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Alain Danielou

Envoyé par Kiran Wilson 
06 septembre 2010, 06:27   Alain Danielou
Chers amis :
Quelqu'un des usagers de ce forum aurait-il lu le livre de Jean-Louis Gabin sur ou plutot contre Danielou, ''L'Inde traditionnelle et l'interpretation d'Alain Danielou'', ou l'auteur pretend demontrer que toute l'oeuvre de l'indianiste est une imposture deliberee qui trahit la metaphysique hindoue authentique ? J.L. Gabin a ete l'ami tres proche (et peut-etre l'amant...) des dernieres annees de Danielou, puis son disciple et l'editeur de ses inedits aux editions Kailash. Avec ce livre tres violent, et a mon sens fort injuste, il renie donc celui qui a ete son pere spirituel et l'a conduit a se convertir a l'hindouisme. Gabin a aussi ete licencie par la Fondation Danielou (pour divergences editoriales, entre autres) quelques mois avant de se lancer dans ce livre, que l'on pourrait donc lire comme une sorte de vengeance...
(Encore une fois, desole pour l'absence d'accentuation)
06 septembre 2010, 17:27   Re : Alain Danielou
J'ai lu, à peu de chose près je crois, toute l'œuvre d'Alain Daniélou. Pas le livre dont vous parlez, et je pense que vous avez raison dans votre interprétation, et que donc je ne le lirai pas. Daniélou est certainement, à mon avis, l'une des meilleures entrées possibles dans la philosophie indienne, qu'il décrit en initié et non en philosophe occidental. Il y a beaucoup d'écrits polémiques ou idéologiques dans son œuvre, mais il faut les lire dans leur contexte, et ils sont toujours très instructifs. Autres entrées de premier ordre : Renou, Lévy, Padoux, Malamoud, Biardeau, Silburn... Le grand Renou disait de Daniélou (c'est Daniélou qui le rapporte) : « Daniélou n'utilise pas nos méthodes (i.e. universitaires, éditions critiques, etc.), mais quand je ne comprends pas un texte sanskrit, c'est à lui que j'ai recours ! »
11 septembre 2010, 14:21   Re : Alain Danielou
J'ai eu le livre entre les mains, et je crois, cher Monsieur Wilson, que vous avez parfaitement raison.
11 septembre 2010, 17:45   Re : Alain Danielou
Bernard,

Ayant été lecteur de Daniélou, devrais-je acheter cet ouvrage de Gabin ? apporte-t-il quelque chose ?
11 septembre 2010, 18:26   Re : Alain Danielou
Je ne l'ai pas lu, Jean-Marc, et je ne le lirai pas, pour les raisons dites par monsieur Wilson : il me semble un livre de ressentiment (les titres de chapitres, déjà !...) On peut bien voir par soi-même les limites internes de l'œuvre de Daniélou. Son approche de l'hindouisme dans Mythes de dieux de l'Inde, par exemple, est sans doute particulière (orientée vers le shivaïsme), mais très fouillée et passionnante. Cette vision de l'hindouisme est d'ailleurs certainement la plus cohérente. Et puis, c'est justement cette approche, personnelle, engagée, initiée, et non pas purement intellectuelle et universitaire, qui est intéressante. Ses visions, dans d'autres ouvrages, d'une sorte de panshivaïsme protohistorique sont sujettes à caution. Mais qui ne le voit d'emblée ? Daniélou ne s'embarrasse pas de références, et il faut souvent lire entre les lignes : c'est sa méthode.
13 septembre 2010, 04:53   Re : Alain Danielou
Pour M. Gabin, toute l'oeuvre de Daniélou ou plutôt tout ce qu'il a dit de l'Inde trouve son explication dans le rejet du catholicisme intransigeant de sa mère (et de son frère, Jean, le cardinal) et son homosexualité. Il aurait fait de l'hindouisme une religion du plaisir (et entre autres du plaisir homosexuel) en réaction au puritanisme supposé et à l'homophobie de la France des années 20-30. Il en aurait fait aussi un polythéisme par haine du monothéisme maternel. Et, pour imposer à ses lecteurs cette vision de l'Inde, il aurait délibérément trafiqué les textes.
Le problème, c'est que J.L. Gabin n'est en aucune façon un indianiste, qu'il ne maîtrise aucune langue indienne et n'a donc pas la compétence d'aller par lui-même vérifier les textes en, question. Il a donc recours en permanence à l'argument d'autorité (Untel a dit que Daniélou s'est trompé, donc Untel a raison...). Le problème, surtout, c'est que ce livre est un livre de ressentiment comme l'a justement noté M. Lombart, un meurtre du père (spirituel), tellement simpliste et caricatural qu'il rend attachant l'auteur qu'il attaque.
Que l'oeuvre de Daniélou ait peu de valeur scientifique, nul ne le conteste. Mais l'essai de JLG en a encore moins. JLG écrit par ailleurs assez mal, alors que Daniélou, quoi qu'on pense de ses livres, est un authentique écrivain.
J'ai croisé M. Gabin à Bénarès l'an passé (il y réside une partie de l'année). Le personnage m'a semblé profondément déplaisant, et ses sympathies affichées pour l'extrême-droite religieuse (car ce livre a été écrit, aussi, pour plaire aux nationalistes hindous qui ne supportent pas la manière dont les Occidentaux interprètent leurs mythes et leurs symboles rituels, comme le lingam) me le rendent plus déplaisant encore.
13 septembre 2010, 10:08   Re : Alain Danielou
Je précise encore (pour clore sur ce livre) :
- l'approche de l'hindouisme par AD est subjective et orientée, c'est évident, et c'est ce qui la rend si particulière et intéressante ; bien sûr, faire de l'hindouisme une " religion du plaisir" est simpliste car l'Inde (surtout l'Inde brahmanique) a toujours été très puritaine ; aujourd'hui encore les sentiments et les comportements y sont fortement censurés, et la sodomie n'a été décriminalisée que tout récemment ; mais il n'en est pas moins vrai que les mythes hindous peuvent être aussi lus comme des apologies du plaisir, et notamment des plaisirs du corps, comme les frises érotiques des temples du Centre et de l'Est (je pense à Belur, à Halebid, à Khajuraho ou à Konarak) le prouvent ; on pourrait même trouver dans certains de ces mythes et théogonies une sorte de justification codée de l'homosexualité humaine : Shiva s'unit à Vishnou (qui a pris sa forme féminine de Mohini) pour engendrer Ayyappan ; un de ses autres fils, Skanda (appelé Murugan dans le Sud), a été conçu sans participation féminine, etc. ; c'est bien la pluralité des interprétations de ces récits qui les fait si fascinants ; quant au lingam, il est probable que la plupart des Indiens d'aujourd'hui, après quelques siècles de pudibonderie musulmane et britannique, n'y voient plus un phallus érigé ; mais il est tout aussi probable que c'est d'abord ainsi que cet objet de culte et ce symbole ont été perçus jadis ;
- par ailleurs, les notions mêmes de polythéisme et de monothéisme n'ont pas grand sens en Inde ; l'hindouisme est à la fois un monothéisme et un polythéisme ; l'extrême souplesse de la psyché indienne permet aux hindous de vénérer tel ou tel dieu en particulier tout en étant bien conscients qu'ils ne sont (ces centaines de dieux) que la représentation humaine des différents attributs ou pouvoirs d'une divinité absolue, en elle-même irreprésentable et au delà de toute conceptualisation ; AD me semble avoir été fort explicite sur ce point dans ses divers livres, et le reproche constant que lui fait JLG de vouloir faire de l'hindouisme un polythéisme n'est donc guère fondé ;
- les articles du "Monde" et du "NouvelObs" sur l'ouvrage de JLG sont par ailleurs d'une affligeante médiocrité intellectuelle ;
- pour en finir donc : non, messieurs Lombart et Jean-Marc, il n'est guère urgent de perdre de précieuses heures à lire le livre de M. Gabin ; mais s'il vous tombe entre les mains, feuilletez-le quand même.
13 septembre 2010, 11:27   Re : Alain Danielou
"l'extrême souplesse de la psyché indienne permet aux hindous de vénérer tel ou tel dieu en particulier tout en étant bien conscients qu'ils ne sont (ces centaines de dieux) que la représentation humaine des différents attributs ou pouvoirs d'une divinité absolue, en elle-même irreprésentable et au delà de toute conceptualisation "
Je crois même que chacun peut donner au principe divin l'apparence qui lui convient. Il paraît qu'on a vu des hindous le vénèrer sous l'apparence de ... Brigitte Bardot .
13 septembre 2010, 11:37   Re : Alain Danielou
Je remercie chaleureusement monsieur Wilson pour ces précisions bien informées.

Pour faire voir la différence de niveau entre Daniélou et son détracteur, voici quelques courtes citations à propos de la problématique polythéisme/monothéisme, extraites d'une page que l'on trouve au début des Mythes et dieux de l'Inde :

« La cause première doit être au-delà du nombre, autrement le nombre serait la cause première. »

« La nature de l'Illusion (Maya) est [représentée par] le nombre un » (Eka shabdâtmikâ mâyâ).

« À aucun degré l'unité ne peut être considérée comme la cause de quelque chose puisque l'existence implique une relation, et l'unité causale impliquerait une existence sans relation » (pp. 24-25).
13 septembre 2010, 11:44   Re : Alain Danielou
Oui, Cassandre, ou des vedettes de "Devda", ou du Sacré-Cœur !
Mais les Indiens mystiques dont je parle refuseraient même le concept de « principe divin », puisque, justement, ce n'est qu'un concept à notre mesure. Et bien entendu, la religion naïve et la superstition sont présentes partout...

14 septembre 2010, 04:11   Re : Alain Danielou
Oui, oui, bien sûr, la Superstition et la religion naïve existent partout, et beaucoup d'Indiens peu éduqués lisent leurs légendes au 1er degré et croient sincèrement que la descente du Gange a été arrêtée par la chevelure de Shiva, ou que le dieu-singe Hanuman a, en un temps immémorial, "existé". Encore qu'on puisse être surpris par la façon dont des Indiens en apparence illettrés parlent finement de leurs mythes. Je me souviens d'avoir eu il y a quelques années, toujours à Bénarès, une longue conversation avec un jeune batelier dont j'étais plus ou moins amoureux sur le rôle de Krishna dans le Mahabharata (Krishna, avatar du dieu suprême Vishnou, est censé protéger et maintenir le dharma, l'ordre cosmique, la loi universelle ; or il transgresse lui-même ce dharma par le mensonge et la ruse afin que le camp des Pandavas remporte la victoire sur leurs cousins ennemis, les Kauravas...).
L'hindouisme serait donc, sous l'apparence polythéiste, un monothéisme plus subtil et complexe. Mais la réciproque n'est-elle pas vraie ? Le monothéisme chrétien n'est-il pas, à travers le culte des Saints, une sorte de polythéisme ? J'ai lu alors que j'étais jeune homme le très beau livre de Remy de Gourmont, "Le Paganisme éternel", longue et belle rêverie où l'auteur veut démontrer que le christianisme, loin de faire disparaître le paganisme antique, l'a en fait prolongé, remplaçant ses dieux par d'autres... Au sens gourmontien du terme, je me sens très chrétien. C'est du reste la principale différence entre l'islam et le christianisme, il me semble. L'islam, pour exister, a besoin de faire disparaître tout ce qui l'a précédé, d'en effacer même le souvenir. C'est bien en ce sens une religion de mort, comme l'actualité nous le prouve chaque jour.
14 septembre 2010, 07:26   Re : Alain Danielou
Je crois, pour ma part, que l'on a aucun intérêt à tirer les textes sanskrits vers le monothéisme, ni à voir une sorte de polythéisme dans les textes chrétiens. Les chrétiens ont toujours fait parfaitement la différence entre Dieu et ses saints. C'est moins net, bien entendu, pour les religions indiennes, mais on peut voir dans le polythéisme une plus grande transcendance, comme le laissent deviner les petits extraits que je citais plus haut.

Petite anecdote. Un Indien m'a fait cadeau, un jour, de bâtons d'encens. Il était écrit sur la boîte, sous un chromo très kitch de Krishna, le dieu à la flûte (sens ad libitum) quelque chose comme : « the lord Krishna was born in 3200 BC... » Comme je me mis à rire (involontairement, car ce n'était pas très poli, mais nos nos relations pouvaient le permettre), il s'exclama : « oh yes, of course, there is no proof... »


14 septembre 2010, 08:11   Re : Alain Danielou
Je ne mésestime évidemment pas ce qui sépare le monothéisme du polythéisme, ou le christianisme du paganisme antique. Je parlais de la perception populaire du christianisme, à ses débuts et plus tard, qui explique pourquoi il s'est répandu à travers l'Europe avec si peu de heurts comparativement à la propagation guerrière de l'islam. On sait que de nombreux lieux de pèlerinage se sont installés sur des lieux de culte romain, grec, gaulois ou celte précédents, et que de nombreux saints ont été vénérés par le petit peuple comme l'étaient, avant que le christianisme fût devenu religion officielle de l'Empire, tel dieu ou telle déesse. C'est ce qui rend à mes yeux le catholicisme si poétique et attachant, à l'inverse par exemple de la froide rigidité protestante. Quant à l'hindouisme, encore une fois, les termes de mono- et de polythéisme sont mal appropriés pour l'appréhender. Il est du reste amusant de constater que maintes sectes hindoues reconstituent une forme de monothéisme puisqu'elles privilégient et vénèrent un dieu en particulier, à l'exception de tout autre parfois. Ainsi, les lingayats du Madhya Pradesh et du Karnataka (qui enterrent leurs morts au lieu de les brûler) adorent-ils uniquement Shiva, tandis que ce même Shiva, pour certaines sectes krishnaïtes (dans l'Orissa par exemple) n'est que la manifestation de certains attributs de Vishnou - dieu suprême et unique...
14 septembre 2010, 08:42   Re : Alain Danielou
On peut en tout cas remarquer à ce sujet que les musulmans reprochent au chrétiens d'être de faux monothéistes, des "associateurs".
La question se pose aussi à propos de la tentative éphémère d'Aménophis IV (Akhenaton) d'instaurer ce que certains appellent "une sorte de monothéisme" tandis que d'autres parlent de simple hiérarchisation du panthéon égyptien.
Et qu'en est-il, Messieurs, quand Socrate, au moment de sa mort, parle de Dieu ?
14 septembre 2010, 09:10   Re : Alain Danielou
Dans le texte de Platon sur la mort de Socrate, l'on trouve la plupart du temps "ho theos" (avec l'article défini). Il y a, en effet, l'une ou l'autre occurrence sans l'article... Vous pouvez vérifier ici : [remacle.org]
Question de traduction et de traducteur, à mon sens... Je ne crois pas que l'on puisse en tirer des conclusions en faveur d'un monothéisme au sens où nous l'entendons ("les trois monothéismes")... Certains textes grecs à tendance gnostique (IV a.C.) établissent des équivalences entre les dieux au point de tout ramener à un seul, mais c'est par définition spéculatif et confidentiel...
14 septembre 2010, 09:26   Re : Alain Danielou
Je pense que le grec ancien utilise l'article défini comme déterminant du nom propre, dès lors que le porteur de ce nom propre est parfaitement identifié, voir Libanius employant "Le Démosthène".
14 septembre 2010, 09:49   Re : Alain Danielou
"Theos" est un nom commun, et "le" dieu dont il s'agit au début du Phédon est Apollon...
(L'article en grec est un ancien démonstratif.)
14 septembre 2010, 09:58   Re : Alain Danielou
Oui, c'est comme cela que j'avais compris votre message, je voulais insister sur le fait que l'article défini grec n'avait pas exactement le même sens que l'article défini en français, et qu'écrire "le dieu" ou "dieu" n'a pas forcément une grande importance en grec.
14 septembre 2010, 10:31   Re : Alain Danielou
Je n'entends hélas pas le grec. Dans la traduction que vous avez mise en ligne, cher Bernard, il y a tout de même de nettes différences entre, par exemple,

C’est justement cette théorie qu’ils ont toujours envoyée depuis lors, et qu’ils envoient encore aujourd’hui chaque année au dieu (où Phédon parle d'Apollon)

et

je me prenais à penser que, même en allant chez Hadès, il y allait avec la faveur des dieux et qu’arrivé là-bas, il y serait heureux

ou

je crois, poursuivit-il, que si Ésope avait remarqué cela, il en aurait composé une fable, où il aurait dit que Dieu, voulant réconcilier ces deux ennemis

Et, citant, Socrate en style direct :

Mais à présent que mon procès a eu lieu et que la fête du dieu a fait surseoir ma mort (où Socrate parle d'Apollon)

et

ce sont des dieux qui s’occupent de nous et que, nous autres hommes, nous sommes un des biens qui appartiennent aux dieux

alors que

Si l’on se place à ce point de vue, peut-être n’est-il pas déraisonnable de dire qu’il ne faut pas se tuer avant que Dieu nous en impose la nécessité, comme il le fait aujourd’hui pour moi.

ou bien

Tant que nous serons en vie, le meilleur moyen, semble-t-il, d’approcher de la connaissance, c’est de n’avoir, autant que possible, aucun commerce ni communion avec le corps, sauf en cas d’absolue nécessité, de ne point nous laisser contaminer de sa nature, et de rester purs de ses souillures, jusqu’à ce que Dieu nous en délivre.

ou encore, bien sûr, le fameux

Tant que nous serons en vie, le meilleur moyen, semble-t-il, d’approcher de la connaissance, c’est de n’avoir, autant que possible, aucun commerce ni communion avec le corps, sauf en cas d’absolue nécessité, de ne point nous laisser contaminer de sa nature, et de rester purs de ses souillures, jusqu’à ce que Dieu nous en délivre. où Socrate ne semble vraiment pas parler d'Apollon, ni même d'Hadès.

Ces différences flagrantes, y compris par l'emploi ou non de la majuscule, sont-elles réellement dues au traducteur et à lui seul ?
14 septembre 2010, 10:53   Re : Alain Danielou
« Ces différences flagrantes, y compris par l'emploi ou non de la majuscule, sont-elles réellement dues au traducteur et à lui seul ? »

Pour moi, c'est certain. Pour reprendre un ou deux de vos exemples, dans « avant que Dieu nous en impose la nécessité » ou « jusqu’à ce que Dieu nous en délivre » (je ne récuse pas la traduction avec majuscule proposée par Remacle), il s'agit d'Anankè, la Nécessité ou de Dikè, la Justice (celle qui distribue, par exemple, le rôle des astres), "entités" divines que l'on retrouve notamment chez les présocratiques...
14 septembre 2010, 10:59   Re : Alain Danielou
Et qu'on retrouve dans Notre-Dame de Paris !
14 septembre 2010, 11:01   Re : Alain Danielou
» Et qu'on retrouve dans Notre-Dame de Paris !

Ah oui ? Dites-nous...
14 septembre 2010, 11:04   Re : Alain Danielou
Merci beaucoup de vos savantes réponses.
14 septembre 2010, 11:12   Re : Alain Danielou
Je suis, chers amis, votre échange avec un vif intérêt et vous en remercie.
14 septembre 2010, 11:14   Re : Alain Danielou
Notre-Dame de Paris est le premier ouvrage dit de la trilogie des Ananké, suivi des Misérables et des Travailleurs de la mer.

Hugo nous écrit ceci dans la préface des Travailleurs :



La religion, la société, la nature ; telles sont les trois luttes de l'homme. Ces trois luttes sont en même temps ses trois besoins ; il faut qu'il croie, de là le temple ; il faut qu'il crée, de là la cité ; il faut qu'il vive, de là la charrue et le navire. Mais ces trois solutions contiennent trois guerres. La mystérieuse difficulté de la vie sort de toutes les trois. L'homme a affaire à l'obstacle sous la forme superstition, sous la forme préjugé, et sous la forme élément. Un triple anankè pèse sur nous, l'ananké des dogmes, l'ananké des lois, l'ananké des choses. Dans Notre-Dame de Paris, l'auteur a dénoncé le premier ; dans les Misérables il a signalé le second ; dans ce livre, il indique le troisième.

A ces trois fatalités qui enveloppent l'homme se mêle la fatalité intérieure, l'ananké suprême, le cœur humain.

Hauteville house, février 1866.


Par ailleurs, Ananké apparaît explicitement dans le roman Notre-Dame de Paris.
14 septembre 2010, 11:19   Re : Alain Danielou
Pour Notre-Dame de Paris :

Il y a quelques années qu'en visitant, ou, pour mieux dire, eu furetant Notre Dame, l'auteur de ce livre trouva, dans un recoin obscur de l'une des tours, ce mot gravé à la main sur le mur :

ΑΝΑΓΚΗ

Ces majuscules grecques, noires de vétusté et assez profondément entaillées dans la pierre, je ne sais quels signes propres à la calligraphie gothique empreints dans leurs formes et dans leurs attitudes, comme pour révéler que c'était une main du moyen-âge qui les avait écrites là, surtout le sens lugubre et fatal qu'elles renferment, frappèrent vivement l'auteur.

Il se demanda, il chercha à deviner quelle pouvait être l'âme en peine qui n'avait pas voulu quitter ce monde sans laisser ce stigmate de crime ou de malheur au front de la vieille église.

Depuis, on a badigeonné ou gratté (je ne sais plus lequel) le mur, et l'inscription a disparu. Car c'est ainsi qu'on agit depuis tantôt deux cents ans avec les merveilleuses églises du moyen-âge. Les mutilations leur viennent de toutes parts, du dedans comme du dehors. Le prêtre les badigeonne, l'architecte les gratte; puis le peuple survient, qui les démolit.

Ainsi, hormis le fragile souvenir que lui consacre ici l'auteur de ce livre, il ne reste plus rien aujourd'hui du mot mystérieux gravé dans la sombre tour de Notre-Dame, rien de la destinée inconnue qu'il résumait si mélancoliquement. L'homme qui a écrit ce mot sur ce mur s'est effacé, il y a plusieurs siècles, du milieu des générations, le mot s'est à son tour effacé du mur de l'église, l'église elle-même s'effacera bientôt peut-être de la terre.

C'est sur ce mot qu'on a fait ce livre.
14 septembre 2010, 11:54   Re : Alain Danielou
Merci, Jean-Marc.
Utilisateur anonyme
21 octobre 2010, 11:19   Re : Alain Danielou
Lettres ouvertes du Centre Daniélou aux articles grossiers et désinformés parus dans une presse qui fait la part belle à l'obscurantisme le plus rétrograde" :

Lettre ADA22

Lettre ADA22bis
21 octobre 2010, 11:42   Re : Alain Danielou
Merci pour cette mise en ligne.

Ma position sur ce livre et cette "affaire" est inchangée : aussi douteuses que soient certaines des interprétations de l'hindouisme par Daniélou, il fait figure, comparé à ce JLG, de géant de la pensée, et la complaisance avec laquelle le livre dudit JLG a été accueilli par la presse "sérieuse" en dit long sur la compétence et l'intelligence des journalistes qui y sévissent.
21 octobre 2010, 13:03   Re : Alain Danielou
Bernard nous manque, ses lumières aussi.
22 octobre 2010, 06:34   Re : Alain Danielou
Il est par ailleurs comique (je me répète) de voir "Le Monde" et "Le NouvelObs" encenser un livre roulant de fait pour les extrémistes hindous...
Utilisateur anonyme
09 novembre 2010, 13:23   Re : Alain Danielou
Surprenant également, le fait que les Editions du Cerf, aux accointances plutôt catholiques, publient l'ouvrage d'un auteur comme Jean-Louis Gabin. En effet, ce dernier a sorti chez Denoël en 1986; sous le pseudonyme de Jean-Louis Bastian, un ouvrage érotique assez audacieux, "Chaque fête de sang", qui relate notamment de façon plus qu'osée des aventures avec un jeune homme de dix-sept ans.
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