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Question aux trotskologues

Envoyé par Utilisateur anonyme 
Utilisateur anonyme
20 mai 2008, 19:44   Question aux trotskologues
Je viens de lire le livre de Virginie Linhart (la fille à Robert) "Le jour où mon père s'est tu". Livre intéressant, souvent émouvant, même s'il se termine par un plaidoyer pro-68 plutôt lourd et convenu, mais mon propos n'est pas là.
Parmi les gens qu'elle interviouve, tous fils et filles de "révolutionnaires", figure un certain Thomas dont elle ne donne pas le nom de famille mais précise simplement que son père, fils de banquier, était "dirigeant de la Ligue communiste en 1968 aux côtés d'Alain Krivine, puis de la LCR. Aujourd'hui professeur émérite d'économie politique de l'Université".
J'aimerais bien résoudre la petite énigme mais j'avoue que là, comme ça, je ne vois pas. Y aurait-il un trotskologue dans la salle?
Il faut demander à Petit-Détour, il doit être le plus éminent trotskologue parmi nous.
A défaut de trotskologue, on peut aussi faire confiance à un teratologue, comme votre serviteur: je dirais Henri Weber
Utilisateur anonyme
20 mai 2008, 20:14   Re : Question aux trotskologues
Alain Madelin ?

Patrick Devedjan ?
Utilisateur anonyme
20 mai 2008, 21:30   Re : Question aux trotskologues
Philippe Herzog ?

Non, c'est idiot ce que je dis, il n'a jamais été gauchiste, ou bien si ?
Oui Petit-Détour se réveille. Merci, Marcel Meyer, vous êtes trop bon.
Je pense qu'il s'agit du fils de Jacques Valier, lequel était, aux côtés de l'immense Ernest Mandel (bonjour Aline) et Pierre Salama, un des critiques en chef de l'économie politique à la Quatrième Internationale.
Cher Pascal Ottavi, j'ai lu le petit livre, très mal écrit, de Virginie Linhart et ne partage pas votre indulgence. Cette enquête est d'une mièvrerie pathétique. Le ton est pleurnichard ("ah que c'était difficile d'ête enfant de 68tards"). Je partais pourtant d'un a priori favorable car j'avais de la considération pour l'oeuvre de Linhart, malgré ses engagements maoïstes, notamment pour L'établi, beau livre qui relate son établissement à Citroën en 1969, et Le Sucre et la faim, méditation sur la misère des campagnes du nord du Brésil. Et puis je me demandais ce qu'il était devenu car, contrairement à beaucoup d'anciens chefs maos, on ne le voyait pas chez les médiatiques étaler ses reniements.
Pour tout vous dire, le seul point qui m'a amusé est relatif à l'éducation très stricte, sur le plan scolaire, prodiguée par les militants de l'époque à leurs enfants. Rien à voir avec Libres enfants de Summerhill : Premier de la classe ou rien ; travail scolaire pendant les vacances d'été (Linhart imposait des séances quotidiennes de dictée à la pauvre Virginie puisée dans les livres de Flaubert ou Maupassant); meillleurs lycées. Bref on était à des années-lumière du pédagogisme des IUFM. Rien de contradictoire d'ailleurs avec les idéaux des militants de l'époque, qui vouaient un culte à la grande littérature et à l'écrit en général Ceux qui parlent de nihilisme pour qualifier "68" n'ont rien compris. Ou alors il s'agit du nihilisme au sens russe du terme, narodnik, lequel n'a rien à voir bien évidemment avec l'acception sarkozyste.
Utilisateur anonyme
21 mai 2008, 11:55   Re : Question aux trotskologues
Il me semble tout de même que c'est à partir de 68 et autour des idées du mouvement de mai que se développent en France les sciences de l'éducation et le "pédagogisme" (quelqu'un comme Gabriel Cohn-Bendit en est l'exemple le plus caricatural). En fait, je pense que les "soixante -huitards" étaient tout à fait favorables aux principes du pédagogisme, à condition qu'on ne les applique pas à leurs propres enfants.
Utilisateur anonyme
21 mai 2008, 14:08   Re : Question aux trotskologues
Merci infiniment, cher Petit-Detour; je n'aurais jamais trouvé.
Sur le livre de la petite Linhart, il est vrai qu'il est parfois un peu nunuche (le genre "moi, je ne supporte pas qu'Arthur passe à table sans se laver les mains") mais il éveille quand même la sympathie (j'ai trouvé le passage où la petite fille se demande la nuit comment appeler au secours la famille "normale" qui vit en face assez déchirant, moi, mais bon, je suis très sentimental).
Sur le plan documentaire, il m'a appris des choses, sur Robert Linhart lui-même (effectivement beaucoup moins surexposé que ses ex-compères), et sur les années post-gauchistes que je n'avais jamais vues décrites de façon aussi effrayante (dans leur composante féministe tout particulièrement).
Quant à la question des exigences scolaires versus le pédagogisme qui a sévi ensuite, elle me turlupine aussi. Je ne suis pas sûr que les IUFM et toute la mélasse idéologique qui va avec soient imputables à des gens comme Linhart; au contraire, c'est à un ancien de la bande, Jean-Claude Milner, qu'on doit leur critique à la fois la plus précoce et la plus féroce ("De l'école", 1984).
Faut-il alors penser que le gauchisme de la rue d'Ulm était atypique, non seulement du point de vue de son inspiration (la Grande Révolution Prolétarienne) mais aussi dans son rapport au savoir?
Peut-être, mais je ne crois pas non plus que les situationnistes, autres acteurs majeurs, quoique minoritaires, de 68, aient été particulièrement "pédagogistes".
So what?
"Linhart imposait des séances quotidiennes de dictée à la pauvre Virginie puisée dans les livres de Flaubert ou Maupassant"...
C'est plus qu'un petit détour!
Oui nunuche, c'est exactement le terme. Vous avez raison de rappeler que l'on doit la critique la plus radicale du pédagogisme à Jean-Claude Milner dans son livre De l'école. Je crois que le paradoxal élitisme que préconisaient les ulmiens maoïstes ne leur était pas spécifique. J'ai bien connu les milieux troskystes avant l'arrivée de Besancenot, le Cavaliere de l'anti-capitalisme, vous savez l'homme qui jouait aux dominos l'samedi avec sa maman quand il était petit, eh bien les comportements étaient proches. Quant à Debord, ses auteurs de référence étaient Retz, Machiavel, Hegel et Marx bien sûr. Faut dire qu'avec Alice Becker-Ho c'était du sérieux.
Utilisateur anonyme
21 mai 2008, 14:22   Re : Question aux trotskologues
Faut dire qu'avec Alice Becker-Ho c'était du sérieux.

C'est pas un peu du jargon, là ?
M. Joyce je vois que vous êtes un connaisseur.
Utilisateur anonyme
21 mai 2008, 18:43   Re : Revenons aux textes
Peut-être, mais je ne crois pas non plus que les situationnistes, autres acteurs majeurs, quoique minoritaires, de 68, aient été particulièrement "pédagogistes".

Extrait du chapitre : "En finir avec l'éducation carcérale et la castration du désir" (Raoul Vaneigem Avertissement aux écoliers et lycéens)

"Quelle devrait être la préoccupation essentielle de l'enseignement? Aider l'enfant dans son approche de la vie afin de lui apprendre à savoir ce qu'il veut et à vouloir ce qu'il sait, c'est-à-dire à satisfaire ses désirs, non dans l'assouvissement animal mais selon les affinements de la conscience humaine.
L'inverse s'est produit. L'apprentissage s'est fondé sur la répression des désirs. On a revêtu l'enfant d'angéliques habits sous lesquels il n'a cessé de faire la bête, une bête dénaturée de surcroît. Comment s'étonner que les écoles imitent si bien, dans leur conception architecturale et mentale, les maisons de force où les réprouvés sont exilés des joies ordinaires de l'existence?
Une école qui entrave les désirs stimule l'agressivité.
Les anciens bâtiments scolaires ne laissent pas d'évoquer les pénitenciers. Les fenêtres haut placées n'autorisaient au regard de l'élève qu'une échappée vers le ciel, unique espace réservé au bonheur des âmes, sinon des corps. Car le corps, immobilisé sur un banc d'étude vite transformé en banc de torture, subissait dans la gêne ordinaire sa destinée terrestre.
L'opinion prévalait alors qu'il fallait pour s'instruire (comme pour être beau) apprendre à souffrir. Entrer dans l'âge adulte, n'était-ce pas renoncer aux plaisirs de l'enfance pour progresser dans une vallée de larmes, de décrépitude, de mort?
Les pédagogues ont toujours affirmé que la discipline et le maintien de l'ordre formaient la condition sine qua non de toute éducation. Nous percevons mieux aujourd'hui à quel point leur prétendue science relevait en fait d'une très ordinaire pratique répressive : encourager le mépris de soi et brimer les «appétits charnels» afin d'élever l'homme au septième ciel de l'esprit en l'arrachant à la matière terrestre."

Et patati ! et patata !
21 mai 2008, 19:26   Re : Question aux trotskologues
Oui, bonjour à vous, cher Petit-Détour ! (Rassurez-vous, je ne dormais pas au fond de la classe. Mais, s’il vous plaît, ne m’interrogez pas trop sur ces matières…)
Utilisateur anonyme
22 mai 2008, 17:12   Re : Revenons aux textes
Bien vu, sieur Alexis.
Debord a bien fait de virer Vaneigem de l'IS.
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