, dit autrement l'avenir du temps humain, limité, et que le temps inhumain lui-même dévore, dont la claire conscience ferait toute la culture. Et voilà notre ami Ganache qui doit reconnaître que l'humanité et sa culture, qui se distinguent de mon chien et de mes poux, sont accrochées, suspendues, libérées par le faux-temps de la contrainte bestiale et infantile du présent, du moment, de l'instant, de la nuit qui entourent et bloquent l'écoulement des heures de l'horloge, indifférentes à l'espèce qui, contre le temps astronomique, persiste à penser l'avenir ou à le désirer.

L'universalité de la culture humaine existe et l'espèce sapiens sapiens fait une unité qui partout se gratte aux mêmes endroits, et du reste la science et la technique des hommes, cette technosphère qui ne sert à rien sinon à avilir l'humanité dans son ensemble (précisément), sert au moins à en attester: le Chinois expédie des satellites, des fusées, il copie, il singe, tout comme un homme, il est nous-mêmes jusqu'au tréfonds et tous nos droits sont les siens. Venu dans notre science, qu'il soit Chinois, Japonais ou Coréen, cette science est la sienne, et il peut, le bougre, parce qu'il voit en nous un singe tout semblable à lui, un singe qu'il a percé, à l'occasion, nous en remontrer dans le coeur et à la pointe de nos inventions. Nature et culture sont authentiquement unies dans cette irréductible espèce et il faut défendre, soutenir tous ceux qui se battent, à Singapour, à Pékin, à Séoul ou à Tokyo, pour les droits de l'homme, les droits de l'espèce contre le Temps, contre la bête du temps indifférent.

Si la culture humaine n'existe pas, l'espèce, le corps uni des hommes, continuent d'exister; cette espèce fait peuple contre la bête et la minéralité, elle possède en apanage l'avenir qu'elle oppose à la vulgarité de l'heure et du temps perdu.
» Et je pense pour ma part que la "nature" se contrefout ne serait-ce que du mot "droit"

Les "droits de l'homme" sont des sortes d'énoncés performatifs, et leur prétention (car il s'agit bien de prétention) à l'universel est d'ordre normatif, et non factuel, comme le serait une correspondance à un quelconque état de fait. Étant de ce fait indémontrables, rien ne les empêche précisément de prétendre à l'universel, car ils procèdent d'un choix (et l'on peut choisir et vouloir ce que l'on veut, en matière de valeur), et non d'un jugement de connaissance.
Au reste, chercher quelque droit que ce soit dans la nature, cela me semble être un contresens semblable à celui qui consiste à vouloir que les couleurs fussent dans les choses mêmes, indépendamment des mécanismes perceptuels particuliers qui les produisent.

Mais certains, non contents de ne les y point trouver, voudraient en plus nous persuader que parce qu''elles en sont absentes comme telles, elles n'existent de fait tout simplement pas.
C'est une pente dangereuse, car ce sophisme ferait accroire l'idée que ce sont les individus atteints d'achromatopsie qui ont raison.
Citation
Alain Eytan
Mais certains, non contents de ne les y point trouver, voudraient en plus nous persuader que parce qu''elles en sont absentes comme telles, elles n'existent de fait tout simplement pas.
C'est une pente dangereuse, car ce sophisme ferait accroire l'idée que ce sont les individus atteints d'achromatopsie qui ont raison.


Voici ce que je reproche, en substance, aux fameux "droits de l'homme" qui partent, je l'admets volontiers, de bons sentiments (mais dont on prétend l'Enfer lui-même pavé...) :
Nul excès n’est raisonnable, pas même en matière de droit. En effet, le droit obsessionnel, tel qu’on le rencontre en France plus qu’ailleurs, porte chacun à ne s’intéresser en définitive qu’à sa petite personne. Or, si chacun agit ainsi, la vie en société n’a plus lieu d’être. D’ailleurs, le fléchissement des faveurs accordées à la nuptialité n’est pas en soi totalement distinct du refus croissant de renoncer aux libertés individuelles pour se soumettre aux obligations conjugales. La suprématie du devoir vient de ce qu’il enjoint chaque citoyen à s’intéresser en premier lieu aux droits de son prochain, sans pour autant perdre de vue les siens en propre. Réciproquement, ses droits personnels lui sont alors garantis par un pacte mutualiste, institué comme principe vital. Mathématiquement, sur le plan social, un catalogue de devoirs respectés vaut donc doublement une kyrielle de droits claironnés. Hélas, on a tellement sollicité le nombrilisme social qu’un renversement de valeurs semble à présent loin de toute portée humaine. Il appartient à chacun de faire mentir ce dicton populaire que l’on attribue le plus souvent au regretté Coluche : La dictature, c’est « ferme ta gueule », la démocratie, c’est « cause toujours ».
Le devoir engendre le droit, non l'inverse. Qui de ceux qui brandissent constamment leurs droits inaliénables en ont réellement pris conscience ? Qui de ceux qui en abusent se sont tout autant penchés sur l’existence de la Déclaration des Devoirs de 1795, en préambule à la Constitution de l’An III, déclaration passée très vite par profits et pertes ?
Je ne me souviens pas avoir lu quoique ce soit que je puisse comprendre et qui m'éclaire aussi bien sur les fameux «droits de l'homme» et les non moins fameuses «valeurs». Merci, cher Alain.
Les devoirs garantiraient l'intégrité des droits. Il semble bien que ce qui est perdu dans ce domaine ne se rattrape plus, tel paraît être le cas du sens du devoir. Le dernier garde-fou, règle de sagesse, serait peut-être de s'empêcher d'appeler "droit" toute prétention qui asservit l'autre à ses besoins. Le "droit au logement" que l'on a dit "opposable", est une de ces prétentions, qui impose un devoir à autrui sans contrepartie. De manière générale, les "droits" sociaux, financés par des prélèvements obligatoires, ne sont pas caractérisables comme droits humains dans la seule mesure où ils opèrent cet asservissement. Cela ne veut pas dire que ces prétentions ne soient pas justifiables au plan politique ou "social"; pour autant, il est abusif de les désigner comme des droits, et il est pure folie de vouloir les promouvoir en "droits de l'homme".
En matière d'achromatopsie, je vous assure, tête-dieu, prenant le mot au pied de la lettre, que nos Droits de l'Homme n'en sont pas, loin de là, le moindre des vecteurs :
Niant le noir, niant le blanc,
Ne voyant qu'en un gris la panacée du temps,
Ils nous somment de nier toute réalité.
Le devoir est synallagmatique, pas le droit.
C'est d'ailleurs sur ce principe que fonctionne notre système de santé mutualiste (hors CMU-C et AME, qui en sont des perversions) : nous sommes, en théorie, toutes et tous assurés (c'est le cas de le dire) d'avoir le DROIT de se voir "offrir" moult frais médicaux, mais en ayant, au préalable, accepté les DEVOIRS y afférents, en tête desquels, la cotisation.
Si le système a fini par se corrompre, nous plongeant dans la banqueroute, c'est avant tout parce qu'arc-boutés sur ce droit imprescriptible, bon nombre de bénéficiaires en ont oublié leur devoir le plus élémentaire, celui de garder à l'esprit en toutes circonstances que le pot commun constitue en soi une partie de leurs biens propres. Qui n'a jamais entendu dire : "Tu t'en fous, c'est remboursé !"
Merci, cher Éric. C'est un plaisir de vous relire ici...
19 mars 2010, 19:56   Sophisme naturaliste ?
» Ils nous somment de nier toute réalité.

Cher Gillgamesh, je bute toujours contre cet écueil : comment ce qui est de l'ordre du vouloir-être peut-il nier quoi que ce soit qui est de l'ordre de l'être ?
Citation
Alain Eytan
Cher Gillgamesh, je bute toujours contre cet écueil : comment ce qui est de l'ordre du vouloir-être peut-il nier quoi que ce soit qui est de l'ordre de l'être ?


Justement parce que le "vouloir être" a une forte propension à tenter de recouvrir entièrement l'"être", de s'en approprier la légitimité. J'entends par là que les tenants de droits de l'homme imprescriptibles, universels et, comme vous le dites, performatifs (très bien trouvé au passage, merci pour cet apport) mettent tout en œuvre pour faire d'un simple choix de société un principe immuable et absolu qui, pourtant, sera peut-être (sûrement...) périmé d'ici un siècle (tout au plus).
19 mars 2010, 21:47   PMU, pastis et aspirine
Tiens, j'observe grâce à vous que les sigles PMU et CMU se ressemblent comme deux frères et que ça n'est peut-être pas complètement un hasard.

Pour en revenir aux "droits de l'homme", quelqu'un tient un blog, qui s'intitule De Chine, [blog.lefigaro.fr]
où est débattue la sentence de 11 années d'emprisonnement qui a frappé le dissident Liu Xiaobo il y a quelques semaines. Lisez les arguments du Chinois de service, agent de Pékin pour le coup: En disant que Hong-Kong devait sa prospérité, sa réussite, etc. à 100 ans de colonisation, Liu savait qu'il franchissait la ligne jaune (vous savez, le fameux dérapage du terrorisme idéologique qui sévit aujourd'hui en France contre un Zemmour) et que donc il méritait ce qui lui arrive; que s'il dit cela de son pays, c'est parce qu'il est stipendié par les Américains qui détestent la Chine et son essor actuel, etc.. Bref, Liu, qui est Chinois, ne peut pas vouloir le bien de son pays s'il avance des idées qui vont à l'encontre de la doxa maoïste qui règne encore dans ce pays et que le pouvoir promulgue tous les matins par ses médias. Voilà un droit de l'homme, celui de vouloir le bien public par des mots, des énoncés et des idées qui concurrencent le discours dominant, voire s'y opposent frontalement. Liu va se taper 11 années de cabanon nullement parce qu'il a "franchi la ligne jaune", "dérapé", "provoqué", "agi pour le compte d'une puissance étrangère", etc., non, il sera privé de liberté et devra subir des brimades de la part de ses geôliers et co-détenus pendant de longues années parce que ses vues divergent de l'horizon dominant de la pensée du moment que le pouvoir en place a déclaré sien. Liu n'est guère plus qu'un Zemmour chinois; et le voilà très gravement sanctionné. Cette sanction est inhumaine, et à mon sens elle est une atteinte aux véritables droits de l'homme et doit être dénoncée. L'ingérence en pareil cas, en l'espèce d'un soutien international à Liu, est pleinement justifiée.
"Liu savait qu'il franchissait la ligne jaune..."

C'est l'incipit du Petit Livre Rouge ou le prélude de L'Amant ?
C'est ce que dit ce Chinois dans ce blog ("il faut savoir jusqu'où ne pas aller trop loin" et ce genre de choses). Vous savez, pour le récent communiqué du P.I. qui commente la décision de l'Elysée de faire revenir cette Marocaine en France, Renaud Camus et Didier Bourjon seraient en prison s'ils étaient Chinois en Chine Populaire, pour de longues années, et réveillés tous les matins à coup de tuyau de plomb sur l'échine (nue, à peine protégée par une couverture sale), en se voyant refuser des soins s'ils tombaient malade, etc.

Que ceux qui déclarent ici ne pas reconnaître l'universalité des Droits de l'homme et décrient le droit d'ingérence y songent un peu avant de pousser plus avant leurs raisonnements. La solidarité internationale envers les victimes d'incarcération arbitraires, condamnées pour délits d'opinion, est un authentique devoir.
Citation
Francis Marche
Que ceux qui déclarent ici ne pas reconnaître l'universalité des Droits de l'homme et décrient le droit d'ingérence y songent un peu avant de pousser plus avant leurs raisonnements. La solidarité internationale envers les victimes d'incarcération arbitraires, condamnées pour délits d'opinion, est un authentique devoir.

Le droit d'ingérence ? Eh bien voilà déjà un point sur lequel vous êtes en total désaccord avec Monsieur Zemmour.

Personnellement, je pense que le "droit d'ingérence", que ce soit au nom des droits de l'homme ou du slip de ma belle-sœur, participe du syndrome du Manifeste de Brunswick. Il n'est jamais bon de se mêler directement du destin d'un pays qui nous est culturellement différent, à moins bien que nos intérêts propres soient en danger (ce qui était le cas à l'époque pour l'Autriche vis-à-vis de la France, mais qui n'est pas le cas actuellement pour la France vis-à-vis de la Chine). On ne rend pas service à un pays, pas plus qu'à une collectivité ou à un individu, en l'assistant en permanence. Les seuls à pouvoir, et à devoir changer les choses en Chine, ce sont les Chinois eux-mêmes. On a suffisamment daubé sur la France "colonialiste" quand elle s'est attachée à exporter ses "Lumières" à coup de schlague aux quatre coins du Monde.
Maintenant, chacun pour sa g..., et Dieu pour tous.
20 mars 2010, 03:10   Re : Sophisme naturaliste ?
Citation
Gilgamesh
Citation
Alain Eytan
Cher Gillgamesh, je bute toujours contre cet écueil : comment ce qui est de l'ordre du vouloir-être peut-il nier quoi que ce soit qui est de l'ordre de l'être ?


Justement parce que le "vouloir être" a une forte propension à tenter de recouvrir entièrement l'"être", de s'en approprier la légitimité. J'entends par là que les tenants de droits de l'homme imprescriptibles, universels et, comme vous le dites, performatifs (très bien trouvé au passage, merci pour cet apport) mettent tout en œuvre pour faire d'un simple choix de société un principe immuable et absolu qui, pourtant, sera peut-être (sûrement...) périmé d'ici un siècle (tout au plus).

Il ne le peut pas : l'être, comme espace des faits, est horizontal, alors que ce qui procède d'un choix de valeur, comme l'éthique (dont se réclament ces "droits de l'homme"), est vertical, fiché en terre mais pointant vers le ciel, de quelque façon que vous entendiez ce dernier terme ; vous semblez vouloir à tout prix rendre compte de cette verticalité en tentant de l'aplatir selon les reliefs du terrain, mais cela ne marche pas, ils sont irréductibles.
Je vais tenter de rendre plus sensible ce que je veux dire en vous citant cet extrait de la Conférence sur l'éthique, de wittgenstein, que je trouve d'une simplicité déconcertante et qui illustre bien la difficulté à laquelle on est confronté :

« L'éthique, si elle existe, est surnaturelle, alors que nos mots ne veulent exprimer que des faits ; comme une tasse de thé qui ne contiendra jamais d'eau que la valeur d'une tasse, quand bien même j'y verserais un litre d'eau. J'ai dit que dans la mesure où il s'agit de faits et de propositions, il y a seulement valeur relative, justesse, bien relatifs.
Avant de poursuivre, permettez-moi de l'illustrer par un exemple assez parlant. La route correcte est celle qui conduit à un but que l'on a prédéterminé de façon arbitraire et il est tout à fait clair pour chacun de nous qu'il n'y a pas de sens à parler d'une route correcte en dehors d'un tel but prédéterminé.
Voyons maintenant ce que nous pourrions bien entendre par l'expression "la route absolument correcte"... »

Eh bien tout choix axiologique, comme la promotion et la défense des droits de l'homme, ne fait référence à rien d'autre qu'à cette route absolument correcte, vous n'y pouvez rien. C'est une constante, une particularité remarquable et une faculté de la nature humaine, et le parti-pris de n'en tenir aucun compte vous établira d'emblée dans le monde des achromatopsiques, dont je ne sais s'il est vraiment souhaitable.
Cela étant dit, les droit imprescriptibles de se faire piercer les lèvres, ou d'évoluer caparaçonné de noir dans les rues, je vous les laisse volontiers. Mais ça n'a rien à voir, et je suis entièrement d'accord avec Francis sur ce point.
Citation
Alain Eytan
Il ne le peut pas : l'être, comme espace des faits, est horizontal, alors que ce qui procède d'un choix de valeur, comme l'éthique (dont se réclament ces "droits de l'homme"), est vertical, fiché en terre mais pointant vers le ciel, de quelque façon que vous entendiez ce dernier terme ; vous semblez vouloir à tout prix rendre compte de cette verticalité en tentant de l'aplatir selon les reliefs du terrain, mais cela ne marche pas, ils sont irréductibles...........tout choix axiologique, comme la promotion et la défense des droits de l'homme, ne fait référence à rien d'autre qu'à cette route absolument correcte, vous n'y pouvez rien. C'est une constante, une particularité remarquable et une faculté de la nature humaine, et le parti-pris de n'en tenir aucun compte vous établira d'emblée dans le monde des achromatopsiques, dont je ne sais s'il est vraiment souhaitable.

Mais, cher Alain, pour un citoyen tel que vous, qui parvenez à saisir la distinction cardinale entre le factuel et le symbolique, combien d'autres prennent les termes au pied de la lettre ? Les droits de l'homme - s'ils existent (mais nous sommes d'accord, il me semble, pour dire qu'il ne s'agit que de choix contractuels) - ne peuvent être nombreux, car communs à tout un chacun. Or, en avalisant la précession du droit par rapport au devoir (comme dit plus haut), on ouvre la boîte de Pandore de laquelle s'échapperont toutes nos vertus, ne laissant au fond pour seuls recours que nominalisme et ressentiment.
Strauss (puisque chacun y va de sa petite référence) explique très bien qu'en ayant fait précéder la société par l'individu, des penseurs tels que Marsile de Padoue, Guillaume d'Occam, puis Hobbes ou Locke - au rebours des principes aristotéliciens - ont, peu à peu, opéré une révolution axiologique. Le devoir de l'individu à l'égard de la société s'est retrouvé relégué, faisant de cet individu un perpétuel ayant droit.

En outre, votre vision des droits de l'homme - qui me convient assez, mais impossible à assumer par le vulgum pecus - est clairement spirituelle, c'est évident. On a affaire là, et c'est heureux que vous le reconnaissiez, à une nouvelle religion, synthèse du christianisme à vocation universelle et des Lumières individualistes. La religion des droits de l'homme, et c'est un paradoxe aporétique, combine donc à la fois une réponse au besoin de transcendance (religion de substitution, avec sa sotériologie, sa casuistique, etc.), c'est-à-dire votre verticalité, et la génération d'un nominalisme prédateur, infiniment matérialiste et ne tolérant aucune hiérarchie, donc éminemment horizontal. En somme, pour parfaire l'analogie monothéiste, c'est comme si l'homélie des prêtres consistait à démontrer que Dieu n'existe pas !!!
Remarque frappante de justesse, cher Francis !
20 mars 2010, 20:25   Re : Sophisme naturaliste ?
Oui, cher Gilgamesh, mais l'on ne va pas tout de même bazarder la morale, dont le mode d'expression est universalisant par essence, parce que certains caniches passent leur temps à s'enduire le poil de moraline ?
Peut-être voulais-je seulement attirer l'attention sur le fait que les conséquences d'un escamotage total de tout ce qui fait référence à des droits humains essentiels risquent d'être bien pire que leur mauvais usage, lequel ne peut être confondu avec la chose même.
Soit dit en passant, lorsque le respect du droit de l'autre devient un devoir, cela donne Kant. Je vous accorde volontiers qu'il ne fait probablement pas partie des best-sellers de ce que vous appelez le "vulgum pecus", mais enfin, on ne quand même pas tomber dans la perverse aliénation qui consisterait à ne juger des choses que selon ce qu'il en pensera et fera.
Un exemple parmi tant d'autres : l'information.
En préservant le droit à l'information, on s'assure que l'État mettra tout en œuvre pour que les citoyens puissent y avoir accès, mais on n'est en revanche nullement assuré que ces citoyens y auront recours. Ceci sera laissé à leur discrétion, or, ça représente une portion non négligeable de leur "boulot".
En imposant, à l'inverse, un devoir d'information, on commence par s'assurer que chaque citoyen prend la peine de s'informer, ce qui implique, ipso facto, que l'État devra mettre tout œuvre pour y satisfaire.

Le devoir génère du droit. La réciproque est fausse.
CQFD ?
Certains droits fondamentaux sont "passifs", c'est à dire qu'ils imposent aux vis-à-vis un devoir-de-ne-pas. Aucun droit ou devoir de nature synallagmatique n'est sous-jacent à leur primauté. Les Etats ont le devoir de ne pas emprisonner, ni d'inquiéter des individus pour l'expression de leurs idées, par exemple, ou de ne pas empêcher quiconque d'accéder à telle ou telle jouissance (approcher le rivage marin, épouser quiconque, etc.). Mon droit de ne pas être emprisonné ou inquiété pour avoir dit ceci ou cela du pouvoir politique ou de la marche de la société est sans contrepartie aucune, il ne répond à aucun devoir positif de personne. Et c'est ce caractère de "miroir du négatif" qui le rend fondamental et imprescriptible.
Citation
Francis Marche
.....Mon droit de ne pas être emprisonné ou inquiété pour avoir dit ceci ou cela du pouvoir politique ou de la marche de la société est sans contrepartie aucune, il ne répond à aucun devoir positif de personne.

C'est parce que nous n'avons pas la même finalité "citoyenne" à l'esprit. Votre exemple laisse présager que le but assigné à la cité est le bonheur dans la liberté de chacun (mais peut-être me trompé-je). Je pense pour ma part que la fin de la cité est la vertu, vecteur du juste, et qu'il y a donc un devoir préalable en chacun de nous à œuvrer dans le sens du juste par le biais de la vertu, donc du devoir. Partant, en m'adossant sur votre exemple, je dirais que c'est parce que vous avez le devoir, en tant que citoyen actif et consciencieux, de prendre part au débat, d'exercer votre liberté de penser et d'expression qu'en contrepartie, l'État a le devoir de vous assurer cette liberté, et même de mettre à votre disposition tous les moyens de vous enrichir intellectuellement et de parfaire vos points de vue en les confrontant à d'autres, ce qui va bien au-delà de la satisfaction d'un petit caprice personnel.
En amont, il faut donc que soit commune à chacun la fin assignée à la politique de la cité (pour parler comme les Grecs).
Je pense pour ma part que la fin de la cité est la vertu, vecteur du juste, et qu'il y a donc un devoir préalable en chacun de nous à œuvrer dans le sens du juste par le biais de la vertu, donc du devoir.

Ainsi vous êtes partisan du faire du droit de vote un devoir absolu et contraint ?
Voyez-vous bien que le droit de vote n'existe pas s'il ne s'accompagne pas de son négatif: le droit de ne pas voter. Une société sans négativité des droits et devoirs qui sont énoncés positivement dans les textes est une société sans jeu, sans vide, pleine comme un oeuf de chassés-croisés de devoirs (entre les citoyens, et entre les citoyens et l'Etat) qui font de ces liens des ligatures. Une société traversée d'infaillibles échanges bijectifs de devoirs positifs, sans jeu ni reste aucun, constitue une utopie totalitaire de plus.
Citation
Francis Marche
Voyez-vous bien que le droit de vote n'existe pas s'il ne s'accompagne pas de son négatif: le droit de ne pas voter. Une société sans négativité des droits et devoirs qui sont énoncés positivement dans les textes est une société sans jeu, sans vide, pleine comme un oeuf de chassés-croisés de devoirs (entre les citoyens, et entre les citoyens et l'Etat) qui font de ces liens des ligatures. Une société traversée d'infaillibles échanges bijectifs de devoirs positifs, sans jeu ni reste aucun, constitue une utopie totalitaire de plus.

Je ne suis pas sûr de bien tout comprendre mais je crois percevoir que Francis nous propose là une acception de la liberté et de la responsabilité autrement plus vivante, gaie et roborative.
21 mars 2010, 13:08   Usage d'un droit
De mon point de vue, et pour faire écho à Francis : un droit n'en est un que si on a la possibilité de ne pas l'exercer.

Nous avons des droits et des devoirs, mais il n'y a aucune raison qu'ils coïncident exactement, point par point.
Merci de votre appui cher Eric. Au passage, ce devoir-de-ne-pas dans lequel se reflètent certaines libertés et certains droits fondamentaux n'est pas nouveau -- Edmund Burke le définissait comme salutary neglect (repris en Amérique sous le terme benign neglect). Un droit de l'homme que je crois absolu et fondamental: celui d'être négligé, celui qui descend jusqu'à s'exprimer dans le refus du clochard d'aller coucher dans un refuge pour SDF: notre devoir de le secourir s'oppose à son droit à être ignoré, à cracher dans la soupe populaire et à ne pas exister pour nous. Le clochard a le droit imprescriptible de ne nous devoir jamais rien dès lors qu'il lui plaît de loger dans le jeu de la société, en dehors de son maillage de devoirs. Le devoir négatif de l'Etat ainsi, se reflète dans le bienheureux droit négatif du clochard, et la liberté, en son principe, est sauve.
J'ajouterai que la perversité des gens que nous dénonçons va jusqu'à nous interdire d'aimer puisque détester quelque chose ou quelqu'un n'est plus possible.
Réponse collégiale :

Citation
Francis Marche
Ainsi vous êtes partisan du faire du droit de vote un devoir absolu et contraint ?
Voyez-vous bien que le droit de vote n'existe pas s'il ne s'accompagne pas de son négatif: le droit de ne pas voter. Une société sans négativité des droits et devoirs qui sont énoncés positivement dans les textes est une société sans jeu

Citation
Eric Veron
Je ne suis pas sûr de bien tout comprendre mais je crois percevoir que Francis nous propose là une acception de la liberté et de la responsabilité autrement plus vivante, gaie et roborative.

...
Ce n'est pas moi qui irais nier l'absolue nécessité des responsabilités individuelles dans le jeu électoral. Sans responsabilités, pas de libertés, et sans libertés, pas de politique. La responsabilité est même au fondement de la participation potentielle de chacun au pouvoir.

Seulement je conçois la démocratie comme ordinale, non cardinale. Je pense qu'elle doit recouvrer ses vraies valeurs, celles des Grecs qui concevaient notamment la citoyenneté comme devant être acquise (et non innée comme c'est le cas sous nos latitudes), pouvant être perdue et pouvant se reconquérir. Ce qui implique de la part de chaque être souhaitant accéder à la citoyenneté un effort permanent de remise en question. La liberté de chacun consistant alors à choisir délibérément s'il veut ou non se donner les moyens d'intervenir en politique.

Autrement dit, je suis pour l'abrogation pure et simple du suffrage universel, qui a été un véritable cadeau empoisonné, une arme au service des dictatures en puissance entre les mains d'esprits illettrés. Non que je veuille confier la direction du pays à un cénacle de "spécialistes", de technocrates sectaires, mais je souhaiterais par là inciter chacun à prendre ses responsabilités et à mériter, s'il le souhaite, la délivrance du statut de citoyen à l'aune de ses compétences propres, de ses efforts, de son mérite, de ses connaissances, de sa probité intellectuelle. Libre à chacun de laisser cela à d'autres, la finalité étant de couper court aux shows électoraux actuels, éminemment démagogiques, et de permettre à chacun (en ce sens, je reste sous l'égide démocratique) de s'élever intellectuellement. Voilà donc une démocratie présentée sur un véritable mode "participatif" (à la mode), préservée en même temps de la cacophonie de l'universel, c'est-à-dire (malheureusement) du nivellement par le bas.

À défaut d'être "gaie", cette méthode semblera peut-être à Monsieur Veron tout aussi, si ce n'est plus "vivante et roborative" que d'autres !
Utilisateur anonyme
21 mars 2010, 14:49   Re : Dupont Lajoie: un hymne à la francophobie
Voilà une intéressante proposition. Quelles pourraient être les modalités de délivrance du statut de citoyen-électeur ?
21 mars 2010, 15:04   Suffrage universel
Bien cher Gilgamesh,

Au temps de la monarchie absolue, en France, il y avait une forme de suffrage quasi-universel pour des élections locales (qui existaient) et pour les États-généraux.
21 mars 2010, 15:11   Re : Suffrage universel
Citation
Jean-Marc
Bien cher Gilgamesh,

Au temps de la monarchie absolue, en France, il y avait une forme de suffrage quasi-universel pour des élections locales (qui existaient) et pour les États-généraux.

Vous me démontrez la présence de cardinal dans l'ordinal d'ancien régime et je vous en sais gré.
Ce que j'aimerais, c'est que l'on introduise à présent de l'ordinal dans un régime par trop cardinal. L'un n'allant pas sans l'autre.
Citation
PhiX
Voilà une intéressante proposition. Quelles pourraient être les modalités de délivrance du statut de citoyen-électeur ?

Merci à vous.
Je vous avouerai n'en être qu'aux balbutiements de l'étude et toutes les propositions sont les bienvenues. Étudions donc la chose ensemble, parcourons les terres vierges d'une nouvelle expérience politique...

Ce qui me semble poser problème, tout d'abord, c'est le temps à accorder à l'entretien culturel de soi. J'entends par là que de tout temps, si les esprits philosophiques les plus brillants ont tous, plus ou moins, été "bourgeois", ce n'est pas un hasard. C'est que les loisirs engendrés par leurs rentes leur permettaient d'investir pleinement les rouages de leur intellect. Il faudra donc que l'État, s'il subsiste, se charge de m"nager du temps politique aux citoyens "adoubés".

Ensuite, il faudrait rétablir les fondamentaux du débat, et nous ne feront pas l'économie de la critique du régime actuel. Platon, Aristote, Polybe, Cicéron, Machiavel, Hobbes, Montesquieu, Rousseau, Tocqueville, tous ont senti le conflit éternel entre le petit nombre et le grand nombre dans la direction des affaires politiques. En 200 ans, nous sommes passés d'un extrême à l'autre, certes moins dangereux en apparence, mais sûrement plus retors. La dictature du nombre est une tyrannie molle. D'où mon dessein d'abolir le droit de vote universel.

Enfin, puisqu'il devrait être question de décerner des "brevets" de citoyenneté (et je tiens à bien décrire ces brevets comme étant accessibles à toutes et tous, mais jamais définitifs et en aucun cas héréditaires, cela va sans dire), il faudrait s'attacher à organiser ni plus ni moins que des contrôles de connaissance réguliers dans des domaines civiques aussi variés et essentiels que la politique, la philosophie, l'histoire, le droit, l'économie, la/les langue(s) et autres. On pourrait alors, en vue de la préparation de ces examens par celles et ceux qui s'en sentent les épaules, demander à l'État de permettre à ces gens de travailler à mi-temps et d'accorder l'autre moitié à la res publica. Le patron serait dédommagé par l'État. On pourrait tout aussi bien penser à une rétribution des citoyens déclarés par l'État, ce qui en ferait des fonctionnaires, mais sans bien sûr droit de grève ni possibilité d'augmentation salariale.

Le chantier est lancé, j'ai beaucoup d'autres idées à ce sujet.
Pour l'heure, je vous laisse, je file voter.....
21 mars 2010, 16:55   Grec et citoyen
Bien cher Gilgamesh,


Je concevais la citoyenneté athénienne comme essentiellement héréditaire, et non révocable. Pourriez-vous préciser ce point ?
21 mars 2010, 18:03   Théorie et pratique
"On pourrait alors, en vue de la préparation de ces examens par celles et ceux qui s'en sentent les épaules, demander à l'État de permettre à ces gens de travailler à mi-temps et d'accorder l'autre moitié à la res publica."

Un Etat qui serait parvenu à un tel degré de civilisation n'aurait plus besoin d'en passer par les urnes.

Plus généralement, il est amusant de voir une discussion théorique sur la démocratie, pour le moins pointue dans certains de ses échanges, engendrer en guise de première application pratique une idée à laquelle, me semble-t-il, il n'est que plaisant de rêver.
21 mars 2010, 19:18   Re : Théorie et pratique
Citation
Orimont Bolacre
Un Etat qui serait parvenu à un tel degré de civilisation n'aurait plus besoin d'en passer par les urnes.

Si, au contraire. Les votes seraient même hebdomadaires, comme au sein d'un hémicycle. Les citoyens auraient tout à gérer, tout à débattre, décider, planifier. Certains citoyens pourraient être déclarés ès-sciences, ès-économies ou ès-lettres, en rapport avec leur métier propre dans le "civil", mais toujours avec cette obligation de tronc commun, cette exigence de culture générale...
21 mars 2010, 19:19   Re : Grec et citoyen
Citation
Jean-Marc
Bien cher Gilgamesh,


Je concevais la citoyenneté athénienne comme essentiellement héréditaire, et non révocable. Pourriez-vous préciser ce point ?

Exact. Mais je ne désire pas reproduire les modèles grecs ou latins dans leur intégralité. L'Antiquité est une immense source d'inspiration en politique, ce qui ne veut pas dire que certains points ne sont pas à amender. Merci de cette remarque.
Un fils de paysan doit avoir les mêmes chances qu'un fils de notable. En cela, je maintiens les principes démocratiques. En amont.
21 mars 2010, 22:31   Petite explication de texte
Citation
Eric Veron
Citation
Francis Marche
Voyez-vous bien que le droit de vote n'existe pas s'il ne s'accompagne pas de son négatif: le droit de ne pas voter. Une société sans négativité des droits et devoirs qui sont énoncés positivement dans les textes est une société sans jeu, sans vide, pleine comme un oeuf de chassés-croisés de devoirs (entre les citoyens, et entre les citoyens et l'Etat) qui font de ces liens des ligatures. Une société traversée d'infaillibles échanges bijectifs de devoirs positifs, sans jeu ni reste aucun, constitue une utopie totalitaire de plus.

Je ne suis pas sûr de bien tout comprendre mais je crois percevoir que Francis nous propose là une acception de la liberté et de la responsabilité autrement plus vivante, gaie et roborative.

Cher Éric, je crois que Francis joue là du thème éminemment camusien du reste, de la marge entre soi et soi, garants de la non-coïncidence avec soi-même ménageant l'échappée belle toujours possible : en d'autres termes, le citoyen, dans l'acception gilgameshienne, si je puis me permettre, serait une sorte de soi-mêmiste politique, occupant totalement l'espace à lui dévolu dans la cité par la parfaite covalence entre devoir imposé et droit accordé.
Je vois ce que vous voulez dire, cher Alain et j'attends avec intérêt ce qu'en diront Francis et Gilgamesh.
» C'est parce que nous n'avons pas la même finalité "citoyenne" à l'esprit. Votre exemple laisse présager que le but assigné à la cité est le bonheur dans la liberté de chacun (mais peut-être me trompé-je). Je pense pour ma part que la fin de la cité est la vertu, vecteur du juste


Ne trouvez-vous pas plaisant que vous vouliez battre en brèche une revendication qui, en fin de compte, s'appuie sur une certaine conception de qu'il est absolument correct de faire (la route absolument correcte évoquée supra), au nom d'une conception relevant d'un idéal tout autant absolutiste et irreprésentable en fait (car enfin, le juste...) ?
Ce que vous faites en réalité, c'est croiser le fer à coups de droites parallèles.
Citation
Alain Eytan
.......Ce que vous faites en réalité, c'est croiser le fer à coups de droites parallèles.

La vie en société est un amendement à l'état de nature. C'est parce qu'il a l'intelligence de mesurer ce qu'il a à gagner dans le collectif que l'homme s'agrège, qu'il cède à son penchant grégaire. Non comme une mite, une abeille ou une fourmi, mais comme un être ayant une (trop?) haute opinion de lui-même, et bien décidé à tirer de cette communauté de semblables un progrès substantiel.
Ce que je dis, c'est que si ce progrès ne consiste qu'en un confort plus parfait acquis au fil des siècles, ce me semble un peu juste, et l'intelligence dont nous a affublée Dame Nature est alors bien mal investie (de la confiture aux cochons en somme). La fin (le bonheur) ne réside pas ici, mais plutôt dans le juste. Le "juste" qui permet de compenser les disparités en partage léguées dès la naissance par la nature, ce dans le respect d'une certaine équité.
Rien de totalitaire là-dedans. Mais si vous voyez une autre fin à l'humanité ou si, mieux encore, poste-moderniste et revenu de tout, vous n'en voyez plus aucune, je serais, sincèrement, très content de l'apprendre.
Citation
Alain Eytan
.....le citoyen, dans l'acception gilgameshienne, si je puis me permettre, serait une sorte de soi-mêmiste politique, occupant totalement l'espace à lui dévolu dans la cité par la parfaite covalence entre devoir imposé et droit accordé.

Oui, ce n'est pas inexact, à ceci près qu'en conférant au statut de "citoyen" l'équivalence en renommée de la ci-devant noblesse, j'espère rendre ce sacerdoce "contagieux" et tendre ainsi peu à peu vers un suffrage universel obtenu au mérite. On ne traite pas par-dessus la jambe les faveurs gagnées à la sueur du cortex.
Pour résumer : crépuscule de la démocratie cardinale, émersion de la démocratie ordinale.
Citation
Le "juste" qui permet de compenser les disparités en partage léguées dès la naissance par la nature, ce dans le respect d'une certaine équité.

J'avoue que je n'ai suivi la discussion sur ce fil mais le dernier billet de Gilgamesh me désole. Je vous propose quelques aphorismes de Davila à titre de matière à réflexion pour la semaine à venir.

Dans l’état moderne, les classes aux intérêts opposés ne sont pas tant la bourgeoisie et le prolétariat, que la classe qui paye des impôts et celle qui en vit

Celui qui réclame l’égalité des chances finit par exiger que l’on pénalise le plus doué

Le prolétariat tend vers la vie bourgeoise comme les corps vers le centre de la terre.

Le marxisme n’aura de repos que quand il aura transformé tous les paysans et les ouvriers en fonctionnaires petits-bourgeois
Citation
Rogemi
Citation
Le "juste" qui permet de compenser les disparités en partage léguées dès la naissance par la nature, ce dans le respect d'une certaine équité.

J'avoue que je n'ai suivi la discussion sur ce fil mais le dernier billet de Gilgamesh me désole. Je vous propose quelques aphorismes de Davila à titre de matière à réflexion pour la semaine à venir.

Dans l’état moderne, les classes aux intérêts opposés ne sont pas tant la bourgeoisie et le prolétariat, que la classe qui paye des impôts et celle qui en vit

Celui qui réclame l’égalité des chances finit par exiger que l’on pénalise le plus doué

Le prolétariat tend vers la vie bourgeoise comme les corps vers le centre de la terre.

Le marxisme n’aura de repos que quand il aura transformé tous les paysans et les ouvriers en fonctionnaires petits-bourgeois


Cher Rogemi... peut-être auriez-vous dû suivre le fil dans son intégralité. Que vous puissiez croire que l'"égalité" est pour moi une référence me désole tout autant. Je parle d'équité, ce qui n'a rien à voir. Je prétends en effet que certains fils de bourgeois, fils-à-papa, n'ont aucun talent, et que ne manque à certains fils de prolos que quelque coup de pouce pour en faire des génies.

Vous me proposez Davila, c'est mon livre de chevet !!!
Je vous rétorque l'original, Monsieur Flaubert, et mon aphorisme culte : "le grand rêve de la démocratie, c'est d'amener le prolétaire au niveau de bêtise du bourgeois" (Davila n'était pas né à l'époque). À méditer sans modération durant toute la semaine !!!
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