Roquebrune : il vivait reclus chez sa mère depuis 35 ans.
Là, au beau milieu d'un voisinage sous le choc (lire par ailleurs), dans une ville aux atours plutôt luxueux, les policiers de la BSU de Menton ont été témoins d'une scène hors du commun. Alors qu'ils recherchaient à son domicile une vieille dame « portée disparue » depuis quelque temps, ils ont découvert un homme qui n'avait visiblement plus vu la lumière du jour depuis plus... de trente ans !
Un voisinage inquiet
Tout a commencé lundi dernier, en fin de journée. Dans ce quartier très vivant de Roquebrune, le voisinage du 10 av. Général-Leclerc s'inquiète de ne plus voir la vieille dame qui y habite. Une maison très modeste à la façade défraîchie et entourée d'un jardin en friche où seuls les arbres d'agrumes apportent une touche de couleur au tableau. On sait la vieille dame fatiguée depuis quelques jours. Elle a du mal à se déplacer. A tel point qu'à tour de rôle, ses aimables voisins l'aident à porter les courses qu'elle a l'habitude de faire à la supérette de l'autre côté de la route. Une aide qui n'est plus tolérée au-delà de son portail d'entrée. Mais personne ne s'en formalise.
L'autre soir, dès leur arrivée sur place aux alentours de 21 heures, pompiers et policiers sont tout de suite saisis par l'insalubrité des lieux. Une odeur pestilentielle, provoquée en partie par les détritus en tout genre qui jonchent le sol, rend l'atmosphère irrespirable. Dans le salon, ils découvrent Thérèse Pagès, 76 ans, gisant dans son fauteuil. La scène est insupportable. Ses pieds baignent dans une flaque de sang et ses jambes sont en état de décomposition avancée.
Une silhouette apparaît
Mais le pire, ou tout du moins le plus surprenant, est encore à venir. Alors que tout le monde s'affaire autour de la défunte, une silhouette surgit. Fine et anormalement pâle. Il s'agit d'un homme qui donne l'impression d'avoir une trentaine d'années. Il traîne derrière lui son immense tignasse de plus... de trois mètres de long ! Des cheveux qu'il avouera plus tard refuser de se couper depuis l'âge de 14 ans.
Tout le monde reste abasourdi par cette soudaine apparition. Mais rapidement, les policiers identifient l'individu comme étant le propre fils de Thérèse Pagès, Michel. Et il n'a pas trente ans, mais bien cinquante.
« Quoi, ma mère est morte ? », demande-t-il, surpris, aux secouristes.
« Mais je lui ai parlé ce matin. Je pensais qu'elle se reposait ». Hagard et complètement déboussolé, Michel Pagès semble surgir d'une autre époque. Il est très mal habillé et semble effrayé par tout ce remue-ménage dans sa maison. Une maison où il vivait reclus. A l'abri des regards et des autres.
Car les premiers témoignages sont formels : personne n'était au courant de son existence. Quant à la silhouette que certains ont parfois aperçue (ou cru apercevoir) la nuit, comment l'attribuer au fils de Thérèse Pagès ?
L'enquête de police, menée en toute urgence, a permis de contacter une cousine de Mme Pagès. Celle-ci, vit dans le nord de la France d'où est originaire la défunte. Elle a pu fournir quelques éléments de réponse aux enquêteurs. Elle savait que sa parente avait un fils qu'elle-même n'avait jamais vu. Et à sa connaissance, il n'avait jamais travaillé et vivait aux dépens de sa mère. Les services sociaux de la ville n'étaient vraisemblablement pas au courant du dossier. Même s'il y avait bien quelques « on dit ».
Michel Pagès, dans un état de total dénuement, a été confié à la cellule psychologique de l'hôpital Saint-Roch de Nice.
Les médecins parviendront-ils à comprendre pourquoi il vivait ainsi ? Y était-il contraint ? Le mystère reste entier, l'enquête se poursuit.
Nice-Matin d'aujourd'hui.