Dans le cas de Cécile Duflot on peut risquer une analyse plus précise. Voilà une personne qui représente un parti politique qui aspire à diriger le pays — et il y a quelques raisons de penser qu'il y parviendra, au moins dans le cadre d'une coalition, et elle sera ministre — et qui a administré très publiquement la preuve de l'hypocrisie de son mouvement avec l'affaire du confit de porc qu'elle adore mais elle n'a pas le droit de le dire, et celle de sa stupéfiante ignorance, la sienne propre cette fois. Et, comme le souligne Francis, il n'y a de sa part ou de la part de son parti nulle excuse confuse, nul communiqué rectificatif, non, « elle continue de se porter devant les caméras, d'aller dans le monde, de pérorer en public, et d'afficher sa belle et désespérante assurance comme si de rien n'était. » C'est que ces gens pensent que ces choses ne scandaliseront que ceux qui, de toute façon, sont perdus pour eux, et que leurs partisans actuels ou potentiels, eux, ne s'en formaliseront pas, si même ils les relèvent.
Ont-ils raison de penser cela ? Certainement.
D'abord parce qu'il est finalement très improbable que ces aveux soient remarqués par beaucoup de Français puisque le complexe médiatico-politique, si prompt, souvent, à sonner l'hallali au moindre faux pas et à donner alors le signal d'une curée dont il est toujours difficile de se relever, a observé ici, et les deux fois, un silence absolutoire et complice. C'est que, et au vrai on s'en doutait un peu, les idées des Verts sont doxo-compatibles : leur anticapitalisme gentillet n'est pas plus sérieux que celui des socialistes et ils se gardent comme de la peste de remettre en cause l'enseignement de l'oubli, la déculturation, l'immigrationnisme ou même le populationnisme. Cécile Duflot fait d'énormes faux-pas mais elle ne commet pas le moindre
dérapage.
Ensuite, et c'est plus intéressant, parce que les Verts suscitent, promeuvent et sont issus d'une attitude non pas scientifique, mais de nature religieuse. La vérité scientifique, la connaissance impartiale, le doute raisonné leurs sont absolument étrangers. Ils ne cessent de parler technique, climat, biologie, pédologie, agriculture, de manier des prévisions chiffrées, des statistiques et des lois physiques, mais ce babil est à peu près aussi scientifique que l'était le discours des marxistes purs et durs. Non que tout soit faux dans ce qu'ils assènent, loin de là bien sûr, de la même façon que bien des constats et des aspirations communistes étaient hautement nécessaires et tout à fait respectables. Cependant, dans les deux cas, nous avons un mouvement qui affirme que sa doctrine est scientifique mais qui est en fait une église reposant sur des dogmes. C'est pourquoi l'ignorance, même crasse, n'a aucune importance, seule compte la connaissance du dogme.
Nous revendiquons une sensibilité écologiste. C'est tout aussi nécessaire que l'était, au milieu du XIXe siècle, la lutte contre les "orgies du capital" et l'amélioration de la condition ouvrière. Prenons garde cependant à ne pas nous laisser prendre au piège des dogmes faussement scientifiques qui sont associés à cette sensibilité. Avec nos positions véhémentement anti-populationnistes nous administrons la preuve que nous savons le faire, en tout cas dans ce domaine précis.