Le site du parti de l'In-nocence

Éducation nationale et réduction en quantité du corps enseignant

Envoyé par Renaud Camus 
Le parti de l'In-nocence, fort de sa doctrine en matière d'Éducation nationale, et considérant que le problème était autrement plus vaste que celui des seuls effectifs, a attaché jusqu'à présent très peu d'attention à cet aspect des choses, et il n'a pas soutenu les manifestations de professeurs (pardonnez-moi, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas écrire l'affreux "enseignants", terme en lequel réside, justement, à mon avis, une bonne part du problème) contre les réductions d'effectifs dont ils faisaient l'objet. Nous les avons d'autant moins soutenus (sans non plus écrire un mot contre leurs manifestations, du moins contre les motifs d'icelles) que nous étions sensibles aux impératifs budgétaires censés rendre inévitables les réductions d'effectifs.

Mais nous arrivons à une contradiction, et ne pouvons rester plus longtemps dans le silence. Certes nous continuons de considérer que la question des effectifs n'est pas l'essentiel, qu'en tout cas elle n'est pas première, qu'elle n'est pas le plus grave. Néanmoins le parti a un programme très strict en matière d'Éducation, dont l'un des grandes originalités est la création d'un "Troisième Corps" de professeurs (avec ceux de l'Enseignement général et ceux de l'Enseignement professionnel), "escadron volant", nous l'avons souvent dit et écrit, destiné à assurer, dans la mesure du possible, une véritable égalité des chances entre les enfants à quelque origine culturelle, sociale, économique, ethnique qu'ils appartiennent ; à faire en sorte qu'aucune situation non désirable et non désirée ne soit définitive si elle peut ne pas l'être (qu'un enfant engagé dans l'enseignement professionnel soit énergiquement aidé à repasser dans l'enseignement général s'il le désire, par exemple) ; que tous se voient prodiguer les moyens de devenir tout ce qu'il en eux de devenir (si c'est positif) — et cela par le secours d'une assistance pédagogique dans une large mesure personnalisée, ou quasi-personnalisée (séances de rattrapage pour un, deux, trois, quatre ou cinq élèves, etc. ; c'est la mission du fameux "Troisième Corps".

Bien. Pardon, j'écris très vite et ne suis peut-être pas très clair, mais la plupart d'entre vous connaissent déjà le sujet, qui nous a beaucoup occupés. La seule existence de ce "Troisième Corps", escadron volant de secours pédagogique pas nécessairement lié à telle ou telle institution particulière d'enseignement, suppose un corps professoral global quantitativement (il est entendu que nous laissons de côté pour l'instant la question pourtant capitale de sa qualité) important. Comment concilier cette exigence avec les actuelles réductions de poste, si légitimes soient-elles d'un point de vue budgétaire ? Et devons-nous d'ores et déjà soutenir les manifestations de professeurs — bien que la plupart d'entre eux ne soient pas nos amis, et que les dites manifestations soient souvent affligeantes dans leur forme — pour nous opposer avec eux à la poursuite des réductions d'effectifs, contraires aux idéaux de l'In-nocence, parmi lesquels un système éducatif de haute qualité (c'est-à-dire profondément réformé) figure au tout premier rang ?
28 mars 2011, 11:37   Entre deux chaises
Je pense (pardonnez le caractère un peu benêt de cette réponse) qu'il convient que le parti de l'In-nocence affirme haut et fort son opposition à la réduction du nombre de postes dans l'Education nationale (et partant qu'il dise publiquement qu'il est, d'après l'idéal qu'il s'est fixé et les réformes qu'il envisage, sensible à toute protestation qui irait dans le sens de cette opposition), MAIS qu'il ne partage pas les motifs profonds d'indignation desdits "enseignants", quelque légitime et utile, d'un point de vue pragmatique, soit leur lutte. La réponse est dans la question, et je ne crois pas qu'on puisse éviter de faire ce distinguo (laborieusement résumé par votre serviteur).
Quels sont d'après vous ces "motifs profonds" ? On ne peut pas exclure qu'une partie au moins des "enseignants" se battent dans le souci sincère de la qualité de l'enseignement...
Ne serait-il pas souhaitable de regarde l'évolution des effectifs d'élèves et d'enseignants avant de se prononcer ?

Vous vous reporterez avec intérêt aux tableaux et graphiques suivants :

[economie-analyses-actualites-opinions.over-blog.com]

On notera en outre que l'effectif des personnels du premier degré a bondi de 215 000 à 310 000 environ de 1960 à 2010,

[media.education.gouv.fr]

Sachant que les classes d'âge nées entre 1948 et 1956 sont les plus nombreuses de notre histoire, et sachant en outre que les écoles de 1960 accueillaient en "fin d'études" des élèves qui réussissaient et qui maintenant encombrent les collèges, et voyant les éblouissants résultats du système actuel, surtout en les comparant à ceux de 1960, on peut légitimement d'interroger sur l'approche par les effectifs.
Je me suis en effet mal exprimé : je voulais dire que le parti de l'In-nocence, du moins à mon avis, ne devrait pas faire sienne la totalité des motifs desdites revendications portant sur les suppressions de postes de professeurs, car à ces dernières viennent assez souvent (il suffit de croiser une manifestation pour le constater) s'agréger d'autres thèmes, comme les atteintes récentes portées aux IUFM (je ne sache pas que le PI ait jamais porté ceux-ci dans son coeur), le manque de moyens (qui est souvent présenté comme le seul véritable problème de l'Education nationale), etc. Bien sûr, ces professeurs combattent, disent combattre, pour la qualité de l'enseignement (mais mettent-ils dans ce vocable la même chose que l'In-nocence ?), et il est vrai qu'en réclamant la cessation des suppressions de poste ils oeuvrent dans le bon sens, mais j'ai la faiblesse de croire qu'une grande partie d'entre eux appartiennent à la catégorie des demi-habiles si bien décrits par Francis Marche que la vérité traverse comme malgré eux et vient habiter occasionnellement sans imprégner leur conduite générale. Aussi jugé-je que le parti de l'In-nocence doit en l'occurrence, et s'il l'estime nécessaire, affirmer non pas un soutien inconditionnel à ce genre de manifestations, mais un soutien prudent et mesuré.
Stéphane,

Une hausse de 50 % du nombre d'instituteurs alors que le nombre d'élèves en âge d'être scolarisés baissait de plus de 10 % est, pour moi, une augmentation énorme de moyens.

On a vu où cela nous a conduit.
Stéphane, je crois qu'un des problèmes réside dans la logique de "cliquet" des syndicats et de leurs mandants : on ne peut jamais revenir en arrière, sur des avantages particuliers ou sur des allocations de moyens.

A ma connaissance, les "instits" d'autrefois, fonctionnaires de catégorie B, se sont vus remplacés par des "professeurs des écoles" qui sont de catégorie A, si je ne m'abuse. La "revalorisation catégorielle" a été fort importante.

On n'aime pas les statistiques, je le sais. Il ne semblerait pas que ces mesures aient eu une contre-partie quelconque en matière d'acharnement au travail, et surtout en matière de méthodes et de résultats.
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Je crois qu'il faut tenir compte des réalités. Quelles sont-elles ?

La France est de tous les pays de l'OCDE et sans doute aussi du monde celui qui consacre les sommes les plus élevées (par élève et par habitant) à "l'éducation" : fonds publics (communes, conseils généraux, conseils régionaux, Etat) et "investissements" des familles (achat de matériel scolaire, cours particuliers, écolages dans le privé). C'est aussi le pays dans lequel les "résultats" des élèves, évalués dans les pays de l'OCDE à partir des mêmes instruments de mesure, sont parmi les plus faibles. De très gros moyens pour des résultats médiocres qui ne sont pas en rapport avec les sacrifices consentis par les familles, les contribuables et la "nation" : c'est même humiliant pour notre pays.

La seule bonne nouvelle de ces vingt dernières années est la fin de la mainmise des IUFM sur la formation des professeurs de l'enseignement secondaire. Ce n'est qu'un début (mais je doute que quiconque aille plus loin). Il faudrait étendre cette "libération" au primaire, au corps des inspecteurs - primaires, d'Académie et "généraux" -, aux "sciences de l'éducation", à tout ce qui est "recherche" en pédagogie / didactique / sciences de l'éduc...

Le désastre n'est pas consécutif à une insuffisance des "moyens". Ce n'est pas une question de quantité, ni de flux, ni de nombre. Il en va de même dans les universités. Dans de nombreux départements, le nombre d'étudiants inscrits s'est effondré depuis dix ou quinze ans, sans que celui des "enseignants" ait changé, au point que, dans certaines disciplines, il faut multiplier les groupes ou les enseignements sans objet pour que les enseignants aient de quoi s'occuper. Un enseignement dit "supérieur" ou des "cours magistraux" dispensés devant deux ou trois étudiants ne méritent plus les qualificatifs qui y sont prédiqués.

La seule dénomination ("fasciste") d'Education nationale (imposée en 1934 sur le modèle de Mussolini) est haïssable. Rien ne justifie plus l'existence d'un ministère qui emploie plus d'un million de fonctionnaires et qui est contrôlé, non plus par les élus du peuple, mais par des groupes de pression ou des "syndicats" qui ne représentent qu'eux-mêmes. En 1793, les Jacobins (loi Bouquier) ont posé un principe : tout citoyen a le droit d'ouvrir une école, lequel, s'il était appliqué, autoriserait des familles et des professeurs à ouvrir des écoles publiques (fonctionnant avec des fonds publics) dans lesquels seraient enseignés les humanités, par exemple, ou les arts. Il est urgent de revenir aux principes de l'instruction publique énoncés au XIXe siècle : c'est l'instruction publique qui est obligatoire, et non pas l'école; cette instruction peut être dispensée par le chef de famille (père ou mère) lui-même ou toute personne qu'il a désignée; elle peut se faire dans n'importe quel lieu : école publique ou école privée ou école associative ou école alternative; la seule chose qui s'impose à tous, ce sont des programmes nationaux; seule l'instruction peut être assumée par l'Etat ou toute autre institution agréée, l'éducation étant de la responsabilité des familles.
En effet, sans doute la "rebaptisation" de ce ministère est-elle nécessaire.
J'ai dû mal m'expliquer, nous tournons en rond. Toutes les interventions ci-dessus reflètent les positions traditionnelles du parti, il n'est pas question de les remettre en cause. Je m'interrogeais, si j'ose dire, au-delà. Quand les professeurs se plaignent de classes qui du fait des réductions d'effectifs atteindraient trente-deux, trente-cinq élèves ou davantage, on ne peut pas être tout à fait insensible à leurs inquiétudes. Est-ce ou n'est-ce pas le cas ? Je sais bien qu'il y a eu diminution du nombre des élèves, mais cette diminution est, à ma connaissance, interrompue. Est-il souhaitable dans ces conditions de continuer à réduire en quantité le corps enseignant ?
La réduction des effectifs dans l'Education nationale est un fait. Mais c'est une politique très récente, depuis 2002 et Luc Ferry (ou son successeur, je ne sais plus). Si on compare à grande échelle les chiffres depuis 1960, cette baisse est bien sûr invisible. Mais ce qui est décrit dans le premier message est la réalité de ces dernières années et sans doute de celles à venir. De plus, le nombre d'élèves est absolument stable depuis 1980 : quinze millions.

Je suis peut-être exagérément optimiste mais je pense, pour reprendre la formule de M. Camus, "qu'une partie au moins des "enseignants" se battent dans le souci sincère de la qualité de l'enseignement", et même la majorité, selon moi.
Il faut prendre conscience que cette profession vit un très grand malaise au quotidien, pour les raisons que nous citons ici chaque jour, et qu'elle est aujourd'hui profondément désemparée et abattue. Puisqu'elle est empêchée de tenter de comprendre les raisons profondes de son malheur (il ne faut pas le dire, pas le penser !), puisqu'elle a malgré tout une profonde empathie pour les élèves (ça ne peut pas être de leur faute), elle a tendance à viser les cibles que désignent une minorité de braillards syndiqués : la suppression des postes et le manque de moyens, "sources de tous leurs maux" leur disent les porte-voix. Les professeurs ne savent pas trop ce qui leur arrive mais un ennemi est désigné alors ils suivent.

Cependant, la suppression de postes n'est pas, de façon aussi simple, un faux problème. C'est aussi une inflation de la taille des classes, un niveau par cette raison toujours plus hétéroclite, et donc toujours plus médiocre. Quand on a une classe surchargée, la priorité est de s'occuper des faibles et donc de laisser les bons se débrouiller, ne rien faire ou se contenter de suivre, au lieu de de leur donner de quoi s'aiguiser l'esprit. Les postes supprimés sont surtout ceux des bibliothèques (Cdi), de l'orientation, des infirmeries ou des enseignements de l'art. Ainsi, on offre de moins en moins aux élèves, et ceux-ci ne se contentent que du travail obligatoire. Le Cdi tout le temps fermé, tant pis je ne lirai pas ; personne pour m'expliquer mon orientation, tant pis je vais aller à la fac comme les copains...

La réduction des effectifs est un problème qui ne concerne pas que la catégorie des enseignants, mais la France entière, toutes les professions, toutes les catégories. Le travail qui était fait en 39 heures doit toujours être fait en 35 heures, le travail fait à trois personnes toujours à deux. Pour les professeurs comme pour les autres travailleurs, faire plus de choses en moins de temps, c'est être dans l'urgence permanente, faire son travail moins bien ou à minima, avoir moins de recul sur son activité. Enfin, c'est rentrer chez soi éreinté et allumer TF1 au lieu de prendre un livre, se vider l'esprit plutôt que se prendre la tête. Avoir le temps et l'énergie de penser est tout de même le début de tout.

Pour résumer, la réduction des effectifs n'est pas le principal problème pour les enseignants, et il faudrait le leur faire comprendre, mais c'en est un tout de même, et pour tous les travailleurs.
Mathieu,


Trouvez-vous normal que des gens qui ont fait des études supérieures et qui ont pour mission d'éduquer la jeunesse suivent
la "minorité de braillards syndiqués" ?

Qu'est-ce qui les empêche, lors du vote à bulletin secret, de voter pour le SNALC ? il fait 5 %...

En revanche, les "enseignants" se rendent en hordes aux urnes pour la FSU...
Citation
Jean-Marc
Trouvez-vous normal que des gens qui ont fait des études supérieures et qui ont pour mission d'éduquer la jeunesse suivent la "minorité de braillards syndiqués" ?
Qu'est-ce qui les empêche, lors du vote à bulletin secret, de voter pour le SNALC ? il fait 5 %...
En revanche, les "enseignants" se rendent en hordes aux urnes pour la FSU...

Je pense qu'ils sont déboussolés et s'accrochent à une branche, les syndicats qui leur promettent la résolution d'un problème qu'ils pensent primordial. C'est la désignation d'un bouc-émissaire qui est importante dans cette affaire.

C'est à peu près pareil dans n'importe quelle administration, les personnels votent en masse pour FO, SUD, CGT parce qu'ils ont envie que ça bouge alors qu'ils ne sont pas forcément d'extrême gauche.
Combien étaient-ils à défiler dans les rues l'autre jour ? Mille ? Deux mille ? Combien sont-ils à faire grève ? 20 % ?

Avant que M. Darcos ne cesse ses fonctions, il avait commandé une étude sur les absences des enseignants - étude qui, à peine publiée, a été remisée dans les placards, comme le rapport Obin de 2001 ou 2002. Le taux d'absentéisme est légèrement supérieur à celui que l'on constate dans la fonction publique et nettement supérieur à celui des salariés du privé. La répartition sur l'année scolaire des absences est éloquente : la semaine ou les dix jours qui précèdent et suivent les vacances (Toussaint, Noël, hiver, Pâques, été) et les jours qui précèdent et suivent les jours fériés du mois de mai. Que l'on ne s'étonne pas ensuite que les absents ne soient pas remplacés.

Plusieurs siècles durant, des maîtres ont fait la classe à quarante ou cinquante élèves - sans qu'ils se soient jamais plaints et sans qu'ils aient renoncé à leur mission ou sans qu'ils aient abaissé le niveau de leurs exigences. Entendu la récrimination d'une enseignante : désormais, nous ne ferons plus cours devant quinze élèves...

Un des maux du "système" est la "mise à disposition" de syndicats, d'associations de loisirs, d'associations d'éducation populaire, etc. d'enseignants. Le Sénat en a compté plus de dix mille. Ils émargent au budget de l'Etat, mais ils ne sont pas devant les élèves. S'ils y étaient, le nombre d'élèves par classe n'augmenterait peut-être pas autant. Qui aura l'audace de mettre fin à ces manquements à l'esprit public ?
Citation
JGL
Plusieurs siècles durant, des maîtres ont fait la classe à quarante ou cinquante élèves - sans qu'ils se soient jamais plaints et sans qu'ils aient renoncé à leur mission ou sans qu'ils aient abaissé le niveau de leurs exigences.

Euh... peut-être parce que quarante élèves au garde à vous de 1911 et trente zoulous dansants de 2011 ne sont pas le même public ?

Sérieusement, je pense que la réalité d'une classe, aujourd'hui, est plus visible dans "La journée de la jupe" que dans "Entre les murs". Reconnaissez quand même qu'enseigner est un métier difficile. C'est un peu léger de les critiquer pour un ou deux jours de maladie de plus que le salarié normal.

(Je précise que je ne suis pas prof, au fait.)
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Citation
Mathieu
Citation
JGL
Plusieurs siècles durant, des maîtres ont fait la classe à quarante ou cinquante élèves - sans qu'ils se soient jamais plaints et sans qu'ils aient renoncé à leur mission ou sans qu'ils aient abaissé le niveau de leurs exigences.

Euh... peut-être parce que quarante élèves au garde à vous de 1911 et trente zoulous dansants de 2011 ne sont pas le même public ?

Détrompez-vous, cherJGL. Figurez-vous que l'un des motifs de plainte récurrents des prêtres en 1789 était les classes surchargées, puisqu'ils assuraient l'essentiel de l'instruction du peuple, et que les cahiers de doléances du clergé sont remplis de demandes d'augmentation de moyens humains pour alphabétiser les campagnes.
Citation
Didier Bourjon
Mathieu, il suffit de leur appliquer les mêmes "méthodes", à peine "actualisées"... qui ont fait la preuve de leur efficacité avec bien d'autres "zoulous". Contrairement aux apparences, il ne serait pas si difficile de ramener les choses à leur place.

Je suis bien d'accord avec vous, ça pourrait pourtant être facile, mais pour l'instant, les professeurs, à l'image de la France, n'ont pas le droit d'user de leur autorité ni de se défendre.
Sans doute, mais ces classes pouvaient réunir quatre-vingts élèves ou plus (au XVIIe siècle, il était courant qu'un régent de village dans le Briançonnais apprenne pendant les six mois d'hiver les rudiments à cinquante élèves âgés à six à onze ans - assis sur la paille dans une même étable, sans que ces conditions, que l'on jugerait épouvantables dans les milieux syndicaux, aient empêché d'alphabétiser à peu près correctement la quasi totalité de la population, ce que des armées de fonctionnaires ne sont plus capables de faire aujourd'hui) et la notion de "classe" n'était pas celle qui prévaut dans le système actuel. Depuis le milieu du XIXe siècle, les élèves sont répartis en classes en fonction de leur âge. Une même classe aux XVIIe et XVIIIe siècle réunissait des élèves âgés de sept à douze ans ou plus; et dans les collèges, la répartition des élèves en classes se faisait suivant les aptitudes, et non l'âge. Il n'était pas rare que dans une même classe des élèves de dix-sept ans côtoient des élèves "précoces" de douze ans ou moins. Il me semble avoir lu des passages sur ce sujet dans la Vie de Benvenuto Cellini écrite par lui-même (1559).
La question du nombre des élèves par classe est évidemment biaisée... car la réaction "naturelle" et habituelle est de déplorer le "surchargement" de celles-ci. Cependant, comme le fait remarquer JGL, l'enseignement d'avant le désastre s'effectuait fréquemment, sans encombre, devant des classes de plus de quarante élèves. C'est d'ailleurs toujours le cas dans des classes de haut niveau telles que les classes préparatoires, par exemple. Ce simple constat montre bien la simple évidence, qui est que c'est la nature du public scolaire lui-même et non sa quantité dans chaque classe qui est le véritable problème. Mais j'enfonce là une porte ouverte ! Si le grand nombre d'élèves dans des classes hétérogènes (disparités de niveaux) et déliquescentes (disparition de la discipline) peut être considéré comme un facteur aggravant, il n'est sûrement pas la cause du problème. Et que l'enseignement s'effectue devant quinze, vingt ou trente-cinq énergumènes ne change pas fondamentalement la donne.
Lisez ou relisez le Grand Gaspillage de Jacques Marseille : 65000 enseignants n'ont pas de classe et personne ne sait où ils sont et ce qu'ils font.

On pourrait également faire du ménage et des économies:

Retirons les prébendes des agrégés : Faisons les travailler plus que leurs 15 heures hebdomadaires.
Introduisons des jours de carence pour les profs qui font la classe buissonière.

etc etc etc
La "nature du public scolaire", certes, peut expliquer l'inexplicable. Or, que constate-t-on dans les pays d'origine ? Au Maroc, il y a vingt ans ou plus, la règle dans les écoles primaires était des classes de quarante élèves ou plus - en Afrique noire, de soixante-dix à quatre-vingts élèves. Dans les collèges et les lycées, il en allait de même. Tous ceux qui ont "visité" ces classes, "les yeux ouverts" bien entendu, l'ont constaté. Je ne sache pas qu'au Maroc ou en Afrique noire, cette "surpopulation" (à nos yeux de nantis) scolaire ait suscité les phénomènes que l'on observe dans les écoles, collèges, lycées de France (insolence, chahut, agressions, vandalisme de masse).
(Message supprimé à la demande de son auteur)
« Et que l'enseignement s'effectue devant quinze, vingt ou trente-cinq énergumènes ne change pas fondamentalement la donne. »

Ça ne fait pas le même nombre de copies à corriger (entre autres).
Francmoineau,

Si vous imaginez que, dans les écoles coraniques d'Afrique du nord, les "djeuns" dansent le rap, chahutent et insultent leur maître, vous êtes dans l'erreur.

Ce n'est pas une question d'origine des élèves, c'est une question de "les tenir ou pas".

Je souscris totalement à ce que nous dit JGL.
Eh bien, le fil que j'ai lancé aura suscité une discussion intéressante, et j'espère bien que ce n'est pas fini. Mais je me permets d'en préciser le point central, que je n'ai peut-être pas posé avec suffisamment de clarté. À votre avis, l'In-nocence doit-elle s'associer à la lutte contre la poursuite des réductions d'effectifs dans l'enseignement ? — veuillez garder à l'esprit notre revendication de la création d'un "troisième corps", escadron volant de secours individuel, ou quasi-individuel, aux élèves en difficulté qui désirent être aidés.
(Message supprimé à la demande de son auteur)
L'idée de cela (je ne sais comment le nommer, car "escadron volant" me semble peu adapté pour la jeunesse, quand on sait quel usage Catherine de Médicis en fit), ce "troisième corps", est sans doute pertinente.

Ceci-dit, on peut très bien créer ce corps et réduire les effectifs, en ramenant ceux-ci à un ratio qui serait celui, mettons, de 1980 (avant Mitterrand, donc).

JGL met le doigt sur le problème : il y a des gisements de postes, il y en a qui se prélassent dans de grasses prairies...

Plutôt que de s'associer au choeur des pleureuses, mieux vaut aider à une juste répartition des effectifs de fonctionnaires et affecter les postes ainsi économisés là où il y en a besoin.

Il nous faut des policiers, des gardiens de prison, des infirmières. Il nous faut moins d'administration administrante, moins de formalités à accomplir pour les entreprises et à surveiller pour les administrations, moins de contrôle tatillon et plus d'action. Il faut pourchasser les sinécures, les postes de permanents syndicaux, les arrêts de travail à répétition (comment expliquer que les agents des collectivités locales aient beaucoup plus d'arrêts-maladie que les employés du privé ? par le stress ?).
L'In-nocence ne doit pas s'opposer à la réduction des effectifs dans l'enseignement (primaire, secondaire). En revanche un point essentiel de son programme est - si je ne m'abuse - de favoriser comme en Chine la réduction de la natalité, voire la dénatalité. C'est ce à quoi il faut tenir. Moins il y aura d'élèves, moins il y aura besoin d'effectifs dans le corps enseignant, la proportion des uns aux autres pouvant d'ailleurs rester constante.
Au cours de ma scolarité (assez récente, je le rappelle, pour que j'aie encore une bonne idée de ce qui se passe dans les classes d'aujourd'hui...), j'ai fait partie de classes de quarante comme de vingt-cinq élèves ; je ne puis qu'acquiescer à ce que disait l'un d'entre vous sur la vanité qu'il y a à faire du nombre d'élèves par classe une condition fondamentale de la qualité de l'enseignement (M. Bourjon, dans son dernier message, a raison). Une relative homogénéité (de niveau, de "culture", etc.) de la classe est en revanche nécessaire. Et c'est du vécu, comme ils disent...
Les inadaptés, Didier, doivent être traités de la façon suivante : en cas d'incartades répétées, et quel que soit leur âge, expulsion du système classique et cours par correspondance. S'ils ne les suivent pas, c'est leur problème, pas le mien. On confond éducation nationale et assistance sociale.

En revanche, il faut faciliter l'accès à l'éducation classique des handicapés, cela montrera à la jeunesse une diversité qui n'est pas celle de l'obscénité du rap.
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Didier, c'est horrible :

- je suis d'accord avec vous ;

- je suis d'accord avec Stéphane ;

- hier dimanche, j'ai trouvé à une heure d'intervalle "c'est vrai que" dans le Journal de Drieu et chez Simenon.
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Non. L'1-nocence ne doit pas s'opposer à la réduction des effectifs, mais à leur mise au pas en commençant par leur demander des comptes sur les 65000 enseignants sans classe comme certains agrégés rénumérés mais sans élèves.
Pour ce qui me concerne, j'ai la même réponse que vous, cher Didier. Tant que le problème ne sera pas attaqué à la racine, rien n'y fera.


"Si vous imaginez que, dans les écoles coraniques d'Afrique du nord, les "djeuns" dansent le rap, chahutent et insultent leur maître, vous êtes dans l'erreur" : Cher Jean-Marc, qu'est-ce qui peut bien vous amener à faire de telles suppositions (je veux dire, à émettre l'hypothèse que j'imagine etc.) ? Vous êtes parfois déroutant, vous savez...
La grande majorité des "enseignants" qui luttent contre la suppression des postes de professeurs le font à de tout autres fins que la formation d'un Troisième Corps, d'un Escadron volant. S'associer à ces mouvements n'a à mon avis pas grand sens, nos fins n'étant pas communes.


"Vous êtes parfois déroutant, vous savez..." (Tiens, vous trouvez ?)
Je voulais dire que ce n'est pas du tout un fait culturel apporté de l'étranger, spécialement de l'Afrique du nord ou de l'Afrique noire. JGL le disait aussi, autrement.

Les perturbateurs perturbent parce qu'on les laisse perturber : je connais un peu l'Afrique du nord, et je puis vous dire que la relation maître-élève est de la même nature que celle qu'il y avait en France il y a cinquante ans.

Les "enseignants" ont été les premiers à dire, que dis-je, à hurler, qu'il fallait se montrer bienveillant avec ces pauvres jeunes déracinés. Ils récoltent le fruit de leur aveuglement, et ce n'est pas moi qui vais pleurer.

Regardez encore : quand on parle de présence vraiment dissuasive, c'est à dire de policiers et de caméras (les caméras, c'est parfait : on peut cueillir le fauteur de trouble au nid à six heures du matin, et il ne peut pas nier) ils nous répondent quoi ? ils nous répondent trois choses : fascisme, à propos des caméras ; pas de flics dans le lycée ; il faut des moyens en surveillants. Des moyens en surveillants ! ils ne rient pas, les petits malfaisants ! ils se gondolent !

C'est quoi, leur credo, à ces gens ?

C'est "pas de classement".

C'est "des débats" (pas de copies, sans doute).

C'est "la diversité par dessus tout".

C'est "la culture jeune est supérieure à la culture classique qui exhale des relents nauséabonds".

C'est "allons manifester avec RESF".

C'est "les conférences à la goire du Hamas doivent se dérouler librement rue d'Ulm".

C'est "les produits israéliens ne doivent pas se vendre librement au marché Mouffetard".

C'est "décorons la classe d'anglais avec des posters de Géronimo (massacré par les Américains blancs) et de Martin Lucifer King (assassiné par les Américains blancs) et surtout aucune affiche sur les soldats américains débarqués en 1944".

C'est "quand je vois dans la rue un flic contrôler un jeune, j'ai mal parce que c'est de l'oppression".

C'est "il est hors de question, en application de ma liberté pédagogique, que je fasse apprendre la Marseillaise à ma classe".

C'est "ma mission d'enseignant est de convaincre les jeunes originaires de France qu'ils ont une lourde hérédité de colonialistes et qu'il faut qu'ils l'expient, et aux jeunes issus de l'étranger qu'ils ont un droit sur la France à cause du colonialisme".
Je voulais seulement rappeler avec cette remarque sur le nombre de copies à corriger que la revendication de baisse des effectifs des classes obéit à un objectif officiel de nature pédagogique, dont on a dit et redit ici combien il est illusoire, et à un objectif inavoué mais parfaitement réaliste celui-là : faciliter la vie des professeurs.

Il est cependant vrai que les escadrons volants devraient, pour ramener à la surface des élèves qui ont coulé, s'en occuper de façon individuelle, mais pour un temps limité. On pourrait faire des calculs peut-être, mais si l'on commence par réinstaurer des classes de niveau (chose absolument impossible dans le cadre de la doxa pédagogo), on peut envisager d'alourdir nettement les effectifs des classes.

Je ne crois donc pas qu'il faille s'associer au chœur des pleureuses syndicales sur la question des effectifs du corps professoral.
Je partage votre avis ("je ne crois donc pas qu'il faille s'associer au chœur des pleureuses syndicales sur la question des effectifs du corps professoral"), cher Marcel. Ces "pleureuses syndicales" ont tout des intellectuels organiques et des syndicats de masse des anciens pays de l'Est.
Simple anecdote (déjà racontée).

Il y a quelques années, j'ai animé un atelier d'écriture dans un collège de banlieue. La première matinée, devant une classe d'élèves de sixième ou de cinquième, j'ai oublié, j'étais étonné de l'état, comment dire, d'apathie nerveuse des enfants. Je leur posai alors quelques questions sur le début de leur journée et découvris que seuls deux ou trois d'entre eux ne regardaient pas la télévision avant de venir en classe, tous les autres absorbaient leur ration de graines trempées dans du lait avec pour première parole perçue dans la journée celle des personnages des dessins animés entrecoupés de publicités en faveur des-dites graines, toutes plus vitaminées les une que les autres. Comment imaginer une seconde pourvoir comparer les quarantes petits paysans du temps jadis se rendant à pied à l'école - et quelquefois sur de longues distances - avec une vingtaine de ces enfants recevant de plein fouet au sortir du sommeil toute la stimulation nerveuse d'images faites pour eux, puis véhiculés dans des transports en commun ?

Il est sans doute du dernier "ringard" d'aller présenter la télévision (et l'audio-visuel en général) comme la contre-parole omniprésente malgré laquelle les instituteurs doivent exercer leur métier. Et cependant...

D'autre part, si réforme de l'éducation il devait y avoir, ne devrait-on pas songer à l'âge auquel les enfants sont "scolarisés" ? Soumettre des enfants dès l'âge de deux ans à la vie en collectivité sous prétexte de "socialisation" m'a toujours paru une des sources principales de la confusion qui s'installe dans les jeunes esprits entre "nounous", "institutrice", "garderie", "école". Faire commencer l'école à l'âge de six ans me semble une mesure indispensable, sauf qu'elle est parfaitement incompatible avec les exigences de la vie moderne.
Orimont,

Ce que vous dites sur la confusion des rôles est très juste. On peut cependant concilier vie moderne et garderie en faisant garder les petits enfants par des "nounous" et non par des professeurs agrégés de l'enseignement maternel.
28 mars 2011, 18:26   Convention Egalité Réelle
Je crois me souvenir que figure, ou que figurait, dans le programme du Parti socialiste, une réforme consistant à rendre obligatoire l'école maternelle dès l'âge de trois ans. Vérification faite :

[www.parti-socialiste.fr]
Arracher les enfants à l'influence des parents, tel est le grand rêve des "démocrates", champions de l'esprit critique.
Stéphane, je suis étonné que le programme du PS n'évoque pas la création d'un doctorat ou d'une agrégation de torchologie...
Je me fais une nouvelle fois l'avocat du Diable (habituellement je ne suis pas le dernier à taper sur l'EN) et je vais vous faire quelques remarques.

L'un des problèmes principaux est l'hétérogénéité des classes née de l'égalitarisme typiquement français, empêchant les bons élèves de progresser car le niveau sera toujours basé sur les élèves en difficulté, qui presque toujours n'en ont rien à faire et ne cherchent qu'à gêner les autres. Donc la solution est de créer des classes homogènes de niveau. Mais expliquez-moi comment, en réduisant des postes, vous pouvez doubler des classes ?
D'autre part, dans tous les établissements d'excellence ou indépendants, le critère du faible nombre d'élèves par classe est déterminant et très mis en avant : est-ce donc totalement hors de propos de faire un lien entre ce critère et la qualité de l'enseignement ?

Je suis d'accord pour faire la chasse aux emplois inutiles cachés dans les coins et recoins de l'EN. Cependant, il ne faut pas tout mettre dans le même sac et ne laisser que les enseignants en poste. Attention à ne pas déclarer inutiles des "petits" personnels qui n'en sont pas moins importants : bibliothécaires, infirmières, surveillants, etc. De plus, il faut rappeler que les principales victimes des précédentes suppressions d'effectifs étaient les stagiaires, qui arriveront donc directement devant une classe sans préparation.

Enfin, sur la forme de ce débat. Voici ce que je lis en introduction de l'excellent programme du PI sur l'éducation :
"Le parti de l'In-nocence attache la plus grande importance à l'Éducation, et il entend lutter pour que l'École et le corps professoral soient pleinement rétablis dans leur dignité éminente, dans leur sérénité, et dans le rôle majeur qui leur incombe pour la transmission effective des connaissances et des valeurs."
Pensez-vous que généraliser à ce point sur les professeurs comme l'ont fait ici certains soit un premier pas vers le rétablissement de leur dignité ? Imaginez un enseignant venant ici car il s'intéresse à nos thèses dites originales se voir traiter comme toujours d'indécrottable gaucho, pédagogo, pleureuse, etc. La première chose à faire, et je crois qu'elle est indispensable, est de restaurer leur autorité et de les convaincre qu'une autre éducation est possible, pas de leur dire qu'avec eux "pas d'espoir et bon débarras"... Pas la peine que Renaud Camus se fatigue à faire un programme sur l'éducation, dans ce cas.

L'enseignement mériterait d'être réformé de A à Z, mais c'est éminemment complexe. Le nombre de postes est secondaire et les professeurs se trompent en en faisant un problème premier. Mais en même temps, je ne pense pas qu'il l'est non plus pour nous, et comme je ne vois pas l'intérêt de supprimer des postes pour supprimer des postes, à part quelques économies bienvenues mais là encore secondaires, selon moi il n'est pas forcément "souhaitable de continuer à réduire en quantité le corps enseignant."
Mathieu,


Vous nous écrivez :

L'un des problèmes principaux est l'hétérogénéité des classes née de l'égalitarisme typiquement français, empêchant les bons élèves de progresser car le niveau sera toujours basé sur les élèves en difficulté, qui presque toujours n'en ont rien à faire et ne cherchent qu'à gêner les autres. Donc la solution est de créer des classes homogènes de niveau. Mais expliquez-moi comment, en réduisant des postes, vous pouvez doubler des classes ?

Considérez cent élèves, vingt très bons, vingt bons, vingt moyens, vingt médiocres et vingt mauvais. Ils sont, par hypothèse, répartis au hasard dans cinq classes de vingt élèves de niveau hétérogène.
Considérez maintenant cinq classes de niveau homogène.
Vous avez le même nombre de classes, d'élèves et de professeurs.

D'autre part, dans tous les établissements d'excellence ou indépendants, le critère du faible nombre d'élèves par classe est déterminant et très mis en avant : est-ce donc totalement hors de propos de faire un lien entre ce critère et la qualité de l'enseignement ?

C'est inexact, les classes préparatoires ont des effectifs très élevés.
Mathieu,

Vous nous écrivez :

Enfin, sur la forme de ce débat. Voici ce que je lis en introduction de l'excellent programme du PI sur l'éducation :
"Le parti de l'In-nocence attache la plus grande importance à l'Éducation, et il entend lutter pour que l'École et le corps professoral soient pleinement rétablis dans leur dignité éminente, dans leur sérénité, et dans le rôle majeur qui leur incombe pour la transmission effective des connaissances et des valeurs."
Pensez-vous que généraliser à ce point sur les professeurs comme l'ont fait ici certains soit un premier pas vers le rétablissement de leur dignité ? Imaginez un enseignant venant ici car il s'intéresse à nos thèses dites originales se voir traiter comme toujours d'indécrottable gaucho, pédagogo, pleureuse, etc.


Et nous donnez la solution :

La première chose à faire, et je crois qu'elle est indispensable, est de restaurer leur autorité et de les convaincre qu'une autre éducation est possible, pas de leur dire qu'avec eux "pas d'espoir et bon débarras"...

Il y a un mais : les enseignants, via leurs représentants syndicaux qu'ils ont élus (ils n'ont pas été nommés par le Komintern), ne veulent pas entendre parler d'autorité.

On dit, en France, qu'on ne fait pas boire un âne qui n'a pas soif, et il me semble que cet âne-là est sacrément hydrophobe.
Je pense quant à moi qu'il y a de l'espoir, que nous pouvons changer certaines choses, et ramener beaucoup de monde à la raison, âne ou pas, prof gaucho ou pas. C'est pour cela que je suis venu à l'In-nocence.

Il ne faut pas catégoriser définitivement les personnes et leurs avis. Jean-Marc, avez-vous toujours voté pour le même parti ou syndicat ? Moi pas.
Mathieu,

J'ai (à peu près) toujours voté de la même façon, c'est à dire pour le RPR.

J'ai une seule fois voté à gauche, au second tour de 1981, dans le but de renvoyer dans ses montagnes auvergnates le Grand Néfaste.

Du point de vue syndical, j'ai la chance d'être représenté par un syndicat catégoriel, affilié à l'UNSA. Ce syndicat ne s'occupe pas de politique, mais de nos intérêts.

Je connais beaucoup de vieux professeurs qui sont désolés de ce qui se passe (je veux dire, des professeurs retraités).

Vous qui semblez connaître le sujet, expliquez-moi pourquoi autant de professeurs votent pour les syndicats qu'on sait, et pourquoi il y a toujours, autour des sans-papiers, autant de professeurs ou d'instituteurs ?

Un jeune professeur sait quelle est l'idéologie de l'éducation nationale. Il n'est pas forcé d'être professeur, il choisit ce métier en connaissance de cause. Qui vous dit qu'il n'y a pas là un réceptacle donquichottique, une sorte de nirvana de l'adorateur de l'underdog, une sorte de rôle de mère Théresa sans maladies tropicales, une certitude d'être pour la bonne cause et en plus avec la bonne façon ?

Qui vous dit qu'ils n'en sont pas, en fait, contents ? qu'ils n'aiment pas tourner en récitant leur mantra "Moyens, postes, moyens, postes" ?
Pour les classes préparatoires, il faut les comparer avec les autres voies de l'enseignement supérieur, c'est-à-dire principalement l'université, et non le lycée. Dans ce cas, le faible effectif est réel.

Pour les classes homogènes, vous avez raison pour les gros collèges ou lycées. J'avais en tête mon fils et sa modeste école où une séparation par niveau serait impossible. Dans la majorité des établissements, je doute quand même qu'elle soit réalisable sans professeurs supplémentaires.

Pour votre dernière question, je ne connais pas plus le sujet que vous et je laisse à d'autres le soin d'expliquer pourquoi les professeurs sont en grande majorité degauche. Encore que voter pour un syndicat de gauche ne veut pas dire qu'on l'est, il y a beaucoup d'électeurs du FN à la CGT.
Mathieu,

On peut être de gauche et être intelligent.

Je ne reproche pas aux professeurs d'être de gauche, je leur reproche de se complaire dans leur logique, ce qui n'est pas la même chose.

Je ne pourrais pas concevoir de faire pendant plus de quelques mois un métier qui me sort par les yeux, et surtout d'appliquer à la jeunesse une politique que je réprouve.

Croyez-moi, s'ils restent, c'est qu'ils aiment le pédagogisme, et Bégaudeau est leur prophète.
Mathieu,


Vous nous dites :

J'avais en tête mon fils et sa modeste école où une séparation par niveau serait impossible.

Le niveau de cette école vous convient-il ? pour quelle raison est-elle modeste ? s'agit-il d'un lieu isolé, ou bien d'une ville où il a beaucoup de petites écoles ?
Quand on a la sécurité de l'emploi, qu'on a passé un concours assez difficile, quelques années difficiles en ZEP mais maintenant en province, et que malgré tout on aime les enfants et qu'on a un "souci sincère" de leur enseigner quelque chose, on ne quitte pas son métier. Mais plusieurs craquent, c'est vrai.

Tous les enseignants que je connais rigolent bien de Bégaudeau et se reconnaissent plutôt dans le "journée de la jupe".
Et puis dire qu'un million de personnes SONT comme ci ou comme ça...

Mon fils est à Paris et souffre énormément de devoir réviser le présent de l'indicatif en CM2. Voilà.

J'arrête là car ce fil intéressant tourne au dialogue, et cela doit être très désagréable pour le lectorat. Mes excuses.
Mathieu,


Je ne répondrai pas au fond de votre message puisque vous souhaitez en rester là, mais je ne pense pas qu'il s'agisse d'un dialogue au sens de conversation privée entre deux personnes (rappelez-vous sa Pompeuse Nullité inventant le trialogue).
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Je suis toujours surpris que la plupart des intervenants (dont manifestement ne fait pas partie M. Mathieu) paraissent ne pas connaître le programme du parti ou semblent le considérer, s'ils le connaissent, comme nul et non advenu. Je rappelle que ledit programme, face au prévisible blocage de toute réforme sérieuse de la part du corps enseignant pris dans son ensemble, prévoit, ne serait-ce qu'à titre de mesure provisoire (un provisoire de plusieurs années, certainement), la sécession scolaire des tenants de la reprise, comme dirait notre cher Premier Secrétaire, selon le principe des trois volontariats : des maîtres, des parents, des élèves. À ces sécessionnistes il serait alloué des établissements scolaires et des crédits à proportion de leur nombre : s'ils sont mille un lycée, s'ils sont dix mille dix lycées, etc.
(Message supprimé à la demande de son auteur)
En fait, ce sont des questions disjointes.

Si l'instruction in-nocente a des moyens à proportion de ses élèves, alors ces moyens seront pléthoriques, car ils feront l'objet d'une bonne administration.

Gabegie et revendication, justement mises en évidence par JGL, seront absentes de ce programme.

Il ne s'agira pas de plaire à des cliques, des castes et des claques, mais de travailler.

Donc on peut tailler dans le vif, supprimer les rentes de situation, remettre au travail les paresseux : cela ne concerne pas le projet d'éducation in-nocent, mais le sauvetage des deniers publics.

Pour ce qui est du "troisième corps", je comprends mal quel est son cadre d'action ? le projet in-nocent, et dans ce cas c'est cohérent, où la totalité du champ (et dans ce cas je vois le monstre de la bureaucratie se bâtir, sous la forme d'une usine à gaz) ?
29 mars 2011, 08:26   La question qui tue
Cette réflexion devrait nous amener à poser la question fondamentale de l'école comme lieu d'apprentissage. J'aimerais savoir ce que les personnes qui fréquentent ce forum ont véritablement appris dans le cadre scolaire et universitaire de ce qu'ils savent et savent faire, et penser aujourd'hui.

Je suis de plus en plus convaincu que, de même que l'oisillon n'a pas plus à faire pour voler où il veut, comme il veut, partout où il veut, afin de répondre tant à ses besoins qu'à ses désirs, que d'apprendre à voler, une bonne fois pour toutes, en deux ou trois séances, l'enfant doit apprendre à lire, à écrire, qui seront ses ailes pour la vie, et à compter, à calculer, deux apprentissages qui pourront lui servir à spéculer utilement des vérités, des procédés, etc., s'il le souhaite ou si les circonstances futures l'y invitent.. Tout le reste du voyage dans les acquisitions et les maîtrises, professionnelles et autres, seront, comme le vol lui-même qui occupe tout l'oiseau, l'affaire de toute une vie sans transmission organisée ni canalisée par aucun tiers, à l'exception des apprentissages techniques ponctuels (apprendre à conduire certaines machines, à façonner des objets, à pratiquer la chirurgie, etc.) qui doivent se faire auprès d'un homme de l'art.

Après l'âge de quatorze ans, je n'ai strictement plus rien appris de déterminant à l'école ou à l'université que je n'eusse pu apprendre par mes lectures, conversations et voyages. Tout le reste, sous les linteaux de l'éducation dispensée en groupe et assis, n'ayant été qu'inutiles dépenses d'efforts et gaspillage de temps. Et vous ?
Puis-je me dire le fruit de l'Education nationale actuelle ? Je ne sais. Quand j'entrai à l'école, le désastre, comme dit Alain Finkielkraut, avait déjà eu lieu. J'ai connu l'enseignement de masse. Au collège et au lycée, j'ai connu les débats citoyens sur le racisme et la peine de mort, les situations d'énonciation et la focalisation interne, la littérature pour la jeunesse, les leçons de morale voilées à travers l'étude de textes, mais aussi la domination physique et symbolique des fils d'immigrés (nommons le choses par leur nom) et la violence des cours d'école (encore que ces dernières ne fussent pas prégnantes au lycée). Avec le recul, je puis dire que rien de ce que j'ai pu retenir de mes lectures d'alors n'est dû à l'enseignement que j'ai reçu, même si je me souviens encore avec émotion de quelques professeurs hors du commun. A l'université, où j'échouai par fainéantise et absence de "projet d'avenir", il m'a fallu tout relire une seconde fois, en autodidacte solitaire, car mon milieu familial n'était pas tel qu'il pût m'accompagner pour m'avoir précédé dans cette voie. Mon plus vif sentiment, en regardant ces années de collège et de lycée, est celui du temps perdu.

C'est un sentiment que je retrouve aujourd'hui avec un élève auquel je donne des cours particuliers de français. En effet, tout ce qu'on lit très tôt reste gravé à jamais en nous-même. Mes premières véritables lectures ont été très tardives ; assez précoces toutefois pour avoir laissé en moi ce limon précieux qui me nourrit encore mieux, plus profondément, que ne font toutes mes lectures d'aujourd'hui. Et sans doute sommes-nous trop ingrats à l'égard de nos formateurs, si criticables fussent-ils, quand nous disons que nous nous sommes faits tous seuls. Peut-être ne mesurons pas bien tout ce que nous leur devons, et que nous croyons avoir tiré de nous-même. Ce que nous apprenons à l'école, ce qu'elle devrait nous apprendre, ce sont de saines habitudes : celle de lire beaucoup, par exemple, d'apprendre le plus de poèmes possible.

A l'université, je ne nierai pas avoir appris beaucoup de choses auprès de mes professeurs souvent brillants. Mais, au-delà de vingt ans, j'avais le sentiment que l'essentiel m'avait déjà précédé, et que de manière générale un très court laps de temps nous était échu pour engranger le plus de savoir humain ; une sorte de force d'inertie nous soutient ensuite, quand les années de formation ont passé ; nous continuons à lire, à apprendre de manière plus libre, mais tout en regrettant de n'avoir pas fait cela plus tôt. Nous savons que si cela avait été le cas, ce que nous lisons nous eût atteint aussi profondément que nos lectures d'enfance.
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Le rôle du "professeur brillant" à qui nous pensons à juste titre devoir beaucoup, qui vous dit qu'il ne se pourrait pas remplir par d'autres rencontres de la vie si la vie était déjà possible à quinze ans ? Le "professeur brillant" est un véhicule du désir d'apprendre, mais cette brillance où la séduction tient une très forte part, un lieu, un voyage, une avalanche de rencontres, un groupe d'amis de son frère aîné ou sa soeur aînée, un oncle, une femme aimée, une femme mariée, un rivage enchanteur, un ermitage, un bois, une source, un tableau, un concerto, la vieille maison d'un ami dans un champ en friche, en seraient tout aussi porteurs, autant que les vieux volumes reliés dans le grenier des grands-parents ou du grand-oncle en sont tout aussi émetteurs; n'est-ce pas la circonstance ou la configuration institutionnelle du "professeur" dans son école qui se voient ainsi créditées d'une fonction désirante ou d'une épiphanie du savoir qui de toute façon, parce qu'on est jeune, éveillé et désirant, ce fussent produites et ce crédit universel n'est-il pas alors accordé par défaut autant que par illusion à une formule (professeur/école/enseignement institutionnel) qui n'a d'autre mérite que celui de s'être substituée aux sourires naturels du savoir ?
Stéphane,

Je partage beaucoup de choses de votre point de vue.

Il y a, évidemment, des professeurs exceptionnels qui réussissent à émerger de la tourbe (cum possis eximere te vulgo).

Lorsque j'étais élève, ces professeurs étaient, me semble-t-il, une majorité. Ils donnaient goût à apprendre, ils instruisaient. Ils sont actuellement, de mon point de vue, une minorité.

Mes meilleurs professeurs furent ceux de classe préparatoire. Au delà, les Laurent Schwartz, les Guichardet en mathématiques, un Cohen-Tannoudji en physique, les Alfred Grosser et René Rémond en sciences politiques étaient trop écrasants, trop loin de nous. Je les admire, car je sais que je pourrai jamais être qu'un ouvrier là où ils furent des génies.
Oui, me plaît beaucoup cette définition du professeur brillant comme "véhicule du désir d'apprendre". Et il est vrai que l'eussent sans doute tout aussi bien remplacé d'autres personnes, et autant de lieux divers. Seulement, pour beaucoup d'enfants appartenant à cette immense et majoritaire classe sociale pour laquelle une source ou un ermitage ne parlent pas spontanément à l'âme, et qui n'ont pas la chance d'avoir des grands-parents lecteurs, ni des parents amateurs de véritable musique, l'école reste (idéalement, bien sûr) la première médiation, la première porte de sortie du monde présent et contingent où s'esquissent et se dessinent les "sourires naturels" que vous décrivez.
"Je n'ai qu'un regret, c'est de ne pas avoir connu plus tôt l'Ecole Universelle", comme disait le slogan publicitaire...
(Cher Stéphane, je m'associe à Didier Bourjon pour vous remercier de votre beau texte.)
Cher Stéphane, vous dites très bien certaines choses que je partage. Ceci singulièrement que je ne saurais trop justifier mais que j'ai pu constater : il n'est jamais trop tôt pour aborder les grands textes, il est rapidement trop tard, puis vient le temps de la relecture. Peu importe que le jeune enfant ne saisisse pas toutes les subtilités, les nuances, jusqu'au sens même parfois, l'impression demeurera et avec elle le désir d'y revenir. La vie de l'adolescent et du jeune adulte est bientôt trop encombrée pour qu'il puisse s'adonner à la véritable lecture. Puis vient le temps béni de reprendre ses lectures d'enfant nourries de l'expérience et de constater que la vie a passé.
Peu importe que le jeune enfant ne saisisse pas toutes les subtilités, les nuances, jusqu'au sens même parfois, l'impression demeurera et avec elle le désir d'y revenir.

C'est exactement ce que je pense, cher Eric Veron, et cela rejoint les réflexions diverses qu'avait inspirées il y a quelque temps un fil ancien, sur les méfaits de la littérature de jeunesse et la croyance qu'il existe un monde de l'enfant superposé à celui de l'adulte.
Eric et Stéphane,

Il me semble qu'il y a peut-être une divergence sur les âges de lecture.

Stéphane nous dit :

Mes premières véritables lectures ont été très tardives ; assez précoces toutefois pour avoir laissé en moi ce limon précieux qui me nourrit encore mieux, plus profondément, que ne font toutes mes lectures d'aujourd'hui

Eric nous dit :

Peu importe que le jeune enfant ne saisisse pas toutes les subtilités, les nuances, jusqu'au sens même parfois, l'impression demeurera et avec elle le désir d'y revenir.

Sans vouloir recommencer le débat du fil que Stéphane nous indique, il me semble que, pour un même auteur, il y a des oeuvres qui demandent davantage de maturité. Salammbô, Madame Bovary et l'Education sentimentale ne se lisent pas, je pense, au même âge.
Lorsque j'étais élève, ces professeurs étaient, me semble-t-il, une majorité. Ils donnaient goût à apprendre, ils instruisaient. Ils sont actuellement, de mon point de vue, une minorité.

Mes meilleurs professeurs furent ceux de classe préparatoire. Au delà, les Laurent Schwartz, les Guichardet en mathématiques, un Cohen-Tannoudji en physique, les Alfred Grosser et René Rémond en sciences politiques étaient trop écrasants, trop loin de nous. Je les admire, car je sais que je pourrai jamais être qu'un ouvrier là où ils furent des génies.


Est-ce que la nostalgie ne vous égare pas ? Dans l'enseignement secondaire privé et public comme dans l'enseignement supérieur, à Paris, je n'ai eu aucun professeur brillant. Peut-être que je "place la barre trop haut" (l'affreux cliché !) mais je crois pouvoir dire qu'ils en étaient très loin, même. Routiniers, sans personnalité ni originalité. Le professeur brillant aura été rare, très rare, à toute époque. Je crois que nous devrions tous nous entendre là-dessus. En revanche, une certaine qualité moyenne, d'ailleurs suffisante, est peut-être désormais un Graal inaccessible. C'est cela qu'il faut déplorer. Et non que des exceptions restent des exceptions.

Quant aux noms que vous citez, Jean-Marc, je ne vois pas qu'ils furent si écrasants que cela, en tant que professeurs. J'en ai connu au moins un et j'ai suivi ses cours : René Rémond. Il me paraissait au contraire très accessible (à tous points de vue). Peut-être que j'en aurais jugé autrement si j'avais lu ses livres à l'époque ou si j'avais mené une recherche sous sa direction. Mais en tant que professeur, je veux dire en tant qu'il donnait des cours magistraux dans un amphithéâtre, non, il ne m'aura ni écrasé ni ébloui.
29 mars 2011, 11:36   La petite bête
M. Jean-Marc, je ne vois pas qu'il y ait divergence entre M. Veron et moi sur ce point. Je dis simplement que j'ai le regret de n'avoir pas commencé à lire plus tôt et d'avoir perdu un bon nombre d'années dans la littérature de jeunesse.

Je conserve le souvenir reconnaissant d'un remarquable professeur d'économie au lycée, qui s'exprimait dans une langue parfaite à tous points de vue, et que ses élèves admiraient pour sa rigueur et sa fermeté (et sa légère ironie, toujours bienvenue).
Buena vista,

Ce domaine de l'enseignement est le seul pour lequel la nostalgie du passé l'emporte sur mon goût pour l'avenir. De mon point de vue, beaucoup de choses se sont améliorées, mais pas l'enseignement, loin de là.

J'ai sans doute eu de la chance, mais j'ai gardé un excellent souvenir des mes professeurs (ou du moins de la grande majorité d'entre eux).

Pour les professeurs de l'X que j'ai cités (René Rémond n'y était pas professeur, il y avait donné des conférences), je me suis sans doute mal exprimé. Je voulais dire que j'ai toujours pensé pouvoir me hisser au niveau d'un professeur de Spé, ou pouvoir être un bon ingénieur. Je n'ai jamais envisagé (et beaucoup avec moi, je crois) pouvoir être l'égal d'un de ces géants. Schwartz était accessible, en ce sens qu'on pouvait lui rendre visite, se faire expliquer des choses. Cela étant, quand vous êtes en face d'un homme qui a compris la totalité du problème que vous lui soumettez avant même la fin de votre phrase, vous saisissez qu'il y a une distance que vous ne comblerez jamais. C'est évident dans le domaine scientifique, sans doute moins lumineux dans celui des sciences humaines.
Mais alors, Stéphane (si je suis trop insistant, merci à Didier d'éliminer mon message), à quel âge pensez-vous que l'Education sentimentale puisse être lue ?
A tous les âges, elle sera lue différemment. Le plus tôt sera le mieux, sans doute, même si ce n'est pas l'ouvrage de Flaubert qui me viendrait immédiatement à l'esprit pour un enfant de dix ou onze ans. Les Contes me paraissent plus appropriés.

(Vous avez lu, M. Bourjon ? M. Jean-Marc est demandeur.)
Autrement dit, il faut apprendre à lire pour savoir lire ce qui permet de lire ce qu’il faut savoir lire.
Apprendre à chercher et organiser ses connaissances.
Il devient de plus en plus probable, à mes yeux, que "l'organisation des connaissances", la recherche du savoir, le parcours vers la connaissance, s'opèrent par des voies qui ont été de tous temps mal enseignées.

Sans pouvoir l'argumenter ici de manière développée, cette organisation, telle qu'elle se construit dans les faits, obéit à des figures qui évoquent le monde du corrélat, le renvoi permanent et l'approfondissement par des voies et approches du sujet connexes (voire transversales), davantage que par la spécialisation, la compartimentation et la focalisation thématique dans les catégories instituées, et l'architecture du savoir que dessinent ces cheminements, qui sont les cheminements de l'acquisition des connaissances, cette architecture que génère le corrélat donc, étrangère aux constructions linéaires, chronologiques -- il faut d'abord connaître et avoir lu l'Odyssée pour aborder le roman dix-huitiémiste, etc. -- et artificiellement hiérarchisée -- on ne peut comprendre telle oeuvre de tel auteur si l'on n'a pas d'abord lu tel autre --, semble si naturelle que sa méthode a à peine besoin d'être enseignée.

Mais il se peut aussi que ces voies paraissent, aujourd'hui seulement, avoir été mal enseignées, le monde d'aujourd'hui ayant déjà réussi à nous faire oublier que dans l'ancien, mort il y a deux décennies à peine, ces voies linéaires, enseignées dans les écoles, étaient appropriées et qu'elles pouvaient être validées de mille façons qui les auraient fait prendre pour naturelles.
"De mon point de vue, beaucoup de choses se sont améliorées, mais pas l'enseignement, loin de là."

L'amélioration de beaucoup de choses n'est-elle pas peu de chose si l'enseignement s'est dégradé ?
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