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L'art de la lecture à voix haute.

Envoyé par Utilisateur anonyme 
Utilisateur anonyme
15 novembre 2010, 21:36   L'art de la lecture à voix haute.
Dans ces temps où le forum fourmille de thèmes politiques, je me permets un apparté sur un sujet me tenant à cœur : lire à voix haute. Plus particulièrement Renaud Camus lisant à haute voix.
J'ai eu la chance de l'entendre lire lors d'une émission de radio. Quelqu'un sait-il si il existe des enregistrements de Renaud Camus lisant. Je le trouve sur ce terrain là, et comme souvent, voir toujours, terriblement brillant.
Ma deuxième question : existe t-il des ouvrages intéressants sur cet art ?
Je me souviens avoir offert à une belle-soeur comédienne deux volumes de Béatrix Dussane sur l'art de la lecture; il doit en exister bien d'autres. Écouter des acteurs comme François Chaumette, Jean Topart, Gérard Philippe, est déjà plein d'enseignement. On peut en citer beaucoup d'autres.
Jeanne Moreau lisant "Histoire d'enfant" de Peter Handke m'avait émue aux larmes.

Y-a-il vraiment un art de cette lecture, je pense à François Mauriac avec sa voie cassée qui faisait la lecture à ses enfants et petits-enfants ( Anne Wiazemski en parle dans un entretien ).
N'oubliez pas Louis Jouvet !
Dans ses Confessions, saint Augustin dit avoir été étonné de voir Ambroise de Milan lire la Bible sans remuer les lèvres. C'est un passage bien connu. Pour ce qui est de Renaud Camus lisant, il y a ceci :




Utilisateur anonyme
16 novembre 2010, 07:18   Re : L'art de la lecture à voix haute.
Eh bien ! Merci à vous tous pour vos conseils, me voilà croulant sous les recherches !
Lucchini a aussi donné une très belle lecture des Trois Contes de Flaubert.
Sans parler de sa lecture de Muray, qui était en tous points divine.
16 novembre 2010, 15:45   Re : L'art de la lecture à voix haute.
Je tiens également beaucoup à la lecture à voix haute, ainsi qu'aux "livres audio", toujours plus nombreux dans nos bibliothèques publiques. Je crois que dans Loin on peut lire quelques phrases sur le goût marqué du narrateur pour ces CD, qu'il écoute en voiture. Paul Désalmand et Yves Nayrolles sont pour moi deux excellents lecteurs, que j'apprécie surtout pour Maupassant (il existe une collection intitulée "Beaux textes et musique" qui ne m'a encore jamais déçu, où l'on peut entendre la claire voix d'Yves Nayrolles), ainsi que Didier Sandre (dont la voix est remarquable et la lecture tout en retenue) pour Le Traité du Vain Combat ou les extraits des Pensées de Pascal.
Cher Jean-Philippe, tapez www.eric-chartier.com, je crois que vous ne serez pas déçu.
Acteur à l'origine, Eric Chartier se consacre depuis plus de vingt ans à la transmission orale de la littérature. Ni lecture (il apprend tous les textes et il les dit), ni adaptation théâtrale (le texte, rien que le texte mis en bouche), ses spectacles sont uniques. Il se produit chaque été près de Pornic, au château des Brefs, propriété de la famille Gallimard, où j'ai pu l'entendre dire Proust, Gracq et Maupassant. Balzac, Aymé, Tocqueville, Saint-Simon, Hugo ou Flaubert sont également à son répertoire. On peut l'entendre parfois à Paris, mais le lien ci-dessus vous en apprendra plus.
(Je m'excuse de ne pas vous procurer directement ce lien mais mes connaissances internet ne vont pas jusque là.)
Cher Werner, quelle joie de vous retrouver ici ! (Je me permets de trahir le fait que nous nous connaissons, j'espère que cela ne nuira pas à votre réputation...).
Puisque vous parlez de "livres audio" - vous savez comme je les apprécie - je me permets d'évoquer cette découverte que furent les Liaisons dangereuses, lus par d'excellents acteurs dont j'ai oublié le nom (ah, et le Nez de Gogol ! Comment s'appelait ce lecteur déjà ?)
En revanche, je me suis infligé hier la première phrase d'Une saison en enfer, lu par Lorànt Deutsch, souffrance à laquelle j'ai mis un terme au plus vite. Il faudrait en outre savoir si l'excellentissime lecture du Voyage au bout de la nuit par Michel Simon va au-delà du premier chapitre (qu'on trouve dans le double disque compact consacré à Céline).
(Avez-vous prêtez l'oreille au site que recommande Johannus Marcus ? Voilà qui me paraît particulièrement réjouissant !)
Pour Rimbaud, le Cercle de Poésie, dans les années soixante, avait publié un 33t préfacé par Jean Paulhan et dont les lecteurs étaient Roger Blin et Laurent Terzief. Remarquable.
Puisque vous parlez de Terzieff, cher Florentin, je reprends un passage d'un entretien qu'il accordait au Monde2 le 2 mai 2009 (Il y a là matière à réflexion pour vous, Jean-Philippe. ) ... et dont les premiers mots sont aujourd'hui particulièrement émouvants :
"Si la vie me donne un peu d'avenir, j'aimerais continuer le sillon que j'ai engagé avec Rilke, Milosz, les poèmes de Brecht, Desnos, Hölderlin ... je voudrais aller plus avant dans l'expérience d'un spectacle de poésie, surtout pas un récital. [ ...] L'oralité peut être une passerelle entre la solitude du poète et chacun d'entre nous. Mais pour cela, il faut une vraie représentation de théâtre. Surtout pas de lecture : il faut apprendre le texte par cœur - quelle maladie que ces lectures où l'on prend une vedette pour faire chic ... Pour que l'acteur soit une passerelle, il faut qu'il ait bien défini pour lui-même les différents sens cachés du poème, sans en imposer aucun. Et surtout, il va devoir traduire l'émerveillement qu'il a lui-même éprouvé à la découverte du texte : que cet émerveillement reste vivant, intact, parce que c'est cela qui va passer."
La question de l'apprentissage par cœur est fondamentale. Eric Chartier, que je cite plus haut, s'est donné la peine d'assimiler les œuvres littéraires ; je me souviens d'un spectacle texte + piano dans lequel Didier Sandre, au contraire, se contentait de lire des lettres d'Hector Berlioz . Malgré son talent, son autorité naturelle et la beauté de sa voix, il restait extérieur au texte. La correspondance de Berlioz semblait au service de l'acteur, et non l'inverse.
16 novembre 2010, 19:40   Re : L'art de la lecture à voix haute.
Merci Johannus Marcus pour ce lien très alléchant, j'aimerais beaucoup aller à ce genre de représentation, et les extraits m'ont mis l'eau à la bouche. Comme vous dites, Didier Sandre a une "autorité naturelle", et j'avoue que pour les livres audio, et non pour les spectacles, j'ai une préférence pour les lectures très sobres. Des lectures que l'on peut écouter plusieurs fois, où l'on peut revenir en arrière à sa guise, jusqu'à posséder le texte par l'ouïe - ce qui revient peut-être dans l'esprit à la même chose, mais qui donne lieu à des sensations très différentes de la lecture.

J'ai eu moi aussi de tristes expériences, notamment avec Denis Lavant et Les Fleurs du Mal, mais ces livres audio et les balladeurs ont tout de même changé bien des choses dans mon quotidien. Je sais ce qu'ont d'agaçant toutes ces personnes qui portent des microphones dès qu'elles mettent un pied en dehors de leur demeure... Et pourtant je suis de ceux-là. Ecouter plusieurs dizaines de fois le même poème, ou la même conférence (ah, Gabriel Marcel sur l'inquiétude !) m'a permis de méditer, si je peux faire usage d'un mot aussi solennel, de méditer les textes. Quel plaisir de sortir vers les onze heures du soir pluvieux, pour marcher dans la vieille ville sous un parapluie, Le Nez dans les oreilles, Jean, lu par Nayrolles !
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