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Le fichu de la mère de Jean Clair

Envoyé par Utilisateur anonyme 
Le nihilisme, au sens de Nietzsche, est la haine de la terre et de la vie au nom d'une idole régnant sur un arrière-monde. Que cette idole est pour nom Allah, Dieu ou même le Prolétariat ne change rien à l'affaire. Le djihadiste qui détruit la vie pour rejoindre son paradis peuplé d'houris est la figure même, l'incarnation, du nihilisme contemporain.
Le nihilisme n'est donc pas, comme le pense ma concierge, le fait de ne croire en rien, mais de croire tout court.
Moi-même, je le confesse, j'ai longtemps été nihiliste par amour pour le Prolétariat rédempteur.
Peut-être l'Occident est-il nihiliste, au sens du moustachu, par son amour de l'Argent et sa soumission au règne de la Valeur. Qu'en pensez-vous Lesquis ? Peut-on considérer l'argent comme une idole ? Le barbu nihiliste Marx, en tout cas, pensait que oui en écrivant dans le livre 1 du Capital que la marchandise possédait une dimension nettement métaphysique. J'ignore ce que Nietzsche pensait du Capital même si je sais qu'il détestait la bourgeoisie.
Florentin,

Vous avez bien raison : la manipulation des textes est hélas trop fréquente. On devrait se contenter de les lire, et non les commenter à perte de vue, en les tordant dans le sens qu'on veut.
Utilisateur anonyme
01 juillet 2011, 15:50   Re : Le fichu de la mère de Jean Clair
Citation
M. Petit-Détour
Que cette idole est pour nom Allah, Dieu ou même le Prolétariat ne change rien à l'affaire. [...] Moi-même, je le confesse, j'ai longtemps été nihiliste par amour pour le Prolétariat rédempteur.

En tout cas, vous semblez mépriser le dernier dieu qui survit encore dans le cœur de certains : celui de la grammaire.

« Je crains que nous ne puissions nous débarrasser de Dieu, parce que nous croyons encore à la grammaire. » Nietzsche

Pour ce qui est du concept de nihilisme, vous devriez jeter un œil sur la distinction qu'opère Nietzsche entre nihilisme passif et nihilisme actif.
Utilisateur anonyme
01 juillet 2011, 15:56   Re : Le fichu de la mère de Jean Clair
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Vous semblez ignorer, vous l'islamophile Lesquis, que le nom d' Allah ne peut être précédé que de l'auxiliaire être.
Utilisateur anonyme
01 juillet 2011, 17:24   Re : Le fichu de la mère de Jean Clair
M. Petit-Détour, je le répète : je ne suis pas islamophile. Votre dualisme est fatiguant, en sus d'être infantile.

Voici quelques éclaircissements pour vous : le nihilisme, dans le vocabulaire de Nietzsche, désigne la dévalorisation des valeurs, la perte de leur force de coercition, de leur autorité régulatrice.

La dévalorisation de la vie, « la glorification du Néant, en tant que but, en tant que « Dieu » », cette fatigue de vivre, c'est le nihilisme passif — le christianisme, le pessimisme, Schopenhaueur, Leopardi, les romantiques.

Une conséquence de ce nihilisme est le nihilisme radical — conduisant à une forme d'athéisme :

« Le nihilisme radical est la conviction du caractère absolument insoutenable de l'existence, dès qu'il s'agit des suprêmes valeurs que l'on reconnaît, y compris la compréhension que nous n'avons pas le moindre droit de se poser un au-delà ou un en-soi des choses qui serait « divin », l'image vivante de la morale. Cette compréhension est une conséquence de la « véracité » amenée à sa maturité ; et de la sorte même une conséquence de la croyance à la morale. » (1887, 10 [192])

Enfin, le nihilisme actif est un nihilisme créateur qui pose de nouvelles valeurs dans la joie et la « gaieté d'esprit », valeurs qui renversent celles qui prévalaient jusqu'alors et qui renouent avec le caractère tragique de la vie — ce type de nihilisme est rare selon Nietzsche.

Comment Nietzsche eût-il jugé l'Occident d'aujourd'hui ? Nietzsche écrivit ceci : « Le libéralisme : en clair, cela signifie abêtissement grégaire... » « La désignation honorifique pour "médiocre" est, cela est bien connu, le mot "libéral" ». Le socialisme n'échappe pas plus à la critique : selon Nietzsche, le socialisme, « religion de la pitié », est une forme sécularisée de morale chrétienne et relève donc du nihilisme passif, celui de la fatigue.

Le libéralisme saupoudré de socialisme, celui de notre époque, serait donc, selon Nietzsche, une forme de nihilisme radical conduisant à l'abêtissement grégaire.

Cela dit, est-ce que les valeurs qui règnent aujourd'hui en Occident furent érigées par un nihilisme actif ? « La jovialité consternante », valeur qui, selon l'érudit Quignard, résume le « puritanisme et l'optimisme » de l'Occident américanisé — « le respect de l'argent, de l'industrie, du profit, de la fécondité, de la reproduction, de la femme, de la santé, de la lumière, des petits, des études, de la victoire, du base-ball, de la vitalité » — fait-elle suite à un nihilisme actif selon l'axiologie nietzschéenne ?

On peut répondre négativement de manière certaine : ces valeurs trahissent plutôt la victoire du libéralisme et de l'égalitarisme — symptômes, selon Nietzsche, d'un habitus de dénégation du caractère tragique de la vie et de ses hiérarchies, habitus propre au nihilisme passif de l'ancienne morale.
La catégorie de nihilisme au sens de Nietzsche appliquée à l'"Occident" en tant qu'il serait opposé à l'islam, telle que vous l'avez utilisée dans votre message, n'avait pas de sens. Elle en avait en revanche si l'on considérait le mot dans son acception "commune", ce que je n'osais croire venant d'un esprit aussi avisé et emphatiquement nietzschéen que le vôtre.
Utilisateur anonyme
01 juillet 2011, 22:11   Re : Le fichu de la mère de Jean Clair
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Cher Petit-Détour, l'infigurable, et peut-être même inexistante, d'après certains, "transcendance" musulmane a pour conséquence l'irruption du religieux dans la totalité du champ temporel ; en termes nietzschéens on pourrait dire alors que l'on délaisse l'être pour le devenir.
C'est le sens profond, mais peut-être est-ce critiquable, que j'entrevois de ce goût de Nietzsche pour l'islam, religion de l'absence de transcendance, ou d'une hypertranscendance si inconcevable qu'elle ne compte pratiquement plus dans la vie, le tout du religieux accaparant la vie même, sans reste laissé à l'idéal.

Or j'aurais tendance surtout à qualifier de "nihiliste" pour Nietzsche tout ce qui entrave, empêche, prétend figer et se porter à l'extérieur du devenir, au bénéfice de l'illusion de l'être, si dépréciative de toute réalité qui devient.

Mais il y a plus, et c'est lié : quelle meilleure expression de la volonté de puissance pourrait-il y avoir qu'une religion pour laquelle la conquête est pour ainsi dire une raison d'être — et cela en regard d'une civilisation dont les symboles fondateurs sont l'amour (Jésus), l'égalité et les "droits de l'homme" (les émules modernes du Christ) ?
Enfin, et c'est là un point qui explique également la dilection curieuse de certains orthodoxes juifs envers Nietzsche (le folklorique reb Yehuda Leib Weissfish, par exemple, qui fut un temps je crois "secrétaire aux Affaires étrangères" des Nétouré Karta, et qui déclara que Nietzsche "méritait d'être juif"); c'est le rejet viscéral, inaugural et fondateur de l'idolâtrie.
Le concasseur d'idoles attitré qu'était Nietzsche et les juifs et les musulmans ne pouvaient, sur ce point, que s'entendre.
Didier,

Cloots est battu d'un naseau par :

1761 subst. «hérétique qui croit que Jésus-Christ en tant qu'homme n'a pas eu de véritable existence» (CREVIER, Histoire de l'Université de Paris, 1, 205 ds Fonds BARBIER)


Comme dit la chanson nihiliste :


Boum Boum

Tra la la

TLFI vaincra



On trouve aussi "Nihilismus" chez Goetz, en 1733.
Utilisateur anonyme
01 juillet 2011, 22:38   Re : Le fichu de la mère de Jean Clair
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Utilisateur anonyme
01 juillet 2011, 22:38   Re : Le fichu de la mère de Jean Clair
Citation
Didier Bourjon
Première occurrence du mot :
"La république des droits de l'homme, à proprement parler, n'est ni théiste ni athée ; elle est nihiliste."
Anacharsis Cloots, cultivateur et député du département de l'Oise, 6 nivôse an II (26 décembre 1793) in Écrits révolutionnaires 1790-1794.

Cette citation est magnifique : en voilà un qui avait tout compris dès le départ. Et de s'en réjouir.
Plaignez-vous : vous avez échappé à "vous avez", dont je suis par ailleurs un ardent supporter.
Utilisateur anonyme
01 juillet 2011, 22:40   Re : Le fichu de la mère de Jean Clair
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Utilisateur anonyme
01 juillet 2011, 23:01   Re : Le fichu de la mère de Jean Clair
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Utilisateur anonyme
01 juillet 2011, 23:02   Re : Le fichu de la mère de Jean Clair
Citation
Alain Eytan
Enfin, et c'est là un point qui explique également la dilection curieuse de certains orthodoxes juifs envers Nietzsche (le folklorique reb Yehuda Leib Weissfish, par exemple, qui fut un temps je crois "secrétaire aux Affaires étrangères" des Nétouré Karta, et qui déclara que Nietzsche "méritait d'être juif"); c'est le rejet viscéral, inaugural et fondateur de l'idolâtrie.

« Les Juifs sont intelligents au sens le plus absolu : rencontrer un juif peut être une bénédiction. Par ailleurs, on n'est pas impunément intelligent : par cela même on a facilement les autres contre soi. Mais l'avantage reste quand même aux intelligents. — Leur intelligence empêche les Juifs d'être absurde à notre manière : par exemple nationalistes. » Nietzsche, 1888

« Quelle bénédiction est un Juif parmi du bétail allemand ! » Nietzsche, 1888
"Impasse", "impasse", comme vous y allez, cher Didier... Ne trouvez-vous pas que cela rappelle un peu ces slogans à la mode, pour motivation d'une humanité peinant et geignant dans le boyau de l'atroce parcours : s'en sortir !
Il y a une voie de sortie, dit-on, c'est par là... Ah mais, notre Nietzsche préféré ne voulait pas, justement ! C'est là où vous le dévoyez, je trouve, en le jugeant avec des arguments d'équipée de sauvetage, alors qu'il voulait s'enterrer vivant en embrassant l'impasse, en faisant corps avec elle...
Mais sauver de quoi, grands dieux, pour quoi faire, pour aller où ??? C'est dingue ça...
Utilisateur anonyme
02 juillet 2011, 07:54   Re : Le fichu de la mère de Jean Clair
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Cher Alain Eytan, votre éclairage est intéressant. J'imagine que la dimension guerrière (aristocratique ?) et misogyne de la volonté de puissance islamique a dû séduire Nietzsche à une époque ou, en Europe, concurrencé par le socialisme en plein essor, le christianisme perdait de sa force originelle. Mais que dirait-il, aujourd'hui, de l'islam européen, en voie de christanisation (paradoxale) en quelque sorte, fondant son entreprise de conquête sur le recours incessant à la victimisation, la plainte, le geignement, la récrimination sur fond d'un ressentiment gigantesque ?
"Mais que dirait-il, aujourd'hui, de l'islam européen, en voie de christanisation (paradoxale) en quelque sorte, fondant son entreprise de conquête sur le recours incessant à la victimisation, la plainte, le geignement, la récrimination sur fond d'un ressentiment gigantesque ?"

C'est exactement la question que je me posais.
Que la ruse est l'un des moyens de la victoire ?

« Tzu Lu, disciple de Confucius, discutait un jour de la guerre avec le Maître :
— Tzu Lu dit : Si vous étiez placé à la tête de trois armées, qui choisiriez-vous pour vous assister ?"
Le Maître dit : "L'homme qui serait prêt à braver un tigre ou à se précipiter dans un fleuve sans se soucier de survivre ou de mourir, cette sorte d'homme, je ne la choisirais certainement pas. Je choisirais certainement un homme qui envisage l'obstacle avec la prudence requise et qui préfère triompher par la stratégie". »
Analectes

Je suis sûr que Didier nous trouvera des passages qui vont dans ce sens...
Utilisateur anonyme
04 juillet 2011, 23:41   Re : Le fichu de la mère de Jean Clair
Citation
Alain Eytan
Citation
M. Petit-Détour
Mais que dirait-il [Nietzsche], aujourd'hui, de l'islam européen, en voie de christanisation (paradoxale) en quelque sorte, fondant son entreprise de conquête sur le recours incessant à la victimisation, la plainte, le geignement, la récrimination sur fond d'un ressentiment gigantesque ?

Que la ruse est l'un des moyens de la victoire ?

« Nous nous sommes à l'inverse assurés [...], dans la lutte pour la vie […], que la ruse se substitue souvent avec avantage à la force [...]. » (FP, 14 [123], 1889)

En effet, Alain, Nietzsche avait identifié l'efficacité supérieure de la ruse par rapport à la force. Néanmoins, il associait la ruse et l'ingéniosité au nombre et à la faiblesse (cf. FP, 14 [123]). La ruse était à ses yeux une arme de la canaille, beaucoup moins noble que l'expression pure de la force domptée.

Aussi eût-il déploré un "islam rusé" — à supposer que celui-là existât — qu'il eût sans doute qualifié de dégénérescent.
Nos ruses nous perdrons à telle enseigne qu'un jour nous nous ruserons de nous-même.
25 novembre 2011, 22:00   Le Renard dans le nom
Henri, je suis de ceux qui pensent que la ruse (paysanne, narquoise, et la ruse de la ruse par laquelle l'on se prétend faible et sous-numéraire devant la force qui est toute elle-même et qui ne montre d'elle-même que ce tout qu'elle est seule à connaître) n'est autre qu'un élément essentiel, un pilier de la force supérieure. La ruse, devrait-on aller jusqu'à dire, est supérieure à la force par la dérision de la force que la ruse véhicule, et cette dérision est comme le signe d'un redoublement de force: quelle que soit l'ampleur de cette dernière, la dérision et la ruse s'amusent à l'embrasser, n'ont qu'en faire, ne la craignent en rien, en sont le tout de la partie.
Ce sont ces raisonnements qui justifient les langues de bois, les discours clos et les idéologies. L'In-nocence n'en est-elle pas à l'opposé, quoi qu'il en coûte ? (D'ailleurs, j'avais entendu dire que le Maître des lieux...)
27 novembre 2011, 20:31   Re : Le Renard dans le nom
La ruse, parce qu'elle échoue dans ses projections quatre-vingt-dix-neuf fois sur cent, offre l'intérêt d'amener une évolution des états de faits dont personne ne possède d'emblée la maîtrise. Pour un peu, on pourrait dire d'elle que ses échecs sont le moteur de l'histoire. La force, elle, est assise sur les états de faits, qu'elle met le reste du monde au défi de modifier.
A Dolus j'oppose Virtus – dont Fatum Mahometanum est, par excellence, l'antipode –, et à Impotentia j'oppose Fortuna – qui est la rançon de Libertas.


La Fortune est chevelue par devant et chauve par derrière.
Utilisateur anonyme
27 novembre 2011, 22:05   Re : Le Renard dans le nom
Je ne suis pas sûr qu'il faille opposer nettement la ruse à la force ; la bombe atomique, par exemple, et par extension toute arme, montre bien que la force peut être produite par la ruse. Par ailleurs, l'aïkido illustre aussi bien la dialectique de la ruse et de la force, cette dernière se vautrant dans les rouages de la première qui, dès lors, la retourne contre elle-même. Mais il est vrai que dans ces deux exemples la ruse l'emporte in fine sur la force, la créant ou la soumettant.
Florentin,

Quoi de plus ridicule que de manquer le moment propice ?
Et pourtant ! c'est souvent le cas.
Il s'agit de ne pas avoir froid aux yeux, le fichu n'étant d'aucune aide.
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