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Déjà au temps de Platon...

Envoyé par Ostinato 
14 juin 2011, 17:29   Déjà au temps de Platon...
"Lorsque les pères s’habituent à laisser faire les enfants, lorsque les fils ne tiennent plus compte de leurs paroles, lorsque les maîtres tremblent devant leurs élèves et préfèrent les flatter, lorsque finalement les jeunes méprisent les lois parce qu’ils ne reconnaissent plus au-dessus d’eux l’autorité de rien et de personne, alors, c’est là, en toute beauté et en toute jeunesse, le début de la tyrannie. "

(La République)
Utilisateur anonyme
14 juin 2011, 17:40   Re : Déjà au temps de Platon...
La plus ferme autorité, laquelle inspire la crainte et force l'obéissance, est un rempart à la bêtise à partir de laquelle émerge le tyran. C'est ainsi que je comprends ce si juste passage.
Utilisateur anonyme
14 juin 2011, 17:56   Re : Déjà au temps de Platon...
Addendum :

« Ce qu'il y a de plus souhaitable reste en toutes circonstances une dure discipline au moment voulu, c'est-à-dire encore à l'âge où l'on est fier de se voir demander beaucoup. Car voici ce qui distingue la dure école de toute autre bonne école : que l'on exige avec sévérité ; que le bon, l'exceptionnel même y est exigé comme normal ; que la louange y est rare, que l'indulgence en est absente ; que le blâme s'y fait entendre durement, en toute objectivité, sans considération de talent et d'origine. Une telle école, elle est nécessaire à tout point de vue : cela vaut pour ce qu'il y a de plus corporel comme pour ce qu'il y a de plus spirituel : il serait fatal de vouloir ici distinguer ! C'est la même discipline qui donne sa valeur au militaire et au savant : et, à y regarder de plus près, il n'y a pas de savant qui n'ait dans le sang les instincts d'un militaire de valeur... rester dans le rang, mais en étant capable à tout instant d'en prendre la tête ; préférer le danger au confort ; ne pas peser le permis et le défendu sur une balance de boutiquier ; être plus ennemi du mesquin, du rusé, du parasitique, que du méchant...
— Qu'apprend-on à une dure école ? À obéir et à commander... »

Nietzsche, Fragments posthumes, extrait du fragment 14 [161], Printemps 1888
Utilisateur anonyme
14 juin 2011, 20:04   Re : Déjà au temps de Platon...
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Utilisateur anonyme
14 juin 2011, 20:45   Re : Déjà au temps de Platon...
L'autorité « n'est purement ce qu'elle est qu'en [l']absence [de l'obéissance] » ?

...Mon dictionnaire doit sans doute dater. Il serait temps que je le change.
Utilisateur anonyme
14 juin 2011, 20:46   Re : Déjà au temps de Platon...
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Utilisateur anonyme
14 juin 2011, 20:47   Re : Déjà au temps de Platon...
Buté, comme dirait Francis.
Utilisateur anonyme
14 juin 2011, 20:48   Re : Déjà au temps de Platon...
(Message supprimé à la demande de son auteur)
"Qu'apprend-on à une dure école ? À obéir et à commander..."

J'apporte ma correction : À servir et à être rigoureux...
« Nietzsche en fait ici des tonnes pour pas grand-chose, pour ne pas dire pis. Il n'est guère intéressant de produire ce genre de "fragment", sauf à vouloir le desservir. »

Oh oh oh.... Je sais bien que M. le Premier Secrétaire a ses bêtes noires philosophiques mais enfin elles ne sont pas ipso facto bannies de ce forum...
Utilisateur anonyme
14 juin 2011, 20:55   Re : Déjà au temps de Platon...
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Utilisateur anonyme
14 juin 2011, 20:56   Re : Déjà au temps de Platon...
Afin d'éviter que nous nous fâchions, Didier, je sors de suite de ce délicat débat. J'ai déjà dit ce que j'avais à dire : Platon me semble là inspiré et Nietzsche, dans le fragment que j'ai cité, dans la droite ligne de Platon.
"Les hommes doivent nécessairement établir des lois et vivre selon des lois, sous peine de ne différer en aucun point des bêtes les plus totalement sauvages. La raison en est qu'aucune nature d'homme ne naît assez douée pour à la fois savoir ce qui est le plus profitable à la vie humaine en cité et, le sachant, pouvoir toujours et vouloir toujours faire ce qui est le meilleur. La première vérité difficile à connaître est, en effet, que l'art politique véritable ne doit pas se soucier du bien particulier, mais du bien général, car le bien commun assemble, le bien particulier déchire les cités, et que bien commun et bien particulier gagnent tous les deux à ce que le premier, plutôt que le second, soit solidement assuré."

(De la nécessaire obéissance aux lois)
Citation
Pyrrhon
"Les hommes doivent nécessairement établir des lois et vivre selon des lois, sous peine de ne différer en aucun point des bêtes les plus totalement sauvages. La raison en est qu'aucune nature d'homme ne naît assez douée pour à la fois savoir ce qui est le plus profitable à la vie humaine en cité et, le sachant, pouvoir toujours et vouloir toujours faire ce qui est le meilleur. La première vérité difficile à connaître est, en effet, que l'art politique véritable ne doit pas se soucier du bien particulier, mais du bien général, car le bien commun assemble, le bien particulier déchire les cités, et que bien commun et bien particulier gagnent tous les deux à ce que le premier, plutôt que le second, soit solidement assuré."

(De la nécessaire obéissance aux lois)

Vous souscrivez à cela ? Et que vous inspire le suffrage universel en la matière : ressortit-il au bien particulier ou au bien commun ? Pensez-vous réellement que la somme des biens particuliers puissent nous donner, de manière prosaïque, le bien commun tant convoité ?
Utilisateur anonyme
15 juin 2011, 07:31   Re : Déjà au temps de Platon...
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Le juste châtiment d'un peuple qui ne croit à rien, si ce n'est à la force, à la ruse, au pouvoir de l'équivoque et du mensonge, sera la terreur infailliblement et le remède à la terreur n'est qu'en la majesté des lois, qui nous libère de la force, de la ruse, du pouvoir de l'équivoque et du mensonge, lesquelles prennent aussitôt la place que les lois désertent.
Cela dit, se fâcher à cause de Nietzsche, cela aurait tout de même de l'allure. Voire du panache, si l'affaire se termine sur le pré et aux aurores.
Didier,

Ce sera non pas sur le pré et aux aurores mais dans les champs et aux aubes.
Je ne comprends guère comment l'on peut être "contre" le suffrage universel, Gilgamesh. Comme si l'on pouvait être contre la pluie, les séismes ou le désir amoureux. Le suffrage universel est un donné primordial, primordial à la meute même. Le chef non élu par ses sujets ne persiste dans son être et son rôle que par le suffrage universel appliqué et reconduit à chaque instant de sa tenure. Le suffrage universel moderne (un homme une voix tous les cinq ans, tous les sept ans, etc.) ne fait qu'introduire un répit dans le régime de suffrage universel permanent qui l'avait précédé dans l'histoire. Tout chef, tout état politique, y compris bien sûr la monarchie absolue, sont destructibles, sujets à être violemment renversés par un soulèvement contre le régime même, davantage encore que contre le monarque lui-même, comme l'histoire des révolutions l'a montré : la bonne grâce que mettent les chefs à alterner en régime démocratique, qui s'accorde avec le répit programmé du suffrage universel par mode de scrutin uninominal direct à calendrier stable, n'est rien d'autre qu'un adoucissement, une forme polie du suffrage universel premier, brut et permanent qui fait le socle violent de toute obéissance à un ordre humain.
Utilisateur anonyme
15 juin 2011, 14:50   Re : Déjà au temps de Platon...
Citation
Didier Bourjon
...cher Henri, sachez que je maintiens, à la virgule près, ce que j'ai dit, que vous n'avez ni compris ni cherché à comprendre...

Cher Didier, j'accepte enfin de faire un pas en avant : je vous concède que l'autorité, après que l'obéissance est devenue naturelle, du moins habituelle, voire instinctive, se passe volontiers de l'imposer encore. Néanmoins, ce qui fait devenir l'obéissance habituelle est sans conteste la crainte. C'est comme oublier, il me semble, que la sève de toute fleur provient de ses plus profondes racines.
Utilisateur anonyme
15 juin 2011, 14:58   Re : Déjà au temps de Platon...
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Citation
Francis Marche
Je ne comprends guère comment l'on peut être "contre" le suffrage universel, Gilgamesh. Comme si l'on pouvait être contre la pluie, les séismes ou le désir amoureux. Le suffrage universel est un donné primordial (...) la bonne grâce que mettent les chefs à alterner en régime démocratique, qui s'accorde avec le répit programmé du suffrage universel par mode de scrutin uninominal direct à calendrier stable, n'est rien d'autre qu'un adoucissement, une forme polie du suffrage universel premier, brut et permanent qui fait le socle violent de toute obéissance à un ordre humain.

Et moi j'ai du mal à ne pas voir du dogmatisme dans le fait de ne pas même trouver légitime que la question de la pertinence du suffrage universel puisse simplement être posée (voyez au passage comme je peux, moi aussi, me complaire dans l'alambiqué).
Il faudra que vous me racontiez plus précisément ce que vous entendez par le "suffrage universel premier", car honnêtement, ça sent un peu le dévoiement de droit naturel, mâtiné d'"aimez-vous-les-uns-les-autres", bref, on se retrouve dans une humanité apolitique mythifiée et utopique.

Je réitère ici ce que j'ai écrit ailleurs :

Le suffrage universel est l'avorton né de l'union de ce qui a de plus vil dans l'aristocratie (l'élitisme dynastique, les "énarques") et de ce qui a de plus vil dans la démocratie (l'égalitarisme mercantile).
De deux choses l'une :
- soit un homme = un vote, et dans ce cas, plus besoin du vote, assumons et tirons au sort.
- soit le vote, comme l'impôt, doit être soumis à l'égalité géométrique, et dans ce cas, le mot "universel" doit tomber.



Bien à vous.
Gilgamesh,

Comment expliquez-vous que, dans les couvents du moyen-âge, le suffrage ait été universel et, dans certains cas, secret ?
Citation
Jean-Marc
Gilgamesh,

Comment expliquez-vous que, dans les couvents du moyen-âge, le suffrage ait été universel et, dans certains cas, secret ?


Peut-être le terme "énarque" vous aura-t-il fait croire que j'inscrivais ma critique uniquement dans notre époque sans considérer que le suffrage universel ait pu être en vigueur ici ou ailleurs avant 1848...
Rassurez-vous, je ne prétends nullement qu'il soit notre apanage ; il n'en demeure pas moins quelque chose d'irrationnel.

Entre nous, accorder le droit de vote à des femmes retirées qui se connaissent toutes entre elles et qui passent leurs journées à la contemplation, est-ce comparable au fait de l'accorder à une multitude se foutant éperdument de son prochain, dont elle n'a d'ailleurs pas la moindre idée et qui ne pense qu'au loisir et au pouvoir d'achat ? Allons...
16 juin 2011, 05:57   L'alambic des limbes
Bien, alors ne faisons pas dans l'alambiqué ma biquette:

Reconnaissez-vous, pour commencer, qu'un caïd du 9-3 qui commande, en leur intimant le respect, à 30 petits malfrats est bénéficiaire du suffrage universel, que son caïdat, tous les matins et tous les soirs, et plusieurs fois par jour, repose sur une unanimité de suffrages en sa faveur, à défaut de quoi il serait renversé sans que personne ou presque n'ait le temps de lui crier gare ? Oui ? Non ?

Si oui, rendez-vous à la question suivante, plus difficile: par quel mécanisme selon vous la pérennité d'un ordre, quel qu'il soit, est susceptible d'être instaurée, autrement dit comment faire pour que le renversement du chef n'anéantisse point l'ordre auquel il présidait ? Ce qui revient à se poser la question du découplage entre l'ordre et son chef, qui seul peut permettre que la fin du chef n'entraîne point l'effondrement de l'ordre.

L'organisation du suffrage universel et tous les rouages et mécanismes de la démocratie (consultations électorales régulières par scrutin, etc.) ont été conçus pour, petit a) à la ligne:

-- éliminer l'ordre violent du suffrage unanime et universel permanent en référence à la question 1 supra ("l'ordre du caïd ou de la horde"), petit b) à la ligne

-- permettre le découplage et la pérennité, et donc, disons-le quand même et toujours le plus simplement du monde, la paix et la stabilité dans l'expression des contradictions.

Comme ça, ça vous parle ? Non? Très bien, alors poursuivez seuls vos harangues et vos éructations façon années 30 contre "les z'énarques" ou "les z'aristos" mais je vous préviens, plus vous verserez dans ce travers, plus je serai alambiqué, c'est dans ma nature.
Gilgamesh,

Il n'y avait pas que des femmes retirées...

Que pensez-vous aussi des systèmes municipaux et des Capitouls ? et, plus tôt, des Tribuns de la plèbe ?
Jean-Marc, je prends le temps de vous répondre, désolé, j'ai fort à faire dans le moment.

Rapidement : vous avez l'air de présager que je sois totalement hostile à tout contre-pouvoir populaire, eh bien non, pas du tout.
J'aspire également à la démocratie, mais non comme moyen, comme fin. Non comme le moyen d'être tous égaux pour pouvoir acheter tous le même frigo, voyager dans la même voiture, regarder la même télé et caresser le même chien.
La démocratie est à mes yeux bien plus que cela : un idéal à atteindre, une asymptote, et nous ne prenons pas du tout le chemin vers cet idéal.

Toute société a besoin d'une colonne vertébrale, une hiérarchie. Je fais partie des gens qui ne croient pas à l'égalité naturelle autre qu'en dignité. J'aspire forcément à l'égalité en droit, mais en tant que moyen, non en tant que fin cette fois. C'est-à-dire que je conçois nos institutions comme devant nous mettre tous sur une même ligne de départ, voilà l'égalité que je revendique. Mais une fois le coup de feu parti, certains, de par leurs talents propres, naturels, en partage, courront plus vite que d'autres, il n'y a là aucune discrimination. Tout simplement parce qu'il ne s'agit pas d'égalité (qui est une chimère), mais d'é-qui-té. A chacun selon son dû, soit donner à celui qui mérite et ne pas donner à celui qui ne mérite pas. Voilà la hiérarchie qui s'instaure, de type géométrique, dans tous les rouages de la société.
Il y a deux cents ans, la hiérarchie inique, devenue insupportable qui nous régissait depuis des siècles a été renversée. Mais nous avons jeté le bébé avec l'eau du bain, et c'est l'idée même de hiérarchie qui nous est devenue insupportable. Grave erreur semble-t-il : la hiérarchie fait partie de ces choses refoulées qui ne s'estompent jamais. Négligez ainsi qu'il se puisse concevoir une hiérarchie naturelle et vous revoyez une hiérarchie hier inique remplacée aujourd'hui par une autre hiérarchie inique, soit le privilège du sang par celui de l'argent.

Enfin, petit parallèle entre contribuable et électeur :
En suivant Aristote (chez qui vous auriez pu piquer l'exemple de la société de voleurs, présente presque au mot près dans l'Ethique à Nicomaque, voyou !), nous dégageons des rapports humains une justice commutative égalitaire de particulier à particulier, et une justice distributive équitaire entre chaque sociétaire et la société qui le porte.
Voici ma question :
Si nous appliquions le principe d'égalité en matière d'imposition (rapport des sociétaires à la société), nous obtiendrions qu'un smicard paierait autant d'impôts qu'un PDG. Serait-ce normal ? Non, et ce serait pourtant rigoureusement égalitaire. En l'occurrence, nous optons pour l'équité (égalité proportionnelle), et encore, même pas, de sorte que certains ne paient rien et d'autres reverseront peut-être un jour 80% de leurs revenus.
Je dis juste ceci : pourquoi ne pas appliquer le même principe d'équité rigoureuse en matière d'élection (là aussi rapport des sociétaires à la société) ? Bien entendu, non plus sur une base financière, mais sur une base autre... Exemple : une synthèse d'éléments de connaissances indispensables à maîtriser et de temps à accorder à la communauté ? Ainsi aurions-nous à notre tête en majorité des hommes/femmes au foyer, des chômeurs de longues durée et des retraités, toutes et tous instruits et volontaires, en outre indemnisés comme il se doit en fonction de l'effort fourni. En clair, pourquoi ne pas redonner à l'espace public la place qui lui revient de droit, et pourquoi ne pas découper nos vies en vie publique/vie privée/vie professionnelle ?...


Je vais donc vous paraître illuminé après ça, mais... pourquoi diable n'y a-t-il aucun travail là-dessus dans notre belle et douce démocratie ???
Mais le suffrage universel n'est en rien incompatible avec les hiérarchies...

Prenez les Etats-unis : ils sont une société inégalitaire, et pourtant le suffrage universel intervient dans un nombre incroyable de domaines.
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