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Danger Apéro

Envoyé par Florentin 
13 mai 2010, 22:37   Danger Apéro
Le maire de Toulouse veut, depuis plus d'une semaine, interdire l'apéro géant prévu en Juin à Toulouse. Ce qui vient de se passer à Nantes, un mort, ne peut qu'inciter le préfet à confirmer cette interdiction. Il y a lieu de s'interroger sur la facilité avec laquelle ce genre d'événement peut avoir lieu et sur l'état d'esprit des gens qui répondent à de telles convocations.

La Dépêche du Midi
C'est l'apérobic

A elles la gym

A moi l'tonic.
13 mai 2010, 23:05   Re : Danger Apéro
"Il y a lieu de s'interroger sur la facilité avec laquelle ce genre d'événement peut avoir lieu et sur l'état d'esprit des gens qui répondent à de telles convocations."

Il semble que préfets et maires se soient moins interrogés sur la facilité avec laquelle se sont rassemblés les supporters de l'équipe d'Algérie il y a quelques mois et qu'ils s'interrogent encore moins sur les rassemblements de même nature, prévus par le calendrier.

Je ne sais combien de milliers de gens se sont rassemblés à Nantes et ce grand concours de badauds se solde par la mort accidentelle et bien sûr déplorable d'un pochetron (ce qui, soit dit en passant, ne déclenche aucune émeute, comme d'autre morts accidentelles dans certains quartiers n'ont jamais manqué de le faire.) On peut faire la critique tant qu'on veut de l'état d'esprit de ces fêtards, mais parler de danger me semble abusif. A-t-on jusqu'à présent assisté à des pillages, des passages à tabac, de graves déprédations auxquelles on ne manquerait pas d'assister si un nombre équivalent de "divers" se trouvaient rassemblés sur la place d'une ville française ?

Il ferait beau voir que les forces de l'ordre, incapables de faire régler l'ordre dans les fameux "quartier sensibles", et cela depuis des années, se retournent contre les organisateurs et les participants de ces "apéros", sachant, que cela plaise ou non, que ces rassemblements sont majoritairement le fait de la jeunesse du pays et, selon moi, traduisent, sans doute pas dans les formes les plus distinguées, un désir de se compter entre gens du cru.
Je dois avouer, bien cher Orimont, que je ne voyais pas les choses ainsi.

Effectivement, tout comme les "raves" que je hais, ces "apéros géants" sont une façon de rassembler, largement, les autochtones.

Ce n'est pas de meilleur goût, j'en conviens. Cela étant dit, vous mettez fort bien en lumière ce fait qui m'échappait complètement : manifestations de la diversité avec ses drapeaux lors des matchs qu'on sait, 叩頭 ; manifestations autochtones, critiques sous tous les angles.
13 mai 2010, 23:33   Re : Danger Apéro
« un désir de se compter entre gens du cru » Grand cru bourgeois.
13 mai 2010, 23:41   Re : Danger Apéro
Ces "apéros facebook" ne sont pourtant qu'une expression de la fabuleuse énergie dont ces jeunes gens sont capables.


A Rochefort, il y a quelques jours, une centaine de collégiens se sont donnés rendez-vous via facebook pour se bagarrer dans les rues.

En Argentine, tout récemment, 11.000 collégiens et lycéens de la province de Mendoza ont massivement séché les cours après y avoir été invités sur le "réseau social".

Nous ne sommes qu'au début de ces flambées grégaires, dont chacun peut apprécier l'innocence et la valeur hautement culturelle. Il est aisé de prévoir que la puissance mobilisatrice de l'Internet sera pleinement exploitée dans les années à venir. Festivités monumentales et manifs monstres au programme.
14 mai 2010, 03:37   Se compter
On peut ne pas avoir l'instinct grégaire, comme c'est d'ailleurs mon cas, mais reconnaître qu'en certaines circonstances historiques il est difficile d'en faire l'économie, quitte à le baptiser de noms plus présentables. Comment, sans lui, s'y retrouver ?
14 mai 2010, 09:21   Re : Se compter
Il me semblait aussi que, puisque les autorités mobilisent contre eux les juges pour les interdire et la maréchaussée pour les disperser, ces rassemblements ne pouvaient être que du nauséabond, du ventre encore fécond, du rappel des heures les plus sombres...
14 mai 2010, 09:36   Re : Se compter
ces rassemblements sont majoritairement le fait de la jeunesse du pays et, selon moi, traduisent, sans doute pas dans les formes les plus distinguées, un désir de se compter entre gens du cru.

Croyez-vous vraiment, cher Orimont ? Je pense pour ma part que nombre de participants à ces agapes éthyliques font partie des amis du désastre, et sont sûrement par ailleurs d'ardents zélateurs de toutes les tolérances et de toutes les vigilances.
14 mai 2010, 09:41   Re : Danger Apéro
Je serais assez d'accord avec Francmoineau, ce serait un des symptômes d'une société anxiogène, conditionnée à se voiler la face devant la régression, la barbarie, la médiocrité organisée.
14 mai 2010, 10:51   Re : Se compter
Il est indéniable que ces apéros géants, ces pique-nique citoyens, ces flashmobs, et autres rassemblements ponctuels, sont une manière de recréer un espace public, disons, un espace de convivialité, une place de village où l'on peut rencontrer, enfin, de vrais gens. Personnellement, je ne blâme personne d'y participer, surtout pas les jeunes; mais je pars du principe qu'une vie sociale aussi artificielle, aussi peu spontanée - malgré les apparences - que ces sympathiques beuveries, ne servent au bout du compte qu'à adapter l'individu à son néant. Peu importe ma solitude profonde : j'ai trois-cent vingt-sept amis sur facebook. Je rencontre des milliers de gens sous la tour Eiffel tous les samedis soir.
14 mai 2010, 10:52   Re : Danger Apéro
Je suis aussi plutôt de l'avis de Florentin et de Francmoineau. Cependant ce genre de manifestation traduit aussi sans doute une désorientation, un désir de lien dans une société en cours de désintégration, et pour calmer le malaise, l'oubli dans l'alcool. Mais je pense qu'il n'y a aucune conscience des problèmes de l'immigration dont ces jeunes ressentent les effets sans en percevoir certaines des causes.
14 mai 2010, 12:34   Re : Danger Apéro
Toutes mes excuses pour le message blanc ci-dessus. J'ai tenté sans succès d'envoyer deux photos de la Place Royale à Nantes, à 42 ans de distance (mai 1968, image d'archive, et mai 2010, Presse-Océan) presque jour pour jour : sur le thème "identité et différence", le parallèle est saisissant.
Manifestants installés sur la fontaine (la Loire et ses affluents), un drapeau en 2010, cinq ou six en 1968, bouteilles et verres en 2010, mains désœuvrées et incrédules en 1968, et en 1968 comme en 2010 ambiance plutôt bon enfant.
Les buveurs d'aujourd'hui sont les enfants et les petits enfants des sages jeunes gens d'hier, tétanisés par leur audace même, semblant ne pas croire possible ce qu'ils sont en train de vivre, et ne sachant ni quelle boîte de Pandore ils ouvrent ni, probablement, qu'ils ne peuvent pas ne pas l'ouvrir.
14 mai 2010, 13:13   Re : Danger Apéro
En voici une ...

14 mai 2010, 13:36   Hypocrisie
Pour ma part, je ne puis que noter l'hypocrisie des personnes (élus, administration, médias and so on) qui tapent sur ces apéros, que je n'aime pas, alors qu'elles ont laissé proliférer boîtes de nuit, discothèques de nuit, bars de nuit, soirées étudiantes du jeudi dans des bars ayant pignon sur rue (voir par exemple la place Saint-Pierre à Toulouse). Lire aussi la Dépêche du lundi pour y voir les "cartons" automobiles du week-end.

Je note aussi l'hypocrisie de ceux qui ont transformé les fêtes taurines en exposition de bodegas, sachant que la borrachera est particulièrement éloignée de l'idéal taurin. Je me rappelle très bien les arènes du soleil d'or, à Toulouse, les secondes de France par la capacité, et on ne buvait pas comme des outres. Ma mère se rappelait y avoir vu toréer Conchita Cintron, en 1949, et mon grand-père avoir assisté à des corridas aux arènes de Balma, circa 1935 (elles précédèrent celles du soleil d'or). Les arènes de soleil d'or furent symboliquement remplacé par le lycée des arènes, un des plus grands branlariums de France.
14 mai 2010, 13:46   Re : Danger Apéro
Bon reportage sur mai 68 à Nantes. Trois leaders étudiants s'expriment sur cette époque qui a peu à voir avec l'apéro.. Souvenirs...

video: [ma-tvideo.france3.fr]
14 mai 2010, 13:47   Re : Danger Apéro
Citation
Olivier
Ces "apéros facebook" ne sont pourtant qu'une expression de la fabuleuse énergie dont ces jeunes gens sont capables.



Satanés festivus...
Utilisateur anonyme
14 mai 2010, 13:57   Re : Danger Apéro
(Message supprimé à la demande de son auteur)
14 mai 2010, 14:51   Re : Danger Apéro
Cher Jean-Marc, j'aime beaucoup votre branlarium !
14 mai 2010, 14:55   Re : Danger Apéro
Les apéritifs géants ? Une invention tout droit sortie d'un livre de Philippe Muray !
14 mai 2010, 15:26   Re : Danger Apéro
   Chère Ostinato, merci pour vos documents. La photo que je voulais envoyer appartient à la même série, prise sous le même angle quelques minutes auparavant, avec la flèche de l'église Saint-Nicolas en arrière-plan.
   L'époque a changé, bien sûr ... mais les buveurs du 12 mai 2010 ont hérité de l'extension du droit à la liberté individuelle ("c'est mon choix !"), auquel Mai 68 a donné un coup d'accélérateur, et dont ils font, et feront de plus en plus, un usage d'autant moins judicieux que leur éducation et leur instruction ont été laissées en friche ... par la génération de 68.
   A quarante ans de distance on a pris presque la même photo, ce n'est pas un hasard : quelle que soit la justification que chaque membre se donne, le groupe qu'ils finissent par constituer reproduit les mêmes formes. Si les variantes sont infinies, il y a des situations-types aussi prévisibles que les formes du monde végétal.
   Mais c'est un peu comme la nouvelle de Borgès «Pierre Ménard, auteur du Quichotte» : deux textes identiques n'ont pas le même sens. Aussi pourrait-on s'amuser à donner une valeur symbolique à ce je ne sais quoi qui différencie les deux photos : les regards de 68 se tournent dans la même direction, probablement vers un orateur. Il y a donc encore un projet commun. Que dit l'orateur, quel est le projet commun? C'est une autre question. Ou plutôt non, c'est la même, puisqu'il se livre vraisemblablement à une variation nantaise sur la nécessité de faire table rase du passé ... et, victoire! les regards de 2010 se dispersent.
   Pour conclure, le rapprochement de ces deux documents me paraît une illustration assez juste, un raccourci saisissant de la remarque de Paul Valéry sur la mort des civilisations.
 
14 mai 2010, 16:00   Notre bâtard
"Les apéritifs géants ? Une invention tout droit sortie d'un livre de Philippe Muray !"

Oui, bien sûr, on peut dauber indéfiniment sur ce gâleux, ce bâtard, d'homo festivus au lieu de le reconnaître comme l'un de nos enfants et détourner le regard de lui avec dégoût alors que nous l'avons conçu sans se soucier de l'élever, on peut rêver à des pélerinages géants au lieu d'apéro, ou simplement à des foules pieuses, revêtant leurs habits du dimanche pour aller à la messe après une semaine de labeur simple et compréhensible, vous savez, un de ces bons métiers du genre de ceux qui ont été systématiquement liquidés, oui, on peut indéfiniment se foutre de la gueule de ces bourrins de participants aux "apéros" géants, tout ce qu'ils ont trouvé pour rappeler leur existence, on peut refuser de réfléchir un instant au message identitaire inconscient et si mal exprimé qui, j'en suis certain, s'exprime là, on peut ne même pas tenter de se mêler à eux, de les écouter ou de leur parler, mais si par extraordinaire on le fait, il se pourrait bien qu'en effet on trouve en eux un gros bataillon d'"amis du désastre", répétant la leçon, mais, aussi, du côté de l'appartenance ethnique, on sera peut-être étonné des propos qui circulent avec de moins en moins de gêne et qui demandent à être entendus.
14 mai 2010, 16:01   Re : Danger Apéro
...dans une société en cours de désintégration, et pour calmer le malaise, l'oubli dans l'alcool. Mais je pense qu'il n'y a aucune conscience des problèmes de l'immigration dont ces jeunes ressentent les effets sans en percevoir certaines des causes.

Chère Ostinato, j'avais naguère essayé de faire passer ce message, que je répète, on ne sait jamais: il me semble évident, pour qui a un peu de mémoire, que les fêtes populaires que ces apéros et autres nuits blanches essaient de remplacer (fêtes de village ou de quartier, carnavals etc...) ont commencé à disparaître précipitamment dans les années 60 et 70, à une époque ou l'immigration ne pouvait absolument pas en être la cause, et souvent dans des lieux ruraux, ou des quartiers qui n'avaient jamais vu un immigré. Tous les lieux que j'ai habités ou fréquentés dans les années 60, à Toulouse, en Roussillon et en Corrèze avaient encore au moins une fête annuelle avec défilé de chars, et toutes ces fêtes avaient disparu dans les années 70, quand je crois bien que je n'avais pas rencontré un arabe ou un noir de ma courte vie. (Et là, hop, Cassandre nous ressort un délicieux bal-musette en Corse circa 1983). Pour des raisons que je comprends mal, cette désintégration, cette raréfaction du collectif me semble avoir atteint des proportions plus grandes en France qu'en Angleterre ou aux USA. Par exemple, jusque dans les années 90, j'ai été témoin, dans un quartier italien de Brooklyn, de processions à la vierge avec petit orchestre installé sur une plateforme portée à dos d'homme, comme on n'en voyait plus que dans quelques villages du Sud de l'Italie (et, inutile de préciser, ce n'était pas pour les touristes). New York a été un conservatoire de traditions populaires qui ont été efficacement détruites partout en France.
14 mai 2010, 16:26   Re : Danger Apéro
Peut-être parce-qu'en France ces traditions étaient ancrées dans le monde rural, et que celui-ci a été désintégré à grande allure et de façon volontaire au profit d'une modernisation à marche forcée. Les urbains gardaient des racines rurales qui ont été perdues pour beaucoup avec la concentration des exploitations agricoles. enfin c'est une hypothèse...
14 mai 2010, 17:32   Re : Danger Apéro
Je pense également que les fêtes de villages et autres manifestations sociales d'antan (on pourrait presque dire « de l'ancien monde », mais cela sonnerait peut-être comme étant trop pessimiste...) ont été peu à peu détruites par la modernité triomphante : télévision, internet, urbanité, règne du « tout, tout de suite », valorisation de l'individu, etc. Et puis, c'est bien connu, le progressisme et le modernisme ont horreur de la tradition, surtout si elle est un tant soit peu enracinée dans un terroir. Tout cela a sans doute contribué à « ringardiser » les fêtes populaires. Or le problème est que l'humain a par nature besoin de lien social et de vie en communauté, et la disparition des anciens événements sociaux ainsi que la déshumanisation de bien des comportements ont sans doute provoqué une sorte de manque inconscient, d'où l'idée de reconstruire ces liens perdus par l'intermédiaire de fêtes telles que les apéros géants et autres. Mais le malaise qui à mon avis en résulte, c'est justement que ces nouveaux événements festifs sont totalement artificiels, coupés de toute racine. Alors que la fête de village d'autrefois faisait se rencontrer des gens qui se connaissaient et partageaient déjà un espace commun (le village, la petite communauté), les apéros-géants ne forment qu'un agrégat d'individus qui ne se connaissent pas vraiment et n'ont rien en commun, si ce n'est d'avoir pris connaissance de l'événement par un réseau social sur le net, c'est-à-dire ce qui symbolise justement le contact totalement artificiel de gens très séparés géographiquement.

Plus généralement, on peut voir à travers cela le malaise de notre société moderne, qui participe à mon sens du même mouvement : d'un côté, on détruit au nom du progressisme tout de qui permettait de structurer la société (ordre, hiérarchie, goût de l'effort, institutions, valeurs, culture...) alors qu'en même temps, l'inconscient collectif tente de pallier ce manque en essayant de reconstruire tant bien que mal ce que ce progressisme a aboli. Mais le manque de profondeur et d'enracinement de ces nouvelles pratiques ne peuvent qu’être générateur d’insatisfaction, d'autant plus que, comme cela a très bien été dit plus haut, elles aident les individus à se voiler la face devant un réel devenu trop médiocre.

On pourra également constater la différence entre les fêtes de village à l'ancienne, qui étaient basées sur des événements locaux ou des dates faisant référence à la culture nationale (bal du 14 juillet), et les fêtes bobos actuelles, qui se fondent sur des concepts abstraits bien-pensants (on parle de fête « citoyenne », « métissée », de brunch « équitable », etc.)

Pour répondre à jfbrunet sur la différence entre ce qui se passe en France et aux USA, on pourrait avancer l'hypothèse de différence entre le modèle français et le modèle anglo-saxon : ce dernier ayant par nature tendance à laisser les individus et organisations s'organiser comme ils l'entendent (contrairement au modèle français, plus directif et fédérateur), cela engendre un individualisme forcené mais également, sans doute afin de contrebalancer celui-ci, une forte propension à regrouper les individus selon les centres d'intérêts. On trouve ainsi beaucoup aux Etats-Unis, par exemple, de « conventions » réunissant des fans d'une série télévisée ou de bandes dessinées, mais aussi des groupes tels que les alcooliques anonymes ou les réunions « Tupperware ». Les américains ont souvent tendance à se regrouper de façon conviviale et à inviter des gens chez eux même si ce ne sont pas forcément des amis proches. Il y a donc davantage de lien social là-bas que chez nous, mais le revers de la médaille est que ces relations sociales sont bien souvent plus artificielles qu’ici.
14 mai 2010, 17:47   Re : Danger Apéro
Il a subsisté longtemps les Fest-noz, qui ont connu un nouvel essor après mai 1968, et qui n'avaient rien de bobo. Je n'ai pas l'impression qu'il en reste grand'chose.
14 mai 2010, 17:50   Re : Danger Apéro
Alors que la fête de village d'autrefois faisait se rencontrer des gens qui se connaissaient et partageaient déjà un espace commun (le village, la petite communauté), les apéros-géants ne forment qu'un agrégat d'individus qui ne se connaissent pas vraiment et n'ont rien en commun

Si si : ils ont en commun leur âge, c'est-à-dire leur jeunesse. Je ne pense pas que ces rassemblements abritent beaucoup de personnes de plus de vingt-cinq ou trente ans. C'est d'ailleurs une des différences avec les fêtes traditionnelles, qui regroupaient des gens de tous âges.

D'autre part, et pour répondre à jfbrunet, certaines régions encore assez rurales (enfin, tout est relatif, n'est-ce pas...), la Bretagne par exemple, ont maintenu (et continuent de le faire) une tradition assez vivace de fêtes populaires. Ostinato a raison sur ce point, ces traditions étaient solidement ancrées dans le monde rural, et c'est en grande partie ce qui explique leur disparition.
14 mai 2010, 18:20   Re : Danger Apéro
Les jeunes cependant ne sont pas si isolés qu'ils aient besoin de facebook pour organiser un apéro, à dix, à vingt même. Les boites de nuit existent depuis longtemps, les bars aussi. Facebook apporte le gigantisme, une certaine démesure relationnelle. Pourquoi s'entourer de mille personnes qu'on ne connaît pas, et qu'on ne connaîtra pas plus, pour l'immense majorité, à la fin de la fête ? C'est la question qu'il faut se poser. L'internet a peut-être inauguré le développement d'un nouvel imaginaire collectif. On se sent maintenant citoyen du village planétaire, presque physiquement, car l'internet donne l'illusion de la proximité et de l'accessibilité. Les rassemblements géants ne sont-ils pas une continuité de cette expérience fusionnelle ? Les jeunes ne sont-ils pas désireux de sentir autour d'eux la présence du monde entier, comme ils sentent la présence virtuelle de centaines, de milliers d'"amis" sur les réseaux sociaux ?
"Je ne pense pas que ces rassemblements abritent beaucoup de personnes de plus de vingt-cinq ou trente ans."

C'est indiscutable pour les "raves party" à cause du volume sonore. En revanche, rien n'empêche quiconque de participer à ces "apéros" géants si ça lui chante.

Si le "brassage" des générations n'a pas lieu autant qu'on pourrait l'attendre, cela ne tient pas à la nature même du rassemblement, à ne considérer que ce terme un rien ringard "d'apéro" qui les désigne, sorti directement d'un parler populaire légèrement ringard, certains diraient "franchouillard", et qui ne doit rien ni à la terminologie anglo-saxonne comme "rave-party", "brunch", ni au jargon bien-pensant, "fête citoyenne", "équitable" etc.
14 mai 2010, 18:34   Re : Danger Apéro
"...on peut refuser de réfléchir un instant au message identitaire inconscient et si mal exprimé qui, j'en suis certain, s'exprime là..."

Vous croyez, M. Bolacre ? Pour moi, je suis certain que ces bataillons de zombies (avec lesquels je n'ai qu'un point commun : l'âge) n'ont cure de leur appartenance ethnique, et que leur discours est, en la matière, des plus convenus ; si vraiment le sentiment (culturel) de l'origine était développé chez eux, ils n'auraient qu'un souci : fuir à tout prix ce genre de manifestation où l'individu est absorbé par la masse de ses semblables, fuir comme les mélomanes fuient la Fête de la Musique, et les amateurs d'art la Nuit des Musées... La seule réponse politique possible à ce phénomène inédit ne peut être, de nos jours, que son institutionnalisation à courte échéance.
14 mai 2010, 18:35   Re : Danger Apéro
Il ne faut pas oublier qu'il y a un concours entre les villes : Quel apéro sera le plus gigantesque ?
14 mai 2010, 19:07   Re : Danger Apéro
On chantait davantage autrefois, on chantais sans complexe. La radio, le disque, la télévision ont détruit la musique d'amateurs en proposant, de bonne foi, des virtuoses, des bonnes prises de son, des arrangements sophistiqués. Essayez de chanter Vierzon a cappella; avec l'accordéon de Marcel Azzola c'est différent.
14 mai 2010, 19:24   Re : Danger Apéro
Ce n'est qu'une intuition, S.Bily, appuyée sur le fait concret que ces rassemblements drainent des autochtones. Pour moi, ce sont des mouvements (au sens strict) aveugles de certains membres du corps social, qui sont l'indice d'autre chose que ce qu'ils donnent à voir à première vue. Quand bien même les participants ne le diraient pas, on ne peut évacuer d'un revers de la main le fait que, pendant ces "apéros", on sait pertinemment qu'on aura le plaisir de ne pas croiser de Belphégors flanquées de leurs barbus, ni de petits frimeurs adeptes de l'intimidation.

Vous dites être jeune eh bien, si je peux me permettre une suggestion, c'est celle de ne pas refuser de discuter avec ceux de votre génération qui vous paraîtraient à l'opposé de vos conceptions et, sans les prendre à rebrousse-poil ni à rebrousse-locks, de les amener sur le terrain de la pression exercée par les "divers". Je pense que c'est précisément un "angle d'attaque" où vous seriez peut-être étonné de vous découvrir des affinités, mais ce serait à vous de faire un effort pour surmonter vos répugnances. De tels efforts de "pédagogie", d'ouverture, d'esprit de dialogue, on les réclame de nous depuis des lustres à l'adresse de populations qui s'en moquent. Pourquoi ne pas les diriger vers ceux qui sont nos semblables ? Fussent-ils honnis "festivus" ne nous sont-ils pas plus proches et susceptibles d'être à la longue éclairés ? Etes-vous dans la même disposition d'esprit au moment de croiser une bande de banlieusards qui "descendent en ville" ou un groupe de "teufeurs" ?

Cela dit, d'accord avec vous sur l'hypothèse de l'institutionnalisation à plus ou moins brève échéance de ces rassemblements.
Utilisateur anonyme
14 mai 2010, 19:42   Re : Danger Apéro
(Message supprimé à la demande de son auteur)
14 mai 2010, 20:11   Re : Danger Apéro
Cher Orimont Bolacre, rassurez-moi : j'espère ne plus vivre le jour les apéritifs géants seront le seul endroit que ne hanteront pas les barbus à cimeterre ni les Belphégors aux gants noirs !

Sachez de plus qu'il m'arrive, fort heureusement d'ailleurs, de "discuter", à l'Université, avec des festifs qui, comme vous l'imaginez, y sont légion (y compris chez les professeurs, d'ailleurs : un des miens, libéral jusqu'au bout des ongles, comme on ne peut pas l'imaginer sur ce forum, a dernièrement fait en cours une sorte d'éloge de la Fête de la musique - c'est dire si ne manquent pas les occasions de mettre des gifles). Cependant "éclairer", comme vous dites, un festivus, est un travail de longue haleine qui est au-dessus de mes forces : je manque trop de cette "vertu militaire", comme l'appelait Péguy, nécessaire à l'évangélisation de sauvages sans foi ni loi. Je plaisante, mais l'ouverture d'esprit n'est pas toujours du côté qu'on croit : souvent le mot est prononcé, déversé à torrents dans les conversations, là où justement il a cessé d'avoir un sens.
Bien chers amis,

Étant par nature porté sur le respect des traditions, je ne suis pas autrement scandalisé par l'aspect "festif" de ces rassemblements de jeunes. Après tout, je ne saurais me montrer plus sévère que l'Ecclésiaste, qui recommande à la jeunesse de s'amuser.

Le "festif", comme on dit, me dérange quand il est hors de propos. Qu'un adolescent attardé ou un jeune adulte le soit, c'est une chose. Qu'une personne de quarante ans soit "festive", c'est un autre problème, c'est très nouveau, c'est soixante-huitard.
Que voulez-vous, cher Jean-Marc, la personne de quarante ans est "festive" pour autant qu'on la prie d'être productive jusqu'à 70 ans, et cela ne doit rien à mai 68...
14 mai 2010, 21:07   Re : Danger Apéro
Cher Felix, j'"achète" dans une grande mesure votre explication sur la différence entre les Etats-Unis et la France, avec une nuance, cependant, sur le caractère artificiel des regroupements là-bas. Pour reprendre l'exemple de New York, on trouve dans cette mégalopole, et jusqu'au cœur de Manhattan, de nombreuses "communautés de quartier" qui se battent bec et ongles contre les promoteurs immobiliers pour soustraire un petit terrain abandonné à leur appétit, et le transformer en jardin "communautaire" où chacun jouit d'un espace où installer une plate-bande potagère, une sculpture, un arbre. On échange des pots et des boutures, et j'y ai vu organiser des lectures de textes par leurs auteurs (dont certains seraient peut-être un peu trop "méritants" aux yeux de Renaud Camus, mais qui étaient loin d'être nuls à mon avis), dans cette tradition orale qui a maintenu vivant l'art poétique outre-Atlantique, alors qu'il est mort d'attrition académique en France. Je ne vois rien d'artificiel là-dedans, et c'est bien entendu inconcevable à Paris. Pour finir sur une note très négative, je pense qu'il y a quelque chose de pourri, ou de moisi, au Royaume de France, qui n'a rien à voir avec les immigrés (je répète: qui n'a rien à voir avec les immigrés), ni avec les "métissolâtres", ni non plus d'ailleurs avec les militants de l'anti-immigrationnisme qui trouvent ici un havre, et qui est une forme, étonnamment avancée pour ce vieux pays, d'individualisme, dont je me sens d'ailleurs entièrement solidaire, à mon corps défendant, et parfois à mon désespoir (inutile de dire que je regardais les processions Brooklynesque à la vierge, évoquées plus haut, en ethnologue plus qu'en possible participant).
14 mai 2010, 21:43   Re : Danger Apéro
Mais peut-être pourrions-nous lutter et nous déprendre de cette langueur individualiste si une perspective pouvait se découvrir compatible avec une immigration croissante. Comme ce n'est pas possible le repli individualiste est une solution immédiate, mais qui devient de plus en plus coûteuse et mortifère.Voilà le lien à mon avis.
14 mai 2010, 22:01   Re : Danger Apéro
Cher jfbrunet, ce que je voulais dire en parlant d'artificialité (mais peut-être me suis-je mal exprimé) ne tenait pas tant au caractère des regroupements sociaux qu'à l'attitude qu'ont la plupart des Américains a facilement nouer des liens et être très accueillant même avec des gens qu'ils connaissent peu sans pour autant que cela relève de la vraie amitié. Vous pouvez ainsi facilement être invité à déjeuner chez des gens que vous connaissez à peine, mais contrairement à ce qui se passe généralement en France, les repas ne s'éternisent pas et on parle de pas grand chose. Les gens acceptent simplement de venir pour ne pas refuser la politesse. Les Français sont plus froids au premier abord, alors que les Américains sont plus ouverts, ce qui ne veut pas dire pour autant que cela traduise un lien plus fort entre les gens. C'est cela que j'entendais en disant que les rapports humains étaient parfois un peu superficiels là-bas. Un peu comme sur Facebook où vous pouvez avoir des tas d'"amis", alors que la plupart ne sont en fait que de simples connaissances.
14 mai 2010, 22:17   Re : Danger Apéro
Je suis comme souvent assez d'accord avec Orimont. Il se pourrait que, en effet, les raisons du succès de ces " apéros " soient les mêmes que celles de films comme " Amélie Poulain " ou de " Les choristes " sans que le public soit capable de se les expliciter.
14 mai 2010, 22:44   Re : Danger Apéro
Oui, sauf que le succès des films que vous citez, chère Cassandre, vient à mon avis du fait qu'ils représentaient la nostalgie de la France d'avant, celle qui a disparu ou qui est en train de disparaître, alors que les apéros Facebook sont au contraire le reflet d'un modernisme technophile, festif et jeuniste, bref l'opposé des valeurs dépeintes dans Les Choristes ou Amélie Poulain...
14 mai 2010, 22:47   Amélie Poulain
Ces fêtes ont commencé dans l'ouest, notre région la moins "diverse"...

Il me semble par ailleurs que, comme les raves, c'est un "biotope" hostile aux CpF : le "de souche" aviné (ou enfumé) cesse d'être une victime offerte, d'autant qu'il est "en masse"...

Ces points seraient à méditer.
14 mai 2010, 23:00   Re : Danger Apéro
Désolé, j'ai vu Amélie Poulain et les Choristes, c'est de la bibine.
14 mai 2010, 23:21   Re : Danger Apéro
Peu importe ici, cher Florentin.
14 mai 2010, 23:34   Ouverture d'esprit
"(...) l'ouverture d'esprit n'est pas toujours du côté qu'on croit : souvent le mot est prononcé, déversé à torrents dans les conversations, là où justement il a cessé d'avoir un sens."

C'est le point le plus flagrant (il en va de même pour le racisme) et il ne faudrait pas cesser, chaque fois que l'occasion s'en présente, de le démasquer. C'est usant, en effet (mais aussi assez amusant, parfois, de retourner benoîtement l'accusation de "fachos" aux parangons de vertu), d'autant qu'on ne doit pas perdre de vue que ce n'est pas au contradicteur qu'on s'adresse car c'est peine perdue, mais à ceux qui ne disent rien, il y en a toujours qui ne disent rien et c'est à eux qu'on s'adresse en réalité, eux pour qui on argumente et c'est utile, voilà pourquoi il ne faut pas renoncer.
14 mai 2010, 23:40   Carbone 14
"(...) je pense qu'il y a quelque chose de pourri, ou de moisi, au Royaume de France,(...)"

Cher Brunet, de quand dateriez-vous les débuts de cette décomposition ?
15 mai 2010, 11:47   Re : Carbone 14
" d'autant qu'on ne doit pas perdre de vue que ce n'est pas au contradicteur qu'on s'adresse car c'est peine perdue, mais à ceux qui ne disent rien, il y en a toujours qui ne disent rien et c'est à eux qu'on s'adresse en réalité, eux pour qui on argumente et c'est utile, voilà pourquoi il ne faut pas renoncer "

Entièrement d'accord..
15 mai 2010, 11:48   Re : Carbone 14
ce n'est pas au contradicteur qu'on s'adresse car c'est peine perdue, mais à ceux qui ne disent rien, il y en a toujours qui ne disent rien et c'est à eux qu'on s'adresse en réalité, eux pour qui on argumente et c'est utile, voilà pourquoi il ne faut pas renoncer.

Absolument d'accord.
15 mai 2010, 11:48   Re : Carbone 14
Voilà une approbation bien concertée, ma foi !
15 mai 2010, 11:55   Re : Carbone 14
C'est finement observé.
15 mai 2010, 14:06   Re : Danger Apéro
Vous avez certainement raison, cher Bolacre.
A ce propos, propos d'un écrivain de quarante-cinq ans :

""On parle de vous pour le Goncourt" me dit Jean Cau. Je fus choquée : j'avais passé l'âge. [...]
J'avais prévenu le jury et Gaston Gallimard qu'au cas où je serais choisie je ne paraîtrais pas place Gaillon, ni rue Sébastien-Bottin. A trente-cinq ans, dans mon innocence, cela m'aurait amusée de m'exhiber ; maintenant, j'y répugnais. Je n'ai ni assez de forfanterie ni assez d'indifférence pour me donner allègrement en pâture aux curieux."

Simone de Beauvoir - La force des choses
18 mai 2010, 00:05   Re : Danger Apéro
Voici ce que nous dit un Ami du Désastre sociologue à propos des apéros Facebook : " Mais il n’y a rien de nouveau: déjà au 16e siècle, Rabelais décrivait des orgies bien plus alcoolisées organisées à Poitiers."

On remarquera que les sociologues et autres bien-pensants ont toujours le même genre d'arguments imparables pour excuser, justifier ou glorifier ce qui va précisément dans leur sens.
Première méthode : dites que ça change (donc que c'est intrasèquement bien) ; exemple : "La langue française décline ? Mais non, elle change, elle évolue..."
Deuxième méthode (ici illustrée) : faites une comparaison plus ou moins fumeuse avec le passé, même si le phénomène actuel n'est pas forcément comparable en intensité ; exemple : "La France a toujours été une terre d'immigration.", "Les Blousons noirs des années 60 sont l'équivalent des jeunes des cités actuels.", etc.

[20minutes.fr]
18 mai 2010, 09:20   Re : Danger Apéro
Quand je bois du vin clairet
Ami tout tourne, tourne, tourne, tourne
Aussi désormais je bois Anjou ou Arbois
Chantons et buvons, à ce flacon faisons la guerre
Chantons et buvons, les amis, buvons donc !


.
18 mai 2010, 09:23   Re : Danger Apéro
Apéro annulé à Toulouse

La Dépêche
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